SUITES ALEATOIRES D`ENTIERS

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SUITES ALEATOIRES D’ENTIERS
Yitzhak KATZNELSON
L’analyse Harmonique dans le Domaine Complexe
Montpellier 11-15 Septembre 1972
Springer Lecture Notes in Math,
vol 336 pp.148-152
Soient Z le groupe des entiers, T = R/Z le groupe dual muni de la topologie usuelle et Td le même groupe muni de ia topologie discrète. Le compactifié
de Bohr B de Z est le groupe dual de Td et l’injection β : Z 7→ B est duale de
l’injection canonique de Td dans T. Grâce a β , Z devient un sousgroupe dense
dans B.
La méthode aléatoire exposée ci-dessous permet de construire des ensembles
Λ “rares” dans Z au sens de i’analyse harmonique mais tels que β (Λ) soit dense
dans B. Cependant, la question la plus intéressante: “existe-t-il une suite de Sidon
dense dans B?” reste ouverte.
Une condition nécessaire et suffisante pour qu’une suite Λ ⊂ Z soit dense dans
B est que, pour tout entier s ≥ 1 et tout x ∈ Ts , l’ensemble Λx des λ x, λ ∈ Λ, soit
dense dans le groupe engendré par x dans Ts .
Ceci dit, nous ne savons même pas s’il existe une suite de Sidon Λ pour laquelle Λx soit dense dans T pour tout x “irrationnel” de T. Nous montrons au §1
que certaines suites aléatoires sont denses dane B. Les applications à l’analyse
harmonique sont données au §2.
§1—Suites aléatoires denses dans le compactifié de Bohr des entiers.
Nous considérons une classe de suites aléatoires construites de ia manière
suivante: soit nk , k ≥ 1, une suite rapidement croissante d’entiers, l’on suppose
nk+1 > n2k , et choisissons au hasard `k nombres entiers dans l’intervalle ]nk−1 , nk ].
S
Notons l’ensemble ainsi obtenu par Λk et posons Λ = Λk . Il n’est pas très difficile
de voir ([1]) que Λ est presque sûrement de Sidon si et seulement si `k = O(log Nk ).
1
Théorème. Supposons qu’il existe c > 0 tel que l’inégalité `k > c log nk soit satisfaite pour une infinité de valeurs de k . Soit η > 0 tel que eη c < 1. Alors il est
presque sûr que, pour tout s ≥ 1 et tout x ∈ Ts ,
µx (Λx) > η s ,
µx etant la mesure de Haar du sous groupe fermé engendré par x dans Ts .
Corollaire. Si `k n’est pas O(log nk ), k → ∞, presque toutes les suites Λ sont
denses dans le compactifié de Bohr de Z.
En effet, les hypothèses du théorème étant valables pour tout c > 0, la conclusion l’est pour tout η < 1. Donc pour tout x ∈ Ts , Λx est dense dans le groupe
engendré par x.
Passons à la preuve du théorème. Il suffit de démontrer que, pour tout entier
s ≥ 1, presque toutes les suites Λ sont telles que, pour tout x ∈ Ts
µx (Λx) > η s .
D’autre part, quitte a changer d’indices, on peut supposer que
`k ≥ c log nk
pour tout
k ≥ 1.
s
Soit maintenant {Ωk }∞
1 une suite dénombrable d’ouverts de T ayant les deux propriétés suivantes: tout ouvert U ⊂ Ts est réunion croissante d’ouverts de la suite et
tout ouvert apparaissant dans la suite {Ωk }∞
1 y apparaı̂t une infinité de fois.
Soient E ⊂ Ts une partie compacte et x ∈ Ts . Montrer que µx (E) ≥ η s revient
à montrer que, pour tout k ≥ 1, µx (Ωk ) > 1 − η s implique que Ωk ∩ E n’est pas
vide.
L’idée de la preuve est de remplacer l’ensemble non dénombrable des points
de test x ∈ Ts par un ensemble fini Gk (adapté a la partie Λk de Λ).
Notons d’abord par Fk l’ensemble des (knk )s points de Ts de la forme
a=(
j1
js
,...
)
knk
knk
tels que
0 ≤ j1 < knk , . . . , 0 ≤ js < knk
et notons par Gk le sous ensemble de Fk formé des a tels que
card {n : nk−1 < n ≤ nk
et na ∈ Ωk } > (1 − η s )nk .
Ces définitions de Fk et de Gk ne dépendent pas de Λ. Pour tout a ∈ Gk la
probabilité de choisir l’ensembie Λk de sorte que λk a ∩ Ωk = 0/ est majorée par
2
η s`k ; le nombre d’éléments de Gk ne dépassant pas (knk )s , la probabilité pour que,
pour tout a ∈ Gk , Λk a ∩ Ωk ne soit pas vide, dépasse
1 − (knk )s η s`k > 1 − ks (eη c )s log nk .
Puisque eη c < 1 , la croissance rapide de la suite des nk entraı̂ne la convergence
de la série
∞
∑ ks (eη c )s log n .
k
k=1
Du théorème de Borel-Cantelli, nous déduisons le lemme suivant.
Lemme. Pour presque toutes les suites Λ il existe un k0 tel que pour tout k > k0 et
tout a ∈ Gk , Λa rencontre Ωk .
Montrons maintenant que cette dernière propriété entraı̂ne µx (Λx) ≥ η s . Soit
s
0
x ∈ Ts , Ω un ouvert de la suite des (Ω j )∞
1 tel que µx (Ω) > 1 − η . Appelons Ω
00
∞
0
0
00
et Ω deux autres ouverts de la suite des (Ω j )1 tels que Ω ⊂ Ω, Ω ⊂ Ω , et que,
cepndant, µx (Ω00 ) > 1 − η s . La distance d’un nombre réel x1 à l’entier le plus
proche est notée kx1 k et pour tout x = (x1 . . . , xs ) ∈ Ts , on pose
kxk = kx1 k + · · · + kxs k.
Soit ε > 0 assez petit pour que tout point y ∈ Ts dont la distance à Ω0 ne dépass
pas ε appartienne à Ω. De même, pour Ω0 et Ω00 . Pour N ≥ N0 , on a
Card{n : 1 ≤ n ≤ N
et nx ∈ Ω00 } > (1 − η s )N.
Pour tout entier k tel que Ωk = Ω0 , que nk > N0 , et assez grand pour que k > εs ,
appelons ak un élément de Fk tel que
kak − xk <
s
.
knk
On a knak − nxk < ε pour 1 < n ≤ nk et donc nx ∈ Ω00 implique nak ∈ Ωk = Ω0 .
Par conséquent ak ∈ Gk et grâce au lemme Λk a ∩ Ω0 n’est pas vide. Le même
raisonnement fournit Λk x ∩ Ω 6= 0,
/ ce qu’il fallait démontrer.
§2—Applications a l’analyse harmonique.
Etant donnée une fonction ϕ(q) qui tend vers l’infini avec q (arbitrairement
lentement), on peut construire un ensemble Λ d’entiers naturels, dense dans le
compactifié de Bohr de Z, mais tel que, pour toute somme trigonométrique f dont
les fréquences appartiennent à Λ, on ait:
√
k f kq ≤ ϕ(q) qk f k2 .
3
Il suffit que, dans la construction aléatoire d’une suite d’entiers du §1, l’on
prenne
`k = ψ(k) log nk
et que ψ(k) croisse assez lentement vers +∞ (en fonction de ϕ).
Références
[1] Katznelson — Malliavin, Vérification statistique . . . C.R. Acad. Sci. Paris, t.
262 pp. 490-492 (1966)
[2] Rudin, Trigonometric series with gaps, Jour. of Math. and Mechanics, Vol.
9, pp. 203 - 238 (1960)
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