334 S. Guillaume et al.
perception de la prise en charge, leurs relations sociofami-
liales, leurs attentes vis-à-vis des professionnels de santé et
de leur environnement social. L’objectif était d’avoir une
image représentative de la prise en charge et du ressenti de
patients souffrant de troubles bipolaires I en France afin de
mettre en évidence les besoins des patients et la qualité de
leur prise en charge.
Méthode
L’étude ECHO a été dirigée par un comité scientifique de
psychiatres1avec le soutien des laboratoires Bristol-Myers
Squibb et Otsuka Pharmaceutical France. Elle a été réalisée
par la société IPSOS Health en deux étapes.
La première phase qualitative a consisté en des entre-
tiens semi-structurés d’une heure auprès de 12 patients
bipolaires I. Cette première étape a permis l’élaboration
d’un guide d’entretien permettant une évaluation relative-
ment exhaustive du vécu de la maladie par les patients. Ce
guide d’entretien a été utilisé au cours de la phase 2.
Durant la seconde phase, 300 patients souffrant d’un
trouble bipolaire I ont été interrogés à l’aide du question-
naire élaboré en phase 1 entre décembre 2008 et février
2009, à leur domicile au travers d’entretiens téléphoniques.
Ces entretiens ont été effectués par des interviewers préala-
blement formés à la passation du questionnaire. Les sujets
ont été sélectionnés via des psychiatres, de réseaux asso-
ciatifs et des médecins généralistes. Le diagnostic a été
confirmé par un Mood Disorders Questionnaire (MDQ) posi-
tif [21]. Ces patients ont été sélectionnés selon la méthode
des quotas de représentativité nationale INSEE 99 pour être
représentatifs de la population franc¸aise.
Le guide d’entretien utilisé dans la phase 2 (disponible
sur requête) comprend 32 questions portant sur l’évolution
et l’histoire du trouble, les répercussions du trouble dans
la vie quotidienne, la conscience et le vécu du trouble et
les attentes des patients. L’interviewer lisait la question et
pouvait la reformuler ou donner des précisions si besoin.
Les réponses des patients aboutissaient à la cotation par
l’interviewer d’une variable quantitative comme une durée,
une intensité sur une échelle bornée de 0 à 10 ou la sélection
d’une réponse parmi un certain nombre d’items proposés.
Trois exemples de question sont retranscrits en Annexe 1.
La durée moyenne de passation était d’environ 30 à
40 minutes.
Une analyse statistique descriptive a été réalisée. Les
variables quantitatives ont été analysées par la moyenne et
l’écart-type, les variables qualitatives par le nombre et le
pourcentage.
Résultats
Caractéristiques de l’échantillon et histoire du
trouble
Sur 300 patients inclus : 67 % sont des femmes, l’âge moyen
à l’inclusion était de 40,6 ans (±11,2 ans), 50 % vivent
1Comité scientifique : Pr P. Courtet, Dr J.-P. Chabannes,
Dr J.-A. Meynard.
maritalement, 63 % mentionnent des antécédents familiaux
de premier ou deuxième degrés de troubles psychiatriques.
Quatre-vingt-dix-neuf pour cent des patients ont
consulté au moins une fois pour des signes psychologiques
en amont du diagnostic. Comme le montre la Fig. 1, les
principaux motifs de consultation étaient des symptômes
dépressifs (71 %), des troubles du sommeil (63 %) et/ou
une asthénie (62 %). L’âge moyen de ces premières consul-
tations était de 25 ans (±11,1) et 38 % des patients ont
consulté avant l’âge de 18 ans. L’âge moyen au moment de
la pose du diagnostic de trouble bipolaire était de 30,1 ans
(±11,3). L’âge moyen lors de la première hospitalisation
était de 30,3 ans (±11,6). Le délai moyen entre la première
consultation et le diagnostic est donc d’environ cinq ans.
Dans l’immense majorité des cas (92 %), le psychiatre est
l’intervenant de santé qui a posé le diagnostic alors que
74 % des patients étaient également suivis par un médecin
généraliste. Dans 47 % des cas, ce diagnostic avait été posé
à l’occasion de la première hospitalisation.
Modalités de la prise en charge thérapeutique
Le motif de la première hospitalisation rapporté par le sujet
est généralement un épisode dépressif majeur (41 % des
cas), un accès maniaque (38 % des cas) ou une tentative de
suicide (18 % des cas). Depuis le début du trouble, si 100 %
des participants ont été hospitalisés pour accès maniaque,
86 % ont également été hospitalisés pour une symptoma-
tologie dépressive. Concernant le mode d’hospitalisation,
57 % des patients ont demandé au moins une fois à
être hospitalisés (dans 65 % des cas lors d’une phase
dépressive), 36 % ont déjà été hospitalisés sous le mode
d’hospitalisation à la demande d’un tiers et 8 % ont déjà
été hospitalisés sur le mode de l’hospitalisation d’office.
Dans 78 % des cas, la demande d’hospitalisation sous
contrainte a été faite à l’occasion d’un accès maniaque ou
mixte.
Comme le montre la Fig. 2, le ressenti général des
patients vis-à-vis de l’hospitalisation est ambivalent. Pour
un grand nombre d’entre eux, le vécu apparaît positif (sen-
timent de sécurité 84 %, d’être aidé 81 %), même si ces
expériences sont aussi associées à la perception d’un enfer-
mement (52 %) ou encore de rejet par le monde extérieur
(21 %). Enfin, 42 % restituent une indifférence vis-à-vis de la
situation qu’ils vivent.
Au moment de l’entretien, 97 % de ces patients étaient
suivis par un ou plusieurs professionnels de santé : psychiatre
(73 %), médecin généraliste (55 %) et psychothérapeute ou
psychologue (14 %). Le psychiatre exerc¸ait en milieu libéral
dans 54 % des cas.
Quatre-vingt-treize pour cent des patients déclarent
prendre un traitement. Dans 44 % des cas le traitement est
une monothérapie, dans 24 % des cas une bithérapie, dans
13 % des cas une trithérapie et dans 6 % des cas les pres-
criptions déclarées comprennent quatre médicaments ou
plus. Seuls 34 % de ces patients prennent un stabilisateur
de l’humeur (lithium, anticonvulsivant à action thymoré-
gulatrice ou antipsychotique atypique ayant une AMM en
France dans le trouble bipolaire), alors que 44 % prennent
un antidépresseur et 38 % prennent des anxiolytiques. Les
médicaments les plus souvent pris sont la fluoxétine (16 %),