ANALYSE D’UNE PUBLICITE A
CARACTERE SCIENTIFIQUE :
LA CAMPAGNE DU FORUM NUCLEAIRE.
Travail de communication scientifique réalisé par
Josseaux Etienne, Master 1 chimie ULB,
Année académique 2008/2009.
2
INTRODUCTION
Le présent travail est une analyse de la campagne de sensibilisation au nucléaire menée par le Forum
Nucléaire dans le courant du mois de février 2009. Il se divise en trois partie : une première partie qui
concerne l’analyse de la campagne, via chacune de ses déclinaisons : spot télévisé, affichage public et
publicité dans la presse écrite et enfin le site internet du Forum ; une seconde partie dans laquelle
j’ai essayé d’identifier les conséquences et les réactions suscitées par la campagne ; et une troisième
partie qui servira de conclusion.
La campagne de publicité du Forum Nucléaire est une campagne de grande ambition dont le but réel
n’est pas perceptible au premier abord : est-ce une campagne qui vise simplement à relancer le
débat nucléaire ou a-t-elle pour objectif de repopulariser cette énergie très mal perçue par le grand
public ? Elle s’inscrit en effet dans une époque l’énergie propre est un sujet sensible de
développement. Les ressources en pétrole et en gaz s’amenuisent, l’effet de serre prend de l’ampleur
et pour répondre à ces deux phénomènes, on recherche des sources d’énergie qui ne se basent pas
sur l’énergie fossile et qui ne dégagent pas de polluants à effet de serre.
L’écologie est aussi devenue une préoccupation majeure, et les organismes de protection de
l’environnement et des espèces naturelles gagnent en popularité et en importance. Parmi leurs
activités, un vaste mouvement de dénigrement du nucléaire a vu le jour dans la fin des années 70 et
a donné pendant de nombreuses années à l’opinion publique l’image d’un nucléaire polluant,
dangereux et éthiquement malvenu.
C’est en réponse à cette tendance que le Forum Nucléaire inscrit sa campagne « pour ou contre le
nucléaire », une campagne diffusée dans tout le pays et disponible dans les deux langues nationales
principales. Lors de la conférence internationale des responsables de communication nucléaire de
l’année 2009 (PIME), la campagne du Forum nucléaire a reçu le 'Prix de l’Excellence en
Communication 2009’.
3
PREMIÈRE PARTIE : ANALYSE DE LA CAMPAGNE
1°) le Spot Télévisé :
Le spot télévisé se présente comme un argumentaire pour et contre le nucléaire. Un homme est assis
à une table de dessin et se pose la question du nucléaire. Avec ses deux crayons de couleur, il illustre
le fil de sa pensée. Le spot reprend l’essentiel du débat du nucléaire : s’il fallait résumer ce débat
cette courte vidéo (une minute) serait parfaite, exception faite de la tendance pour le nucléaire qui si
elle n’est pas énoncée clairement, est très facilement ressentie. Cette publici a été vue sur la
plupart des chaînes télévisées belges, surtout sur Canal Z, la chaîne d’information économique, ainsi
que dans certaines salles de cinéma. La vidéo, disponible dans les deux langues nationales
principales, a été postée sur les sites de partage de vidéo (youtube, …) sur internet par le Forum
nucléaire lui-même.
J’ai reprit ici les différents points de la réflexion en mettant en exergue sur les couleurs utilisées pour
illustrer les propos du narrateur. Les arguments en faveur du nucléaire sont dessinés en vert, tandis
que les arguments contre sont illustrés en rouge. Le choix des couleurs n’est certainement pas
anodin, le rouge étant le signal international du danger et de l’interdiction tandis que le vert la
couleur de la sécurité.
: «Je suis contre l’énergie nucléaire, parce que je pense à mes enfants. »
Le narrateur prend d’abord le parti de la majorité de la population. Il apparait que la plupart
des non-scientifiques se considèrent par défaut comme contre le nucléaire sans pour autant
savoir pourquoi. Les organismes contre le nucléaire sont très influents et beaucoup plus
tournés vers la communication que les partisans du nucléaire. Le nucléaire est vu de manière
très négative et tout le monde pense savoir que le nucléaire provoque des malformations
congénitales, des cancers et des mutations de toutes sortes. Tout cela n’est pas faux,
l’exposition sans protection à la radioactivité peut provoquer ce genre de désagréments,
mais dans des cas d’expositions extrêmes ce qui n’est pas le cas dans les centrales ni même
dans leurs environs directs.
1°b : « J’aurais peut être intérêt à être pour alors, parce qu’ils en auront besoin aussi de
l’énergie ; et le pétrole, est-ce qu’il y en aura encore ? »
L’argument principal en faveur du nucléaire, qui se base lui aussi sur une réalité bien
connue : la pénurie de pétrole à venir. Pénurie qui se fait d’autant plus ressentir que les prix
du combustible ne cessent d’augmenter. On parle beaucoup, chaque hiver, des gens qui ne
savent plus se chauffer, c’est une image qui toucheEn embrayant sur la pensée protectrice
vis-à-vis des enfants, on titille un nouveau point sensible : tout le monde souhaite toujours le
meilleur pour ses enfants ! On induit peut être aussi un début de culpabilité chez les gens qui
refusent cette ressource à leur enfants et aux générations à venir. Toujours est-il que cet
argument est on ne peut plus vrai, les anti-nucléaires eux-mêmes en conviennent.
4
: « Il y a bien les énergies renouvelable, mais… »
Comme source d’énergie, le nucléaire n’est pas la seule alternative. Les mouvements anti-
nucléaires mettent très souvent l’accent sur les éoliennes, sur l’énergie solaire et hydraulique
ou encore sur les biocarburants. Il faut remarquer ici que les énergies renouvelables sont pas
réellement un argument contre le nucléaire : ils font partie du débat parce qu’ils sont
présentés comme une alternative, une solution de substitution au nucléaire alors qu’en
réalité ce n’est pas le cas. On peut tout à fait envisager une production d’énergie mixe
énergie renouvelable/énergie nucléaire, c’est d’ailleurs ce que la plupart des experts en
énergie préconisent. L’argument des énergies renouvelables n’est donc pas réellement
incompatible avec l’énergie nucléaire.
2°b : « ce ne sera peut-être pas suffisant. »
Et le narrateur de dessiner un champ d’éolienne. Effectivement, même si les énergies
renouvelables ont la cote, elles ne supporteraient pas la demande en énergie des entreprises
et de l’industrie. Il est en général accepté que les énergies renouvelables peuvent subvenir
aux besoins privés des habitations, mais il est tout aussi vrai que les besoins en énergie de
l’industrie sont trop importants. De plus ces technologies restent chères et il faut mentionner
un fait que la publicité ne reprend pas, sans doute pour ne pas créer plus de tensions que
nécessaire : bien que les éoliennes soient très populaires lorsqu’on en parle, dès qu’il s’agit
d’en installer une, des voix s’élèvent pour la préservation du paysage, ou pour l’inconfort
d’avoir une hélice près de chez soi (grondement et effet stroboscopique). Pour cela et pour
beaucoup d’autres raisons qui font que personne n’en veut près de chez soi, on veut bien des
éoliennes, mais ailleurs. Tout cela sans parler des processus de production de biocarburant
qui sont loin d’être au point.
: «Par contre avec elles, pas de déchets, parce que le nucléaire… »
Voici enfin le premier véritable argument contre le nucléaire : les déchets radioactifs dont on
ne sait que faire. Et c’est vrai que les énergies renouvelables ne produisent pas de déchets
lorsqu’elles fonctionnent. La production de déchets est en réalité le seul réel point faible de
l’énergie nucléaire et le principal argument des mouvements anti-nucléaires. Le Forum ne
fait pas état de tous les types de déchets radioactifs. On décompte en réalité trois type de
déchets, selon leurs activités hors de la centrale : les déchets de faible radioactivité
(vêtements du personnel, équipements peu irradiés), les déchets de radioactivité moyenne
(tubes combustibles, produits chimiques du traitement des déchets, …) et les déchets de
radioactivité élevée (les sous produits, qui peuvent rester actifs pendant des milliers
d’années.).
3°b : «Cela dit la quantité de déchet vraiment radioactif, c’est pas énorme : un à coudre
par an par habitant. »
Le narrateur relativise la quantité de déchet nucléaire produite en prenant un volume qui
parle à tout le monde. En faisant cela, il passe sous silence la réelle problématique des
déchets nucléaires, qui n’est pas leur volume mais bien leur activité ! Les citoyens lambdas,
5
loin d’être connaisseurs en nucléaire, se disent tout naturellement : « mais oui, un dé à
coudre par personne ce n’est pas tant que cela ». Mais ce n’est pas n’importe quel à
coudre, il s’agit bel et bien d’une substance dont on ne sait que faire, qui restera active
pendant encore des milliers voire des centaines de milliers d’année, et dont le danger ne
s’exprime pas en fonction du volume !
4° « Multiplié par le nombre d’habitant, ça fait un gros dé à coudre »
Pour que la comparaison du à coudre soit honnête, il faut effectivement rappeler que
c’était un à coudre par habitant, et que nous sommes nombreux. La quantité qui
paraissait réduite de prime abord prend une autre réalité, comme le champ d’éolienne. Je
remarque tout de même qu’à nouveau, aucune mention n’est faite sur le danger de ce type
de déchet. Le contre-argument s’en trouve à mon sens, quelque peu diminué et c’est peu
être le seul moment où la publicité prend explicitement le parti de l’énergie nucléaire, me
si tous les spectateurs ne sont pas en mesure de le comprendre.
4°b : c’est vrai il y a des solutions… »
Le narrateur dessine un site de stockage, souterrain et flanqué d’un panneau. Le stockage est
pour l’instant la mesure adoptée dans la gestion des déchets radioactifs la plus connue. Je
suis assez surpris que la publicité n’aborde pas le sujet du recyclage de ces déchets :
aujourd’hui une fraction, certes réduite mais une fraction tout de même, des déchets de
centrale sont transformés et réutilisés, la quantité de déchets radioactifs mis en stockage est
donc diminuée. Sans doute que les concepts du recyclage nucléaire sont trop compliqués que
pour être expliqués dans une publicité ou encore parce que le retraitement des déchets
nucléaires est soumis au même débat que le nucléaire et qu’il n’est pas encore tout à fait au
point. On ne fait pas état non plus de l’enfouissement, qui consiste à enterrer à très grande
profondeur et dans les containeurs étanches les déchets à radioactivité élevées, une mesure
qui n’est ni éthique ni populaire.
: « quoique le stockage… »
Sans autre développement. Oui, le stockage pose problème, mais encore, le spot n’en dit
pas plus, et on pourrait de nouveau le reprocher au Forum Nucléaire. La gestion des déchets
nucléaires posent de très gros problèmes parce que l’on estime les sites existants insuffisants
pour recevoir la totalité des déchets nucléaires futurs. Cela implique la création de nouveau
sites de stockage, sites qui doivent être surveillés et entretenus, et qui alourdissent encore
plus la note financière déjà salée du nucléaire.
5°b : « mais au moins là, on sait ils sont, parce que le CO2 produit par le pétrole ou le
charbon, bonjour l’effet de serre. »
Le narrateur « rattrape » directement son imprécision en parlant du CO2. Le fameux CO2
tellement médiatisé, responsable de l’augmentation de l’effet de serre et donc du
« réchauffement global de la planète». Bien que ce dernier soit une réalité scientifique, le
gonflage médiatique donne à ces mots une connotation presque mystique. Le Forum utilise
1 / 20 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !