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Il y a surtout deux groupements comprenant la Chine et la Russie. Le premier est dit BRICS : Brésil, Rus-
sie, Inde, Chine et Afrique du Sud. C’est un regroupement de grands pays (BRIC dans un premier temps,
auquel l’Afrique du Sud s’est joint après coup) mécontents de ne pas faire partie du G7, ayant pour but de
faire avancer un programme politique face aux pays occidentaux. La création du G 20 et du G7+1 (Russie)
a réduit leur marginalité et leurs raisons de se sentir maintenus à l’écart.
La Chine et la Russie animent un autre groupe qui fédère ou influence un grand nombre de pays d’Asie : la
Shanghai Cooperation Organization (SCO) qui regroupe les membres d’une alliance qui s’appelait les ‘Cinq de
Shanghai’ (Chine, Russie, Kazakhstan, Kirghizistan et Tadjikistan) auxquels s’est joint l’Ouzbékistan. Mais
l’influence de cette SCO est bien plus large puisque l’Inde, l’Iran et le Pakistan y ont le statut
d’observateurs et que les autres pays membres de l’ancienne Union soviétique et les membres de l’ASEAN
(Association des Nations de l’Asie du Sud-est) sont régulièrement invités à ses réunions. Ce groupe qui
s’est constitué sur la base de préoccupations politiques territoriales (lutte contre les tendances sécession-
nistes en Asie centrale) tend à constituer un contrepoids à l’OTAN et a refusé le statut d’observateur aux
États-Unis. Il soutient des projets d’infrastructures d’ampleur régionale et a pour cela créé, en octobre
2005, le SCO Interbank Consortium qui facilite la coopération entre les banques centrales des pays membres.
La réunion au sommet de la SCO de juin 2009 s’est tenue à Ekaterinbourg, en Russie, conjointement avec
le Sommet des BRICS. Quelles que soient les divergences entre les pays membres, la réforme des droits de
vote au FMI et l’antipathie à l’égard du rôle dominant du dollar font l’unanimité.
Il faut enfin ajouter le Conseil de coopération du Golfe (GCC) : fondé en 1981 par un pacte liant l’Arabie
Saoudite, le Bahreïn, le Koweït, Oman, le Qatar et les Émirats arabes unis (EAU). L’appartenance du Ma-
roc et de la Jordanie est actuellement à l’étude. C’est une quasi union monétaire. Ce groupe aurait proba-
blement déjà adopté une monnaie commune s’il n’y avait pas, comme pour la zone Euro, la difficulté
d’adopter une politique monétaire commune, sans unification des politiques budgétaires. La faillite, en no-
vembre 2009, de Dubaï World, un très important holding d’investissement privé a porté un coup au GCC
mais la banque centrale des EAU a renfloué ce trust et la crédibilité du Conseil du Golfe s’en est finale-
ment trouvée renforcée
G/ Les US, le Royaume Uni et le Japon
Les US ont un taux d’endettement public de plus 100%, seuil considéré dangereux (un peu plus élevé en-
core que la France, c’est tout dire !). Le RU est proche de ce seuil tandis que le Japon, qui est encalminé
depuis fin 1989, il y a 25 ans, dans une dépression, en est déjà à un taux d’endettement de 200%.
Autant dire que la situation de dépression économique est partagée, tout comme les politiques pour y faire
face : bas taux directeurs, impression de papier monnaie et achat d’obligations d’État. US, RU et Japon es-
pèrent, autant les uns que les autres, une dose d’inflation qui réduirait leur dette publique et redonnerait
peut-être de l’appétit à leurs acteurs économiques.
La Banque d’Angleterre en est à la quatrième opération d’assouplissement quantitatif (2009, 2011 et deux
fois en 2012). L’objectif avoué est une croissance au moins « nominale » résultant d’une inflation.
La dépression du Japon a été causée par l’explosion à la fin des années 80 d’une bulle de son marché bour-
sier et de son marché immobilier, qui s’était formée au cours de la décennie. Dans les années 90, le Japon a
pratiqué sans succès des politiques de relance. Son PIB, après un pic en 97, a baissé de 11% en 2011. Son
indice des prix a connu un pic en 1998 mais est régulièrement en baisse depuis, à l’exception de quelques
trimestres. Le pays connaît donc une déflation, qui peut cacher, de temps à autres, une certaine croissance
réelle, mais cela n’arrange pas les affaires de l’État. Après des années de politique monétaire ni claire, ni
convaincante, Shinzo Abe a été élu, fin 2012, sur l’annonce d’un vaste programme d’impression de yens.
Depuis lors, la politique monétaire japonaise ressemble à celle des US, mais, proportionnellement, plus
massive encore en termes d’émission monétaire.
Au total, ces trois pays, US, RU et Japon, sont clairement dans une dépression et tentent de s’en sortir par
une dévaluation de leur monnaie. Or le dollar US, la livre anglaise et le yen japonais représentent ensemble
70 % des réserves mondiales affectées et 65% du panier du DTS du FMI.
Les pays du BRIC, de la SCO et du GCC assistent impuissants mais rageurs à ce concours d’émission de
papier monnaie par les banques centrales des US, du RU et du Japon, que Rickards qualifie de « crime du
siècle ». La seule chose qui reste à savoir, ajoute-t-il, c’est si le système monétaire international « va
s’écrouler sous son propre poids ou va être renversé par les perdants des marchés émergeants ».