revue des declarations des effets indesirables au cours

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J. sci. pharm. biol., Vol.9, n°2 - 2008
KAMAGATE M. & al. : Revue des declarations des effets indesirables ...
© EDUCI 2008.
J. sci. pharm. biol., Vol.9, n°2 - 2008, pp. 84-92
© EDUCI 2008
REVUE DES DECLARATIONS DES EFFETS
INDESIRABLES AU COURS DES ESSAIS CLINIQUES
DE PHYTOMÉDICAMENTS
KAMAGATE M.1*
DIÉ-KACOU H.1
BAMBA-KAMAGATÉ D.2
KAKOU A.1
POTEY-DAUBREY T.1
YAVO J-C1
BALAYSSAC E.1
GBOIGNON V. M.1
1- Département de Pharmacologie Clinique, Université Cocody, Abidjan, Côte d’Ivoire
2- Institut de Cardiologie Abidjan, Côte d’Ivoire
*Correspondance : Mamadou Kamagaté, Département de pharmacologie UFR SMA, 04 BP 51 Abidjan 04 (Ré-
publique de Côte d’Ivoire), Email : [email protected] - Tel (225) 22 44 57 95
RESUME
Les effets indésirables constituent une
préoccupation majeure pour l’ensemble
des acteurs du médicament. L’objectif de
l’étude était d’évaluer les caractéristiques
de la déclaration des effets indésirables
des phytomédicaments au cours des essais
cliniques a n de juger les biais d’évaluation
de la tolérance. Ont été inclus dans l’étude,
les essais randomisés en insu réalisés et
publiés de 1980 à 2000 ; référencés dans les
bases de données accessibles par Internet;
sans distinction de leur origine. Des données
ont été recueillies sur la déclaration ou non
des effets indésirables.
Nous avons recensé 41 essais cliniques.
Le taux de déclaration était de 26,8%.
Aucun effet indésirable n’a été observé
par les auteurs dans 5 des 11 essais. Le
taux de sous-déclaration était important
et stable quelque soit la durée des essais.
Il y a cinq fois plus de risque que les
essais en parallèle ne déclarent pas les
effets indésirables que ceux qui sont en
cross over. Les auteurs estimaient les
effets indésirables relevés peu nombreux
et de gravité légère. L’appareil digestif
était le plus concerné avec les douleurs
abdominales, diarrhées, nausées.
Cette étude montre que les effets
indésirables sont peu déclarés et sous
évalués. La recherche de la tolérance doit
être une préoccupation majeure au cours
des essais cliniques de phytomédicament
afin de disposer de thérapeutiques
alternatives, efficaces, peu toxiques et
moins coûteuses.
Mots-clés : Essais cliniques, Effets
indésirables, Phytothérapie, Pharmacopée
traditionnelle.
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SUMMARY
trials. The rate of under noti cation was high
and steady independently to the duration of
trials. The risk of under noti cation in parallel
trials was more than 5 times in comparison
to those in cross over. According to authors,
few and not serious adverse drug reactions
were reported . The digestive system is most
concerned with abdominal pains, diarrhoea,
vomiting, and nausea.
In our study, few trials were interested
by adverse drug reactions reporting which
is one parameter of good trial. So the
noti cation of ADRs must be a priority in all
clinical trials using plant in order to have
therapeutic alternatives, effective, non-toxic
and inexpensive.
Key words : Clinical trials, Adverse Drug
Reactions, Herbal remedies, Traditional
pharmacopoeia.
The adverse drug reactions (ADRs),
harmful events, nondesired constitute
the obsession not only for pharmaceutical
industries, but also for prescribers,
dispensers and patients. The aim of this
study was to evaluate the qualities of
adverse effects noti cation of clinical trials
using plants in order to judge bias of safety
assessment.
The review included blinded randomized
studies published since 1980 to 2000
and accessed by Internet (MedlineWorld
Health Organization website, Inist, Embase,
Cochrane Library); without distinction of
their origin. Data of noti cation or not were
collected and their characteristics.
We listed 41 clinical trials. Percentage
of adverse drug reactions noti cation was
26,8%. Any adverse drug reaction was
observed according authors in 5 of these 11
INTRODUCTION
Les essais cliniques sont devenus
une méthode scientifique rigoureuse
d’évaluation de l’ef cacité et de la tolérance
des médicaments avant leur mise sur
le marché. Les médicaments issus des
plantes n’échappent pas à cette rigueur
scientifique [KAMAGATE 2005a, OMS
1991]. Les résultats des essais cliniques
deviennent convaincants si et seulement
si les biais ont été soigneusement évités
afin de réduire les résultats liés au
hasard. Si l’ef cacité des plantes est bien
démontrée leur tolérance reste biaisée et
sous évaluée [YELL 2007, BENSOUSSAN
1998]. En effet, les plantes médicinales
ont été longtemps considérées comme
dénuée de tout effet toxique ce qui entraîne
certainement une sous noti cations des
effets adverses liés à l’utilisation des
plantes. La longévité d’un médicament
sur le marché dépend de sa sécurité
d’emploi et de son innocuité. Pour cela,
les effets indésirables, événements nocifs,
non voulus constituent la hantise non
seulement de l’industrie pharmaceutique,
du prescripteur, du dispensateur mais
aussi des patients. Ce souci permanent
d’avoir des produits peu toxiques a fait
prendre conscience à la communauté
internationale de la nécessité du recueil
des effets indésirables à toutes les étapes
des essais cliniques afin d’évaluer le
rapport Béné ce/Risque [HUNTLEY 2005,
TRAUTMANN 2004]
Aujourd’hui, la médecine traditionnelle
est devenue un centre d’intérêt pour
les scientifiques, les pharmacologues,
les médecins et d’autres corps de
métiers à travers le monde [YELL 2007].
L’Organisation Mondiale de la Santé
estime que cette thérapeutique est la
principale alternative pour environ 80%
de la population en Afrique [WHO 2002].
Aussi, la surveillance des effets indésirables
des plantes médicinales s’est intensi ée
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et la littérature regorge de plus en plus
de cas [GOLDMAN 2001]. Plusieurs cas
d’effets indésirables et d’intoxications sont
décrits bien que parcellaires [KAMAGATE
2005b]. C’est pourquoi, la valorisation
de la médecine traditionnelle africaine
passe par la fourniture de la preuve
scienti que de l’ef cacité et de l’innocuité
des « recettes traditionnelles » [WHO 2002,
AKE-ASSI 1995]. Cette étude a eu pour
objectif d’évaluer les caractéristiques de la
déclaration des effets indésirables au cours
des essais cliniques utilisant des plantes
médicinales.
MATERIEL ET METHODES
Cette étude rétrospective s’était
intéressée aux effets indésirables noti és
ou non au cours des essais cliniques des
médicaments à base de plantes. Ont été
inclus dans l’étude, les essais randomisés,
en insu, réalisés et publiés de 1980 à 2000
référencés dans les bases de données
accessibles par Internet (Medline, Site
de l’Organisation Mondiale de la Santé
(OMS), Inist, Embase, Cochrane Library),
sans distinction de leur origine. Les mots
clés utilisés pour la recherche, ont été:
médicament à base de plantes, ef cacité,
innocuité, pharmacopée traditionnelle,
essais cliniques. Ont été exclus de cette
étude tous les essais qui ne mentionnaient
pas la randomisation.
Tous les articles ont été entièrement lus
par chaque auteur de l’étude. Les données
ont été extraites indépendamment sur une
che d’enquête standardisée comportant :
l’année, le nombre de sujets inclus, la
durée de l’étude, la randomisation, le type
d’insu, la déclaration et le type d’effets
indésirables, la sévérité, la gravité, sa
prise en charge et l’évolution. Nous avons
estimé la sous noti cation par le rapport
entre le nombre d’article avec déclaration
des effets indésirables (D) sur l’ensemble
des articles de même que le ratio de la
noti cation (D/nD).
RESULTATS
Nous avons recensé 41 essais cliniques
qui ont été majoritairement réalisés dans
les pays européens. 39 essais soit 81,2 %
étaient à la fois randomisés et en double
insu. Dans 95,2% des études, le produit
de comparaison était un placebo. Dans ce
groupe, deux études avaient été faites avec à
la fois un placebo et un produit de référence.
Les indications rhumatismales occupaient
la première place avec 43,7% suivies des
indications psychiatriques dans 14,6%.
Les autres indications étaient infectieuses,
cardiologiques et dermatologiques.
ETAT DE LA DÉCLARATION DES EFFETS
INDÉSIRABLES
Seulement dans 11 essais cliniques
(26,8%), les effets indésirables ont été
rapportés. De ces 11 essais cliniques dix
essais avaient été réalisés après 1990.
Dans cinq essais sur 11, les auteurs
avaient déclaré n’avoir observé aucun effet
indésirable. Le pourcentage des essais
cliniques où les effets indésirables n’ont pas
été déclarés était homogène dans le temps et
supérieur à 72% à l’exception de la période
1991-1995 avec un taux de sous noti cation
de 28,6% ( gure).
EFFETS INDÉSIRABLES EN FONCTION
DE LA DURÉE ET TAILLE DE
L’ÉCHANTILLON
La durée moyenne des études était de
quatre mois. Elle n’excédait pas un mois
dans 41,1% des cas. Neuf des 11 essais
cliniques ont une durée inférieure ou égale
à six mois. Les effets indésirables ont été
rapportés dans plus du tiers des essais
cliniques ayant une durée d’au moins deux
mois (tableau I).
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Près de 70,7% des essais comportaient
entre 30 et 90 sujets inclus. La médiane du
nombre de sujets inclus dans les études se
situait à 47. Les effets indésirables ont été
rapportés dans 8 sur 30 essais cliniques
avec un effectif compris entre 30 et 300.
Le ratio D/nD (effet déclaré/non déclaré)
était de 0,57. Dans la moitié de ces essais
cliniques, aucun effet indésirable n’a été
observé. Concernant les essais avec effectif
compris entre 30 et 49, la déclaration des
effets indésirables représentaient 42,9%
des essais cliniques (tableau I).
EFFETS INDÉSIRABLES EN FONCTION
DE LA MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE
La sous noti cation dans les essais
randomisés en cross over était de 33,3%
(2/6) et celle des essais randomisés en
parallèle était de 74,28% (26/35). Ce
qui fait que le risque d’observer la non
déclaration des effets indésirables était
cinq fois plus important dans les études
en parallèle que dans les études en cross
over.
EFFETS INDÉSIRABLES EN FONCTION
DU LIEU DE L’ÉTUDE
La sous noti cation dans les études
réalisées au Danemark était nulle (0/1), en
France de 1/3, aux USA de 1/3, Grande-
Bretagne 5/9, Allemagne 12/14, et de
100% en chine, Amérique latine, Italie,
Suisse, Iran et Taïwan.
ORGANE ET GRAVITÉ DES EFFETS
INDÉSIRABLES
Les effets indésirables déclarés étaient
peu nombreux et de gravité légère et
rare selon les auteurs. L’appareil digestif
était le plus concerné (66,7%) suivi
des système immunologique (20,1%),
système neuropsychiatrique (9,2%)
et dermatologique (4%). Les troubles
gastro-intestinaux étaient à type de
douleurs abdominales, diarrhée, nausées,
vomissements et de flatulence. Les
proportions n’ont pu être chiffrées. Les
plantes impliquées dans la survenue
de ces effets indésirables étaient
Harpagophytum procubens (Burch) DC.
Meissn., Pedaliaceae, Tanacetum sp.,
Urtica sp et des associations de plantes
chinoises non identi ées (tableaux II et
III). Aucune précision de tolérance sur les
comparateurs n’avait été donnée dans la
plupart des études. Cependant, les plantes
chinoises utilisées dans le traitement
du SIDA contre placebo ont entraîné
respectivement 46 effets indésirables
chez 19 (79%) patients contre 20 effets
indésirables chez 11 (38%) patients sous
placebo [WEBER 1999]. Ces plantes se
sont révélées être plus toxique que le
placebo. Il s’agissait de diarrhée liquide
(2 vs 1), d’augmentation des mouvements
péristaltiques (10 vs 1), de douleurs
abdominales (5 vs 2), de nausées (3 vs 0),
de atulence (4 vs 5), constipation (0 vs
1). Aucune modi cation hématologique
signi cative n’a été rapportée dans les deux
groupes. Deux décès sont survenus dans
le groupe traité par les plantes chinoises
sans qu’aucun lien soit trouvé avec le
médicament. Ces patients étaient à un
stade tardif de leur maladie.
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12
55
67
2
13
0
2
4
6
8
10
12
14
1980-1985 1986-1990 1991-1995 1996-2000
Effectifs
Année
Récherchés
Figure : répartition de la recherche des effets indésirables par période
Tableau I : Effets indésirables selon la durée et le nombre de sujets des essais cliniques de phy-
tomédicaments
EI
DÉCLARÉS
EI DÉCLARÉS
ET ABSENTS
EI NON
DÉCLARÉS TOTAL
DURÉE
< 1 MOIS
1 MOIS
2 MOIS
3 - 4 MOIS
5 MOIS
6 MOIS
> 6 MOIS
NON PRÉCISÉ
TOTAL
1
1
2
3
2
1
2
0
11
1
1
1
1
1
0
5
7
4
4
1
0
4
5
5
30
8
5
6
4
2
5
6
5
41
NOMBRE DE
SUJETS
< 30
30 – 49
50 – 99
100 – 300
> 300
NON PRÉCISÉ
TOTAL
0
5
2
1
2
1
11
0
2
0
2
1
0
05
4
6
10
6
1
3
30
4
11
12
7
3
4
41
EI : Effet indésirable
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