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Les troubles conductifs
du sportif
Comment interpréter, surveiller, voire explorer, les troubles de conduction asymptomatiques
fréquemment rencontrés chez le sportif ?
Dr Marc Ferrière (Département de Cardiologie, CHU de Montpellier)
S
elon le consensus de la Société
Européenne de Cardiologie,
l’ECG de repos fait partie du
minimum requis du bilan cardiovasculaire de dépistage du sportif de compétition, qu’il soit de haut niveau ou
non. On recherche les pathologies
rares mais potentiellement dangereuses que sont la cardiopathie hypertrophique, la maladie arythmogène du
ventricule droit et les canalopathies.
La majorité des ECG sont normaux,
ou montrent des particularités plus
fréquentes chez le sportif très entraîné
(cœur d’athlète).
chez les sportifs. Ils semblent liés à
une susceptibilité individuelle et
dépendre d’une sensibilité du nœud
AV indépendante de celle du nœud
sinusal aux influences du système
nerveux autonome. Ainsi, l’espace PR
est, en règle générale, allongé chez le
sportif et sans relation avec une éventuelle bradycardie. Le BAV de premier
degré, 5 à 10 fois plus fréquent que
dans la population sédentaire, est rencontré 3 fois plus souvent chez le
sportif que chez la sportive. Non évolutif dans le temps si l’activité physique persiste, il disparaît après arrêt
de l’entraînement. Il n’est pas plus fréquent chez le vétéran.
> Troubles de conduction
pariétaux
Troubles intra-atriaux
L’élargissement de l’onde P est beaucoup plus fréquent que chez le sédentaire. Défini comme une hypertrophie
auriculaire électrique, il est sans rapport, cependant, avec le diamètre
échographique. Il n’a pas de signification pathologique.
Une origine extrasinusale du pacemaker auriculaire, sans caractère
pathologique, est aussi fréquente. En
général, l’influx naît dans l’oreillette
droite. Le wandering pace maker est
plus rare que le BAV du premier degré.
> Pauses cardiaques
Les pauses cardiaques (période d’asystolie ou de bloc sino-auriculaire) sont
des constatations fréquentes, lors de
la période nocturne, sur les Holter de
24 heures. Elles ont la même origine
vagale que la bradycardie sinusale du
sportif à laquelle elles sont souvent
associées. Elles sont indépendantes
de l’existence d’un trouble de conduction atrio-ventriculaire (BAV). Plus fréquentes chez les vétérans, elles
dépassent 3 secondes dans un tiers des
cas. Elles doivent toujours être asymptomatiques.
> Blocs
artrio-ventriculaires
Les BAV sont aussi plus fréquents
Si des BAV de second degré avec
période Luciani-Wenckebach peuvent
aussi être observés, les BAV de plus
haut grade sont beaucoup plus rares
et doivent faire rechercher une pathologie sous-jacente avant d’affirmer
leur caractère fonctionnel.
Chez les sportifs asymptomatiques, le
pronostic à long terme de ces troubles
de conduction est bon, même si l’activité sportive est poursuivie au même
niveau. Chez des sujets symptomatiques, au repos ou à l’effort, la diminution de l’entraînement, qui doit
toujours être proposée en première
intention, peut être insuffisante et
une stimulation définitive peut être
nécessaire.
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Bloc incomplet droit
D’autant plus fréquent que le rythme
cardiaque est lent, il est considéré
comme une variante de la normale.
Comme chez le sédentaire, il est deux
fois plus fréquent chez l’homme. Présent chez au moins 15 % des sportifs
et 30 % des endurants, sa fréquence
n’augmente pas avec l’âge, mais avec
l’ancienneté de l’entraînement. Sa
physiopathologie est mal expliquée
mais il semble associé à une hypertrophie ventriculaire droite. Il n’évolue pas dans le temps.
Bloc complet droit
Rare, ce n’est pas un signe du cœur d’athlète. Il peut masquer l’hypertrophie
adaptative du sportif en diminuant
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Le point sur...
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ischémie au niveau de la microcirculation. Si le bilan cardiovasculaire
exhaustif est normal, la pratique sportive sous surveillance annuelle peut
être autorisée.
> En conclusion
Les particularités de la conduction du
cœur d’athlète ne doivent être ni
sous-estimées, ni surestimées. Elles
ne se conçoivent que chez des sujets
asymptomatiques. Elles ne s’observent qu’en cas de haut niveau d’entraînement et plus souvent chez les
endurants. Leur découverte chez une
femme doit un peu plus alerter. L’analyse et la comparaison d’ECG successifs sont le gage de l’utilité de cet
examen basique de dépistage. ❚
Elargissement
de l'onde P
(D2, VF, V2-3)
chez un sportif
professionnel
de 32 ans.
“naturellement” le voltage des QRS et
rendant donc les critères de Cornell et
Sokolow moins sensibles. Il est associé
à une hypertrophie ventriculaire droite.
Il peut, parfois, poser, dans cette population, des problèmes diagnostiques avec
la dysplasie ventriculaire droite arythmogène et le syndrome de Brugada.
Bloc complet gauche
Exceptionnel au repos, il doit faire
rechercher systématiquement une
cardiopathie qui, dans 70 % des cas,
sera une coronaropathie.
Déviations axiales
Observées dans 5 % des cas et plus
souvent chez les hommes et les sportifs vétérans, les déviations axiales
gauche (≥ - 30°) ou droite (> 110°), ne
font pas partie des signes ECG du
cœur d’athlète et doivent conduire à
un bilan approfondi.
Troubles de conduction
pariétaux à l'effort
Ils sont toujours évocateurs de pathologie cardiaque, notamment coronarienne. Le bloc gauche d’effort peut être
douloureux lors de son installation,
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même sans lésion coronaire significative. Son incidence est de
0,17 à 0,5 % des épreuves d'effort tout
venant (10 000 BBG d'effort annuels
aux USA !), y compris chez le sportif.
Des anomalies associées à la scintigraphie font parfois évoquer une
MOTS CLÉS
Bloc atrio-ventriculaire,
Bloc incomplet, Bloc complet,
Déviation axiale,
Pauses cardiaques,
Sportif, Trouble intra-atrial
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