De l`asile à la ville : une géographie de la prise en charge de

UniversitéParis1Panthéon‐Sorbonne
Écoledoctoraledegéographie
2010
Thèsededoctoratdegéographie
MagaliCOLDEFY
Del’asileàlaville:unegéographie
delapriseenchargedelamaladiementaleenFrance
SousladirectiondeDenisePUMAIN,Professeure,UniversitéParis1Panthéon‐Sorbonne
Soutenancele22juin2010
Membresdujury:
MichelBUSSI,Professeur,UniversitédeRouen
SarahCURTIS,Professeure,UniversitédeDurham,Royaume‐Uni
SergeKANNAS,Psychiatrehospitalier,CoordinateurdelaMissionNationaled’AppuienSantéMentale
VéroniqueLUCAS‐GABRIELLI,Maîtrederecherche,Institutderechercheetdocumentationenéconomiedelasanté
GrahamMOON,Professeur,UniversitédeSouthampton,Royaume‐Uni
DenisePUMAIN,Professeure,UniversitédeParis1
AlainVAGUET,Maîtredeconférences,UniversitédeRouen
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Convention CIFRE-n°351/2006
Image couverture : Berrang, Berceau de la fantaisie, Atelier du non-faire
Magali Coldefy De l’asile à la ville : une géographie de la prise en charge de la maladie mentale en France
Thèse Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – 2010 - 3 -
Prologue
Paris, le 22 juin 2010
Bulletin de sortie de Mlle M.
Admise dans le service du Dr Pumain en septembre 2004, la patiente Mlle M. a montré une
excellente compliance au traitement et est autorisée à sortir de l’établissement le 22 juin
2010. Son état est jugé stabilisé. La patiente est très reconnaissante envers l’équipe soignante
qui l’a accompagnée toutes ces années et tient à retracer son itinéraire au sein du secteur
75GEO.
Mlle M. est venue rencontrer le Dr Pumain en septembre 2004, sur les conseils de
différentes personnes, anciens patients du Dr Pumain et collègues. Elle avait également lu
certains ouvrages de l’éminente Dr Pumain et pensait que celle-ci serait le meilleur praticien
pour l’aider.
Elle obtient un rendez-vous très rapidement et présente ses problèmes. Le docteur l’écoute
attentivement et bien que Mlle M. ne dépende pas de son secteur géographique (elle avait
été suivie auparavant par les équipes spécialisées en santé des secteurs 92G10 et 34G03),
accepte de la prendre en charge dans son service.
Mlle M. présente certains troubles de la personnalité, elle est suivie dans un service de
géographie mais a du mal à accepter cette identité qu’elle a l’impression d’emprunter. Elle
ne sait pas exactement ce qu’elle est : sociologue, démographe, chercheure en santé,
apprentie-géographe. Elle se revendique des sciences sociales, son seul repère identitaire.
Magali Coldefy De l’asile à la ville : une géographie de la prise en charge de la maladie mentale en France
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Après quelques séances, le diagnostic du Dr Pumain est ferme, Mlle M. souffre d’un trouble
doctoral (forme particulière des troubles de la personnalité anankastique caractérisés « par
un sentiment de doute, un perfectionnisme, une scrupulosité, des vérifications et des
préoccupations pour les détails, un entêtement, une prudence et une rigidité excessives »
(Classification internationale des maladies, 10e révision)). Cette pathologie dont la
prévalence exacte n’est pas connue, touche essentiellement des individus jeunes, ayant un
diplôme d’études supérieures. Le nombre de cas recensés est particulièrement important
dans les grands centres urbains sièges d’université. Hommes et femmes peuvent être affectés
de la même manière, bien que certaines sous-catégories de la maladie présentent des ratios
hommes/femmes très différents. Si les premiers symptômes de la maladie apparaissent en
général vers 22-23 ans, le cas de Mlle M. se distingue par le développement tardif des
premiers symptômes. La pathologie s’est en effet déclenchée chez la jeune femme à
l’approche de la trentaine.
Les symptômes de la maladie sont les suivants : troubles de l’humeur et cyclothymie, la
patiente peut passer de phases d’enthousiasme très intenses avec une forte labilité
émotionnelle lorsqu’elle évoque son sujet, à des sentiments d’angoisse, d’anxiété très
prégnants quant à sa capacité à avancer. La pathologie s’accompagne également de
nombreux symptômes tels que des maux de tête, une irritabilité, une diminution de la
tolérance au stress, une dégradation du sommeil et une perte d’appétit accompagnée parfois
de quelques accès boulimiques compulsifs. Il existe presque toujours une diminution de
l’estime de soi et de la confiance en soi, et fréquemment des idées de culpabilité
(notamment à l’approche des soirées, des week-ends et des vacances) ou de dévalorisation
du travail effectué. Nous observons également fréquemment une altération significative des
modes de comportement qui étaient habituels au sujet avant la survenue de la maladie. Les
personnes souffrant de trouble doctoral tendent ainsi à s’isoler socialement, restant seuls à
ruminer leurs obsessions.
Dans le cas de Mlle M., la maladie s’est développée dans un milieu fortement pathogène.
Diplômée en démographie et en sociologie, Mlle M. travaille dans un Observatoire
Régional de la Santé. L’observation des fortes disparités territoriales de santé en région
Centre lui donne envie de s’initier à la géographie de la santé. Elle rencontre alors le
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Thèse Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – 2010 - 5 -
Dr Picheral, spécialiste réputé exerçant à Montpellier, qui lui fait découvrir la discipline.
Malheureusement, Mlle M. changera de travail en cours d’année et ne pourra finir son
apprentissage. Elle travaille désormais à la Direction de la Recherche, des Etudes, de
l’Evaluation et des Statistiques du Ministère de la Santé (DREES) comme chargée d’études
sur l’offre de soins en psychiatrie. Elle découvre avec enthousiasme le milieu « psy », est
passionnée par son sujet, aidée en cela par sa fréquentation de professionnels, médecins ou
décideurs investis dans ce vaste champ. Mais là encore, les disparités territoriales d’offre de
soins sont criantes et l’idée de la nécessité d’une formation complémentaire en géographie
réinvestit l’esprit de la patiente. Elle en parle à la DREES qui va lui permettre de réaliser
son projet. Le service du Dr Picheral a fermé et l’offre de soins en géographie de la santé est
très limitée dans notre pays. Elle se tourne alors vers le service du Dr Salem à Nanterre qui,
là aussi, l’accepte malgré son trouble de l’identité géographique. Le Dr Salem et son équipe
vont lui permettre de finaliser sa formation en géographie de la santé et de découvrir lors de
son mémoire les nombreux travaux étrangers réalisés en matière de géographie de la santé
mentale. C’est là le facteur déclenchant de la maladie : « Il n’est pas possible de laisser la
psychiatrie française absente de ces recherches en géographie ! ». C’est alors que la patiente
rencontre le Dr Pumain pour lui expliquer son projet, son obsession, ses troubles
identitaires. Le Dr Pumain diagnostique immédiatement le trouble doctoral en géographie
et lui propose un suivi dans son service de pointe. Le suivi doit être intense et Mlle M. ne
parvient à suivre le traitement avec son emploi à temps plein au Ministère. Elle va donc
chercher les moyens de se consacrer davantage à sa prise en charge. Elle mettra deux ans à
obtenir un temps partiel thérapeutique à travers une convention CIFRE de l’ANRT.
Pendant les trois années qui vont suivre, Mlle M. est prise en charge en accueil familial
thérapeutique à l’Institut de Recherche et de Documentation en Economie de la Santé
(IRDES). Elle est très bien intégrée et bénéficie de conditions d’accueil exceptionnelles.
L’encadrement soignant est d’une qualité rare, veille à son état de santé, à son bien-être, à
ses conditions de réalisation professionnelle et personnelle. La patiente tient à remercier
toute l’équipe soignante de l’IRDES et plus particulièrement Véronique Lucas-Gabrielli,
Julien Mousquès, Dominique Goldfarb, Catherine Sermet, pour leur soutien et leurs
encouragements, mais aussi leur respect du temps précieux consacré à sa thèse, à son soin.
François Tonnellier a fourni de précieux conseils à la lecture des écrits de la patiente. Dans
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