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Introduction
Les recherches sur le phénomène des communications de masse se sont appuyées au cours
du XXe siècle sur les acquis méthodologiques et cognitives des savoirs établis comme la
sociologie, les sciences du langage et la psychologie. Les approches sur le phénomène
communicationnel se sont inspirées des travaux de la théorie de l’information et de la
cybernétique pour laquelle l’information, transformée par l’émetteur en un signal avant
d’être captée par le récepteur, est une quantité qui relève des lois de la physique. Pour ce
courant de recherche rendu célèbre par Shannon, le phénomène communicationnel relève
des sciences exactes car l’étude de la circulation de l’information entre les machines
s’avère aussi valable pour les humains. Cependant, cette formulation évacue totalement les
questions fondamentales liées au sens et aux groupes sociaux. C’est la raison pour laquelle
Roman Jakobson, théoricien majeur en linguistique, formule un second schéma et tente
d’humaniser les schémas de Shannon en y intégrant l’homme et la spécificité de son
langage (Ollivier : 2007 : 76). Les linguistes envisagent les langues comme des systèmes
distincts mais qui entretiennent plusieurs types de relations. Les concepts définis dans les
Cours de linguistique générale de Ferdinand de Saussure, qui esquisse une sémiologie
générale en passant de la grammaire historique à l’étude des systèmes de signes, ont été
repris dans l’étude du phénomène communicationnel. Ce projet de sémiologie générale qui
a mis en place les outils nécessaires au développement de la linguistique a été repris par le
sémiologue Roland Barthes dans l’étude des communications de masse (ibid. : 9-10).
Les recherches sur la communication ont emprunté des outils théoriques et
méthodologiques aux pionniers de la sociologie qui ont livré les premiers concepts sur le
phénomène de la communication de masse. La sociologie s’attache fondamentalement à
l’étude des groupes sociaux et à leurs relations et propose à travers différentes écoles des
concepts afin d’analyser des situations de communication, non plus à partir du sens, mais à
partir des groupes et des processus mis en jeu comme l’appartenance et l’exclusion, les
identités et les hiérarchies, etc. Bruno Ollivier (id. : 89-91) dégage dans cette perspective
quelques concepts de la première école française de sociologie repris plus tard dans les
recherches sur la communication. Ainsi le « fait social » constitue pour Émile Durkheim
un objet d’étude susceptible de dévoiler des lois qui le régissent. La communication occupe
en effet une place centrale dans la réalisation des faits sociaux puisqu’elle assure la