tique : celui-ci cherche à montrer que la Loi, quand elle n’est pas inter-
prétée selon le principe d’amplification dicté par l’amour, s’étouffe elle-
même et meurt. En ce sens, on peut véritablement dire, avec l’auteur,
que « Rt ré-écrit la Torah » (p. 148). Cette interprétation amplificatrice
qui fait de l’amour l’essence de la Loi et qui porte son accomplissement
au-delà de sa lettre contient, par ailleurs, une incidence théologique
de premier ordre : Dieu est plus grand que sa Loi. Ce qui rend ici le pro-
pos particulièrement subversif et paradoxal, c’est qu’une telle démons-
tration est mise à l’actif d’une femme moabite représentant pour Israël
l’autre, la déviante par excellence. A une époque où le respect de la
lettre était devenu la condition même d’appartenance à la commu-
nauté, Ruth apparaît ainsi comme l’indispensable élément extérieur
capable de briser le carcan légal, dont le respect littéral conduit à la
mort. Muni de cette clé, le lecteur est guidé dans ce récit fascinant par
un commentaire (une centaine de pages) qui ne manque jamais de
mentionner les textes de référence, juridiques ou non, qui lui sont sous-
jacents. Le point fort de cette étude réside sans doute d’une part, dans
cette capacité d’éclairer des questions institutionnelles et légales com-
plexes (et, pour cette raison, souvent délaissées) présentes dans le livre
de Ruth et d’autre part, de fournir, par le fait même, une justification
objective à son rattachement liturgique à la fête de Shavouot (don de
la Torah). Deux regrets cependant : la bibliographie maigrichonne (des
travaux de qualité en français sont omis) et l’absence de tout index s’ac-
cordent mal aux ambitions déclarées de la collection.
Du même livre de Ruth, mais dans un tout autre genre, Carlos Mes-
ters propose un commentaire actualisant, fruit d’un travail mené avec
des communautés ecclésiales de base du Brésil 3en même temps que
proposition pour une étude en groupe biblique. La démarche est pro-
gressive et didactique, organisant, après une brève introduction sur le
cadre historique, la traversée du livre en six parties : 1) un peuple en
manque de terre, de pain et de descendance (1, 1-5 : tableau initial) ; 2)
retourner à la terre pour chercher du pain (1, 6-22 : 1re étape) ; 3) glaner
est un droit des pauvres (2, 1-23 : 2eétape) ; 4) une nuit féconde sur l’aire
de Booz (3, 1-18 : 3eétape) ; 5) garantir au peuple la possession de la
terre (4, 1-12 : 4eétape) ; 6) « un enfant est né », le monde prend un nou-
veau départ (4, 13-22 : tableau final). Une conclusion invite à faire mé-
moire du chemin, personnel et collectif, parcouru. Lacoque, dans son
commentaire, indiquait précisément la pertinence et les conditions de
validité de ce type de démarche. L’horizon du texte et celui du lecteur
sont faits pour se rencontrer, texte et communauté « sont en relation
Chronique d’Ecriture Sainte (A.T.)
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3. C. MESTERS, Ruth. L’amour engendre la justice, coll. « Connaître la Bible » 34,
Bruxelles, Lumen Vitæ, 2004, 15 x 21 cm, 80 p., 9
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