Marie-Ange RENAUX session 2012 PLP Hôtellerie service & commercialisation Le rôle des compétences émotionnelles dans les apprentissages des élèves dyslexiques d’ULIS 2 CA-SH option D Académie d’Aix Marseille 1 Remerciements Cette partie me permet de montrer toute ma gratitude envers les personnes qui m’ont accompagnée dans mon parcours professionnel et personnel liés aux dys. Tout d’abord, un remerciement tout particulier à Mme Arlette POGGI, infirmière scolaire du collège Pont de Vivaux, qui a permis de positiver ma démarche toute entière, et de transformer un cauchemar en tremplin. Merci à tous les jeunes dys que j’ai croisés et qui m’ont permis d’évoluer dans mes pratiques pédagogiques et dans ma représentation du handicap. Merci à Marine, Alexia, Lucas, Sacha, Nicolas, Romain, Grégory… Merci à Mme Joëlle Mons, enseignante spécialisée du collège Pont de Vivaux qui a accepté, avec une grande générosité, d’ouvrir sa classe si souvent et à tous ceux qui en avaient besoin. Merci à ma hiérarchie, Mme Béatrice Baïda, Mme Claire Rosty, Mr Denis Herrero de m’avoir soutenu dans ma démarche de communication sur ce handicap invisible nouvellement reconnu. Merci aux mamans réconfortantes et dynamiques des associations de la région PACA, Luce Nocera et Sophie Péro de DFD, Annie Jullien d’Hyper Super, Cathy Piasco d’Avenir Dysphasie. Et surtout, merci à ma fille Eve-Lise qui m’a montré le chemin avec intelligence, courage, sensibilité et détermination et qui restera ma source d’énergie. 2 Sommaire Sommaire 3 Introduction 4 1. le constat 5 2. la problématique 6 3. les hypothèses de travail 6 4. les apports théoriques 7 5. l’expérimentation pédagogique 14 6. l’analyse 23 Conclusions 27 Les annexes Références 3 Introduction Ma carrière à l’éducation nationale a commencé au lycée hôtelier Jean Quarré de Paris. Durant ces premières années d’enseignement, j’étais en contact avec un public d’élèves de BEP ou de Bac Pro que je qualifierais d’«initiés ». En effet, tous avaient une idée déjà précise des métiers de l’hôtellerie, et peu avaient un doute quant à leur avenir dans cette filière. Les années passant, le mode d’admission des élèves en lycée professionnel a changé. Mon passage à l’EREA Alexandre Dumas de Paris (établissement régional d’enseignement adapté) puis ma mutation en lycée professionnel Camille Jullian de Marseille, en classe de CAP m’ont montré une autre facette de l’élève. Dans ces cas précis, l’hôtellerie est souvent un choix par défaut et l’orientation en CAP une punition. Force est de constater que manque de motivation et déficit d’estime de soi ne sont pas propices aux apprentissages et à l’épanouissement. Ce constat m’a conduit à me documenter sur l’importance des compétences émotionnelles. Cette approche de l’individu m’a permis d’envisager ma pédagogie sous un nouvel angle : celui des savoir être, compétence indispensable dans nos métiers d’accueil et de services. En considérant la compétence et sa triple dimension, remarqué que la difficulté d’acquérir une compétence réside j’ai plus souvent dans les savoirs-être que dans l’acquisition des savoirs et savoir-faire. Le concept d’intelligence émotionnelle ou plutôt de compétences émotionnelles me semble une des clés de la réussite des élèves en difficultés. Depuis 2005, la loi sur le handicap nous propose un nouveau défi, celui de scolariser des élèves en situation de handicap. Aussi, c’est tout naturellement que je me suis posé la question suivante : Est ce que ce levier que sont la valorisation de l’estime de soi et les autres compétences émotionnelles, sont des outils performants pour ces élèves à besoin éducatif particulier, que sont les dyslexiques, aussi bien pour acquérir les techniques professionnelles d’exécutant que pour manager une équipe ? 4 1. Le constat Selon le docteur Michel Habib, Neurobiologiste du CHU de la Timone à Marseille, « 10% environ des enfants d’âge scolaire sont dyslexiques. Leur scolarité est une succession de frustrations, d’efforts non récompensés et leur avenir professionnel est souvent compromis ». L’OMS (organisation mondiale de la santé) donne la définition suivante : la dyslexie relève d’une difficulté durable d’apprentissage de la lecture et d’acquisition de son automatisme chez des enfants intelligents, normalement scolarisés et indemnes de troubles sensoriels ou psychologiques préexistants. 1 à 3 % de ces enfants sont porteurs d’une dyslexie sévère. Depuis la loi de 2005 la dyslexie est reconnue comme un handicap. Dans ce cas précis et seulement, ils pourront être scolarisés en ULIS avec une reconnaissance de handicap de la MDPH (maison départementale des personnes handicapées). Les différentes manifestations recensées pour la dyslexie sont : confusions visuelles, inversions, transformations de mots, substitutions, difficulté de repérage dans le temps et l’espace, difficultés de mémorisation à court terme et à long terme … Ces difficultés entraînent entre autres, les 3 conséquences auxquelles je vais m’intéresser tout particulièrement : la pauvreté de vocabulaire, la difficulté à planifier une tâche (c'està-dire respecter un plan) et la mésestime de soi. Ces 3 conséquences sont particulièrement visibles lors des exercices de rédaction. Cette grande difficulté à développer un écrit est un constat souvent exprimé par mes collègues de français ou d’histoire géographie lors d’échanges sur des élèves de classes communes ou lors de mes interventions comme formatrice au sein de la team dys de la DAFIP de l’académie d’Aix Marseille. Le manque de vocabulaire, le non respect d’un plan et la mésestime de soi, qu’induit la dyslexie me sont confirmés par les enseignantes spécialisées des ULIS Dys du collège Roger Carcassonne de Pelissanne et Pont de Vivaux à Marseille. Aussi je vais considérer dans mon expérimentation, ces 3 conséquences comme prioritaires. 5 2. La problématique Comment le développement des compétences émotionnelles permettent-elles à l’élève dyslexique d’ULIS de collège, d’être capable de rédiger un paragraphe descriptif ? 3. Les hypothèses de travail Hypothèse n°1 En prenant appui sur les capacités sensorielles innées, comme les 5 sens, je propose de mettre en situation de réussite et ainsi de valoriser ou revaloriser la confiance en soi des élèves dyslexiques. Hypothèse n°2 Pour permettre à l’élève dyslexique de planifier une tâche en suivant un plan et ainsi garder la maîtrise de soi, j’envisage de lui fournir le modèle professionnel de l’analyse sensorielle. Hypothèse n°3 En utilisant l’empathie, je propose à chaque élève en situation de handicap de se dépasser et de pallier son manque de vocabulaire. 6 4. Les apports théoriques La dyslexie : de la difficulté jusqu’au handicap Le préfixe dys que nous utilisions dans le langage courant, crée depuis un siècle de nouveaux mots comme dyslexie, dysgraphie, dyscalculie, etc et ce jusqu’à devenir un nom commun à part entière : les dys, la constellation des dys, les troubles dys… Dys en grec veut dire : « c’est difficile » Dys en médecine, désigne la difficulté d’acquisition d’une fonction (alors que le préfixe "a" désigne la perte d’une fonction préalablement établie) Dys dans le dictionnaire Larousse : préfixe indiquant une difficulté, une anomalie, le mauvais état ou le mauvais fonctionnement de quelque chose. La description la plus ancienne du premier diagnostic de dyslexie développementale est mentionnée dans une publication parue dans le British Medical Journal, le 7 novembre 1896, « un cas de cécité verbale congénitale » par W.Pringle Morgan, un savant anglais. Ensuite, d’autres chercheurs comme Samuel Orton (1879/1948), pionner dans l’étude des troubles des apprentissages, ou le médecin français André Ombredane (1898/1958) commencent à définir plus précisément « dysgrammataxie » ce trouble. Ce dernier la nommera c'est-à-dire « une difficulté d’intégrer les éléments symboliques perçus dans l’unité du mot ou d’une phrase, quelque soit au demeurant le mécanisme de cette intégration ». Le docteur Launay introduit la notion de durabilité de ce trouble en donnant la définition suivante : une « asymbolie aux ensembles des lettres, qui reproduit en les amplifiant et en les prolongeant, les difficultés habituelles au début de la lecture et de l’écriture, laissant intactes les autres fonctions intellectuelles ». Le docteur Borel-Maisony sera la première personne en France à diffuser une méthode de rééducation structurée du langage et perçoit la dyslexie comme « une difficulté particulière à identifier, comprendre et reproduire les symboles écrits, qui a pour 7 conséquence de troubler profondément l’apprentissage de la lecture entre 5 ans et 8 ans, l’orthographe, la compréhension des textes et les acquisitions scolaires par la suite ». Dans la première note technique de l’association « les lavandes » à la demande de l’association Apedys Paca et à partir du rapport scientifique des docteurs Mancini, Habib, Pech du CHU de la Timone, nous trouvons une définition encore plus complète : « c’est un trouble dynamique de l’apprentissage de la lecture, qui se caractérise par une diminution significative des performances en lecture ou orthographe par rapport à le norme d’âge. Ces difficultés sont durables et non pas un simple retard d’acquisitions. Les mécanismes fondamentaux du langage écrits sont atteints dans leur structure même, souvent à la fois dans le versant expression. Les facteurs dits d’environnement, tels que psychologiques, linguistiques, socioculturels etc… ne génèrent pas ces troubles, mais ils les aggravent ». L’intérêt pour ce trouble de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture est récent au regard des autres handicaps, sûrement du fait qu’il est invisible et que l’importance du langage écrit dans la transmission des savoirs est lui aussi très récent. Les causes de ce trouble spécifique des apprentissages restent encore une source de recherche et d’attention particulière pour la communauté scientifique et médicale. Mais la dyslexie en tant que handicap reste mal connue et encore trop peu reconnue. Les causes de cette lenteur de reconnaissance sont multiples. Il s’agit d’un handicap invisible, qui revêt des formes et degrés divers et qui n’altère aucune autre fonction intellectuelle. La dyslexie est un handicap invisible La classification des troubles dys dans les troubles cognitifs et la loi de 2005 qui cite de façon explicite l’altération des fonctions cognitives dans le champ du handicap, a fait reconnaître la dyslexie si elle est sévère comme handicap. L’OMS comporte dans sa 10ème édition internationale des maladies, le classement de ces troubles dits « développementaux » (par exemple F81.0 et F81.1 pour la lecture et l’écriture). Avec la dyslexie, la notion de « situation de handicap » prend tout son sens. En effet, ce trouble 8 de la cognition (traitement de l’information) se manifeste uniquement avec le langage écrit. Le dyslexique peut se distinguer et être performant dans des domaines comme le sport, les arts plastiques et appliqués, l’architecture … Il peut également compenser par d’autres moyens de traitement de l’information et ainsi empêcher son repérage. L’aspect invisible de ce handicap augmente la mauvaise estime de soi. En effet, la pose d’un diagnostic est rarement précoce, plusieurs mois voire années s’écoulent entre le début des apprentissages de la lecture et le dépistage du trouble dys. Pendant ce lapse de temps, la question du manque de volonté, du désintérêt ou du trouble dys se pose. Cette période contribue à la fragilisation de l’enfant entrant dans les apprentissages. Son estime de soi est en jeu. La dyslexie a des formes variées La constellation des dys [issu de Habib (2004), in Metz-Lutz, M.N., Demont, E., De Saint Martin, A. & Seegmuller, C. (Eds) (2004). Développement Cognitif et Troubles des apprentissages : Evaluer, comprendre, rééduquer et prendre en charge. Editions Solal (p. 221) 9 Un enfant dyslexique présente souvent des troubles associés, ainsi sa dyslexie pourra être conjuguée avec d’autres troubles dys comme la dysgraphie, la dysorthographie, la dyscalculie, la dyspraxie, les TDAH (trouble de l’attention et de l’hyperactivité, précocité intellectuelle… ). On parle, alors de comorbidité. En médecine, la comorbidité désigne la présence d’un ou de plusieurs troubles associés à un trouble ou une maladie. La dyslexie a des degrés divers La difficulté à cerner le statut du dyslexique, relève du degré du trouble. Nous pouvons ainsi passer d’une « simple » difficulté comme la définition du Larousse « une difficulté d’apprentissage de la lecture et de l’orthographe, en dehors de toutes déficiences intellectuelles et sensorielles, et de tout troubles psychiatriques » à un « réel » handicap dans le sens strict de la Loi du 11 Février 2005 Article 2 « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou trouble de santé invalidant » La dyslexie n’altère aucune autre fonction intellectuelle La dyslexie se distingue des autres handicaps cognitifs par une non altération des capacités intellectuelles. En effet, contrairement aux autres personnes atteintes de troubles cognitifs, les dyslexiques ne présentent aucune réduction des capacités intellectuelles. « Il n'est pas possible d'aborder la situation de difficultés ou d'échec scolaire d'un enfant suspect de DYS sans réaliser d'abord -en premier lieu- un bilan psychométrique (appelé aussi test de Q.I.). Pourquoi ? Pour répondre aux conditions mêmes de la définition des DYS : mettre en évidence au moins une épreuve d'intelligence générale préservée » publié par le Dr Alain Pouhet, du CHU de Poitiers - Café Pédagogique de 2008 Aussi, contrairement aux autres handicaps cognitifs, la dyslexie n’est pas qu’une succession de déficits. En effet non seulement, nous sommes toujours en présence de personnes dotées d’une intelligence normale mais aussi très souvent supérieure à la 10 moyenne et faisant preuve de qualités particulières. Les avantages de ce fonctionnement particulier sont tout particulièrement développés dans la publication « le cerveau extra ordinaire – la dyslexie en question » du Dr Habib rédacteur en chef de la revue Neuropsychologie : « Un certain nombre d'arguments permettent à l'inverse de penser que l'organisation particulière du cerveau chez le dyslexique présente également certains avantages. En premier lieu, les dyslexiques auraient des aptitudes de perception et d'attention spatiales supérieures à celles de non dyslexiques, aptitudes généralement attribuées au fonctionnement de l'hémisphère droit. On retrouve parmi les dyslexiques des sujets obtenant des performances au-dessus de la moyenne à des épreuves consistant à manipuler l'espace, par exemple les épreuves de rotation mentale où il s'agit de reconstituer mentalement en trois dimensions un cube mis à plat. De même, les dyslexiques sont en moyenne supérieurs aux non dyslexiques pour capter un stimulus visuel situé dans les parties latérales du champ visuel. Le fait qu'on retrouve un nombre conséquent de dyslexiques dans des professions faisant appel aux aptitudes spatiales (architectes, ingénieurs) et dans des activités sportives nécessitant une précision spatiale (escrime, tennis) est sans doute à mettre en relation avec ces capacités particulières » Ainsi chaque dyslexique est différent, chacun est une mosaïque d’une quantité plus ou moins importante des manifestions citées ci-dessus et à un degré plus ou moins important. Cependant, tous les élèves dys scolarisés présentent les points communs suivants à savoir une intelligence respectée, pas de troubles sensoriels associés, pas de désordre affectif grave et les conséquences suivantes : - La problématique de la double tâche - La non automatisation des tâches - La lenteur - Une fatigabilité - L’emploi du temps surchargé par la rééducation - Le manque de confiance en soi et une mauvaise estime de soi 11 La loi de février 2005 fut une révolution dans le monde des dys. Ce handicap invisible qui nuit à la scolarité des jeunes et à l’insertion professionnelle des adultes qu’ils deviendront, est enfin reconnu. Désormais, les mesures de compensations indispensables sont devenues légitimes. Des émotions aux compétences émotionnelles Longtemps, les émotions ont été associées à la passion et l’irrationalité, et de ce fait considérées comme des processus primaires voire inférieurs. Darwin, fondateur de la théorie de l’évolution, définissait les émotions comme un moyen d’adaptation et de survie. Il les qualifie « d’innées, universelles et communicatives ». Dès les années 20, Edward Thorndike, psychologue américain connu notamment pour ses travaux sur l’intelligence et la psychologie de l’éducation, souligne l’importance de « l’habileté à identifier ses propres états internes, motivations et comportements, et à interagir avec autrui de manière optimale sur la base de ces informations ». Ensuite, Howard Gardner, célèbre dans le monde entier pour sa théorie révolutionnaire sur les intelligences multiples, propose en 1983 d’ajouter à l’intelligence classique (QI) une intelligence intrapersonnelle et interpersonnelle. Il définit la première comme étant « la connaissance introspective de soi et le sentiment du vivant, l’expérience de ses émotions et la capacité à les différentier puis à les nommer, à en tirer les ressources pour comprendre et orienter son comportement » Salovey et Mayer , issus de la communauté scientifique américaine, suggèrent à partir de 1990 l’idée d’une intelligence émotionnelle « capacité à identifier les émotions, à générer les émotions adéquates pour faciliter la pensée, à comprendre les émotions et à gérer ses émotions de manière à promouvoir la croissance émotionnelle et intellectuelle ». 12 Ce concept sera repris et popularisé par le journaliste scientifique Daniel Goleman et la parution de son ouvrage l’intelligence émotionnelle en 1995 qui donnera la définition suivante : « La capacité de reconnaître ses propres sentiments et ceux des autres, de se motiver et de composer efficacement avec les émotions, autant dans sa vie intérieure que dans ses relations avec les autres. » Désormais, intelligence et émotions, raison et passion ne sont plus contradictoires et peuvent co exister. Cette appellation d’intelligence émotionnelle [IE] a suscité de nombreuses et intenses controverses. Aujourd’hui, le terme de compétences émotionnelles est plus volontiers utilisé. On distinguera dans l’IE, la capacité de l’individu à prendre conscience des « diverses aptitudes pratiques fondées sur cinq composants : la conscience de soi, la maîtrise de soi, la motivation, l’empathie et la maîtrise des relations humaines » Goleman 1998 et dans les compétences émotionnelles, « la capacité qu’a l’individu de passer à l’action concrètement » Compétences émotionnelles (traduit de Cherniss & Goleman, 2001) Compétence émotionnelle personnelle Compétence émotionnelle sociale Auto-évaluation ou conscience de soi Conscience sociale Connaissance de soi Empathie Estime et confiance en soi… Service aux autres Conscience de l’organisation... Auto-régularisation ou maîtrise de soi : Aptitudes sociales de communication : Contrôle de soi Aider les autres Fiabilité Motiver Droiture Savoir gérer les conflits Adaptabilité … Accompagner Initier le changement Travailler en équipe… Source : Gendron B 2007e) 13 A partir de ce modèle, je me suis posé la question de l’intérêt de développer ces compétences chez les élèves dyslexiques et en situation de handicap. En considérant l’élève en situation professionnelle, j’ai tout d’abord considéré la question de la professionnalisation dans un contexte d’exécutant et ensuite en tant que chef d’équipe. Je me suis également appuyée sur les recherches et publications du Professeur Dr Bénédicte Gendron de l’université Paul Valéry de Montpellier qui développe, l’intérêt des compétences émotionnelles chez l’enseignant pour faire face à ses nouvelles missions (5ème colloque Questions de pédagogie dans l’enseignement supérieur, juin 2008 Brest) Si ces compétences sont utiles et précieuses pour permettre à l’enseignant de trouver sa place de leader au sein du groupe classe, ne peuvent-elles pas être transposables à la situation de l’élève apprenant et au futur professionnel qu’il sera ? 5. l’expérience pédagogique L’expérimentation réalisée en mai 2012, s’inspire des théories basées sur les compétences émotionnelles, et s’appuie également sur mon expérience d’enseignante de filière professionnelle. Elle se déroule dans l’ULIS dys du collège Pont de Vivaux à Marseille. Le collège Pont de Vivaux est l’un des établissements pionner dans l’académie d’Aix Marseille. 360 élèves y sont scolarisés, il fait partie du réseau de réussite scolaire (RSS), et l’équipe éducative entière est formée depuis une dizaine d’années à la prise en charge des élèves dys. Cet établissement a ouvert une ULIS dys en septembre 2007 et à mis en place des ateliers de méthodologie et de remédiation cognitive pour les élèves ne relevant pas de l’ULIS mais souffrant de troubles des apprentissages moins sévères et sans reconnaissance de la part de la MDPH (maison départementale des personnes handicapées). 14 Depuis 5 ans, je tisse des liens entre mon lycée et cet établissement qui font partie du même bassin : mini stages en ateliers professionnels, interventions sur l’orientation en LP en classe d’insertion et 3ème DP6. Depuis 2006, la communauté éducative de cet établissement m’a permis d’appréhender la problématique de ces élèves, de leur famille et de leurs enseignants aussi bien sur le plan pédagogique que sur le plan administratif avec la mise en place des PPS, la relation avec le référent de scolarité, la médecine scolaire… Le groupe qui m’est confié se compose de 3 filles et 1 garçon. Tous sont dyslexiques, trois élèves sont en classe de 5ème et un en 4ème. L’un des 3 élèves est plutôt extraverti, les 3 autres sont plus réservés voire effacés pour l’un d’entre eux. Cependant malgré des profils en apparence différents tous ont une petite capacité de concentration. Chacun de ces élèves a un PPS. Les aménagements préconisés sont classiques : agrandissements en format A3, documents photocopiés lorsque cela s’avère nécessaire, temps de reformulation à l’ULIS, tiers temps et reformulation des consignes à l’oral aussi souvent que possible. Aucun n’a une AVS ou un ordinateur comme moyen de compensation pour lecture à voix haute et pour produire des écrits. Tous ont une prise en charge à l’extérieur pour des séances d’orthophonie. J’ai conçu une séquence de 3 séances pour développer les 3 des 4 compétences émotionnelles chez l’élève dyslexique en situation de handicap afin de tester si celles-ci peuvent être utilisées comme une stratégie de compensation. La séquence a pour objectif final de rédiger un paragraphe descriptif L’évaluation finale de cette séquence «expérimentale» peut permettre d’évaluer, dans le cadre du palier 3 du LPC (livret personnel de compétences) : Compétence 1 -maitrise de la langue française – rédiger un texte bref, cohérent et ponctué, en réponse à une question ou à partir d’une consigne donnée. 15 Séance 1 Les objectifs de cette séance sont : Objectifs n°1 : utiliser des capacités sensorielles innées des 5 sens afin de développer la confiance en soi Objectifs n°2 : s’approprier un modèle pour planifier une tâche afin d’acquérir la maîtrise de soi Définition de la confiance en soi selon le psychiatre et psychanalyste Alain Braconnier : « la confiance en soi est un sentiment subjectif. C’est la représentation de soi-même par rapport aux autres » Définition de la maîtrise de soi : Savoir gérer ses états intérieurs, ses impulsions, ses ressources Pour les dyslexiques, la notion de mauvaise estime de soi est une constante. Les efforts fournis sont souvent vains, ils pensent trop vite et dans le désordre. Ils ont souvent une hyper activité associée, et sont bien mal compris par leur entourage. Eux même ne comprennent pas pourquoi ils sont aussi peu performants dans certains domaines et brillants dans d’autres. Ces questions sans réponse, cette incohérence des performances et l’errance jusqu’au diagnostic, accentue la mauvaise estime et le manque de maîtrise de soi. Cette séance dure 2 heures et se compose des 5 phases suivantes : - Les présentations et objectifs - L’évaluation initiale - La dégustation - La remédiation - La mémorisation 16 Les présentations et objectifs En tout premier lieu, je prends soin d’instaurer un climat de confiance. Je me présente et j’insiste sur le fait que « je connais la dyslexie » et qu’il n’y aura pas de jugement de valeur sur le travail qu’ils fourniront. Je leur annonce l’objectif final sans entrer dans les détails pour ne pas parasiter le côté ludique de la séquence, ou pire, être source d’angoisse. Je réponds à une question qui les taraude car lorsque l’un la pose 2 autres acquiescent. Je les sens tendus lorsque la phrase est lâchée : « vous allez pouvoir nous lire ? ». Je m’implique personnellement et leur réponds que « je lis le dyslexique ». Cette phase de mise en confiance est essentielle. Je dois faire vite, j’ai trop peu de temps pour qu’ils puissent juger sur mes actes. L’évaluation initiale (annexe 1) Je propose de faire un test court. Il n’est ni noté, ni « jugé » et pour prouver ce que j’avance, je leur dis que je ne le regarderai seulement à la fin de la 2ème séance. Ce test consiste à observer une CHIP (pétale de pomme de terre frite et salée) en vue d’écrire dans un premier temps une liste de mots la caractérisant et un deuxième, un petit paragraphe la décrivant. Ce test est effectué en 15 minutes. Chacun fait l’effort de respecter les consignes. Cependant l’un d’entre eux a beaucoup de mal à travailler en silence et perturbe la concentration des autres élèves du groupe. Je dois l’aider à rester calme et concentrer pour que ce temps de travail reste viable. Pour cela je me place le plus souvent possible près de lui, je le regarde dans les yeux lorsqu’il s’agite, je lui fais signe de rester silencieux…). Le manque de concentration et l’excitation de cet élève peut très vite se propager au groupe. 17 La dégustation Après les 2 premières phases (présentations et test d’évaluation initiale), phases plutôt anxiogènes, nous passons à une phase plus agréable et plus ludique où chacun pourra travailler sans vraiment en avoir conscience. Sous ses apparences de récréation, cette phase correspond à une véritable offensive dans le développement des compétences émotionnelles. On peut dire qu’une véritable bataille inconsciente va être livrée dans l’esprit de ces jeunes élèves. Il faut, enfin, inverser le cours des évènements, changer le point de vue qu’ils ont sur eux-mêmes : croire en ses capacités, avoir confiance en soi, avoir de l’estime pour soi. Je leur propose de déguster les CHIPS qu’ils ont observées précédemment et de m’en faire un commentaire à l’oral. J’oriente leur dégustation en leur faisant remémorer les 5 sens mis à la disposition de chaque être humain pour appréhender toutes choses. Après la précipitation classique de gouter en premier sous l’influence de la gourmandise, les esprits se calment et se disciplinent. Les chips peuvent désormais être considérées sous différents angles, ceux de la vue, de l’odorat, de l’ouïe, du toucher et du goût. Une sorte de discussion s’établie entre les élèves et les termes recherchés commencent à apparaître. Les élèves se parlent et se répondent, un mot en appelle un autre. Une émulation se produit. Pendant la phase de dégustation, au tableau, j’inscris au fur et à mesure la liste de mots proposés. La remédiation Nous reprenons au tableau la 1ère consigne qui était de faire une liste de termes caractéristiques du produit alimentaire que nous « analysons ». Chaque réponse exacte est mise à l’honneur et chaque réponse inexacte est expliquée et justifiée avant d’être effacée. Ensemble, nous mutualisons nos impressions et nos réflexions jusqu’à établir la liste de mots. Sans leur dire, j’avais commencé à classer chaque mot sur le tableau selon les principes de l’analyse sensorielle. 18 Ensuite, j’explique le principe de l’analyse sensorielle, sa fonction dans les métiers de la restauration et aussi son utilité dans la vie de tous les jours. Je leur montre qu’ils ont balayé de façon intuitive toutes ces catégories sensorielles et pour le prouver je trace des ensembles autour des termes correspondant à chaque sens. Ils constatent par eux même qu’il existe une méthode, un plan pour observer. Je leur confirme ainsi qu’il existe un plan, une méthode pour observer et je pousse ma démonstration en leur faisant comprendre que cette méthode peut s’appliquer à tous les domaines et être utiliser dans la vie de tous les jours mais aussi dans la vie culturelle (face à une sculpture, un tableau, une œuvre architecturale, en botanique etc). Cette méthode a un intérêt dans le monde professionnel. Elle est prometteuse d’avenir car elle rend chacun plus sensible au monde extérieur. Il s’agit maintenant d’entrer dans le vif du sujet, et de réussir à rédiger un paragraphe descriptif de la chip. Ce travail de remédiation est fait en commun. Chacun va ajouter les mots et les nuances nécessaires et construire des phrases. Je leur rappelle qu’ils connaissent une méthode et que le moment est propice pour l’utiliser. Celle-ci doit les aider à garder la maîtrise de leur réflexion mais je ne leur dis pas. L’exercice se passe plutôt bien, je ne relève aucune démission, ni agacement, ni agitation. Chacun se concentre, l’élève le plus « vif » essaie de monopoliser la parole, les 3 autres arrivent néanmoins à participer et se faire entendre. Le résultat que j’écris au tableau sous leur dictée semble les épater. Le tableau tout entier est utilisé ! La mémorisation Une 2ème dégustation est faite afin de faire ce travail de mémorisation. Cette fois 2 chocolats (un extra noir et un au lait) sont observés. La comparaison de 2 produits voisins facilite le travail de description. Elle donne de l’élan à cet exercice. Bien sûr, là encore il faut tempérer l’agitation que produit ce type d’aliment. La méthodologie de l’analyse sensorielle permet de conditionner chaque élève et de le 19 recentrer sur l’objectif. Je rappelle les principes et le travail s’effectue dans une ambiance plutôt calme, les élèves sont détendus, aucune phase n’est oubliée et le nombre de termes caractéristiques trouvé est conséquent. Séance 2 : L’objectif suivant est : Etre capable de lâcher son handicap en utilisant son empathie Définition de l’empathie selon le dictionnaire Larousse : faculté intuitive de se mettre à la place d’autrui, de percevoir ce qu’il ressent. Définition de l’empathie du dictionnaire de psychologie Doron-Parot : Selon psychologue humaniste Carl Rogers : elle consiste à saisir avec autant d’exactitude que possible, les références internes et les composantes émotionnelles d’une autre personne et à les comprendre comme si l’on était cette autre personne. Pour les dyslexiques cela permet une mise à distance de leur handicap. Ils s’identifient à l’aliment observé. Ils se détachent un instant de leur condition d’élève. Cet exercice de mise à distance est utilisé en rééducation. Lors d’un entretien avec une orthophoniste, elle m’avait fait remarquer combien l’utilisation d’un ordinateur pour écrire, permettait une mise à distance, que la personne exprimait la plupart du temps un soulagement de ne plus être crispé sur son stylo, de ne plus subir dysorthographie et dysgraphie. Quelque soit le moyen d’y parvenir, la mise à distance est un atout. Cette séance dure 2 heures et se compose des 4 phases suivantes : - Le rappel de l’objectif principal – rédiger un paragraphe descriptif - L’explication du principe du jeu du portrait chinois - L’explication du principe du jeu du portrait chinois - L’ autoévaluation et l’évaluation de fin de séquence 20 Rappel de l’objectif principal – rédiger un paragraphe descriptif Je rappelle l’objectif général sans trop m’attarder, toujours dans le but de dédramatiser la situation. L’explication du principe du jeu du portrait chinois Cette nouvelle étape propose une nouvelle manière d’utiliser ses connaissances. Nous allons travailler selon le modèle du jeu du portrait chinois. J’explique brièvement les règles du jeu et comment nous allons utiliser ce jeu. Je donne un exemple. L’explication du principe du jeu du portrait chinois Pour que l’apprentissage du jeu soit progressif, pour le 1 ère manche, je suis le « maître du jeu » en choisissant un aliment. Sur le principe du questionnement du portrait chinois, chaque élève doit collecter des indices qui lui permettront de découvrir l’aliment « mystère ». Les jeux suivants, je propose à tour de rôle à chaque élève, un aliment à faire découvrir à ses camarades. Chaque aliment est montré physiquement à l’élève maître du jeu. Ce principe est indispensable pour rester concret même s’il n’y a pas dégustation. Nous ferons une première série avec des aliments réels et une seconde avec des aliments photographiés. Peu à peu, ils se détachent de l’approche physique et font l’effort de puiser dans leurs souvenirs et leurs connaissances. Les aliments analysés sur le principe du portrait chinois sont un yaourt nature, des cerises, un citron, du Roquefort, une pomme, du sel, de la vanille… 21 L’autoévaluation et l’évaluation de fin de séquence Renforcés, dans leur apprentissage, je procède à un test de fin de séquence. Cette fois ci, je leur propose un document (annexe 2) avec 2 grilles d’évaluation et ce avant même de commencer le test. Ces grilles leur permettent de visualiser les objectifs intermédiaires qui mènent à la mise en évidence de la compétence. Je lis à voix haute les consignes, les grilles, et j’explique le tout. Les deux mêmes exercices qu’en séance 1 sont proposés aux élèves, à savoir exercice n°1 « écrire une liste de mots caractéristiques de l’aliment » et exercice n°2 « rédiger un paragraphe décrivant le dernier aliment choisi». Ce dernier aliment est un œuf de poule cru. Les élèves réalisent le test, toujours dans le même temps. Avant de ramasser les copies, je leur demande de faire l’évaluation de leurs exercices sur les grilles de la fiche d’évaluation. Séance 3 : Cette séance dure 1 heure et se compose des 2 phases suivantes : - Rendre les résultats du travail de chacun - Prendre congé Rendre les résultats J’utilise donc cette séance pour communiquer les résultats des évaluations. J’utilise une nouvelle fiche (annexe 3) qui fait la synthèse des 2 grilles vues par les élèves à la séance 2 et j’y rajoute les résultats de l’évaluation initiale pour faire un comparatif. Ainsi, je mets en évidence la progression de chaque élève. Chaque élève visualise ses scores et remarque que le défi est relevé avec succès. C’est une réussite personnelle mais qui s’apprécie en groupe et en présence de leur enseignante spécialisée. 22 Cette séance doit donc rester un moment positif et mémorable. Je souhaite que chacun puisse s’appuyer sur cette réussite pour se lancer de nouveaux défis. Prendre congé Pour rendre ce moment encore plus agréable et donc encore plus mémorable, j’ai organisé un moment de partage autour d’une dégustation informelle cette fois ci. Nous allons découvrir ensemble le goût des premières cerises de l’année. Ce moment nous permet également de nous dire au revoir et me permet de les remercier pour leur participation. 6. L’analyse Dans cette séquence, il n’y a pas à proprement parler d’adaptation pédagogique, mais plutôt une méthodologie proposée à chaque élève. Hypothèse n°1 En prenant appui sur les capacités sensorielles innées, comme les 5 sens, je propose de mettre en situation de réussite et ainsi de valoriser ou revaloriser la confiance en soi des élèves dyslexiques. L’évaluation de la confiance est un exercice fort délicat. Bien sur, il existe des tests utilisés dans les services de ressources humaines des grandes entreprises. Dans le cas de cette expérimentation, je n’ai pas souhaité faire répondre à un questionnaire, de peur de lasser les élèves. J’ai plutôt fait le choix de leur proposer un exercice « inratable » et de supposer que cela allait obligatoirement les rassurer et leur faire plaisir. Cependant, j’ai pu observer des signes tangibles de confiance en soi : pas de position de repli, sourires fréquents, traits du visage détendus, débit de paroles fluide, volume sonore non agressif… 23 Mais la preuve principale de confiance en soi est la motivation qu’elle génère ; sans cette estime de soi, l’exercice n’aurait pu continuer. L’élan que donne la confiance en soi est indispensable pour passer à une étape suivant, à un nouveau défi. Et nous avons continué… Hypothèse n°2 Pour permettre à l’élève dyslexique de planifier une tâche en suivant un plan et ainsi garder la maîtrise de soi, j’envisage de lui fournir le modèle professionnel de l’analyse sensorielle. Cette méthode s’appuie sur une adaptation classique, le « séquençage ». Cette méthode du « travail pas à pas » permet d’organiser l’exécution de la tâche. La problématique de la double tâche ne doit jamais être négligée dans le cas d’un élève dyslexique. En effet, le manque de mémoire de travail entrave la planification de la tâche. Ainsi, en décomposant la tâche en plusieurs phases et en les enchaîner les unes après les autres, elles n’interfèrent entre elles. Ce séquençage est une adaptation de base pour entrer dans les apprentissages pour tout élève ordinaire et est essentielle voire indispensable à tout moment pour les élèves dys. Dans le cas du dyslexique, ce séquençage permet de rester maître de ses émotions, de ne pas céder à la panique, à l’agacement voire à la violence. Dans le cadre de l’expérimentation, les élèves ont parfaitement compris le modèle de l’analyse sensorielle. Cependant, il a été difficile de leur faire respecter la chronologie classique des phases de mise en œuvre de cette technique. J’accepte très vite que dans le cas des élèves de collège son importance n’est pas justifiée. L’objectif sera plutôt de leur faire mémoriser les 5 phases pour qu’aucune ne soit oubliée. J’ai donc renoncé à utiliser ce modèle dans son intégralité. Je leur ai juste demandé de goûter en dernier. Peut être qu’avec plus de temps cela aurait été possible, mais est ce que cela a un réel intérêt pour l’objectif de la séquence ? 24 Hypothèse n°3 En utilisant l’empathie, je propose à chaque élève en situation de handicap de se dépasser et de palier son manque de vocabulaire. Aucun élève n’a refusé de faire les exercices de portrait chinois. Aucun n’a exprimé de doute quand à sa capacité de se mettre à la place d’un aliment pour répondre au questionnement du reste du groupe. Personne n’a parlé de difficulté à trouver des mots, ni même évoqué leur statut de dyslexique. Sans doute parce que nous étions encore dans le domaine de l’oral, néanmoins cette nouvelle étape intermédiaire les a préparés au travail principal : rédiger un paragraphe descriptif. L’analyse des scores évaluation statistiques de l'expérimentation évaluation initiale évaluation de fin évolution de séquence exercice n°1 : nombre de mots élèves n°1 élèves n°2 élèves n°3 élèves n°4 4 5 5 6 19 16 10 11 + + + + 15 11 5 5 3 5 3 4 12 13 8 9 + + + + 9 8 5 5 0 0 0 0 1 1 1 3 + + + + 1 1 1 3 exercice n°2 : nombre de lignes élèves n°1 élèves n°2 élèves n°3 élèves n°4 nombre de figures de style élèves n°1 élèves n°2 élèves n°3 élèves n°4 évaluation de l'exercice n°1 : 25 faire une liste de mots caractéristiques (nombre de mots) évaluation de l'exercice n°2 : faire un paragraphe descriptif de l'aliment observé (nombre de lignes) 26 Chaque élève a amélioré ses scores. Chacun a pu rédiger un paragraphe descriptif 2 à 4 fois plus important en quantité, après les 2 séances. Dans mon analyse de la production des écrits des élèves, je note que le respect du plan reste un point faible. J’avais plutôt imaginé que le volume de mots serait le point le plus difficile à faire évoluer. Le plan ne fut pas facile à respecter, mais cette nouvelle technique n’avait été vue que 2 fois (phase de découverte et phase de mémorisation). En bac professionnel, elle est proposée de nombreuses fois aux lycéens avant d’être complètement acquise. L’utilisation des grilles d’autoévaluation n’a pas été un succès. D’une part, ils ont été déroutés par le document (trop de texte et tableau à double entrée), et d’autre part ils ne semblaient pas habitués à ce type d’exercice. Lorsque que je referai ce type de document : Je transformerai le tableau en questionnaire pour que la lecture du document soit linéaire. Je donnerai les résultats sous forme de graphiques (histogrammes) Conclusions La mobilisation des compétences émotionnelles telles que la confiance en soi, la maîtrise de soi par le biais du modèle professionnel de l’analyse sensorielle et l’empathie assurent des conditions favorables dans l’exécution de tâches qu’elles soient scolaires ou professionnelles. Elles peuvent donc permettre à chaque individu quelque soit son degré de dyslexie d’être un exécutant opérationnel et compétent. Mais ne peut-on aller plus loin dans la démarche ? J’aurais aimé pouvoir expérimenter les compétences émotionnelles dans leur intégralité. J’aurai aimé avoir le temps de proposer à chacun de ces élèves d’ULIS, une position de leadership dans leur classe ordinaire 27 respective et ainsi pouvoir leur démontrer qu’ils avaient les capacités d’être moteur dans un groupe. J’aurais apprécié de pouvoir tester ce que je ressens de façon intuitive : L’élève dyslexique sévère peut prétendre à des fonctions d’encadrement. Ce travail en collège, parmi des élèves d’ULIS, me conforte un peu plus encore dans ma démarche de pédagogue. « S'intéresser aux DYS profitera à tous les élèves, car l'élève DYS chute là ou beaucoup d'élèves lambda trébuchent ». S’intéresser aux dys, c’est faire l’effort indispensable de simplifier ses outils proposés en classe et à tous. C’est aussi prendre conscience que l’école peut être un merveilleux outil de résilience. C’est adopter une position positive, il est de notre responsabilité de dire à chacun de nos élèves qu’il a un potentiel, des compétences, des qualités, un avenir. « J’étais une nullité scolaire et je n’avais jamais été que cela… C’était beaucoup plus qu’une certitude, c’était moi. De cela certains enfants se persuadent très vite, et s’ils ne trouvent personne pour les détromper, comme on peut vivre sans passion ils développent, faute de mieux, la passion de l’échec ». D. PENNAC. "Chagrin d’école". Gallimard. 2007. 28 Annexe n°1 Fiche d’évaluation initiale - semaine 1 Consigne du travail n°1 : faire une liste, la plus longue possible, de mots caractérisant l’aliment observé. L’orthographe n’est pas évaluée. Critère de réussite Critère de réalisation Nombre de termes trouvés J’écris le plus de mots possible Termes caractéristiques (adaptés) Je choisis des termes spécifiques et adaptés au produit Orthographe Evaluation professeur Non évaluée Consigne du travail n°2 : rédiger un paragraphe descriptif de l’aliment observé, aussi long que possible. L’orthographe n’est pas évaluée. Critère de réussite Critère de réalisation Nombre de lignes J’écris autant de lignes que possible Utilisation de termes adaptés et caractéristiques J’utilise le plus de termes adaptés Utilisation d’un plan J’utilise un plan, une organisation pour rédiger Utilisation d’une figure de style (comparaison) J’utilise une comparaison Orthographe Evaluation professeur Non évaluée 29 Annexe n°2 Fiche d’évaluation finale – semaine 2 (fiche en format A3 pour les élèves) Consigne du travail n°1 : Faire une liste de mots caractérisant l’aliment observé Critère de réussite = Ce qui doit être présent dans mon travail Critère de réalisation = Ce que je dois faire Autoévaluation de l’élève J’ai réussi = je mets une croix Présence de termes J’écris au moins 8 mots Emploi de termes adaptés et spécifiques Je choisis des termes spécifiques et adaptés au produit Orthographe correcte Evaluation professeur Je n’ai pas réussi = je mets une croix Non évaluée Consigne du travail n°2 : Rédiger un paragraphe descriptif de l’aliment observé Critère de réussite = Ce qui doit être présent dans mon travail Critère de réalisation = Ce que je dois faire Présence de lignes J’écris 6 lignes minimum Emploi de termes adaptés et spécifiques J’utilise des termes spécifiques et adaptés au produit Respect d’un plan ou d’une logique J’utilise un plan ou je range mes mots par thèmes Utilisation d’une figure de style (comparaison) Je fais une comparaison minimum Orthographe correcte Autoévaluation de l’élève J’ai réussi = je mets une croix Je n’ai pas réussi = je mets une croix Evaluation professeur Objecti f atteint Résultat quantifié Non évaluée 30 Annexe n°3 Fiche de synthèse ………………………………… Travail n°1 : faire une liste, la plus longue possible, de mots caractérisant l’aliment observé Critère de réussite = Ce qui doit être présent dans mon travail Critère de réalisation = Ce que je dois faire Présence de mots J’écris au moins 8 mots / le plus de mots possibles Emploi de termes adaptés et spécifiques Je choisis des termes spécifiques et adaptés au produit Orthographe correcte Comparaison Semaine 1 et semaine 2 1 2 Non évaluée Travail n°2 : rédiger un paragraphe descriptif de l’aliment observé Critère de réussite = Ce qui doit être présent dans mon travail Critère de réalisation = Ce que je dois faire Comparaison Semaine 1 et semaine 2 1 Présence de lignes J’écris 6 lignes min / le plus de lignes possibles Emploi de termes adaptés et spécifiques J’utilise des termes spécifiques et adaptés au produit Respect d’un plan ou d’une logique J’utilise un plan ou je range mes mots par thèmes Utilisation d’une figure de style (comparaison) Je fais une comparaison minimum Orthographe correcte 2 Non évaluée 31 Références Ouvrages : L’intelligence émotionnelle - Daniel GOLEMAN Les compétences émotionnelles - Moïra MIKOLAJCZAK , Jordi QUOIDBACH, Ilios KORTSOU Avoir confiance en soi - Marie HADDOU Aider l’enfant en difficulté scolaire - Jeanne SIAUD-FACCHIN. L'enfant surdouée - Jeanne. SIAUD-FACCHIN. La constante macabre - André Antibi Mourir de Dire - La honte - Boris Cyrulnik Articles et publications : Les cahiers de recherches en éducation et formation : Reconnaissance des compétences émotionnelles comme compétences professionnelles : le cas des enseignants. Analyse des représentations sociales d’acteurs pédagogiques Caroline Letor N° 53 ● DECEMBRE 2006 « Des compétences au capital émotionnel et bien-être et mal-être au travail des enseignants », Gendron B, Article soumis pour le congrès d’actualité de la recherche en éducation et formation, Strasbourg, 2007. Les dossiers de l’Onisep collection handicap. Les dys et la scolarité Psychologie Magazine Dossier Confiance : 5 clés pour croire en soi et en son avenir mars 2012 École et résilience. Sous la direction de Boris Cyrulnik et Jean-Pierre Pourtois. www.psychologue.levillage.org/sme3030w/Ecole_resilience.pdf Sites internet : o http://www.resodys.org/ o http://www.apedys.org o sites.google.com/site/dralainpouhet/ Conférences : Journées dys des associations de la région PACA - Marseille 2011, 2010, 2009, 2008 Journées scientifiques du Centre de Référence des troubles d’apprentissage du CHU de Marseille 2011«Neuropsychologie des troubles de l’attention» 2010 «Le développement cognitif et ses troubles, de la petite enfance à l’adolescence » 32