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© Université de Liège - http://reflexions.ulg.ac.be/ - 20 April 2017
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performants le matin mais se couchent de bonne heure. D'autres encore, à l'inverse, ont des difficultés à se
lever le matin, préfèrent travailler en soirée et se coucher en pleine nuit.
Des différences significatives
Aspirante du FNRS, Christina Schmidt fut la cheville ouvrière d'une étude, publiée dans Science (1)en
2009,qui mit en scène des «extrêmes du matin» et des «extrêmes du soir» (Lire l'article «Du soir ou
du matin?»). Une épreuve d'attention visuelle fut proposée aux uns et aux autres. Résultats ? Les
seconds se révélèrent plus résistants à la privation de sommeil que les premiers. Parallèlement, la région
suprachiasmatique et le locus coeruleus, deux régions cérébrales anatomiquement interconnectées et
fortement impliquées dans le signal circadien qui sous-tend l'éveil et régule notre niveau de vigilance à l'éveil,
étaient activés différemment dans les deux groupes.
(1) Schmidt, C., Collette, F., Leclercq, Y., Sterpenich, V., Vandewalle, G., Berthomier, P., Berthomier, C., Philipps, C., Tinguely, G., Darsaud, A., Gais, S.,
Schabus, M., Desseilles, M., DangVu, T., Salmon, E., Balteau, E., Degueldre, C., Luxen, A., Maquet, P., Cajochen, C., & Peigneux, P. (2009). Homeostatic
Sleep Pressure and Responses to Sustained Attention in the Suprachiasmatic Area, dans Science 324, 516.
La conclusion apportée par Christina Schmidt était la suivante : «La pression de sommeil retentit
négativement sur le niveau d'activité de la région du noyau suprachiasmatique pendant la tâche de
vigilance. Nous avons ainsi montré pour la première fois chez l'Homme -et la deuxième fois toutes espèces
confondues - que l'activité des circuits cérébraux responsables de la régulation circadienne est modulée par
les processus homéostatiques du sommeil. Ceci suggère que les "sujets du matin" souffrent plus fortement
que "ceux du soir" de l'impact de la pression de sommeil accumulée au cours de la journée, pression qui
empêche l'expression optimale du signal d'alerte par la région du noyau suprachiasmatique et le locus
coeruleus.»
PERIOD3 : un miroir à deux faces
Une autre étude, fut alors menée au Centre de Recherches du Cyclotron en collaboration avec le Surrey
Sleep Research Centre de l'Université du Surrey, en Angleterre. Elle était axée sur la vulnérabilité
individuelle à la privation de sommeil et ses résultats furent publiés le 24 juin 2009 dans The Journal of
Neuroscience (2).
D'abord les antécédents. L'équipe de Derk-Jan Dijk, de l'Université du Surrey, a montré en 2007 que
l'un des gènes de l'horloge circadienne des mammifères, PERIOD3 (PER3), intervient dans la régulation
homéostatique du sommeil. Le gène PERIOD3 est doté d'un polymorphisme spécifique aux primates
caractérisé par la répétition d'un même motif, soit quatre fois, soit cinq fois. Il existe des homozygotes de
la forme (allèle) courte PER34/4 et d'autres de la forme longue PER35/5. Mieux encore : les chercheurs
anglais ont mis en évidence que les individus PER35/5 sont plus sensibles à la privation de sommeil que
les autres (PER34/4). «Assez curieusement, les deux populations ne se distinguent en rien par leurs
marqueurs circadiens, précise Pierre Maquet. Ainsi, on n'observe aucune différence entre elles au niveau de
la sécrétion de mélatonine ou de cortisol, de la température centrale, de l'expression des gènes d'horloge
dans les leucocytes, etc. En revanche, il est acquis que les "5/5" accumulent plus vite la pression de
sommeil. La preuve en est qu'ils produisent plus d'ondes lentes lors des premiers cycles de sommeil.»
Ici, ce sont les gènes qui parlent, et non des préférences individuelles. Au cours d'une journée normale, les
deux groupes d'individus («4/4» et «5/5») maintiennent un niveau de performances cognitives relativement