CNCH - CARDIO H - N°35
insuffisance cardiaque systolique, chronique,
légère à moyenne, en rythme sinusal traitée
par diurétique et digoxine, montrent avec un
suivi de 3 mois, que l’arrêt de la digoxine s’est
accompagné d’une diminution de la capa-
cité d’effort, d’une détérioration de la FEVG
et d’une augmentation des hospitalisations
pour poussée d’insuffisance cardiaque.
Ces résultats favorables à la digoxine seront
remis en question par l’étude DIG menée sur
6800 patients en rythme sinusal qui avaient
une FEVG ≤ 45 %. En effet, dans cette étude,
l’adjonction de digoxine vs placebo à l’asso-
ciation diurétique-IEC n’a pas modifié la mor-
talité mais a seulement diminué significati-
vement les hospitalisations pour aggravation
de l’insuffisance cardiaque.
Stricto sensu, les résultats de DIG ne contre-
disaient pas mais rendaient caduques les
conclusions de PROVED et RADIANCE qui
n’avaient pas la puissance statistique néces-
saire pour mettre en évidence un effet de la
digoxine sur la mortalité. Mais en montrant
que la digoxine était sans effet sur la morta-
lité, l’étude DIG a mis un terme à la prescrip-
tion généralisée du tonicardiaque, et ce d’au-
tant qu’à la même époque, plusieurs grands
essais cliniques démontraient que d’autres
médications, à savoir les bêtabloquants, les
IEC, les ARA II diminuaient significativement
la mortalité des patients en insuffisance car-
diaque chronique, quel qu’en soit le stade.
La prescription de la digoxine peut-elle des-
cendre encore plus bas ? A-t-elle véritable-
ment touché le fond ? Sans doute pas, dans
la mesure où cette prescription se voit au-
jourd’hui contestée même dans la FA dont,
selon une série d’études rétrospectives ré-
centes, elle pourrait bien augmenter la mor-
talité.
2e exemple, la remise en question du Mg
dans l’infarctus aigu du myocarde.
Se référant au fait qu’à des concentrations
pharmacologiques, le Mg dilate les coro-
naires, inhibe l’agrégation plaquettaire et
possède un effet anti-arythmique, on avait
suggéré qu’il pourrait réduire la mortalité
précoce de l’infarctus aigu du myocarde.
De fait, dans l’étude LIMIT II menée chez 2316
patients hospitalisés pour suspicion d’infarc-
tus myocardique aigu, l’injection IV de Mg vs
placebo, a diminué significativement de 24
% la mortalité du premier mois et de 25% les
poussées d’insuffisance ventriculaire gauche.
Or, ces conclusions favorables au Mg allaient
être battues en brèche quelques années plus
tard par la branche Mg de l’étude ISIS IV re-
groupant plus de 4000 patients et par l’étude
MAGIC menée chez 6 213 patients hospitali-
sés pour un infarctus myocardique aigu ST+,
ce qui mettait un terme définitif à l’utilisation
préventive routinière du Mg IV dans l’infarc-
tus aigu du myocarde.
Vérités transitoires, pourquoi ?
La pérennité de certaines vérités peut être
menacée par 2 types de situations : la dé-
couverte d’une nouvelle approche physio-
logique/thérapeutique ; la survenue tardive
d’effets secondaires graves.
*La découverte d’une nouvelle approche
physiologique/thérapeutique a été à l’origine
du triple déclin de la prescription des bêta-
bloquants :
- D’abord, dans l’HTA, depuis qu’en 2005, la
méta-analyse de Lindholm a remis en ques-
tion leur efficacité (pas de diminution du
risque d’infarctus par rapport aux autres
anti-hypertenseurs) et leur sécurité d’emploi
(augmentation significative de 16% du risque
d’AVC et accroissement non significatif de 3%
de la mortalité totale) et ce, probablement
comme l’a montré en 2006 l’étude CAFE, car à
baisse identique de la pression humérale les
bêtabloquants abaissaient moins la PAS cen-
trale que les IEC ou les inhibiteurs calciques.
- Ensuite, dans la maladie coronaire et le post-
infarctus. En effet, depuis l’ère de la reperfu-
sion myocardique précoce qui réduit la taille
de la nécrose et de la zone cicatricielle aux
frontières de laquelle naissent les arythmies
ventriculaires les plus graves, la prescription
de bêtabloquants peut désormais se limi-
ter aux 3 premières années après l’infarctus,
en l’absence de symptôme et de dysfonc-
tion ventriculaire gauche et n’est plus sys-
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DE LA VÉRITÉ PARTICULIÈRE DES GRANDS ESSAIS CLINIQUES
Compte rendu du 21ème Congrès du CNCH 2015
GROUPE RYTHMOLOGIE