CHAPITRE 2 Modélisation du transfert gaz

publicité
CHAPITRE
2
Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions
chimiques dans l’écoulement de liquide autour d’une bulle
2.1
2.1.1
Présentation du système étudié
Système liquide-gaz
Ce chapitre est consacré à la modélisation mathématique du transfert gaz-liquide de CO2
qui prend place au sein des colonnes BIR. Nous considérons le transfert de CO2 depuis une
bulle de gaz, contenant un mélange de N2 et de CO2 , vers une solution aqueuse contenant un
mélange de NaHCO3 et Na2 CO3 .
Ces deux phases sont séparées par une interface. Cette dernière est supposée n’offrir aucune
résistance au transfert de matière, ce qui a été montré expérimentalement dans le cas du
transfert de CO2 [25]. La résistance au transfert de l’interface est négligeable devant les
résistances en phase liquide et éventuellement en phase gazeuse.
Dans le cas de l’absorption de CO2 dans des solutions de carbonate et bicarbonate de
sodium, une hypothèse souvent rencontrée dans la littérature est de considérer que la résistance
de la phase gazeuse au transfert de CO2 est négligeable devant celle en phase liquide [1, 26, 27].
Dès lors, dans tout ce qui suit, nous considérons que la vitesse du transfert gaz-liquide de
CO2 ne dépend que des phénomènes prenant place dans la phase liquide.
Le CO2 étant soluble dans l’eau, il traverse l’interface et est absorbé par la phase liquide.
Ce transfert peut être représenté par l’équation suivante :
CO2 (g) CO2 (l)
(2.1)
Le CO2 provenant de la bulle de gaz est transporté dans la phase liquide par convection et
diffusion moléculaire. La diffusion est un processus de transfert apparaissant sous l’effet d’un
gradient de concentration, tandis que la convection est un processus de transport sous l’effet
du mouvement d’ensemble du fluide [4], comme représenté à la figure 2.1.
Dans le cas d’une solution aqueuse de carbonate et bicarbonate de sodium, les autres es2−
+
pèces présentes en solution sont OH− , HCO−
3 , CO3 et Na . Dans les conditions industrielles,
le pH de ces solutions se situe aux alentours de 10.
Pour les espèces ioniques, un processus supplémentaire, appelé migration, peut s’ajouter
à la diffusion. Il apparaît sous l’effet du champ électrostatique induit par la diffusion des
Figure 2.1: Représentation des processus de transport en phase liquide du CO2 provenant d’une bulle
de gaz.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
14
espèces chargées [28]. Suivant l’orientation de ce champ et la charge des ions, il peut s’ajouter
ou s’opposer à la diffusion. Toutefois, des simulations réalisées au début de ce travail [29] ont
montré que la contribution de cet effet est négligeable sur la vitesse globale du transfert de CO2 .
C’est pourquoi, afin de ne pas alourdir inutilement la présentation des systèmes d’équations et
leur résolution numérique, elle n’est pas prise en compte dans la modélisation.
2.1.2
Réactions chimiques en phase liquide
Dans les colonnes BIR, le CO2 transféré depuis les bulles de gaz et transporté dans la
phase liquide participe à des réactions chimiques. En solution aqueuse basique, les réactions
suivantes prennent place [1, 10, 11, 27, 30, 31] :
CO2 + OH− HCO−
3
−
HCO−
3 + OH
CO2−
3 + H2 O
(2.2)
(2.3)
Désignons par r1 et r2 respectivement les vitesses des réactions (2.2) et (2.3). Ces vitesses sont positives si les réactions se déroulent de gauche à droite et négatives dans le cas
contraire. Dans la littérature, ces vitesses de réactions sont supposées être du premier ordre en
les concentrations [10, 11] . Elles s’écrivent donc :
r1 = k11 [CO2 ][OH− ] − k12 [HCO−
3]
r2 =
2−
−
k21 [HCO−
3 ][OH ] − k22 [CO3 ]
(2.4)
(2.5)
où k11 , k12 , k21 et k22 sont les constantes cinétiques. Nous supposons que ces réactions ne
se déroulent qu’à proximité de l’interface bulle-liquide, dans une mince couche de liquide en
contact avec l’interface.
Loin de l’interface bulle-liquide, dans le cœur de la phase liquide, que nous appelons le
bulk, l’équilibre thermodynamique est supposé être atteint. En effet, le temps de séjour du
liquide dans les colonnes BIR est très grand devant les temps caractéristiques des réactions
(quelques heures par rapport à quelques secondes). Les concentrations dans le bulk sont donc
les concentrations d’équilibre.
Appelons K1 et K2 respectivement les constantes d’équilibre des réactions (2.2) et (2.3).
A l’équilibre chimique, les concentrations vérifient le système suivant :
K1 =
[HCO−
3]
[CO2 ][OH− ]
(2.6)
K2 =
[CO2−
3 ]
−]
][OH
[HCO−
3
(2.7)
De plus, à l’équilibre, les concentrations totales en carbone et en sodium, que nous notons
CC,T et CNa+ ,T , doivent également vérifier les relations suivantes :
CC,T
CNa+ ,T
2−
= [CO2 ] + [HCO−
3 ] + [CO3 ]
=
2−
[HCO−
3 ] + 2[CO3 ]
(2.8)
(2.9)
Pour déterminer complètement l’état du système, deux de ces inconnues doivent être fixées.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
15
Deux voies sont utilisées :
2−
- soit nous fixons [HCO−
3 ] et [CO3 ] ;
- soit nous fixons les concentrations initiales, avant mise à l’équilibre, en NaHCO3 et en
Na2 CO3 , respectivement à [NaHCO3 ]ini et [Na2 CO3 ]ini .
Nous déterminons alors CC,T et CNa+ ,T par :
CC,T
CNa+ ,T
= [NaHCO3 ]ini + [Na2 CO3 ]ini
(2.10)
= [NaHCO3 ]ini + 2 [Na2 CO3 ]ini
(2.11)
Ces équations nous servent par la suite pour déterminer les conditions de concentration
loin de l’interface bulle-liquide.
2.1.3
Caractéristiques des écoulements autour de bulles
La grande majorité des colonnes à bulles industrielles fonctionne soit en régime d’écoulement homogène, soit en régime hétérogène [22, 24, 32].
Le régime d’écoulement homogène est obtenu lorsque la fraction volumique de gaz Ô (le
rapport du volume de gaz sur le volume total du mélange liquide-gaz) est inférieure à une
certaine valeur critique Ôcrit . Ce Ôcrit se situe aux alentours de 15 %. En régime homogène,
toutes les bulles ont à peu près la même taille et leur diamètre est compris entre 2 et 6 mm.
Le régime d’écoulement hétérogène, quant à lui, est obtenu lorsque Ô est supérieur à ce
Ôcrit . Il existe alors deux familles de bulles [22, 32] :
– des petites bulles, dont le diamètre est compris entre 2 et 6 mm ;
– des grandes bulles, qui ont une taille comprise entre 5 et 8 cm.
La phase gazeuse dans une colonne est donc répartie entre ces deux populations de bulles.
Ces deux populations ne sont toutefois pas indépendantes puisqu’elles interagissent via des
processus de coalescence et de rupture.
La densité d’aire interfaciale d’une bulle est le rapport entre la surface de cette bulle et
son volume. Les petites bulles ont une densité d’aire interfaciale beaucoup plus importante
que celle des grandes bulles. Dès lors, le transfert de CO2 , de la phase gazeuse vers la phase
liquide dans une colonne BIR, est principalement dû aux petites bulles (plus de 90 %). C’est
pourquoi nous nous concentrons sur les caractéristiques de l’écoulement du liquide autour de
ces petites bulles.
Toutefois, les grandes bulles participent indirectement au transfert. Elles jouent en quelque
sorte le rôle de "réservoir" de CO2 [22]. En effet, le CO2 contenu dans les petites bulles
est rapidement transféré dans la phase liquide. La vitesse du transfert de CO2 décélérerait
rapidement avec la hauteur si les petites bulles évoluaient seules dans la colonne.
Les phénomènes de coalescence-rupture des bulles ont tendance à égaliser les concentrations en CO2 entre les deux familles de bulles [22]. Ces phénomènes conduisent globalement à
un transfert de CO2 depuis la population des grandes bulles vers la population des petites bulles,
ce qui maintient la quantité de CO2 dans la famille des petites bulles à des valeurs importantes.
La vitesse relative des bulles par rapport au liquide est appelée vitesse de glissement, que
nous notons G. Pour les petites bulles, dont le diamètre est compris entre 2 et 6 mm, cette
vitesse est plus ou moins indépendante du diamètre et est comprise entre 0,15 et 0,25 m/s,
selon la composition de la phase aqueuse. Ces petites bulles sont de forme ellipsoïdale [22, 33].
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
16
L’écoulement du liquide autour d’une bulle peut être laminaire ou turbulent. Le régime
d’écoulement dépend du nombre de Reynolds particulaire de la bulle, défini par :
Re =
db Gρl
µl
(2.12)
db est le diamètre de la bulle, G sa vitesse de glissement. ρl et µl sont respectivement la masse
volumique et la viscosité dynamique du liquide.
L’écoulement est laminaire jusqu’à une certaine valeur critique Recrit du nombre de Reynolds particulaire. Pour une bulle isolée, cette valeur critique est d’environ 3000 [33].
Dans le cas d’une bulle de 5 mm avec une vitesse de glissement G=0,2 m/s, nous avons :
Re ≈ 1000
(2.13)
Si le taux de rétention de gaz Ô augmente, Recrit diminue. Mais il existe assez peu d’informations à ce sujet dans la littérature.
L’interface bulle-liquide peut être qualifiée de propre ou de contaminée. La solution peut en
effet contenir des surfactants qui s’adsorbent à l’interface bulle-liquide. Cette "contamination"
de l’interface va modifier ses propriétés, ce qui peut changer drastiquement l’écoulement du
liquide autour de la bulle [33, 34].
Lorsque l’interface est propre, celle-ci peut se mouvoir avec le liquide en contact avec elle.
Par contre, lorsque l’interface est complètement contaminée par des surfactants, cette dernière
est immobile et la bulle se comporte alors comme une sphère rigide.
Dans ce travail, nous négligeons les éventuelles déformations des bulles au cours du transfert
et nous considérons l’interface bulle-liquide uniquement comme une condition aux limites, tant
du point de vue du transfert de matière que du transport de la quantité de mouvement.
2.1.4
Paramètres physico-chimiques
Des corrélations permettant de calculer les paramètres physico-chimiques de notre système
en fonction de la température, de la masse volumique de la solution et des concentrations en
ions sont tirées de la littérature. Nous présentons ci-dessous les corrélations qui sont utilisées
dans ce travail. Les concentrations apparaissant dans les formules sont exprimées en mol m−3 ;
la température est exprimée en K.
Lors d’un travail précédent, nous avons vérifié que les corrélations présentées dans ce travail
conduisent à des valeurs qui sont comparables aux valeurs utilisées par d’autres auteurs dans
différentes conditions [29].
Solubilité du CO2
La solubilité du CO2 dans l’eau est exprimée par un coefficient de partition, noté h. Ce
coefficient est un nombre sans dimension qui est le rapport des concentrations en CO2 dans
la phase gazeuse et la phase liquide lorsque ces phases sont à l’équilibre :
h=
[CO2 ]l
[CO2 ]g
(2.14)
où [CO2 ]l est la concentration en CO2 en phase liquide et [CO2 ]g la concentration en CO2
en phase gazeuse.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
17
Nous supposons que la concentration en CO2 dans la phase liquide à l’interface, que nous
notons [CO2 ]int, l , est en équilibre avec la phase gazeuse et que cet équilibre est atteint instantanément [25]. Autrement dit, nous considérons que la phase liquide n’est globalement pas à
l’équilibre avec la phase gazeuse mais que cet équilibre est réalisé instantanément uniquement
au niveau de l’interface. Nous écrivons donc :
pCO2
[CO2 ]int, l = h [CO2 ]g = h
(2.15)
RT
où pCO2 est la pression partielle de CO2 dans la phase gazeuse, R est la constante des gaz
parfaits et T est la température.
Dans l’eau pure, h peut être calculé par la relation suivante [10] :
hw = 3, 59 10−7 RT exp
3
2044
T
4
(2.16)
La solubilité du CO2 est affectée par la présence d’un électrolyte. En l’occurrence, elle
diminue si la concentration en électrolyte augmente.
La solubilité dans une solution de carbonate et de bicarbonate de sodium peut être estimée
par la relation suivante [10, 35, 36, 37] :
hw
log
h
3
4
= 9, 88 10−5 [Na+ ] + 5, 73 10−5 [OH− ]
(2.17)
−4
[CO2−
+1, 189 10−4 [HCO−
3 ]
3 ] + 1, 483 10
Masse volumique et viscosité
La masse volumique de la solution, notée ρl , et la viscosité, notée µl , sont calculées en
fonction de la température et la composition de la solution, à l’aide de corrélations fournies
par la société Solvay. La masse volumique est exprimée en kg m−3 tandis que la viscosité est
exprimée en kg m−1 s−1 .
Coefficients de diffusion
La valeur des coefficients de diffusion détermine la vitesse de transport des espèces par
diffusion. Leur valeur peut varier fortement d’une espèce à l’autre. Le fait que les différentes
espèces ne diffusent pas à la même vitesse a une influence sur le couplage entre les phénomènes
de transport et les réactions chimiques. Ces coefficients dépendent de la température et sont
également influencés par la composition de la solution.
Le coefficient de diffusion du CO2 (exprimé en m2 s−1 ) dans l’eau pure est donné par
[1, 36] :
A
B
712, 5 2, 6 105
−4
−
(2.18)
DCO2 ,w = 2, 81 10 exp
T
T2
Pour une solution de carbonate et de bicarbonate de sodium, ce coefficient peut être calculé
à partir de sa valeur dans l’eau pure par [1, 36, 38] :
DCO2 =
µl, w
DCO2 ,w
µl
(2.19)
µl, w et µl sont respectivement la viscosité de l’eau pure et de la solution aqueuse de carbonate
et de bicarbonate de sodium.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
18
L’utilisation d’une autre corrélation, souvent référencée, notamment par Vas Bhat [10],
mène à des valeurs similaires. Toutefois, cette dernière est limitée à des concentrations modérées en carbonate et bicarbonate de sodium.
Les relations suivantes permettent de calculer les coefficients de diffusion des espèces ioniques (exprimés en m2 s−1 ) à dilution infinie [10] :
√
RT
DOH− ,w = (−0, 1925 + 1, 2291 T ) 10−3 2
F
RT
DHCO− ,w = 4, 45 10−3 2
3
F
RT
DCO2− ,w = (3, 11 10−5 + 2, 63 10−10 (T )3 )
3
2F2
(2.20)
(2.21)
(2.22)
(2.23)
Pour estimer la valeur de ces coefficients de diffusion dans des solutions de carbonate et
de bicarbonate de sodium, nous faisons l’approximation que nous pouvons utiliser la même
relation que pour DCO2 [38]. Par conséquent, ils sont estimés par :
DOH−
=
DHCO−
=
DCO2−
=
3
3
µl, w
DOH− ,w
µl
µl, w
DHCO− ,w
3
µl
µl, w
DCO2− ,w
3
µl
(2.24)
(2.25)
(2.26)
Constantes d’équilibre
La constante d’équilibre de la réaction (2.2), notée K1 (exprimée en m3 mol−1 ), est une
fonction de la température et de la masse volumique de la solution. Elle est calculée par la
relation [39] :
K1 =
1
−12092, 1
exp
− 36, 786 ln(T ) + 235, 482 ρl, w
Kw
T
3
4
(2.27)
Kw , le produit ionique de l’eau (exprimé en mol2 m−6 ) est donné par [10] :
Kw = [H+ ] [OH− ] = 10−(
5839,5
+22,4773 log T −61,2062
T
) ρ2
l, w
(2.28)
La constante d’équilibre de la réaction (2.3), notée K2 (exprimée en m3 mol−1 ), est une
fonction de la température, de la masse volumique et de la force ionique de la solution. Une
expression tenant compte de la force ionique est disponible dans la littérature [10]. Toutefois,
il a été montré expérimentalement que cette prise en compte conduit à une sous-estimation
de sa valeur [11]. Dans ce travail, nous utilisons donc la valeur à dilution infinie :
log (K2 ) =
3
1568, 924
− 2, 5865 − 6, 737 10−3 T
T
4
(2.29)
Figure 2.2: Représentation 1D des phénomènes de diffusion et de réaction du CO2 en phase liquide
autour d’une bulle de gaz.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
19
Constantes cinétiques
La constante cinétique k11 , apparaissant dans l’équation (2.4), est une fonction de la force
ionique de la solution. L’expression suivante [36, 37, 40] est utilisée dans ce travail :
log k11 =
3
2382
8, 916 −
T
1
4
(2.30)
2
+ 6 10−5 [Na+ ] + 1, 1 10−4 [OH− ] + 1, 7 10−4 [CO2−
3 ]
avec k11 exprimée en m3 mol−1 s−1 .
La constante cinétique k21 , apparaissant dans l’équation (2.5), est calculée à partir de k11
et de la constante d’équilibre K1 (définie en (2.6)) :
k12 =
k11
K1
(2.31)
La réaction (2.3) est très rapide par rapport à la réaction (2.2) car elle implique seulement
un transfert de protons. La valeur de la constante k21 n’est pas connue avec précision. Dans
la littérature, on peut trouver des valeurs comprises entre 6 106 [11] et 107 m3 mol−1 s−1 [10].
Dans ce travail, nous utilisons cette dernière valeur. Il a été montré précédemment que le
choix de l’une ou l’autre valeur n’a pas d’influence sur le résultat des résolutions numériques
[29]. En effet, cette valeur élevée signifie que l’équilibre est atteint quasi instantanément. Nous
vérifions plus loin que la réaction (2.3) est effectivement toujours à l’équilibre, en tout point
de la phase liquide.
De la même manière que pour k12 , la constante cinétique k22 , apparaissant dans l’équation
(2.5), est calculée à partir de k21 et de la constante d’équilibre K2 (définie en (2.7)) :
k22 =
2.2
k21
K2
(2.32)
Stratégie et objectifs
Nous modélisons le transfert bulle-liquide de CO2 par deux types d’approches.
Dans un premier temps, nous utilisons une approche de modélisation dite unidimensionnelle,
ou 1D, car elle est basée sur la résolution de systèmes d’équations à une dimension d’espace,
comme illustré à la figure 2.2.
Ce type d’approche est une procédure classique du génie des procédés. Elle passe notamment par une représentation simplifiée de l’écoulement autour des bulles. Différentes représentations de l’écoulement existent. Dans ce travail, nous utilisons celles qui sont classiquement
appelées modèle du film et modèle de Higbie.
Deux modèles 1D sont donc développés. Les équations de ces modèles sont résolues numériquement et les simulations réalisées permettent d’étudier le système.
Figure 2.3: Représentation 2D des phénomènes de transport et de réaction du CO2 en phase liquide
autour d’une bulle de gaz.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
20
Nous réalisons notamment une analyse de sensibilité paramétrique afin d’identifier les paramètres qui ont la plus forte influence sur la vitesse du transfert de CO2 .
La précipitation du bicarbonate de sodium NaHCO3 diminue la concentration en HCO−
3
en phase liquide, ce qui peut déplacer les équilibres des réactions (2.2) et (2.3) et se répercuter
sur la vitesse du transfert gaz-liquide. L’effet du "pompage" de matière par la précipitation est
donc également investigué.
Les systèmes d’équations de transport-réaction sont résolus numériquement à l’aide du
logiciel COMSOL Multiphysics.
Bien que la résolution numérique des systèmes d’équations que nous développons soit
performante, elle est difficile à incorporer dans un modèle global de colonne à bulles. Une simplification du problème est donc étudiée dans le cadre de l’approche de Higbie. Une expression
simplifiée, permettant de calculer facilement la vitesse du transfert de bulle-liquide de CO2 en
fonction d’un certain jeu de paramètres dans un modèle de colonne BIR, est développée. Les
résultats de cette expression sont comparés aux résultats du modèle sans simplification, ce qui
permet notamment de déterminer les domaines de concentrations où cette expression fournit
une bonne estimation de la vitesse du transfert.
Dans un second temps, nous utilisons une approche de modélisation dite bidimensionnelle,
ou 2D, car elle est basée sur la résolution de systèmes d’équations à deux dimensions d’espace.
Nous réalisons une modélisation complète du couplage entre l’écoulement, le transport des
espèces par convection et par diffusion et les réactions chimiques autour d’une bulle de petite
taille, comme nous le représentons à la figure 2.3.
Nous considérons une bulle sphérique en mouvement rectiligne uniforme dans le liquide.
Etant donné cette hypothèse et la symétrie de la bulle, une approche axisymétrique à deux
dimensions est utilisée. Au niveau des propriétés de l’interface bulle-liquide, deux types d’interface sont envisagés.
Deux formes du modèle 2D sont donc développées et les équations de ce modèle sont
résolues numériquement à l’aide du logiciel COMSOL Multiphysics.
Les résultats de simulation de l’approche 2D sont d’abord validés par comparaison avec
des corrélations de la littérature en absence de réaction.
Ensuite, les résultats de simulation des modèles 2D sont comparés aux résultats de simulation des modèles 1D. Les comparaisons montrent notamment que, malgré la forte idéalisation
de l’écoulement dans l’approche 1D, cette approche permet d’estimer correctement la vitesse
du transfert bulle-liquide de CO2 couplée à des réactions chimiques, du moins dans les conditions des colonnes BIR.
Pour terminer, deux extensions du modèle 2D axisymétrique sont présentées en perspective.
2.3
Outil de simulation
Les modèles que nous développons se basent tous sur la résolution de systèmes d’équations
différentielles. Dans le cas des modèles 1D, il s’agit de systèmes d’Equations Différentielles
Ordinaires (EDO) dans l’espace ou de systèmes d’Equations aux Dérivées Partielles (EDP)
dans l’espace et dans le temps. Dans les cas des modèles 2D, il s’agit de systèmes d’EDP à
deux dimensions d’espace.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
21
Il n’existe généralement pas de solution analytique à ces systèmes. Pour résoudre numériquement les systèmes d’équations, le logiciel COMSOL Multiphysics 3.4 est utilisé.
De nombreux phénomènes physiques sont modélisés par des systèmes d’EDP. Le logiciel
COMSOL Multiphysics est un outil de simulation, résolvant ces EDP en utilisant la méthode
des éléments finis [41].
Cette méthode consiste à diviser le domaine considéré en un nombre fini de sous-domaines
appelés mailles. L’ensemble de ces mailles constituent le maillage. Des points, appelés nœuds,
sont définis dans chaque maille. Au sein d’une maille, chacune des variables est approchée par
une fonction d’interpolation polynomiale entre les valeurs aux nœuds [42] ; fonction dont les
coefficients doivent être déterminés. Le sous-domaine muni de son interpolation est appelé élément. Le problème devient donc la détermination des coefficients du polynôme pour chacune
des mailles [43].
COMSOL Multiphysics propose une série de modules d’application pour les différents domaines scientifiques requérant de telles équations. Dans le cadre de ce travail, nous utilisons
le module de génie chimique. Ce dernier dispose de plusieurs modèles pré-implémentés. Les
fonctions d’interpolation utilisées sont des fonctions polynomiales quadratiques.
Le logiciel propose plusieurs méthodes de résolution, appelées solveurs. Ces solveurs résolvent un problème en cherchant la solution de un ou plusieurs systèmes d’équations linéaires.
Les équations que nous utilisons sont non-linéaires. C’est pourquoi le logiciel procède préalablement à une linéarisation du problème.
Dans le cas d’équations stationnaires, le solveur linéarise le problème par une méthode de
Newton. Si le problème est instationnaire, il utilise une méthode appelée méthode des lignes
[41].
Une fois le problème linéarisé, le solveur sélectionné en résout les équations. Pour toutes
les simulations réalisées dans ce travail, le solveur utilisé est le solveur UMFPACK. Ce dernier est un solveur direct (qui résout directement le problème, par opposition à un solveur
itératif) particulièrement efficace pour la résolution de problèmes 1D non symétriques [41]. Il a
pour principe de résoudre un système de la forme Ax = B par factorisation LU de la matrice A.
Les paramètres de résolution utilisés sont ceux proposés par défaut par le logiciel. Toutefois,
signalons que l’utilisation de COMSOL Multiphysics nécessite une précaution particulière pour
l’estimation des vitesses de réaction.
En effet, le logiciel "accepte" des concentrations négatives. Celles-ci peuvent apparaître
dans les calculs lorsque la vitesse de consommation d’une espèce est suffisamment grande.
D’une étape de résolution à la suivante, la concentration d’une espèce peut devenir négative.
Une telle erreur est alors amplifiée au fur et à mesure des étapes de résolution suivantes.
Afin d’éviter ce problème, qui peut faire diverger très rapidement la résolution, il faut ajouter
une condition sur le signe des concentrations. Une concentration doit être multipliée par zéro
si elle devient négative. Cette condition s’implémente facilement en écrivant directement les
conditions dans les expressions des vitesses.
Par exemple, si la vitesse d’une réaction s’exprime par r = k C, où k est la constante
cinétique et r la vitesse de réaction d’une espèce dont la concentration vaut C, il faut écrire :
r = k C (C > 0)
Si la condition (C > 0) est vraie, le programme renvoie 1. Il renvoie 0 dans le cas contraire.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
22
Il faut appliquer ces conditions à l’ensemble des termes des vitesses de réaction, qui
s’écrivent donc dans le logiciel :
r1 = k11 [CO2 ] ([CO2 ] > 0) [OH− ] ([OH− ] > 0)
−
−k12 [HCO−
3 ] ([HCO3 ] > 0)
−
−
−
r2 = k21 [HCO−
3 ] ([HCO3 ] > 0) [OH ] ([OH ] > 0)
2−
−k22 [CO2−
3 ] ([CO3 ] > 0)
2.4
Modélisation à une dimension
Dans cette approche, nous adoptons une représentation simplifiée de l’écoulement autour
des bulles, réduisant la complexité de l’écoulement à un paramètre caractéristique.
Etant donné que nous considérons uniquement le transfert depuis les petites bulles et
que leur nombre de Reynolds particulaire (défini en (2.12)) est inférieur à la valeur critique
(équation (2.13)), nous limitons la modélisation aux cas en régime laminaire.
Selon le type de conditions à l’interface, l’écoulement peut être modélisé de différentes
façons.
2.4.1
Les deux cas d’interface
Si des surfactants sont présents dans la phase liquide, ceux-ci peuvent venir s’adsorber sur
l’interface bulle-liquide. La présence de ces surfactants à l’interface peut "rigidifier" l’interface,
ce qui affecte la manière dont le liquide s’écoule autour de la bulle. Dans ce travail, nous
envisageons deux cas limites :
– l’interface est propre, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de surfactant adsorbé à l’interface ;
– l’interface est complètement contaminée, c’est-à-dire que des surfactants sont adsorbés
sur la totalité de l’interface bulle-liquide.
Interface propre
Appelons x la distance repérée sur un axe perpendiculaire à l’interface et orientée vers
l’intérieur de la phase liquide. L’origine de cet axe se trouve à l’interface.
La phase liquide peut être vue comme une mosaïque d’éléments de liquide circulant autour
de la bulle. Si l’interface de la bulle est propre, un élément de liquide arrivant au contact de
la bulle va alors glisser le long de celle-ci. La vitesse tangentielle à l’interface dans la phase
liquide est égale à celle en phase gazeuse. Nous avons donc, en x = 0 :
(2.33)
Ug |x=0− = Ul |x=0+
où Ug et Ul sont respectivement les vitesses tangentielles à l’interface en phase gazeuse et en
phase liquide.
De plus, l’interface propre induit une continuité du cisaillement :
dUg -dx -x=0−
µg dUg -⇒
µl dx -x=0−
µg
-
dUl -dx -x=0+
dUl -dx -x=0+
= µl
=
-
(2.34)
(2.35)
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
23
µg et µl désignent respectivement les viscosités dynamiques du gaz et du liquide.
Si le gaz est un mélange N2 -CO2 , et le liquide une solution aqueuse, le rapport
proche de 0. Par conséquent, d’après l’équation (2.35), nous avons :
dUl -≈0
dx -x=0+
-
µg
µl
est
(2.36)
Autrement dit, nous pouvons considérer qu’il n’y a pas de cisaillement dans l’élément de liquide
au voisinage de l’interface.
La taille caractéristique de la couche limite visqueuse est donnée par [38] :
üV =
ó
ν
db
G
(2.37)
où ν est la viscosité cinématique du liquide.
De même, la taille caractéristique de la couche limite pour le processus de diffusion est
donnée par :
ó
db
(2.38)
üD = D
G
où D est le coefficient de diffusion.
Le rapport des deux est :
√
üV
ν
=
= Sc
üD
D
Sc est le nombre de Schmidt, qui se calcule par
ò
Sc =
ν
D
(2.39)
(2.40)
Ce nombre sans dimension compare l’importance relative de la vitesse du transport par diffusion
par rapport à la vitesse du transport de la quantité de mouvement [44]. Dans le cas d’une
solution aqueuse, nous avons :
üV
≈
üD
ó
√
10−6
≈ 500 ≈ 20
−9
2 10
(2.41)
La couche limite de diffusion est donc environ 20 fois plus petite que la couche limite
visqueuse. Elle est donc caractérisée par une absence de cisaillement, étant donné qu’elle est
bien plus petite que la couche limite visqueuse et qu’à la frontière entre la couche limite
visqueuse et la bulle, il n’y a pas de cisaillement.
Cela implique donc que lorsqu’un élément de liquide arrive à l’interface, nous ne nous intéressons qu’à une partie de cet élément, en contact avec l’interface et ayant une épaisseur e.
Cette épaisseur est telle que cette partie de l’élément est non cisaillée et peut être considérée, comme nous venons de le démontrer, comme un milieu semi-infini pour le transport par
diffusion.
De plus, comme l’échelle de longueur caractéristique de la couche limite de diffusion
(quelques dizaines de µm) est très petite devant le diamètre de la bulle (quelques mm), il
est raisonnable de négliger la courbure de l’interface de la bulle et de considérer que cette
interface est plane.
Dans la direction normale à l’interface, le transport est réalisé exclusivement par diffusion.
Compte tenu du fait que, pour un observateur attaché à cette partie de l’élément, le liquide est
Figure 2.4: Représentation de l’écoulement du liquide autour d’une bulle dans le modèle de Higbie.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
24
immobile, l’équation de transport de matière (en absence de réaction) a donc la forme suivante
[38, 44] :
∂C
∂2C
=D 2
(2.42)
∂t
∂x
où C est la concentration d’une espèce en phase liquide et t est le temps. Cette équation décrit
la pénétration transitoire d’une espèce dans un élément de liquide semi-infini du point
de vue du transport par diffusion.
Au-delà de la couche limite de diffusion, dans le bulk, le transport de matière est dominé
par la convection et la résistance au transfert devient négligeable [44]. Le bulk est supposé
parfaitement mélangé et l’équilibre thermodynamique est supposé être atteint. Les concentrations satisfont donc les équations d’équilibre (2.6), (2.7), (2.8) et (2.9) (et éventuellement les
équations (2.10) et (2.11)).
Un élément de liquide, qui entre en contact avec une bulle de gaz reste en contact avec
elle durant un temps noté tC , avant de se décoller de l’interface et de retourner au cœur du
liquide, comme représenté à la figure 2.4. Ce phénomène est déterministe et il est possible
d’estimer combien de temps l’élément de liquide reste en contact avant de se décoller. Ces
considérations sont à la base de la théorie de Higbie [44, 45].
Il est commode de définir une fonction de distribution des âges des éléments, que nous
notons ξ(t), telle que la fraction d’éléments ayant un âge compris entre t et t + dt vaut ξ(t) dt.
Higbie postule que le temps de séjour de chaque élément de liquide est le même tC [45, 46].
La distribution des âges a donc la forme suivante [47] :
– ξ(t) = t1C pour t < tC
– ξ(t) = 0 pour t > tC
Ce temps de contact tC peut être estimé par :
tC =
db
G
(2.43)
La vitesse du transfert bulle-liquide estimée par l’approche de Higbie est la moyenne, sur la
distribution des temps de séjour des éléments de liquide, de la vitesse du transfert gaz-liquide
au sein d’un élément [44, 45].
Dans la suite, nous nous référons à cette approche sous le terme de modèle de Higbie, dont
le temps de contact tC est le paramètre caractéristique.
Interface complètement contaminée
Si, par contre, l’interface bulle-liquide est complètement contaminée par des surfactants,
l’interface est considérée immobile et le liquide avoisinant l’interface adhère à cette interface.
La vitesse tangentielle du liquide à l’interface est donc considérée nulle :
Ul |x=0+ = 0
(2.44)
Ul est la vitesse tangentielle à l’interface en phase liquide et x est la distance repérée sur un
axe perpendiculaire à l’interface et orientée vers l’intérieur de la phase liquide, l’origine de cet
axe se trouvant à l’interface.
Figure 2.5: Représentation du liquide autour d’une bulle dans le modèle de film de Whitman et Lewis.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
25
Etant donné le rapport (2.41), nous considérons que Ul = 0 sur toute l’épaisseur de la
couche limite de diffusion üD . Nous émettons l’hypothèse que le liquide est parfaitement mélangé au-delà de üD , le transport y étant dominé par la convection. Ces considérations sont à
la base de la théorie du film de Whitman et Lewis [24, 44] car cette mince couche de liquide
parfaitement stagnant peut être vue comme un film liquide d’épaisseur finie xL = üD , comme
représenté à la figure 2.5.
Au-delà de ce film, pour x > xL , les conditions sont celles du bulk.
Comme le film de liquide adhère à l’interface et accompagne la bulle dans son ascension,
nous supposons que le transport par diffusion a le temps de s’y établir et que la vitesse de
transfert est stationnaire. Dès lors, l’équation de transport dans ce film (en absence de réaction)
est de la forme :
d2 C
(2.45)
D 2 =0
dx
Cette équation décrit la diffusion à l’état stationnaire d’une espèce dans une couche de
liquide d’épaisseur finie xL . Au-delà de ce film, le liquide est supposé parfaitement mélangé
et l’équilibre thermodynamique est supposé être atteint. Dès lors, les concentrations satisfont
les équations d’équilibre (2.6), (2.7), (2.8) et (2.9) (et éventuellement les équations (2.10) et
(2.11)).
Dans la suite, nous nous référons à cette approche sous le terme de modèle de film, dont
l’épaisseur xL est le paramètre caractéristique.
2.4.2
Systèmes d’équations
La vitesse du transfert bulle-liquide de CO2 dépend du paramètre caractéristique idéalisant
l’écoulement et du gradient de concentration du CO2 à l’interface. Ce gradient est conditionné
par le couplage entre le transport diffusif des différentes espèces, dont le CO2 , et les réactions
chimiques (2.2) et (2.3) prenant place dans le liquide au voisinage de l’interface.
En effet, la réaction (2.2) consomme le CO2 provenant de la phase gazeuse, ce qui déplace
également l’équilibre de la réaction (2.3). La réaction (2.2) joue en quelque sorte le rôle de
"pompe" à CO2 , conduisant à une vitesse de transfert plus importante qu’en absence de
réaction. Les réactions accentuent et maintiennent le gradient de concentration de CO2 à
l’interface à des valeurs importantes.
Comme la vitesse de transfert est augmentée, l’apport de réactifs vers la phase liquide est
plus important, ce qui affecte en retour la cinétique des réactions.
Suivant que l’interface est propre ou complètement contaminée, nous adoptons une représentation simplifiée de l’écoulement, respectivement par un modèle de Higbie ou par un modèle
de film. Ces idéalisations nous amènent à considérer la pénétration transitoire dans un milieu
semi-infini ou la diffusion stationnaire dans un film d’épaisseur finie.
Modèle de Higbie
Modélisation du couplage diffusion-réaction chimique dans un élément de liquide semi-infini
Dans cette approche, nous considérons la pénétration transitoire du CO2 dans une couche
de liquide semi-infini. Les équations de diffusion-réaction au sein d’un élément de liquide s’ob-
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
26
tiennent à partir du bilan de matière pour chacune des espèces. Elles s’écrivent sous forme
d’un système de 4 EDP dans le temps et dans l’espace :
∂ 2 [CO2 ]
− r1
∂x2
∂ 2 [OH− ]
= DOH−
− r1 − r2
2
∂x
é
è
∂ 2 HCO−
3
= DHCO−
+ r1 − r2
2
3
è ∂x é
∂ 2 CO2−
3
= DCO2−
+ r2
3
∂x2
∂ [CO2 ]
∂t
∂ [OH− ]
è ∂t é
∂ HCO−
3
è ∂t
∂ CO2−
3
∂t
= DCO2
é
(2.46)
(2.47)
(2.48)
(2.49)
A l’instant initial, nous supposons que les concentrations de chaque espèce correspondent
aux concentrations dans le bulk. Nous avons donc les conditions suivantes :
[CO2 ]|x, t=0 = [CO2 ]bulk
#
− $--
OH
è
x, t=0
éHCO−
3 -x, t=0
è
éCO2−
3 x, t=0
=
=
=
$
OH− bulk
#
HCO−
3
è
é
è
CO2−
3
é
bulk
bulk
(2.50)
(2.51)
(2.52)
(2.53)
Comme mentionné plus haut, le bulk est supposé être à l’équilibre thermodynamique. Les
équations d’équilibre (2.6), (2.7), (2.8) et (2.9) (et éventuellement les équations (2.10) et
(2.11)) permettent donc de calculer ces grandeurs.
A l’interface (en x = 0), nous supposons que la concentration du CO2 est imposée par
l’équilibre avec la phase gazeuse et que les autres espèces ne diffusent pas au travers de
l’interface. Nous avons donc :
[CO2 ]|x=0, t = h
∂ [OH− ] -∂x -x=0, t
éè
∂ HCO−
3 ∂x
x=0, t
éè
2− ∂ CO3 ∂x
x=0, t
pCO2
RT
(2.54)
= 0
(2.55)
= 0
(2.56)
= 0
(2.57)
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
27
Loin de l’interface (pour x → ∞), les concentrations sont celles du bulk. Les concentrations
y sont homogènes. Nous écrivons donc :
∂ [CO2 ] -= 0
∂x -x, t
-
lim
x→∞
(2.58)
-
∂ [OH− ] -= 0
lim
x→∞
∂x -x, t
lim
è
é-
∂ HCO−
3 -
x, t
è
é∂ CO2−
3
lim
x→∞
∂x
-
x→∞
∂x
(2.59)
= 0
(2.60)
= 0
(2.61)
x, t
Modélisation de la vitesse du transfert bulle-liquide de CO2
La vitesse du transfert dépend du nombre de moles de CO2 pénétrant dans un élément de
liquide semi-infini au cours d’un intervalle de temps tC , durant lequel l’élément de liquide est
en contact avec le gaz.
L’évolution des concentrations dans cet élément entre les temps t = 0 et t = tC est modélisée par les équations transitoires (2.46), (2.47), (2.48) et (2.49), qui sont résolues avec les
conditions initiales (2.50), (2.51), (2.52) et (2.53) et les conditions aux limites (2.54), (2.55),
(2.56), (2.57), (2.58), (2.59), (2.60) et (2.61). La résolution de ce système d’équations permet de calculer les profils de concentration de chaque espèce dans l’élément de liquide à tout
instant. Dans ce qui suit, nous appelons profil de concentration d’une espèce, à un instant
donné, la mise en graphique de la concentration de cette espèce en fonction de la distance x
par rapport à l’interface à cet instant.
Nous appelons NCO2 (t) la densité de flux de CO2 à l’interface à l’instant t. Cette grandeur
est le nombre de moles de CO2 traversant l’interface par unité de temps et d’aire interfaciale
(en mol m−2 s−1 ). Elle se calcule par :
NCO2 (t) = −DCO2
∂ [CO2 ] -∂x -x=0,t
-
(2.62)
La vitesse de transfert bulle-liquide de CO2 est la moyenne des flux instantanés, pondérés
par la distribution des temps de séjour des éléments. La densité de flux moyenne calculée par
l’approche de Higbie, que nous notons NCO2 , Higbie , s’évalue donc par :
NCO2 , Higbie = −
DCO2
tC
Ú tC
∂ [CO2 ] -∂x 0
dt
x=0,t
(2.63)
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
28
Modèle du film
Modélisation du couplage diffusion-réaction chimique dans une couche de liquide d’épaisseur
finie
Les équations qui décrivent la diffusion dans une couche de liquide d’épaisseur finie xL
s’obtiennent à partir du bilan de matière à l’état stationnaire pour chacune des espèces. Ces
bilans conduisent au même système que celui donné par les équations (2.46), (2.47), (2.48) et
(2.49) mais dans lequel les dérivées temporelles sont nulles.
Les équations de diffusion-réaction dans une couche de liquide d’épaisseur xL s’écrivent
donc sous la forme d’un système de 4 EDO dans l’espace :
∂ 2 [CO2 ]
∂x2
∂ 2 [OH− ]
DOH−
2
è ∂x é
∂ 2 HCO−
3
DCO2
DHCO−
2
3
è∂x
∂ 2 CO2−
3
= r1
(2.64)
= r1 + r2
(2.65)
= −r1 + r2
(2.66)
é
= −r2
(2.67)
∂x2
A l’interface bulle-liquide (en x = 0), nous faisons les mêmes hypothèses que dans le cas
transitoire. Les conditions à l’interface sont donc également données par les équations (2.54),
(2.55), (2.56) et (2.57).
A la frontière entre le film et le bulk (en x = xL ), nous supposons que les concentrations
sont celles du bulk. Par conséquent, nous écrivons :
DCO2−
3
[CO2 ]|x=xL , t = [CO2 ]bulk
#
− $--
OH
x=x , t
L
é− HCO3 x=xL , t
éè
2− CO3 -
è
x=xL , t
=
=
=
$
OH− bulk
#
HCO−
3
è
é
è
CO2−
3
é
bulk
bulk
(2.68)
(2.69)
(2.70)
(2.71)
Modélisation de la vitesse du transfert bulle-liquide de CO2
La vitesse du transfert dépend de la vitesse de diffusion du CO2 dans la couche de liquide
d’épaisseur finie xL , lorsque la diffusion a atteint un état stationnaire.
L’évolution des concentrations dans ce film est modélisée par les équations (2.64), (2.65),
(2.66) et (2.67), qui sont résolues avec les conditions aux limites (2.54), (2.55), (2.56), (2.57),
(2.68), (2.69), (2.70) et (2.71). La résolution de ce système d’équations permet de calculer les
profils de concentration de chaque espèce dans la couche de liquide à l’état stationnaire.
La vitesse de transfert bulle-liquide de CO2 dans l’approche du film correspond à la densité
de flux à l’état stationnaire de CO2 à l’interface, que nous notons NCO2 ,film (exprimée en
mol m−2 s−1 ). Elle se calcule par :
NCO2 ,film = −DCO2
∂ [CO2 ] -∂x -x=0
-
(2.72)
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
2.4.3
29
Résolution
Ces systèmes d’équations sont résolus numériquement par la méthode des éléments finis
à l’aide du logiciel COMSOL Multiphysics. Le mode Diffusion du module Génie Chimique est
utilisé. La taille de la géométrie et les paramètres de maillage dépendent du type d’approche
considérée.
Modèle de Higbie
Dans ce cas, le solveur doit résoudre un problème transitoire, du temps t = 0 jusqu’au
temps correspondant au temps de contact, c’est-à-dire jusqu’à t = tC . Une géométrie 1D est
construite et sa taille est choisie de manière à ce que le domaine puisse être considéré comme
semi-infini pour le tC considéré. Autrement dit, la taille du domaine, pour un temps de contact
tC considéré, doit être telle qu’il n’y ait pas d’évolution des concentrations au-delà de cette
distance par rapport à l’interface au temps t = tC .
En pratique, nous observons
que cette condition est satisfaite pour une taille de domaine
ð
égale ou supérieure à 4 DCO2 tC .
L’évaluation de la densité de flux moyenne passe par l’intégration numérique des flux instantanés successifs évalués par le solveur sur l’intervalle de temps qui lui est spécifié. La valeur
de ces différents flux décroît rapidement au cours du temps.
La densité de flux évaluée au premier instant après l’instant initial est la plus grande ; c’est
elle qui contribue le plus à la valeur moyenne. Elle est évaluée par COMSOL de la manière
suivante :
3
4
[CO2 ]int − [CO2 ]bulk
NCO2 (t1 ) = −DCO2
(2.73)
x1 − x0
où t1 est le premier instant après t = 0, x1 est la position du premier nœud et x0 =0.
Par conséquent, la densité de flux moyenne est influencée par la taille du maillage et du
nombre de divisions de l’intervalle de temps.
Concernant le maillage, la taille de maille optimale est déterminée par comparaison de la
solution numérique obtenue par COMSOL avec la solution analytique du problème de diffusion
d’une seule espèce en absence de réaction. Ce problème est modélisé par le système suivant :
∂[A]
∂t
= DA
∂2A
∂x2
(2.74)
[A]|x, t=0 = 0
(2.75)
[A]|x=0, t = [A]int
(2.76)
∂[A] -lim
x→∞ ∂x -x, t
= 0
(2.77)
La résolution de ce système d’équations conduit à une expression analytique pour la vitesse
moyenne de transfert [44], qui s’écrit :
ó
NA,Higbie = 2
DA
[A]int
πtC
(2.78)
Figure 2.6: Pourcentage d’écart de NCO2 , Higbie calculé par COMSOL avec la solution analytique
(2.78) en fonction de la taille de maille.
Figure 2.7: Pourcentage d’écart de NCO2 , Higbie calculé par COMSOL avec la solution analytique
(2.78) en fonction du nombre de divisions de l’intervalle de temps.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
30
Nous présentons à la figure 2.6 la valeur absolue de l’écart relatif entre la densité de flux
simulée et celle calculée analytiquement, en fonction de la taille des mailles. Nous observons
que la taille optimale des mailles, représentée par le carré rouge, est de 1 µm.
Nous testons ensuite le nombre de divisions de l’intervalle de temps. Les densités de flux
moyennes simulées par COMSOL sont également comparées à la solution analytique (2.78)
pour la taille de maille optimale, c’est-à-dire avec des mailles de 1 µm.
Nous présentons à la figure 2.7 l’écart relatif entre les densités de flux simulées et la solution
analytique pour différents nombres de divisions de l’intervalle de temps.
Nous observons que le nombre optimum de divisions de l’intervalle de temps se situe entre
500 et 600. La valeur de 500 est sélectionnée.
Modèle du film
Dans ce cas, le paramètre de modélisation xL impose la taille du domaine. Autrement dit,
la taille de l’espace de résolution est égale à xL .
Une taille de maille de 1 µm est également utilisée pour la résolution des équations stationnaires. Toutefois, il apparaît que le flux de diffusion à l’état stationnaire est beaucoup moins
sensible envers la taille des mailles que le flux moyen estimé avec le modèle de Higbie.
2.4.4
Résultats et analyses
Nous présentons dans cette section quelques résultats qui ont été obtenus par simulation
des équations des modèles 1D.
Nous présentons aux figures 2.8 et 2.9 le résultat de la résolution des équations de transportréaction. Les conditions de température, de pression et de composition considérées correspondent approximativement à celles dans la colonne BIR de Dombasle.
Le temps de contact est estimé par le rapport db /G. Pour des petites bulles dont le diamètre
est compris entre 2 et 6 mm et la vitesse de glissement est comprise entre 0,15 et 0,25 m/s,
le temps de contact est donc compris entre 0,008 et 0,04 s.
La figure 2.8 représente les profils de concentration adimensionnelle obtenus en résolvant
les équations de pénétration transitoire dans un milieu semi-infini. Les concentrations sont
normalisées par une concentration de référence. La concentration du CO2 est normalisée par
sa concentration à l’interface et les concentrations des autres espèces sont normalisées par leur
concentration dans le bulk. Le résultat présenté sont les profils de concentration adimensionnelle
à l’instant t = tC . Le temps de contact tC considéré est de 0,02 s.
La densité de flux moyenne estimée est de 1, 7 10−3 mol/(m2 s). Elle est augmentée de
73% par rapport à sa valeur en absence de réaction.
Les profils de concentration adimensionnelle dans le cas de la diffusion à l’état stationnaire
sont présentés à la figure 2.9. L’épaisseur du film est de 30 µm, ce qui est l’ordre de grandeur
de la taille de la couche limite de diffusion (équivalent à un temps de contact de 0,03 s).
A l’état stationnaire, la densité de flux estimée est de 1, 5 10−3 mol/(m2 s). Elle est augmentée de 260% par rapport à sa valeur en absence de réaction.
Nous remarquons également que les réactions conduisent à la diminution des concentrations
−
en CO2 , OH− et CO2−
3 et à une augmentation de la concentration en HCO3 au voisinage de
l’interface. La réaction (2.3) se déroule donc de droite à gauche pour les conditions des colonnes
BIR. La consommation d’une mole OH− par la réaction (2.2) conduit à la consommation d’une
Figure 2.8: Profils de concentrations normalisées dans le cas de la pénétration transitoire dans un
milieu semi-infini au temps t=0,02s.
Figure 2.9: Profils de concentrations normalisées dans le cas de la diffusion à l’état stationnaire dans
un film d’épaisseur xL = 30µm.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
−
mole de CO2−
3 pour reformer une mole de OH . La
de la manière suivante :
CO2 + OH− →
CO2−
3 + H2 O →
CO2 + CO2−
3 + H2 O →
Nous présentons à la figure 2.10 le rapport de
31
réaction globale peut donc s’écrire donc
HCO−
3
−
HCO−
3 + OH
−
2HCO3
[CO2−
3 ]
−
[HCO−
3 ][OH ]
sur K2 en fonction de x, pour
le cas de la pénétration dans un milieu semi-infini au temps t=0,02s. Ce rapport vaut 1 pour
tout x du domaine considéré, ce qui confirme que la réaction (2.3) est à l’équilibre en tout
point de la couche limite de diffusion.
Le modèle peut être utilisé pour déterminer quels sont les domaines de concentrations
−
en CO2−
3 et HCO3 les plus favorables au transfert gaz-liquide de CO2 du point de vue de
l’accélération par la réaction chimique.
La densité de flux moyenne de CO2 est estimée en fonction de la composition du liquide en
carbonate et bicarbonate de sodium, pour les conditions de température et de pression de la
colonne BIR de Dombasle, en utilisant l’approche de Higbie avec tC =0,02s. Nous présentons à
la figure 2.11 les courbes de niveau de la surface générée en calculant NCO2 , Higbie en fonction
de la concentration en carbonate (en abscisse) et en bicarbonate (en ordonnée). Le point de
fonctionnement de la colonne est repéré par un losange vert. Pour des raisons de confidentialité, les échelles de l’abscisse et de l’ordonnée ne sont pas présentées.
La sensibilité de NCO2 , Higbie envers les paramètres physico-chimiques est également estimée, pour tC =0,02s. Il ressort de cette étude que NCO2 , Higbie dépend fortement du coefficient
de diffusion du CO2 (DCO2 ) et de sa solubilité (h). Dans une moindre mesure, NCO2 , Higbie
est également sensible à la valeur de la constante cinétique de la réaction (2.2) (k11 ) et aux
constantes d’équilibre des réactions (2.2) et (2.3) (respectivement K1 et K2 ).
Nous présentons à la table 2.1 les pourcentages de variation de NCO2 , Higbie , pour différents
pourcentages de variation des paramètres DCO2 , h, k11 , K1 et K2 .
Pour les conditions des colonnes BIR, il apparaît que NCO2 , Higbie est quasiment insensible
aux valeurs des autres paramètres. Pour la plage de variations testées dans la table 2.1, les
variations estimées sont inférieures à 0,01 %.
La vitesse du transfert est donc contrôlée par la diffusion du CO2 et la réaction (2.2),
c’est-à-dire par l’équation (2.46), mais l’équilibre de la réaction (2.3) contribue également au
transfert en "régénérant" les OH− consommés par la réaction (2.2).
Un autre point mis à jour par l’utilisation des modèles est que nous pouvons vraisemblablement considérer que le transfert gaz-liquide de CO2 et la consommation de HCO−
3 par la
précipitation ne sont pas couplés.
D’une part, les profils de concentration nous montrent que la concentration en HCO−
3
n’est pas significativement augmentée dans la couche limite par rapport au bulk du liquide.
Cela signifie que la couche limite n’est pas un lieu privilégié pour la sursaturation en NaHCO3 .
D’autre part, l’impact de la précipitation sur la vitesse du transfert de CO2 est étudié. Un
terme de consommation du HCO−
3 par la précipitation, noté rs , est ajouté aux équations de
transport-réaction. L’équation (2.48) devient dès lors :
è
∂ HCO−
3
∂t
é
= DHCO−
3
è
∂ 2 HCO−
3
∂x2
é
+ r1 − r2 − rs
(2.79)
Figure 2.10: Rapport de
[CO2−
3 ]
−
[HCO−
3 ][OH ]
sur K2 en fonction de x, dans le cas de la pénétration dans un
milieu semi-infini au temps t=0,02s.
Figure 2.11: Courbes de niveau de la surface générée en calculant NCO2 , Higbie (exprimé en mol/m2 s)
−
en fonction des concentrations en CO2−
3 (en abscisse) et en HCO3 (en ordonnée) pour les conditions
de la colonne de Dombasle, en utilisant l’approche de Higbie avec tC =0,02s.
Variation du paramètre
-50%
-20%
+20%
+50%
DCO2
h
k11
K1
K2
-29,71%
-58,34%
-13,39%
-9,22%
+30,89%
-10,25%
-23,23%
-5,18%
-2,36%
+8,62%
+10,02%
+23,55%
+4,96%
+1,53%
-6,00%
+23,31%
+59,11%
+12,03%
+3,05%
-11,68%
Table 2.1: Pourcentages de variation de NCO2 , Higbie pour différents pourcentages de variation des
paramètres dans les conditions de la colonne BIR de Dombasle et pour tC =0,02 s.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
32
Cette vitesse de transfert liquide-solide de HCO−
3 est estimée pour le cas de la colonne
BIR de Dombasle sur base de résultats expérimentaux fournis par Solvay. Les mesures de la
distribution granulométrique des cristaux permettent d’estimer la vitesse de croissance des
cristaux. La méthode est présentée en détail à la section 4.2.3 du chapitre 4.
La connaissance des vitesses de croissance et de germination des cristaux permet alors de
calculer la vitesse de consommation du HCO−
3 par la précipitation. Ce calcul est détaillé à la
section 5.2.4 du chapitre 5 (en divisant l’équation (5.64) par le volume de liquide).
Nous trouvons rs ≈ 90 mol/(m3 s).
Nous présentons à la figure 2.12 les variations relatives de la densité de flux de CO2
par rapport à celle pour rs = 0, pour différentes valeurs de rs , jusqu’à 300 mol/(m3 s). Nous
observons que le transfert gaz-liquide est augmenté d’environ 0,05 % si cette vitesse de transfert
liquide-solide correspond à celle dans la colonne BIR de Dombasle.
Nous présentons également à la figure 2.13 les différents profils de concentration adimensionnelle de CO2 au voisinage de l’interface, normalisée par la concentration à l’interface, pour
différentes valeurs de rs . Nous observons que tous les profils sont superposés.
La combinaison de ces deux résultats montrent que les phénomènes de transfert gaz-liquide
et de précipitation sont vraisemblablement découplés. Dès lors, dans la suite, nous considérons
les deux phénomènes séparément.
2.4.5
Développement d’une expression simplifiée
Les systèmes d’équations modélisant la vitesse du transfert bulle-liquide de CO2 ne possèdent pas de solution analytique et sont, dès lors, résolus numériquement à l’aide du logiciel
COMSOL Multiphysics. Bien que performante, cette résolution numérique semble assez lourde
à incorporer dans un modèle global de colonne BIR.
Une simplification du problème est donc investiguée dans le cadre de l’approche de Higbie.
Nous développons un modèle simplifié et nous comparons le résultat de ce modèle simplifié
avec le résultat du modèle "complet". Sur base de cette comparaison, nous déterminons une
−
plage de concentrations en CO2−
3 et HCO3 dans laquelle le modèle simplifié fournit une bonne
approximation de la vitesse du transfert bulle-liquide de CO2
Comme nous l’avons vu ci-dessus, le système est surtout sensible aux paramètres DCO2 , h
et dans une moindre mesure à k11 et K2 pour les temps de contact caractéristiques des bulles
dans les colonnes BIR. La vitesse du transfert est gouvernée par l’équation (2.46).
De plus, dans ce domaine de concentration, le OH− consommé par la réaction (2.2) tend
à être reformé par la réaction (2.3). Une simplification plausible serait donc de considérer que
la concentration en OH− reste constante. Dans ce cas, nous pouvons exprimer la vitesse de
la réaction (2.2) comme proportionnelle à l’écart de la concentration en CO2 par rapport à
l’équilibre. Nous écrivons dès lors :
r∗ = k11 OH−
#
$
bulk ([CO2 ] − [CO2 ]bulk )
(2.80)
Cette approximation est généralement appelée approximation du pseudo premier ordre.
Dans la colonne BIR de Dombasle, [CO2 ]bulk vaut environ 15% de [CO2 ]int (la valeur maximale de [CO2 ] dans un élément de liquide), c’est pourquoi nous ne négligeons pas [CO2 ]bulk
devant [CO2 ].
Figure 2.12: Densité de flux de CO2 moyenne calculé par l’approche de Higbie pour différentes valeurs
de rs .
Figure 2.13: Profils de concentration adimensionnelle de CO2 calculé par l’approche de Higbie pour
différentes valeurs de rs .
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
33
Le modèle se réduit donc à une seule EDP traduisant le bilan de matière pour le CO2 , qui
s’écrit :
∂ 2 [CO2 ]
∂ [CO2 ]
= DCO2
− r∗
(2.81)
∂t
∂x2
Cette équation est résolue avec la condition initiale (2.50) et les conditions aux limites (2.54)
et (2.58).
Pour résoudre ce problème, posons :
y = [CO2 ] − [CO2 ]bulk
(2.82)
yint = [CO2 ]int − [CO2 ]bulk
k =
(2.83)
$
k11 OH− bulk
#
(2.84)
Les équations (2.81), (2.50), (2.54) et (2.58) deviennent :
∂y
∂t
= DCO2
∂2y
−ky
∂x2
(2.85)
y|x, t=0 = 0
(2.86)
y|x=0, t = yint
∂y -lim
= 0
x→∞ ∂x -x, t
(2.87)
(2.88)
Notons Y (x, p) la transformée de Laplace suivant t de y(x, t). En appliquant la transformée
de Laplace à l’équation (2.85) et compte tenu de l’équation (2.86), nous obtenons :
∂2Y
− (k + p) Y = 0
∂x2
La solution générale de cette équation est donnée par :
(2.89)
DCO2
Y (x, p) = c1 (p) exp
Aó
A ó
B
k+p
x + c2 (p) exp −
DCO2
B
k+p
x
DCO2
(2.90)
Les transformées de Laplace suivant t des équations (2.87) et (2.88) s’écrivent respectivement :
yint
(2.91)
Y |x=0, p =
p
∂Y -lim
= 0
(2.92)
x→∞ ∂x -x, p
L’utilisation de ces deux équations permet de déterminer c1 (p) et c2 (p). Nous obtenons :
A ó
yint
exp −
Y (x, p) =
p
B
k+p
x
DCO2
(2.93)
Nous recherchons la densité de flux de CO2 à l’interface, calculée par l’équation (2.62).
Í
Notons N CO2 (p) la transformée de Laplace de NCO2 (t), qui s’exprime dès lors par :
Í
N CO2 (p) = −DCO2
yint
= −
p
ó
∂Y (x, p) -∂x -x=0, p
-
k+p
DCO2
(2.94)
∗
Figure 2.14: Courbes de niveau de la surface générée en calculant le rapport (NCO2 , Higbie −
−
NCO2 , Higbie )/NCO2 , Higbie en fonction des concentrations en CO2−
3 (abscisse) et HCO3 (ordonnée)
- Losange vert : composition de sortie de la colonne BIR de Dombasle - Triangle orange : composition
du liquide d’entrée dans la colonne BIR Dombasle - Cercle rouge : composition quelconque.
Figure 2.15: Profils de concentration adimensionnelle au temps t=0,02 s pour la composition de sortie
de la colonne BIR de Dombasle.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
La transformée de Laplace inverse suivant p de
√
k+p
p
34
s’écrit [48] :
1√ 2
exp (−kt) √
√
+ k erf
kt
πt
Í
En appliquant la transformée de Laplace inverse suivant p à N CO2 (p) et en remplaçant y
et yint respectivement par les équations (2.82) et (2.83), nous obtenons l’expression suivante :
∗
NCO2 (t) = ([CO2 ]int − [CO2 ]bulk )
ó
ó
DCO2 
k

1√ 2
k
exp (−kt) + k erf
kt 
πt
(2.95)
Nous appliquons la distribution des temps de séjour de Higbie à cette expression. Compte
tenu que [48] :
ò
Ú tC
1ð
2
π
exp (−kt)
√
erf
dt =
ktC
k
t
0
ò
3
4
Ú tC
2
1√ 2
1ð
1
tC
kt dt =
ktC
exp (−ktC ) + tC −
erf
erf
πk
2k
0
et en remplaçant k par l’équation (2.84), nous obtenons :
∗
NCO2 , Higbie
= ([CO2 ]int − [CO2 ]bulk )
A3
$
k11 OH− bulk +
ó
+
∗
#
ó
DCO2
k11 [OH− ]bulk
(2.96)
4
4
3ñ
1
−
k11 [OH ]bulk tC
erf
2 tC
!
#
$
"
DCO2
exp −k11 OH− bulk tC
π tC
B
où NCO2 , Higbie est la densité de flux moyenne de CO2 , calculée en utilisant l’approche de
Higbie et un modèle simplifié du point de vue du couplage diffusion-réaction chimique.
Cette expression n’est une bonne approximation de NCO2 , Higbie que si l’hypothèse de pseudo
premier ordre est valide. Il faut donc que, pour le temps de contact considéré, la concentration
en OH− évolue peu dans la couche limite de diffusion [36].
En comparant les résultats de ce modèle simplifié avec ceux du modèle complet, nous
déterminons les plages de concentrations dans lesquelles le modèle simplifié s’écarte significativement du modèle complet. Nous présentons à la figure 2.14 les courbes de niveau de la
∗
∗
surface générée en calculant le rapport (NCO2 , Higbie − NCO2 , Higbie )/NCO2 , Higbie en fonction
−
des concentrations en CO2−
3 (en abscisse) et en HCO3 (en ordonnée). Pour des raisons de
confidentialité, les échelles de l’abscisse et de l’ordonnée ne sont pas présentées.
Le losange vert correspond approximativement à la composition du liquide en sortie de la
colonne BIR de Dombasle, le triangle orange correspond approximativement à la composition
du liquide d’entrée et le cercle rouge représente une composition quelconque.
Nous présentons à la figure 2.15 les profils de concentration adimensionnelle des différentes
espèces dans un élément de liquide en contact avec l’interface au temps t=0,02 s et pour la
composition du liquide en sortie de la colonne BIR de Dombasle (losange vert à la figure 2.14).
Nous constatons que le profil de [OH− ] est presque plat. La concentration en OH− est donc
pratiquement constante pour l’intervalle de temps considéré.
Figure 2.16: Profils de concentration adimensionnelle au temps t=0,02 s pour la composition d’entrée
de la colonne BIR de Dombasle.
Figure 2.17: Profils de concentration adimensionnelle au temps t=0,02 s pour la composition représentée par le cercle rouge à la figure 2.14.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
35
De même, nous présentons à la figure 2.16 les profils de concentration adimensionnelle au
point correspondant à la composition du liquide à l’entrée de la colonne BIR de Dombasle
(triangle orange à la figure 2.14), nous observons que le profil de OH− évolue peu pour le
temps de contact considéré. Sa diminution est inférieure à 10% au niveau de l’interface (là où
la diminution est la plus importante).
Par contre, pour la composition représentée par le cercle rouge à la figure 2.14, nous observons à la figure 2.17 que le profil de OH− est significativement modifié. Par conséquent,
l’hypothèse de pseudo premier ordre n’est plus valide.
2.5
2.5.1
Modélisation d’une bulle par une approche à deux dimensions axisymétrique
Considérations sur l’approche à deux dimensions axisymétrique
Nous considérons une bulle de diamètre db , en ascension dans un liquide initialement au repos. Sa vitesse d’ascension est la vitesse de glissement G. Cette bulle est supposée parfaitement
sphérique et son mouvement est rectiligne, vertical et dirigé vers le haut.
Comme la bulle est en mouvement rectiligne uniforme, il est équivalent de considérer que
la bulle est immobile et que le liquide s’écoule autour d’elle, parallèlement à sa direction
d’ascension, avec une vitesse moyenne G.
Dès lors, nous considérons un repère galiléen dont l’origine se trouve au centre de masse de
la bulle et muni d’un système de coordonnées cylindriques (r, ϕ, z). Ce repère est représenté à
la figure 2.18. r est la coordonnée radiale par rapport à l’axe z, ϕ est l’angle azimutal et l’axe
z est orienté dans la direction du mouvement de la bulle et son sens est dirigé vers le haut.
Si, de plus, nous considérons que la composante azimutale de la vitesse est nulle et qu’il
n’y a pas de variation des différentes grandeurs du système avec ϕ, alors la vitesse du liquide
ne dépend que des coordonnées radiale et axiale.
Dans ce cas, l’écoulement peut être qualifié d’axisymétrique, l’axe z étant l’axe de symétrie.
Il n’est alors pas nécessaire de représenter la bulle en trois dimensions. Cette dernière peut être
vue comme la surface tridimensionnelle engendrée par la rotation d’un demi-cercle autour de
l’axe de symétrie [49].
La validité de l’hypothèse d’axisymétrie de l’écoulement est toutefois limitée par le nombre
de Reynolds particulaire de la bulle [34], défini en (2.12).
Dans le cas d’une sphère rigide, l’écoulement dans la traînée de la bulle présente un tourbillon axisymétrique stationnaire lorsque Re > 20 et perd son axisymétrie pour Re > 210,
où deux filaments tourbillonnaires apparaissent. Cet écoulement devient instable autour de
Re = 280, où les tourbillons se détachent régulièrement.
Dans le cas d’une bulle sphérique dont l’interface est propre, il n’y pas de tourbillons qui
apparaissent et la traînée reste axisymétrique et stationnaire jusqu’à Re = 500.
Nous supposons que le liquide est incompressible. Comme nous nous limitons à un écoulement axisymétrique, ce dernier est toujours laminaire. Le transfert de matière depuis la bulle
vers le liquide est calculé en résolvant les équations stationnaires de Navier-Stokes, de la continuité et de transport-réaction sur un domaine bidimensionnel axisymétrique.
Figure 2.18: Repère au centre de la bulle muni d’un système de coordonnées cylindriques (r, ϕ, z).
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
2.5.2
36
Systèmes d’équations
Soit u = (u, v) le vecteur vitesse du liquide. u et v sont respectivement les composantes de
la vitesse selon les axes r et z. p représente la pression et ρl est la masse volumique du liquide.
Les équations sont écrites sous forme adimensionnelle. D’une part, cela permet de faire
apparaître une série de nombres sans dimension comparant les différents phénomènes de transport. D’autre part, les équations adimensionnelles sont plus stables numériquement, ce qui
facilite leur résolution numérique.
Le diamètre de la bulle db , la vitesse de glissement G et le produit ρl G2 sont respectivement
utilisés comme référence de longueur, de vitesse et de pression. Nous notons les variables
adimensionnelles de la manière suivante :
u
(2.97)
ũ =
G
v
ṽ =
(2.98)
G
r
(2.99)
r̃ =
db
z
(2.100)
z̃ =
db
p
p̃ =
(2.101)
ρl G 2
Le diamètre adimensionnel de la bulle vaut 1 :
db
d˜b =
=1
db
(2.102)
Les concentrations sont adimensionnalisées par des concentrations de référence. Les références utilisées sont la concentration à l’interface pour le CO2 et celles dans le bulk pour OH− ,
2−
HCO−
3 et CO3 :
a =
b =
c =
d =
[CO2 ]
[CO2 ]int
[OH− ]
[OH− ]bulk
è
HCO−
3
è
CO32−
è
HCO−
3
è
CO2−
3
é
é
é
ébulk
(2.103)
(2.104)
(2.105)
(2.106)
bulk
Dans ce cas, nous appelons bulk le liquide à l’extérieur du domaine considéré, c’est-à-dire à
une distance très grande ("infinie") de l’interface du point de vue du transport par diffusion.
Le régime d’écoulement est supposé établi. Nous résolvons donc un problème stationnaire.
Les systèmes d’équations ne contiennent pas de dérivées temporelles.
Les différentes équations sont écrites sous forme adimensionnelle vectorielle. L’opérateur
˜ sous forme adimensionnelle. Concernant le développement des notations
différentiel ∇ s’écrit ∇
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
37
vectorielles en coordonnées cylindriques axisymétriques, nous invitons le lecteur à consulter
l’annexe A.1.
Les équations de Navier-Stokes et de continuité, dont la résolution permet de déterminer
l’écoulement, sont couplées aux équations de convection-diffusion-réaction en phase liquide :
- Equation de Navier-Stokes (transport de la quantité de mouvement) :
2
˜ ũ = −∇p̃
˜ + 1 ∇
˜ 2 ũ
ũ · ∇
Re
(2.107)
˜ · ũ = 0
∇
(2.108)
1
- Equation de continuité (transport de la masse totale) :
- Equations de convection-diffusion-réaction (transport des espèces) :
1 ˜2
∇ a
Pe
βb ˜ 2
∇ b
Pe
βc ˜ 2
∇ c
Pe
βd ˜ 2
∇ d
Pe
1
2
˜ a
= r̃1 + ũ · ∇
(2.109)
1
2
˜ b
= χb (r̃1 + r̃2 ) + ũ · ∇
1
(2.110)
2
˜ c
= χc (−r̃1 + r̃2 ) + ũ · ∇
1
2
˜ d
= χd (−r̃2 ) + ũ · ∇
(2.111)
(2.112)
Re est le nombre de Reynolds particulaire, défini en (2.12), et Pe est le nombre de Peclet,
défini par :
G db
Pe =
(2.113)
DCO2
Le nombre de Peclet compare l’importance relative de la vitesse du transport de matière par
convection à la vitesse du transport par diffusion. Remarquons qu’il peut être calculé par
l’équation :
Pe = Re.Sc
(2.114)
où Sc est le nombre de Schmidt, défini en (2.40).
r̃1 et r̃2 sont les vitesses de réaction adimensionnelles. Elles s’écrivent :
r̃1 = Ha1 2 (ab − αc)
(2.115)
2
r̃2 = Ha2 (bc − d)
(2.116)
α est le rapport entre la concentration du CO2 dans le bulk et celle à l’interface :
α=
[CO2 ]bulk
[CO2 ]int
(2.117)
Ha1 et Ha2 sont les nombres de Hatta des réactions (2.2) et (2.3). Ces nombres comparent
respectivement les temps caractéristiques des réactions (2.2) et (2.3) à un temps de contact
défini comme db /G. Ils s’écrivent :
Ha1 =
ó
Ha2 =
ö
õ
õ
ô
k11 [OH− ]bulk
k21
db
G
è
[OH− ]bulk HCO−
3
[CO2 ]int
(2.118)
é
bulk
db
G
(2.119)
Figure 2.19: Représentation du domaine de calcul.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
38
βb , βb et βb sont les rapports des coefficients de diffusion des ions par rapport au coefficient
de diffusion du CO2 :
DOH−
DCO2
DHCO−
βb =
3
βb =
DCO2
DCO2−
3
βb =
DCO2
(2.120)
(2.121)
(2.122)
χb , χc et χd sont les rapports de la concentration en CO2 à l’interface par rapport aux
concentrations des ions dans le bulk :
χb =
χc =
χd =
2.5.3
[CO2 ]int
[OH− ]bulk
[CO2 ]int
è
HCO−
3
è
CO2−
3
é
(2.124)
bulk
[CO2 ]int
é
(2.123)
(2.125)
bulk
Géométrie considérée et conditions aux limites
Le domaine est représenté à la figure 2.19. Un demi-cercle représentant la bulle, de diamètre unitaire, est placé au centre d’un domaine semi-circulaire. Le diamètre du domaine est
10 fois plus grand que celui de la bulle.
Entrée du domaine
Nous considérons que le liquide entre par la partie supérieure du domaine. Une vitesse
uniforme verticale dirigée vers les z négatifs est appliquée. Les concentrations adimensionnelles
correspondent à celles du bulk :
ũ = 0 , ṽ = −1
(2.126)
a = α, b = 1, c = 1, d = 1
(2.127)
Sortie du domaine
La sortie du liquide est située dans le bas du domaine. Nous considérons que la composante
normale des contraintes adimensionnelles s’annule à cet endroit. Nous écrivons donc :
3
3
1
˜ + ∇ũ
˜
où τ̃ = ∇ũ
2T 4
−p̃I +
1
τ̃ · n = 0
Re
4
(2.128)
est le tenseur des contraintes visqueuses adimensionnelles, I est le
tenseur unité et n est le vecteur unitaire normal à l’interface délimitant la sortie du domaine.
Nous supposons qu’il n’y a pas de flux diffusif normal à l’interface délimitant la sortie du
domaine. Par conséquent, nous y appliquons les conditions suivantes :
˜ = 0 , n · ∇b
˜ = 0 , n · ∇c
˜ = 0 , n · ∇d
˜ =0
n · ∇a
(2.129)
Figure 2.20: Représentation du maillage et agrandissement sur la zone au voisinage de l’interface.
Figure 2.21: Nombre de points de maillage définis sur les frontières du domaine de résolution.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
39
Surface de la bulle
A la surface de la bulle, seul le CO2 peut diffuser au travers de l’interface bulle-liquide. Sa
concentration est supposée uniforme et en équilibre avec le gaz. Le flux des autres espèces est
nul. Par conséquent, nous appliquons les conditions suivantes à la surface de la bulle :
α=1
,
˜
βc ∇c
+ cũ = 0
n· −
Pe
,
A
B
˜
βb ∇b
n· −
+ bũ = 0 ,
Pe
A
B
˜
βd ∇d
n· −
+ dũ = 0
Pe
A
B
(2.130)
où n est le vecteur unitaire normal à la surface de la bulle.
Du point de vue du transport de la quantité de mouvement, nous pouvons appliquer deux
types de conditions aux limites, selon qu’on considère une interface propre ou complètement
contaminée.
Dans le cas d’une bulle dont l’interface est complètement contaminée, celle-ci se comporte
comme une sphère rigide. Une condition d’adhérence du liquide à l’interface est donc appliquée :
ũ = 0
(2.131)
Dans le cas d’une bulle dont l’interface est propre, une condition de glissement est appliquée.
La composante normale de la vitesse et de la contrainte de cisaillement s’annulent à la surface
de la bulle :
4
3
1
τ̃ · n = 0
(2.132)
n · ũ = 0 , t · −p̃I +
Re
2.5.4
Résolution
Maillage
Un maillage quadrangle concentrique est utilisé. L’orthogonalité des mailles est un critère
de qualité du maillage [49, 50]. Lorsqu’un maillage quadrangle est utilisé, nous observons que
la résolution numérique est plus stable et que la convergence est plus rapide.
Dans la zone près de la bulle, un maillage plus dense que dans le restant du domaine est
utilisé, comme illustré à la figure 2.20.
A cette fin, nous définissons dans un premier temps deux sous-domaines distincts : un sousdomaine au voisinage de la bulle et un autre correspondant au restant du domaine. L’union
des deux sous-domaines forme le domaine complet.
L’épaisseur du sous-domaine en contact avec la bulle correspond à 0,05 fois le diamètre de
la bulle. Il peut être montré que l’épaisseur de la√couche limite de diffusion, normalisée par le
diamètre de la bulle, peut être approchée par 1/ Pe. La plus petite valeur de Pe utilisée pour
les simulations est de 5000. La couche limite de diffusion normalisée ne s’étend donc jamais
au-delà de cette zone où le maillage est plus dense.
Pour générer le maillage, les frontières de la géométrie sont préalablement maillées, comme
représenté à la figure 2.21.
392 points régulièrement espacés sont disposés sur la circonférence du demi-cercle représentant la bulle. La taille de maille dimensionnelle correspondante est, dès lors, d’environ 4
µm.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
40
En regard des points sur la bulle, 392 points régulièrement espacés sont également disposés sur le demi-cercle séparant les deux zones et sur le demi-cercle représentant la limite du
domaine.
Sur l’axe de symétrie, dans la zone en contact avec la bulle, 30 points sont définis audessus de la bulle, ainsi qu’en-dessous de la bulle. Une progression linéaire est appliquée pour
que l’espacement entre les points s’agrandisse en s’éloignant du centre de la bulle. Le facteur
de progression linéaire est de 3.
De même, sur l’axe de symétrie mais à l’extérieur de la zone en contact avec la bulle,
80 points sont définis au-dessus et en-dessous de la bulle, avec une progression linéaire en
s’éloignant du centre de la bulle. Le facteur de progression est de 9.
Ces paramètres conduisent à un maillage comportant 43120 éléments. L’épaisseur adimensionnelle du plus petit élément, qui est en contact avec la bulle, est de 8, 3 10−4 .
Ce choix des paramètres de maillage est un compromis. D’une part, il faut que le maillage
soit suffisamment dense pour réaliser une bonne estimation des différentes grandeurs, en particulier dans la zone au voisinage de la bulle. D’autre part, le nombre de mailles ne doit pas être
trop grand pour que le solveur puisse converger et que le temps de calcul reste raisonnable.
Procédure de simulation
Ces systèmes d’équations sont résolus numériquement à l’aide du logiciel COMSOL Multiphysics 3.4. Les modes Convection et Diffusion et Navier-Stokes Laminaire du module Génie
Chimique sont utilisés.
Nous supposons que le transfert de matière et les réactions chimiques qui l’accompagnent
n’ont pas d’influence sur l’écoulement du liquide. Les équations de transport de la quantité de
mouvement et du transport de matière sont résolues séparément.
L’écoulement est d’abord déterminé en absence de transfert de matière. Seules les équations
(2.107) et (2.108) sont résolues. Le solveur a besoin d’une estimation initiale des champs de
vitesse et de pression de l’écoulement pour pouvoir résoudre ces équations. Nous utilisons
comme estimation initiale la condition suivante :
ũ = 0 , ṽ = 0 , p̃ = 0
(2.133)
Une fois l’écoulement résolu, celui-ci est enregistré.
Ensuite, le problème de diffusion-convection est résolu en absence de réaction chimique.
Les équations (2.109), (2.110), (2.111) et (2.112) sont résolues avec r˜1 = 0 et r˜2 = 0.
Le solveur a besoin d’une estimation initiale des champs de concentration pour pouvoir
résoudre ces équations. Nous utilisons comme estimation initiale les champs de concentration
initiaux donnés par les équations en (2.127).
Les termes de transport par convection dans les équations (2.109), (2.110), (2.111) et
(2.112) sont estimés en fonction de l’écoulement déterminé (les champs de ũ et ṽ) à l’étape
précédente.
Une fois calculés, les champs de concentration, solution du problème de diffusion-convection, sont sauvegardés.
Enfin, le problème de diffusion-convection-réaction est résolu, en utilisant l’écoulement
déterminé à la première étape et les champs de concentrations déterminés à la deuxième étape
comme champs de concentration initiaux.
Figure 2.22: Représentation de l’angle θ entre un point sur la bulle et le sommet de la bulle.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
41
Les équations (2.109), (2.110), (2.111) et (2.112) sont résolues avec r˜1 et r˜2 calculés
respectivement par les équations (2.115) et (2.116).
2.5.5
Résultats et discussions
Validation de l’approche en absence de réaction
Afin de valider l’approche 2D axisymétrique et les simulations avec COMSOL, les résultats
de simulation sont tout d’abord comparés avec des corrélations issues de la littérature.
Les simulations sont réalisées pour les deux cas d’interface, pour différentes valeurs du
nombre de Reynolds, en absence de réaction chimique.
Les grandeurs comparées sont le coefficient de traînée CD et le nombre de Sherwood Sh
pour le cas de la bulle propre et de la bulle contaminée.
Comme nous le mentionnons précédemment, la validité de l’approche axisymétrique est
limitée par une certaine valeur du nombre de Reynolds particulaire, différente selon les cas. Par
conséquent, la validation, pour le cas de la bulle propre, est réalisée avec 20 ≤ Re ≤ 400 et,
pour le cas de la bulle dont l’interface est complètement contaminée, avec 10 ≤ Re ≤ 200.
Nous notons θ l’angle formé entre le sommet de la bulle, également appelé point de stagnation, et un point sur le demi-cercle constituant la bulle, comme représenté à la figure 2.22.
La coordonnée θ peut être reliée aux coordonnées exprimées en fonction des axes r et z
par l’équation :
r
(2.134)
tan (θ) =
z
Le coefficient de traînée CD est un nombre sans dimension qui correspond à la force de
traînée sous forme adimensionnelle. C’est la force résultante de la contrainte visqueuse et
de l’inhomogénéité de la composante non-hydrostatique du champ de pression, exercée par
l’écoulement sur la bulle dans la direction des z négatifs, normalisée par la moitié de l’aire
projetée de la bulle et par la pression de référence.
Soit fD la force de traînée par unité de surface sous forme dimensionnelle, exercée par
l’écoulement sur un élément de surface de la bulle repéré par la coordonnée θ. fD se calcule
par :
fD = −p cos θ + τrz sin θ + τzz cos θ
(2.135)
où p est la composante non-hydrostatique de la pression et τrz et τzz sont les composantes
selon z du tenseur des contraintes visqueuses.
Notons FD la force de traînée sous forme dimensionnelle. C’est l’intégrale sur la surface de
la bulle de fD :
Ú
Ú
π
2π
FD =
0
0
fD rb2 sin θdθ dϕ
(2.136)
FD
πd2b ρl G2
(2.137)
où rb est le rayon de la bulle.
Le coefficient de traînée se calcule par :
CD = 8
Sous forme adimensionnelle, il se calcule donc par :
CD = 4
Ú π
0
(−p̃ cos θ + τ̃rz sin θ + τ̃zz cos θ) sin θdθ
(2.138)
Figure 2.23: Vorticité adimensionnelle de l’écoulement sur l’interface de la bulle en fonction de l’angle
θ et mise en évidence de l’angle de décollement pour une bulle complètement contaminée avec Re=100.
Figure 2.24: Coefficient de traînée en fonction du nombre de Reynolds pour la bulle avec interface
propre et la bulle avec interface complètement contaminée.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
42
où p̃ est la composante non-hydrostatique de la pression adimensionnelle et τ̃rz et τ̃zz sont les
composantes selon z̃ du tenseur des contraintes visqueuses adimensionnelles.
Le nombre de Sherwood Sh est un nombre sans dimension qui exprime la vitesse du transfert
de matière sous forme adimensionnelle. Il peut se calculer en normalisant la densité de flux de
matière totale traversant l’interface bulle-liquide, notée NCO2 ,bulle , par une densité de flux de
matière par diffusion de référence.
En grandeur dimensionnelle, la densité de flux de matière totale traversant l’interface bulleliquide peut s’exprimer par :
NCO2 ,bulle = −
1
4πrb2
Ú 2π Ú π
0
0
DCO2 (n · ∇ ([CO2 ])) rb2 sin θdθ dϕ
(2.139)
où n est le vecteur unitaire normal à l’interface bulle-liquide.
Le nombre de Sherwood peut être calculé en normalisant l’équation (2.139) de la manière
suivante :
NCO2 ,bulle
Sh =
(2.140)
([CO2 ]int −[CO2 ]bulk )
DCO2
db
Dès lors, le nombre de Sherwood se calcule sous forme adimensionnelle par :
Sh = −
1
2 (1 − α)
Ú π
0
˜ sin θdθ
∇a
(2.141)
L’écoulement autour d’une sphère solide présente un décollement lorsque Re > 20 et une
zone de recirculation stationnaire apparaît à l’arrière de la bulle. Cette zone reste axisymétrique
jusque Re = 210.
La position sur la bulle à laquelle le décollement apparaît est mesurée par l’angle de dé˜
collement θs . C’est le lieu où la vorticité de l’écoulement ∇xũ
change de signe [49], comme
représenté à la figure 2.23.
L’angle de décollement déterminé par simulation dans le cas de la bulle avec une interface
complètement contaminée est également comparé à la littérature.
Coefficient de traînée
La comparaison du CD calculé par corrélation et le CD estimé par simulation en fonction
du nombre de Reynolds est présentée à la figure 2.24.
Dans le cas de la bulle avec une interface propre, les simulations sont comparées avec les
corrélations de :
- Hamielec et al. [33] :
CD = 13, 725 Re0,74
−
4 < Re < 100
(2.142)
- Hass et al. [33] :
CD = 14, 9 Re−0,78
−
Re > 2
(2.143)
Figure 2.25: Angle de décollement en fonction du nombre de Reynolds pour la bulle avec interface
complètement contaminée.
Figure 2.26: Nombre de Sherwood en fonction du nombre de Reynolds avec Sc=500 pour la bulle avec
interface propre et la bulle avec interface complètement contaminée.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
43
Pour une bulle dont l’interface est complètement contaminé et qui se comporte comme
une sphère rigide, les résultats numériques sont comparés avec les corrélations de :
- Lapple et al. [33, 34, 49] :
CD =
2
24 1
1 + 0, 125 Re0,72
Re
−
Re < 1000
(2.144)
- Clift et al. (1978) [33, 34] :
CD =
2
24 1
1 + 0, 1315 Re0,82−0,05 log10 (Re)
Re
−
0, 01 < Re ≤ 20
(2.145)
2
24 1
1 + 0, 1935 Re0,06305
− 20 < Re ≤ 260
(2.146)
Re
Nous observons à la figure 2.24 une excellente comparaison entre les coefficients de traînée
simulés et les corrélations de la littérature.
CD =
Angle de décollement
Pour une bulle dont l’interface est complètement contaminée, l’angle de décollement simulé
est comparé avec la corrélation proposée par Clift et al. (1978) [33, 34, 49] en fonction du
nombre de Reynolds :
Re
θs = 180 − 42, 5 log
20
3
3
440,483
−
20 < Re < 400
(2.147)
θs étant exprimé en degré (˚).
Les résultats sont présentés à la figure 2.25. Nous observons que les angles de décollement
simulés correspondent à ceux calculés par la corrélation (2.147).
Nombre de Sherwood
Le nombre de Sherwood calculé par corrélation est comparé au nombre de Sherwood estimé
par simulation en fonction du nombre de Reynolds pour un nombre de Schmidt Sc = 500. Cette
comparaison est présentée à la figure 2.26.
Pour la bulle avec une interface propre, les corrélations utilisées sont celles proposées par :
- Lochiel et Calderbank (1964) [34, 49] :
2
2, 96
Sh = √ 1 − 1/2
π
Re
3
41/2
(Re Sc)1/2
−
Re º 1 et 0 < Sc < ∞
(2.148)
- Boussinesq [33, 34, 49] :
2
Sh = 1 + √ (Re Sc)1/2
π
−
Re º 1 et 0 < Sc < ∞
(2.149)
Pour la bulle avec une interface complètement contaminée, nous utilisons les deux corrélations suivantes proposées par Clift et al. (1978) [33] :
Sh = 1 + 0, 724 Re0,48 Sc1/3
−
100 < Re ≤ 2000 et Sc > 200
(2.150)
Figure 2.27: Champs de concentration adimensionnelle de CO2 pour la bulle avec interface propre (à
gauche) et la bulle avec interface complètement contaminée (à droite) pour différentes valeurs de Ha1 .
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
A
Sh = 1 + 1 +
Re0,41
(Re Sc)1/3
B
Sc1/3
−
1 ≤ Re ≤ 400 et 0, 25 ≤ Sc ≤ 100
44
(2.151)
Pour l’ensemble des cas, nous pouvons observer à la figure 2.26 une bonne comparaison
entre les nombres de Sherwood simulés et les corrélations.
Remarquons que pour la bulle avec interface propre, il y a un écart non négligeable entre les
nombres de Sherwood calculés par les corrélations (2.148) et (2.149) en fonction du nombre
de Reynolds. Les courbes correspondant à ces deux corrélations (figure 2.26) ont la même
tendance mais nous observons que la corrélation (2.149) estime systématiquement des valeurs
de Sh supérieures à celles estimées par la corrélation (2.148).
Il est intéressant de constater, à la figure 2.26, que le nombre de Sherwood calculé par
simulation en fonction du nombre de Reynolds est toujours intermédiaire entre les nombres de
Sherwood calculés par les corrélations (2.148) et (2.149).
En conclusion, les résultats de cette étape de validation démontrent la capacité des simulations réalisées avec le logiciel COMSOL Multiphysics à reproduire correctement les paramètres
liés à l’hydrodynamique et au transfert de matière en absence de réaction.
Cela nous permet de supposer que les simulations réalisées avec le logiciel COMSOL Multiphysics estiment également avec une bonne précision les paramètres liés au transfert de matière
lorsque celui-ci est couplé à des réactions chimiques.
Résultats avec réactions chimiques
Les effets des réactions chimiques sur la vitesse du transfert peuvent être étudiés en faisant
varier les valeurs de Ha1 et de Ha2 .
Nous considérons une bulle ayant un diamètre de 1 mm avec une vitesse de glissement de
0,2 m/s en ascension dans le liquide d’une colonne BIR.
Les valeurs numériques des paramètres adimensionnels sont : Re = 200 ; Sc = 500 (ce qui
conduit à Pe = 100000) ; α = 0, 003 ; βb = 4, 1 ; βc = 0, 9 ; βd = 0, 7 ; χb = 64 ; χc = 0, 03 ;
χb = 0, 025 ; Ha1 = 0, 19 ; Ha2 = 902.
Ces valeurs correspondent approximativement à celles d’une bulle en ascension dans la
solution aqueuse de la colonne BIR de Dombasle. Les paramètres adimensionnels sont estimés
avec les paramètres physico-chimiques calculés à l’aide des corrélations présentées à la section
2.1.4.
Etant donné que la valeur de Ha2 est bien plus grande que celle de Ha1 , la vitesse du
transfert de matière est peu sensible à sa valeur. Cela est confirmé par une analyse de sensibilité
et exprime le fait que la réaction (2.3) est toujours à l’équilibre thermodynamique.
Les champs de concentration de a (concentration adimensionnelle de CO2 ), pour la bulle
avec interface propre et la bulle avec interface complètement contaminée, sont présentés à la
figure 2.27 pour différentes valeurs de Ha1 , en gardant Ha2 constant.
Comme attendu, nous observons que la concentration de a diminue lorsque Ha1 augmente.
Pour Ha1 = 10, a est totalement consommé au-delà de la couche limite de diffusion.
Afin de quantifier l’effet des réactions chimiques sur la vitesse du transfert, le nombre de
Sherwood Sh et le facteur d’accélération E sont calculés en fonction de Ha1 .
Le facteur d’accélération est défini comme le rapport de la vitesse du transfert lorsque
celui-ci est couplé à des réactions chimiques sur la vitesse du transfert sans réaction [24]. Il est
(a) Nombre de Sherwood en fonction de Ha1
(b) Facteur d’accélération en fonction de Ha1
Figure 2.28: Etude de l’effet de Ha1 sur la vitesse du transfert.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
45
calculé en divisant le nombre de Sherwood calculé avec réactions par le nombre de Sherwood
sans réaction.
A la figure 2.28, le nombre de Sherwood (a) et le facteur d’accélération (b) sont portés
en fonction de Ha1 , pour 0, 1 ≤ Ha1 ≤ 10, pour les deux types d’interface considérés. Nous
observons que les réactions chimiques accélèrent le transfert de matière et plus particulièrement
lorsque Ha1 > 1. L’effet des réactions est plus marqué pour la bulle avec interface complètement
contaminée mais le nombre de Sherwood reste plus grand pour la bulle avec interface propre.
Comparaisons avec l’approche 1D
Les résultats de simulation du modèle 2D axisymétrique sont comparés avec les résultats de
simulation obtenus par les approches 1D classiques en terme de vitesse de transfert bulle-liquide
de CO2 .
Afin de réaliser cette comparaison, les équations des modèles à une dimension sont également adimensionnalisées. La même procédure d’adimensionnalisation est utilisée pour que les
paramètres de transfert de matière adimensionnels soient comparables à ceux du modèle 2D.
Les deux types d’interface bulle-liquide sont comparés avec les approches 1D qui leur
correspondent.
D’une part, dans le cas de la bulle avec interface propre, les filets de fluide peuvent "glisser"
le long de l’interface. Cette propriété est à la base du modèle de Higbie. C’est pourquoi nous
comparons les résultats de la bulle propre avec ceux de l’approche de Higbie.
D’autre part, lorsque l’interface de la bulle est complètement contaminée, le liquide "adhère"
à l’interface, où il forme un mince film dans lequel la vitesse du liquide est très faible. Ce cas
est proche de la vision du modèle du film, c’est pourquoi nous comparons les résultats de la
bulle dont l’interface est complètement contaminée avec ceux du modèle du film.
- Comparaison modèle de Higbie - bulle avec interface propre :
db /G et db sont respectivement choisis comme échelles de temps et de longueur caractéristiques. Les variables adimensionnelles sont notées :
t̃ =
x̃ =
t
db /G
x
db
(2.152)
(2.153)
Les concentrations sont normalisées par des concentrations de référence de la même manière
que pour le modèle 2D (équations (2.103), (2.104), (2.105) et (2.106)).
Ce choix des grandeurs de référence pour l’adimensionnalisation est opéré de manière à faire
apparaître les mêmes nombres adimensionnels dans les équations 1D modélisant le couplage
diffusion-réaction.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
46
Les équations (2.46), (2.47), (2.48) et (2.49) du modèle 1D de Higbie deviennent :
∂a
∂ t̃
∂b
∂ t̃
∂c
∂ t̃
∂d
∂ t̃
=
=
=
=
1 ∂2a
− r̃1
Pe ∂ x̃2
βb ∂ 2 b
+ χb (−r̃1 − r̃2 )
Pe ∂ x̃2
βc ∂ 2 c
+ χc (r̃1 − r̃2 )
Pe ∂ x̃2
βd ∂ 2 d
+ χd (r̃2 )
Pe ∂ x̃2
(2.154)
(2.155)
(2.156)
(2.157)
Pe est le nombre de Peclet, défini par l’équation (2.113). r̃1 et r̃2 sont les vitesses de
réactions adimensionnelles calculées respectivement par les équations (2.115) et (2.115). βb ,
βb et βb sont les rapports des coefficients de diffusion des ions par rapport au coefficient de
diffusion du CO2 calculés respectivement par les équations (2.120), (2.121) et (2.122). χb , χc
et χd sont les rapports de la concentration en CO2 à l’interface par rapport aux concentrations
des ions dans le bulk calculés respectivement par les équations (2.123), (2.124) et (2.125).
Les conditions initiales (2.50), (2.51), (2.52) et (2.53) deviennent :
a|x̃, t̃=0 = α
(2.158)
b|x̃, t̃=0 = 1
(2.159)
c|x̃, t̃=0 = 1
(2.160)
d|x̃, t̃=0 = 1
(2.161)
où α est le rapport entre la concentration du CO2 dans le bulk et celle à l’interface, calculé
par l’équation (2.117). A l’interface (en x̃ = 0), les conditions aux limites données par les
équations (2.54), (2.55), (2.56) et (2.57) deviennent :
a|x̃=0, t̃
∂b -∂ x̃ -x̃=0, t̃
∂c -∂ x̃ -x̃=0, t̃
∂d -∂ x̃ -x̃=0, t̃
= 1
(2.162)
= 0
(2.163)
= 0
(2.164)
= 0
(2.165)
Loin de l’interface (pour x → ∞), les conditions (2.58), (2.59), (2.60) et (2.61) deviennent :
∂a -x̃→∞ ∂ x̃ -x̃, t̃
∂b -lim
x̃→∞ ∂ x̃ -x̃, t̃
∂c -lim
x̃→∞ ∂ x̃ -x̃, t̃
∂d -lim
x̃→∞ ∂ x̃ -x̃, t̃
lim
-
= 0
(2.166)
= 0
(2.167)
= 0
(2.168)
= 0
(2.169)
La géométrie et le maillage 1D doivent également être en similitude avec ceux du modèle
2D pour que les paramètres de transfert soient comparables.
(a) Nombre de Sherwood en fonction de Ha1
(b) Facteur d’accélération en fonction de Ha1
Figure 2.29: Comparaisons du modèle 2D dans le cas de la bulle avec interface propre avec le modèle
1D de Higbie et avec l’expression simplifiée.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
47
D’une part, la taille de la géométrie 1D est normalisée par le diamètre de la bulle (1mm).
Ainsi, si l’élément de liquide a une dimension de 50 µm, la taille de l’espace adimensionnel est
de 50 10−3 .
D’autre part, la taille du maillage est également adaptée. La taille de maille optimale, déterminée à la section 2.4.3, est normalisée par le diamètre de la bulle. La taille des mailles est
donc de 1 10−3 .
Nous définissons un nombre Sherwood pour le modèle de Higbie, que nous notons ShHigbie ,
de la même manière que pour le modèle 2D. Il se calcule en normalisant la densité de flux
moyenne de CO2 (NCO2 , Higbie ), définie par l’équation (2.63), par une densité de flux de référence. Afin que le nombre de Sherwood calculé avec le modèle de Higbie adimensionnel soit
comparable au nombre de Sherwood calculé avec le modèle d’une bulle 2D avec interface
propre, nous utilisons la même densité de flux de référence qu’à l’équation (2.140). Le nombre
de Sherwood se calcule donc par :
ShHigbie =
NCO2 , Higbie
DCO2
(2.170)
[CO2 ]int −[CO2 ]bulk
db
Si nous choisissons, en grandeur dimensionnelle, un temps de contact tC = db /G pour
évaluer NCO2 , Higbie par l’équation (2.63), alors le temps de contact adimensionnel vaut t̃C = 1.
Le nombre de Sherwood se calcule donc, en grandeur adimensionnelle, par l’intégration de
t̃ = 0 à t̃ = 1 du flux instantané de a en x̃ = 0 :
1
ShHigbie = −
1−α
Ú 1
∂a -∂ x̃ 0
dt̃
(2.171)
x̃=0, t̃
Nous comparons également le nombre de Sherwood calculé à partir de l’expression simplifiée
(2.96) développée à la section 2.4.5, que nous notons Sh∗Higbie . Ce nombre de Sherwood se
calcule par :
∗
NCO2 , Higbie
∗
ShHigbie =
(2.172)
[CO2 ]int −[CO2 ]bulk
DCO2
db
∗
où NCO2 , Higbie est la densité de flux moyenne de CO2 calculée par l’expression simplifiée (2.96).
En normalisant les concentrations CO2 par [CO2 ]int et en remplaçant tC par db /G dans
∗
l’expression de NCO2 , Higbie (équation (2.96)), nous obtenons l’expression suivante :
Sh∗Higbie
= (1 − α)
√
Pe
33
2
1
1
1
Ha1 +
erf (Ha1 ) + √ exp −Ha1 2
2 Ha1
π
4
4
(2.173)
Les nombres de Sherwood calculés par les équations (2.141) (pour la bulle avec interface
propre), (2.171) (à partir du modèle de Higbie) et (2.173) (à partir de l’expression simplifiée)
peuvent être comparés car les mêmes grandeurs de référence sont utilisées pour l’adimensionnalisation des équations. Les comparaisons du nombre de Sherwood et du facteur d’accélération
sont présentées à la figure 2.29 en fonction de Ha1 , qui est le nombre de Hatta de la réaction
(2.2). Nous observons une excellente correspondance entre les courbes. L’approche de Higbie
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
48
fournit une excellente estimation pour Ha1 ≤ 1. Pour Ha1 > 1, l’approche de Higbie tend à
légèrement sous-estimer l’effet des réactions.
Nous constatons également que l’expression simplifiée développée dans la section 2.4.5
fournit donc une excellente estimation également jusque Ha1 = 3, ce qui valide cette approche
en-deçà de cette valeur. Au-delà, elle surestime la vitesse du transfert et la divergence s’amplifie
au fur et à mesure que Ha1 augmente.
En effet, la validité de cette expression repose sur l’hypothèse que la concentration en OH−
est constante et égale à [OH− ]bulk dans la couche limite de diffusion. Or, lorsque la vitesse de
la réaction (2.2) augmente (c’est-à-dire Ha1 augmente), le OH− s’épuise et sa concentration
diminue dans la couche limite de diffusion. Par conséquent, la réaction (2.2) est ralentie.
Cette expression, par nature, ne tient pas compte de ce phénomène de "saturation", ce qui
explique les écarts observés.
Nous observons que l’expression simplifiée mène à une excellente approximation du nombre
de Sherwood jusqu’à Ha1 = 3. Cette valeur est supérieure aux valeurs de Ha1 rencontrées
pour une composition correspondant au liquide des colonnes BIR, ce qui valide l’utilisation de
l’expression simplifiée pour estimer la vitesse du transfert de CO2 .
Comparaison modèle de film - bulle avec interface complètement contaminée :
db est choisi comme échelle de longueur caractéristique. L’échelle de longueur adimensionnelle est définie par l’équation (2.153).
A nouveau, les concentrations sont normalisées par des concentrations de référence de la
même manière que pour le modèle 2D (équations (2.103), (2.104), (2.105) et (2.106)).
Les équations décrivant la diffusion à l’état stationnaire (2.64), (2.65), (2.66) et (2.67) du
modèle de film deviennent :
1 ∂2a
Pe ∂ x̃2
βb ∂ 2 b
Pe ∂ x̃2
βc ∂ 2 c
Pe ∂ x̃2
βd ∂ 2 d
Pe ∂ x̃2
= r̃1
(2.174)
= χb (r̃1 + r̃2 )
(2.175)
= χc (−r̃1 + r̃2 )
(2.176)
= χd (−r̃2 )
(2.177)
De la même manière qu’au point précédent, Pe est le nombre de Peclet, défini par l’équation (2.113). r̃1 et r̃2 sont les vitesses de réactions adimensionnelles calculées respectivement
par les équations (2.115) et (2.115). βb , βb et βb sont les rapports des coefficients de diffusion
des ions par rapport au coefficient de diffusion du CO2 , calculés respectivement par les équations (2.120), (2.121) et (2.122). χb , χc et χd sont les rapports de la concentration en CO2
à l’interface par rapport aux concentrations des ions dans le bulk calculés respectivement par
les équations (2.123), (2.124) et (2.125).
Les conditions à l’interface (en x̃ = 0) sont identiques à celles du cas transitoire. Elles sont
donc données par les équations (2.162), (2.163), (2.164) et (2.165).
A la sortie du film (en x̃ = xL /db ), les conditions à la limite sont données par l’adimen-
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
49
sionnalisation des conditions (2.68), (2.69), (2.70) et (2.71). Elles deviennent :
a|x̃=x̃L , t̃ = α
(2.178)
b|x̃=x̃L , t̃ = 1
(2.179)
c|x̃=x̃L , t̃ = 1
(2.180)
d|x̃=x̃L , t̃ = 1
(2.181)
α est le rapport entre la concentration du CO2 dans le bulk et celle à l’interface, calculé par
l’équation (2.117). x̃L est l’épaisseur de film adimensionnelle définie par x̃L = xdLb .
L’épaisseur de film adimensionnelle x̃L est le paramètre de modélisation de cette approche.
Cette épaisseur correspond à la taille de la géométrie 1D qui doit, dès lors, être ajustée.
Elle est ajustée en comparant le nombre de Sherwood obtenu via le modèle 1D du film
avec celui obtenu via le modèle 2D de la bulle avec interface complètement contaminée.
Nous observons que cette taille adimensionnelle de film x̃L correspond approximativement
à:
ñ
DCO2 dGb
4
x̃L = 4
=√
(2.182)
db
Pe
Cette observation rappelle celle évoquée à la section 2.4.3 concernant la définition de la
taille de la géométrie pour résoudre
les équations du modèle de Higbie : la taille du domaine
ð
temps de
doit être égale ou supérieure à 4 DCO2 tC . Si nous choisissons tC = db /G comme √
contact, alors la taille adimensionnelle du domaine doit être supérieure ou égale à 4/ Pe dans
le modèle de Higbie.
Ce constat suggère que, dans le modèle du film dimensionnel, pour une bulle ayant un
diamètre db et une vitesse de glissement G, l’épaisseur de film optimale est donnée par :
ó
xL = 4 DCO2
db
G
(2.183)
Cette épaisseur correspond à la distance à l’interface à partir de laquelle l’élément de liquide
peut être considéré comme semi-infini dans le modèle de Higbie dimensionnel.
Comme au point précédent, nous définissons un nombre de Sherwood pour le modèle de
film, que nous notons Shfilm , de la même manière que pour le modèle 2D. Il se calcule en
normalisant la densité de flux CO2 à l’état stationnaire NCO2 ,film par la même densité de flux
de référence qu’à l’équation (2.140) :
Shfilm =
NCO2 ,film
[CO2 ]int −[CO2 ]bulk
DCO2
db
(2.184)
Il se calcule donc à partir du flux adimensionnel de a à l’état stationnaire en x̃ = 0 :
Shf ilm = −
1 ∂a
1 − α ∂ x̃
(2.185)
(a) Nombre de Sherwood en fonction de Ha1
(b) Facteur d’accélération en fonction de Ha1
Figure 2.30: Comparaisons du modèle 2D dans le cas de la bulle avec interface complètement contaminée avec le modèle 1D de film.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
50
Les nombres de Sherwood calculés par les équations (2.141) (pour la bulle avec interface
complètement contaminée) et (2.185) (à partir du modèle de film) peuvent être comparés car
les mêmes grandeurs de référence sont utilisées pour l’adimensionnalisation des équations.
Les comparaisons du nombre de Sherwood et du facteur d’accélération sont présentées à la
figure 2.30 en fonction de Ha1 . Nous observons une excellente comparaison. Cela signifie que,
dès que l’épaisseur de ce film est estimée avec une bonne précision (l’écoulement est "bien
caractérisé"), l’approche du film 1D fournit une excellente estimation de la vitesse du transfert
en fonction des vitesses de réactions chimiques.
2.5.6
Extensions
Nous avons étendu la modélisation bidimensionnelle axysimétrique de la bulle à deux autres
cas de bulles : une bulle de forme ellipsoïdale et une bulle dont l’interface est partiellement
contaminée
Bulle ellipsoïdale
Nous considérons non plus une bulle sphérique mais une bulle dont la forme est celle
d’un ellipsoïde de révolution. Le dessin de la bulle dans l’espace de résolution est donc une
demi-ellipse.
En dehors de la géométrie, tous les autres paramètres de résolution sont les mêmes que
pour la bulle sphérique. Nous nous limitons au cas où l’interface de la bulle est propre : le
liquide peut glisser le long de l’interface.
Appelons L1 et L2 respectivement le grand axe et le petit axe de l’ellipse. Le rapport petit
axe sur grand axe peut être calculé par la corrélation de Wellek [33] :
L2
1
=
L1 1 + 0, 163 Eo0,757
(2.186)
où Eo est le nombre d’Eötvös de la bulle.
Ce nombre se calcule par :
g ρl d2b
(2.187)
σ
où σ est la tension de surface et db représente le diamètre équivalent c’est-à-dire le diamètre de
la sphère ayant le même volume que l’ellipsoïde. Dans les colonnes BIR, nous avons σ = 0, 08
N/m.
Eo =
Pour une bulle dont le diamètre équivalent est de 7 mm et pour la composition de la
colonne BIR de Dombasle, le rapport petit axe sur grand axe vaut environ 0,58.
Nous présentons à la figure 2.31 les champs de concentration de CO2 normalisée par la
concentration de CO2 à l’interface.
Le coefficient de traînée estimé vaut 0,28, ce qui est supérieur à celui dans le cas d’une
bulle sphérique avec interface propre (CD = 0.2). Le nombre de Sherwood en absence de
réaction vaut 189.5, ce qui est bien inférieur à celui de la bulle sphérique avec interface propre
(Sh = 327.5). Le coefficient de traînée est d’autant plus grand et le nombre de Sherwood est
d’autant plus petit que le rapport L2 /L1 diminue (autrement dit, que la bulle s’aplatit). Enfin,
l’effet de l’accélération chimique est légèrement plus grand que dans le cas de la bulle avec
interface parfaitement propre.
Figure 2.31: Champ de concentration adimensionnelle de CO2 autour d’une bulle ellispoïdale dont
l’interface est propre - flèches : vecteurs vitesses.
Figure 2.32: Champ de concentration adimensionnelle de CO2 autour d’une bulle sphérique dont
l’interface est partiellement contaminée pour 150˚<θ<180˚ - flèches : vecteurs vitesses.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
51
Bulle partiellement contaminée
Nous considérons le cas d’une bulle sphérique dont l’interface est partiellement contaminée
par des surfactants. Dans ce cas, les conditions à l’interface bulle-liquide, du point de vue du
transport de la quantité de mouvement, sont mixtes.
A l’avant de la bulle, l’interface peut "glisser" avec le liquide en écoulement. Ce mouvement
tend à entraîner les surfactants à l’arrière de la bulle. L’arrière de la bulle est "rigidifié" jusqu’à
une certaine position sur la bulle. Le long de cette zone, le liquide "adhère" à l’interface. Nous
appelons cette zone le culot de la bulle
Nous avons donc deux types de conditions aux limites à appliquer au niveau de l’interface :
une condition de glissement à l’avant de la bulle et une condition d’adhérence au niveau du
culot de la bulle. Le point de séparation entre les deux zones est repéré par l’angle θ formé
entre le sommet de la bulle et le point de séparation.
Nous présentons à la figure 2.32 les champs de concentration de CO2 adimensionnelle.
L’angle choisi est tel que l’angle formé par la zone contaminée est de 30˚ (de θ=150˚ à
θ=180˚).
Le coefficient de traînée estimé vaut 0.21, ce qui est légèrement supérieur à celui de la
bulle avec interface propre. Le nombre de Sherwood vaut 325, ce qui est légèrement inférieur
à celui de la bulle avec interface propre. Les valeurs de CD et de Sh varient avec l’angle de
contamination entre les valeurs pour la bulle avec interface propre et celles pour la bulle avec
interface complètement contaminée. Enfin, l’effet de l’accélération chimique est légèrement
plus important que dans le cas de la bulle avec interface parfaitement propre.
2.6
Conclusions
Dans ce chapitre, nous nous intéressons à la modélisation de la vitesse du transfert gazliquide du CO2 de petites bulles en ascension dans une solution aqueuse de carbonate et de
bicarbonate de soude. Cela nécessite une modélisation du couplage entre les phénomènes de
transport de matière (diffusion et convection) et les réactions chimiques en phase liquide.
Dans un premier temps, nous réalisons une modélisation de ce couplage en suivant une
approche unidimensionnelle (1D), comme cela est classiquement rencontré dans la littérature.
La vitesse du transfert est supposée ne dépendre que de la diffusion dans la direction s’éloignant de l’interface, dans une couche de liquide dont les caractéristiques sont déterminées par
l’écoulement.
Cette approche passe par une idéalisation de l’écoulement autour des bulles. Nous nous
limitons aux cas où cet écoulement est laminaire. Deux cas sont envisagés :
– un élément de liquide non cisaillé semi-infini du point de vue du transfert de matière ;
– une couche de liquide d’épaisseur finie xL .
Cela correspond donc à deux types de représentations de cet écoulement : une représentation
par l’approche de Higbie et une représentation par l’approche du film.
L’estimation de la vitesse du transfert bulle-liquide de CO2 passe par la détermination
des profils de concentration des différentes espèces dans la couche limite de diffusion, via la
résolution numérique des équations de transport-réaction.
Les simulations réalisées permettent d’étudier l’influence des réactions sur les profils de
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
52
concentration et sur la vitesse du transfert. Les paramètres envers lesquels la sensibilité du
modèle développé en utilisant l’approche de Higbie est la plus grande sont identifiés.
L’influence du transfert sur l’accroissement de la concentration en HCO−
3 dans la couche
−
limite de diffusion et l’influence de la consommation éventuelle de HCO3 par la précipitation
sont également étudiées. Nous observons que ces deux phénomènes n’ont pratiquement aucune
influence l’un sur l’autre et que nous pouvons les traiter de façon tout à fait découplée.
De plus, une expression simplifiée est développée afin d’estimer la vitesse du transfert de
CO2 dans un modèle global de colonne BIR, sans devoir recourir à des outils de calcul numérique lourds. Cette expression est obtenue en faisant certaines hypothèses simplificatrices sur
la cinétique de réactions. Le domaine de validité de cette expression est également déterminé.
Dans un second temps, une approche de modélisation complète du couplage entre l’écoulement, la convection, la diffusion et les réactions chimiques est réalisée. Considérant la symétrie
des bulles, nous nous limitons au cas où l’écoulement est laminaire et où il peut être décrit,
en coordonnées cylindriques, uniquement par sa composante axiale et sa composante radiale.
Cette approche est donc une approche bidimensionnelle (2D) axisymétrique.
Les résultats de simulation de cette approche sont comparés à des corrélations de la littérature. Les grandeurs comparées sont le coefficient de traînée, le nombre de Sherwood et,
pour les bulles dont l’interface est complètement contaminée, l’angle de décollement. Nous
observons que les simulations reproduisent très bien les résultats des différentes corrélations.
Ce constat nous donne confiance dans la résolution numérique de COMSOL Multiphysics pour
estimer les paramètres de transfert de matière.
Nous étudions ensuite l’effet des réactions chimiques sur les champs de concentration
normalisée de CO2 dans le liquide en écoulement autour de la bulle. Nous observons notamment
l’épuisement très rapide du CO2 en s’éloignant de l’interface lorsque la cinétique de réaction
devient importante.
Les résultats de simulation de l’approche 2D axisymétrique sont également comparés aux
résultats des approches 1D du film et de Higbie. Les comparaisons montrent que, malgré la
forte idéalisation de l’écoulement dans les approches 1D, celles-ci permettent d’estimer correctement la vitesse du transfert gaz-liquide couplée à des réactions chimiques. L’expression
simplifiée, qui est utilisée dans le modèle global de colonne BIR, est également comparée. Nous
observons que cette dernière estime correctement la vitesse du transfert jusqu’à des valeurs de
Ha1 = 3, ce qui est supérieur aux valeurs de Ha1 dans les colonnes BIR.
Enfin, deux extensions de la modélisation 2D axisymétrique sont proposées.
D’une part, nous étudions la vitesse de transfert de CO2 depuis une bulle de forme ellipsoïdale dont l’interface est propre. D’autre part, nous étudions le cas d’une bulle sphérique dont
l’interface est partiellement contaminée et dont les propriétés sont, dès lors, mixtes. A l’avant
de la bulle, l’interface peut glisser avec le liquide, tandis que l’arrière est immobile et le liquide
adhère.
Nous observons une influence de la forme de la bulle et de l’état de contamination de
l’interface sur le coefficient de traînée et sur la vitesse du transfert bulle-liquide de CO2 . Nous
proposons donc d’étudier plus en profondeur et de quantifier ces influences.
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
53
Notations
[]
a
A
b
c
C
CC, T
CD
CNa+ , T
d
db
d˜b
D
Eo
fD
F
FD
G
h
I
Ha1
Ha2
k11
k12
k21
k22
K1
K2
Kw
üD
üV
L1
L2
n
NCO2
NCO2
p
p̃
Pe
pCO2
concentration
concentration adimensionnelle de CO2
une espèce quelconque
concentration adimensionnelle de OH−
concentration adimensionnelle de HCO−
3
concentration d’une espèce quelconque
concentration totale en espèces carbonées
coefficient de traînée
concentration totale en Na+
concentration adimensionnelle de CO2−
3
diamètre d’une bulle
diamètre adimensionnel d’une bulle
coefficient de diffusion en phase liquide
nombre d’Eötvös
force de traînée par unité de surface
constante de Faraday
force de traînée
vitesse de glissement d’une bulle
coefficient de solubilité du CO2
tenseur unité
nombre de Hatta de la réaction (2.2)
nombre de Hatta de la réaction (2.3)
constante cinétique de la réaction (2.2) directe
constante cinétique de la réaction (2.2) inverse
constante cinétique de la réaction (2.3) directe
constante cinétique de la réaction (2.3) inverse
constante d’équilibre de la réaction (2.2)
constante d’équilibre de la réaction (2.3)
constante de dissociation de l’eau
taille de couche limite de diffusion
taille de couche limite visqueuse
grand axe de l’ellipse
petit axe de l’ellipse
vecteur unitaire normal à une interface
densité de flux de CO2
densité de flux de CO2 moyenne
pression
pression adimensionnelle
nombre de Peclet
pression partielle de CO2 en phase gazeuse
mol m−3
−
−
−
mol m−3
mol m−3
−
mol m−3
−
m
−
m2 s−1
−
Pa
C mol−1
N
m s−1
−
−
−
−
m3 mol−1 s−1
s−1
m3 mol−1 s−1
s−1
m3 mol−1
m3 mol−1
mol2 m−6
m
m
m
m
−
mol m−2 s−1
mol m−2 s−1
Pa
−
−
Pa
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
r
r∗
r̃
r1
r̃1
r2
r̃2
rb
rs
R
Re
Sc
Sh
t
t̃
t
tC
T
u
u
ũ
ũ
U
v
ṽ
x
x̃
xL
x̃L
z
z̃
coordonnée radiale
vitesse de réaction du pseudo premier ordre
coordonnée radiale adimensionnelle
vitesse de la réaction 2.2
vitesse adimensionnelle de la réaction 2.2
vitesse de la réaction 2.3
vitesse adimensionnelle de la réaction 2.3
rayon d’une bulle
vitesse de consommation de HCO−
3 par la précipitation
constante des gaz parfaits
nombre de Reynolds particulaire
nombre de Schmidt
nombre de Sherwood
temps
temps adimensionnel
vecteur unitaire tangentiel à l’interface
temps de contact
température absolue
composante selon r de la vitesse du liquide
vecteur vitesse du liquide
vecteur vitesse adimensionnelle du liquide
composante selon r̃ de la vitesse adimensionnelle du liquide
vitesse tangentielle à l’interface
composante selon z de la vitesse du liquide
composante selon z̃ de la vitesse adimensionnelle du liquide
distance à l’interface orientée vers l’intérieur du liquide
distance adimensionnelle à l’interface orientée vers l’intérieur du
liquide
épaisseur de film liquide
épaisseur de film liquide adimensionnelle
coordonnée axiale
coordonnée axiale adimensionnelle
54
m
mol m−3 s−1
−
mol m−3 s−1
−
mol m−3 s−1
−
m
mol m−3 s−1
J mol−1 K−1
−
−
−
s
−
−
s
K
m s−1
m s−1
m s−1
−
m s−1
m s−1
−
m
−
m
−
m
−
Lettres grecques
α
βb
βc
βd
Ô
θ
θs
µ
rapport entre la concentration de CO2 dans le bulk et celle à l’interface
rapport entre le coefficient de diffusion de OH− et celui de CO2
rapport entre le coefficient de diffusion de HCO−
3 et celui de CO2
rapport entre le coefficient de diffusion de CO2−
3 et celui de CO2
fraction volumique de gaz
angle repérant un point sur un bulle par rapport au point de stagnation
angle de décollement
viscosité dynamique
−
−
−
−
−
−
−
kg m−1 s−1
2 . Modélisation du transfert gaz-liquide couplé aux réactions chimiques dans
l’écoulement de liquide autour d’une bulle
ν
ξ
ρ
σ
τ
τ̃
ϕ
χb
χc
χd
viscosité cinématique
fonction de distribution des âges
masse volumique
tension de surface
tenseur des contraintes
tenseur des contraintes adimensionnelles
coordonnée azimutale
rapport entre la concentration en CO2 à l’interface et celle en OH−
dans le bulk
rapport entre la concentration en CO2 à l’interface et celle en
HCO−
3 dans le bulk
rapport entre la concentration en CO2 à l’interface et celle en CO2−
3
dans le bulk
Indices
bulk
bulle
crit
ini
int
film
Higbie
g
l
w
dans le bulk
relatif à une bulle
critique
initial
à l’interface
relatif au modèle de film
relatif au modèle de Higbie
gaz
liquide
eau pure
Exposant
∗
T
modèle simplifié
transposé
m2 s−1
s−1
kg m−3
N m−1
Pa
−
−
−
−
−
55
Téléchargement