Pharmacie clinique et thérapeutique
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CHAPITRE 35
TRAITEMENT DE L’INSOMNIE
Catherine Dejean
Pharmacien attaché, Centre hospitalier Henri- Laborit, Maßtre de Conférences des Universités, Poitiers, France
Denis Richard
Praticien hospitalier, pharmacien, chef de service pharmacie, Centre hospitalier Henri- Laborit, Poitiers, France
Jean- Louis Senon
Professeur des universités, chef de service, service universitaire de psychiatrie et de psychologie médicale,
Centre hospitalier universitaire, Poitiers, France
GÉNÉRALITÉS
L’insomnie
La clinique des troubles du sommeil a évolué ces derniÚres
années. Devenue plus précise, elle permet une prise en charge
codiïŹ Ă©e qui mĂ©nage une part moindre Ă  la chimiothĂ©rapie,
la restreignant — du moins en thĂ©orie — Ă  des indications
ciblĂ©es. Les nombreux centres d’hypnologie (ou centres
« veille- sommeil ») implantés dans plusieurs établissements
de soins et accessibles pour l’exploration comme le traitement
des troubles graves et invalidants du sommeil témoignent de
cette mutation.
Les troubles du sommeil ne se limitent pas, évidemment,
aux seules insomnies objet de ce chapitre. Hypersomnies et
troubles du rythme circadien ne doivent pas ĂȘtre mĂ©connus
du fait de leur incidence sur la vie quotidienne (accidents de
la circulation ou accidents du travail). Ils sont d’ailleurs par-
fois eux- mĂȘmes induits par un mĂ©susage des tranquillisants
et des hypnotiques.
L’insomnie est un symptîme banal qui concerne entre
30 et 50 % de la population adulte des pays occidentaux,
toutes formes confondues, et 10 Ă  20 % de cette population
en ce qui concerne les formes les plus graves. Rarement iso-
lée (insomnie chronique primaire, sans cause évidente), elle
survient volontiers dans le cadre d’une pathologie psychia-
trique (dépression) ou somatique (dyspnée nocturne, maladie
rhumatismale). Dans la pratique, une insomnie isolée est à
ce point rare qu’il faut remettre en question sa rĂ©alitĂ© face Ă 
chaque patient insomniaque qui nie avoir des problĂšmes psy-
chologiques, relationnels ou existentiels.
La tendance actuelle privilĂ©gie une dĂ©ïŹ nition de l’insomnie
avant tout subjective. Elle caractérise un sommeil perçu par
le patient comme difïŹ cile Ă  obtenir, insufïŹ sant, insatisfaisant
ou non rĂ©cupĂ©rateur. La durĂ©e objective du sommeil peut ĂȘtre
normale ou peu abrĂ©gĂ©e et l’endormissement peut ĂȘtre rapide,
mais on repÚre de façon récurrente une fragmentation exces-
sive de la phase de sommeil.
Il est difïŹ cile d’établir une nosologie de l’insomnie car les
causes comme les mécanismes de cette affection sont toujours
mĂ©connus. La classiïŹ cation internationale des troubles du
sommeil distingue trois formes d’insomnie intrinsùque (dont
la cause a pour origine l’organisme) et douze formes d’insom-
nie extrinsĂšque (dont la cause est extĂ©rieure Ă  l’organisme),
sans mĂȘme Ă©voquer les insomnies d’origine neurologique,
psychiatrique ou somatique. Elle est d’une extraordinaire
complexitĂ© pour le clinicien. La classiïŹ cation du DSM- IV est
plus pratique. Toutefois, nous proposons ici une classiïŹ ca-
tion schématique, ayant avant tout une valeur pédagogique
(tableau35.1).
Médicaments utilisés
Avant tout, il importe de souligner que la prescription d’hyp-
notiques ne peut constituer en toute situation une réponse
adaptĂ©e. Le recours Ă  d’autres mĂ©dicaments peut s’avĂ©rer plus
pertinent, ainsi que la mise en Ɠuvre d’autres stratĂ©gies thĂ©ra-
peutiques que la chimiothérapie (psychothérapie, etc.).
Il n’y a plus lieu d’utiliser aujourd’hui des produits dont
l’index thĂ©rapeutique est aussi faible que les barbituriques
ou l’hydrate de choral, d’ailleurs retirĂ©s du commerce. Par
consĂ©quent, nous avons pris ici le parti de n’évoquer ces
médicaments que dans la présentation générale, pour infor-
mation, sans les développer par ailleurs (le lecteur trouvera
toutefois mention des barbituriques dans d’autres chapitres
car le phénobarbital est toujours prescrit comme anti-
épileptique).
Les principaux hypnotiques commercialisés sont présentés
dans le tableau35.2.
PARTIE VII. PATHOLOGIE NEUROLOGIQUE ET PSYCHIATRIQUE
688
Présentation des hypnotiques
Barbituriques
Le squelette chimique commun Ă  tous les barbituriques est
l’acide barbiturique, synthĂ©tisĂ© par le chimiste allemand Adolf
von Baeyer en 1864 à partir du noyau malonylurée. DÚs 1882,
Conrad et Guthzeit isolùrent l’un de ses sels, le barbital, mais
ce n’est qu’en 1903 qu’Emil Fischer et J. von Mehring en
découvrirent les propriétés hypnotiques (Véronal).
Ce mĂ©dicament constitua le chef de ïŹ le d’une famille de
molécules nombreuses dont, notamment, le phénobarbital
(GardĂ©nal) indiquĂ© aujourd’hui dans la prĂ©vention des crises
d’épilepsie, etc.
Utilisés de façon en hypnologie, les barbituriques induisent
rapidement une dépendance et ont un index thérapeutique
extrĂȘmement rĂ©duit (la dose potentiellement mortelle est seu-
lement deux à trois fois supérieure à la dose thérapeutique).
Ils ne sont plus commercialisés en France depuis 1988 dans
cette indication.
Tableau35.1.
ClassiïŹ cation simpliïŹ Ă©e des insomnies.
Types d’insomnie CatĂ©gories cliniques Origines et signes cliniques Orientations gĂ©nĂ©rales du traitement
Insomnies occasionnelles
ou situationnelles
Accumulation d’évĂ©nements stressants Prescription d’hypnotiques (ou de tranquillisants)
pour une durĂ©e limitĂ©e (<4semaines)
Insomnies
chroniques
Insomnies
psychophysiologiques
État de tension musculaire
etpsychologique
Conditionnement négatif au sommeil
Relaxation
Biofeedback
Thérapies comportementales
Insomnies organiques InsufïŹ sance cardiaque ou respiratoire
Douleurs chroniques
Traitement symptomatique
Impatience des membres inférieurs Traitement spécialisé
Recours Ă  un centre veille- sommeil
Myoclonies nocturnes Recours Ă  un centre veille- sommeil
Apnées du sommeil Traitement spécialisé
Recours Ă  un centre veille- sommeil
Insomnies
pharmacologiques
Insomnies
médicamenteuses
Consommation réguliÚre
detranquillisants ou d’hypnotiques
Sevrage médicamenteux trÚs progressif
etmĂ©dicalisĂ©
Insomnies « rebond » ArrĂȘt brutal d’un traitement
tranquillisant ou hypnotique
Sevrage trÚs progressif et médicalisé
Tableau35.2.
Principaux hypnotiques utilisĂ©s dans le traitement de l’insomnie.
Familles DCI Noms commerciaux Présentations
Benzodiazépines estazolam Nuctalon Comprimé sécable 2 mg
ïŹ‚ unitrazĂ©pam Rohypnol ComprimĂ© sĂ©cable 1 mg
loprazolam Havlane Comprimé sécable 1 mg
lormétazépam Noctamide Comprimé sécable 1 et 2 mg
nitrazépam Mogadon Comprimé sécable 5 mg
témazépam Normison Capsule 10 et 20 mg
Imidazopyridines zolpidem Stilnox Comprimé sécable 10 mg
Cyclopyrrolones zopiclone Imovane Comprimé sécable 7,5 mg
Antihistaminiques alimémazine ThéralÚne Comprimé 5 mg, gouttes et sirop
doxylamine Donormyl Comprimé sécable 15 mg effervescent ou non
niaprazine Nopron Enfants Sirop
prométhazine Phénergan Comprimé 25 mg
Mélatoninergiques mélatonine Circadin Comprimé LP 2 mg
CHAPITRE 35. TRAITEMENT DE L’INSOMNIE
689
Chloral
Synthétisé par le chimiste allemand von Liebig en 1832, le
chloral donna lieu au XIXesiùcle à un usage toxicomaniaque,
proche de celui induit par les barbituriques.
Le chloral est actif comme hypnotique Ă  des doses com-
prises entre 0,5 et 1 gramme chez l’adulte, mais perd rapide-
ment son efïŹ cacitĂ©. Il a Ă©tĂ© conseillĂ© pour traiter les insomnies
des sujets ùgés déments, mais son administration expose à un
important rebond d’insomnie dùs que le traitement est sus-
pendu. Les interactions médicamenteuses sont nombreuses.
Par ailleurs, l’usage du chloral est fortement irritant pour
la muqueuse digestive. Il induit, au plan neurologique, une
ébriété accompagnée de migraine, de troubles de la marche,
parfois d’une excitation paradoxale, de confusion mentale
voire d’hallucinations chez le sujet ĂągĂ©. L’intoxication aiguĂ«
Ă©voque celle rĂ©alisĂ©e par les barbituriques. Elle s’accom-
pagne de signes hĂ©patiques et digestifs aggravĂ©s allant jusqu’à
la nécrose gastrique. Des décÚs par arythmie cardiaque ont
été rapportés. De plus, le potentiel cancérigÚne du chloral
sur modÚle murin (tumeurs hépatiques) a été démontré. Ce
médicament a été retiré du marché en France en 2000.
Benzodiazépines
Voir chapitre36 « Traitement de l’anxiĂ©tĂ© ».
Analogues pharmacologiques
desbenzodiazĂ©pines
Les cyclopyrrolones sont représentées par la zopiclone (Imo-
vane) et les imidazopyridines par le zolpidem (Stilnox). Ces
deux familles sont proches de celle des benzodiazépines, du
moins quant Ă  leur mĂ©canisme d’action et leur proïŹ l pharma-
cologique. Ces médicaments plus récents respectent mieux
l’architecture physiologique du sommeil, comme l’attestent
les études hypnographiques. Elles sont également relati-
vement mieux tolĂ©rĂ©es : moins d’effets rebond, rĂ©veil plus
agréable, etc. Pour autant, il convient de toujours demeurer
prudent, leur prescription n’étant en rien anodine.
Mélatoninergiques
Commercialisée comme médicament, la mélatonine (Cir-
cadin) n’a pas d’action myorelaxante, anxiolytique ou pro-
amnĂ©siante. Elle est indiquĂ©e dans l’insomnie idiopathique
avec sommeil de mauvaise qualité chez le patient de plus de
55 ans, sans que des donnĂ©es prĂ©cises soient actuellement
disponibles quant Ă  son usage chez l’insufïŹ sant rĂ©nal et/ou
hépatique.
Divers
D’autres composĂ©s sont indiquĂ©s dans le traitement des
troubles du sommeil, notamment des antihistaminiques H1.
On peut citer la niaprazine (Nopron), actuellement indiquée
dans le traitement des insomnies occasionnelles de l’enfant
(noyau pipérazine), la doxylamine (Donormyl, Méréprine), la
promĂ©thazine (PhĂ©nergan) ou l’alimĂ©mazine (ThĂ©ralĂšne).
Le rapport bĂ©nĂ©ïŹ ce/risque des associations de principes
actifs (acéprométazine + carbamate de la Mépronizine ;
acéprométazine + acépromazine + clorazépate du Noctran)
(voir chapitre41 « Traitement de l’anxiĂ©tĂ© ») a Ă©tĂ© réévaluĂ©
par l’Afssaps en 2011. Ayant Ă©tĂ© jugĂ© nĂ©gatif, ces mĂ©dicaments
ont Ă©tĂ© retirĂ©s du marchĂ©, ïŹ n 2011 (Noctran) et dĂ©but 2012
(Mépronizine).
MĂ©canisme d’action des hypnotiques
Le mĂ©canisme de l’action hypnotique des benzodiazĂ©pines
comme celui de leurs analogues (et comme celui des barbitu-
riques) s’explique par une action sur la transmission GABA-
ergique, comme Ă©voquĂ© au chapitre36 sur le traitement de
l’anxiĂ©tĂ©. Les manifestations latĂ©rales de somnolence, d’apa-
thie et de ralentissement des rĂ©ïŹ‚ exes observĂ©es chez les usa-
gers d’anxiolytique trouvent leur pleine expression dans l’in-
dication spĂ©ciïŹ que des insomnies.
Les composés les plus récents (zopiclone, zolpidem) ont
toutefois une action plus spĂ©ciïŹ que sur certains rĂ©cepteurs
aux benzodiazépines (récepteurs de type I), ce qui explique-
rait la moindre incidence de leurs effets indésirables et leur
meilleure maniabilité.
Hormone sĂ©crĂ©tĂ©e par l’épiphyse (ou glande pinĂ©ale, une
glande endocrine située sous le plancher du 3e ventricule qui
traite l’information photopĂ©riodique et joue un rĂŽle capital
dans la photosynchronisation circadienne et saisonniĂšre), la
mélatonine est impliquée dans la régulation du rythme circa-
dien. Sa structure est voisine de celle de la sérotonine. Aug-
mentant dÚs la tombée de la nuit, la sécrétion de mélatonine
connaüt un pic entre 2 et 4 heures du matin puis diminue
jusqu’au lever du jour: elle est corrĂ©lĂ©e Ă  une action hypno-
tique induite par sa liaison aux récepteurs mélatoninergiques
centraux MT1, MT2 (plus secondairement MT3). Le tonus
mĂ©latoninergique diminue avec l’ñge, ce qui explique que les
sujets ĂągĂ©s dorment moins que plus jeunes: l’administration
de mélatonine exogÚne (Circadin) tend alors à régulariser
le sommeil chez les patients souffrant d’insomnie primaire
(c’est- à- dire d’une insomnie sans cause somatique, psychique,
toxique ou environnementale évidente).
Pharmacocinétique des hypnotiques
Benzodiazépines
Voir chapitre36 « Traitement de l’anxiĂ©tĂ© ».
Analogues des benzodiazépines
Les cyclopyrrolones (zopiclone, Imovane) et les imidazopy-
ridines (zolpidem, Stilnox) s’administrent per os, avec une
rĂ©sorption satisfaisante, non inïŹ‚ uencĂ©e par les aliments. Ces
hypnotiques doivent ĂȘtre administrĂ©s immĂ©diatement avant le
coucher car leur dĂ©lai d’action n’est que de 10 Ă  15min. Le pic
plasmatique est atteint en environ 1heure pour la zopiclone
et 1,8heure pour le zolpidem. Les deux groupes de mĂ©dica-
ments subissent oxydation, desméthylation et hydroxylation.
PARTIE VII. PATHOLOGIE NEUROLOGIQUE ET PSYCHIATRIQUE
690
Leur métabolisation est importante (le zolpidem est totale-
ment résorbé, mais un effet de premier passage hépatique
limite sa biodisponibilité à 70 % environ). Quatre à cinq pour
cent seulement de la dose de zopiclone sont éliminés sous
forme inchangée, la molécule mÚre étant, contrairement au
zolpidem, transformée en un catabolite partiellement actif,
son N- oxyde.
La zopiclone, comme son métabolite actif, a une demi-
vie d’élimination variable, oscillant entre 3 et 6 heures,
allant jusqu’à 8heures chez l’insufïŹ sant hĂ©patique ou le
sujet ùgé. Le zolpidem a une demi- vie constamment plus
brĂšve, de l’ordre de 2,4heures. Ces deux composĂ©s fran-
chissent Ă©galement la barriĂšre fƓto- placentaire et passent
dans le lait.
Le tableau 35.3 prĂ©sente les caractĂ©ristiques pharmaco-
cinétiques des principaux hypnotiques benzodiazépiniques et
apparentés.
Mélatonine
La mĂ©latonine (Circadin) bĂ©nĂ©ïŹ cie d’une absorption com-
plĂšte, mais qui peut ĂȘtre rĂ©duite de 50 % chez le sujet ĂągĂ©.
Un important effet de premier passage hépatique (85 %)
explique que la biodisponibilité ne soit que de 15 % envi-
ron. Le pic plasmatique s’observe 3heures aprùs la prise.
La liaison plasmatique de la mélatonine est de 60 % (albu-
mine, alpha- 1 glycoprotĂ©ine, lipoprotĂ©ines). L’hormone
subit un important métabolisme hépatique par certains iso-
formes du cytochrome P450: CYP1A1, CYP1A2, CYP2C19
puisque seulement 2 % de la mélatonine est excrétée
sous forme inchangée. Son métabolite principal est la
6- sulfatoxy- mélatonine (6- S- MT), inactive. La demi- vie ter-
minale d’élimination est d’environ 4heures. 90 % de la dose
est excrétée par voie rénale, sous forme de métabolites. Il
existe une importante variabilité interindividuelle dans le
mĂ©tabolisme. De mĂȘme, le mĂ©tabolisme de l’hormone est
plus réduit chez le sujet ùgé.
CRITÈRES DE CHOIX
THÉRAPEUTIQUE
Les hypnotiques prescrits en France aujourd’hui ont de nom-
breux points communs (exception faite de la mélatonine, dont
l’usage reste limitĂ© et l’efïŹ cacitĂ© modeste). Ils agissent comme
les anxiolytiques sur le récepteur au GABA. Leur résorption
aprĂšs administration orale est rapide et ils sont rapidement
éliminés. La différence essentielle avec les benzodiazépines
Ă©voquĂ©es au chapitre « Traitement de l’anxiĂ©tĂ© » rĂ©side dans
la cinétique de leur effet, permettant une action précoce (utile
pour l’endormissement), intense (sufïŹ sante pour assurer le
sommeil et non une simple anxiolyse) et brÚve (pour prévenir
les effets indésirables diurnes).
Le traitement de l’insomnie doit intĂ©grer des mesures d’hy-
giùne de vie. Par exemple, nombre d’insomniaques sont de gros
consommateurs de café: il importe avant tout traitement de
réduire ou de cesser cette consommation, et de ne pas consom-
mer de cafĂ© mĂȘme si l’on a recours Ă  des mĂ©dicaments. Le trai-
tement doit aussi intégrer une prise en compte étio logique des
troubles: agir sur le bruit, la tempĂ©rature, les conditions de tra-
vail (travail posté imposant des rythmes en contradiction avec
les rythmes biologiques), le stress psychique.
Selon le type d’insomnie
Un traitement spĂ©ciïŹ que de l’affection primaire est nĂ©cessaire
le plus souvent dans les insomnies accompagnant un trouble
psychiatrique (dépression, psychose, etc.). Dans ce cas, des
antipsychotiques ou des antidĂ©presseurs, surtout s’ils ont une
composante sédative importante peuvent agir à la fois sur
l’affection psychiatrique et sur l’insomnie. Pour autant, cer-
tains antidépresseurs, connus comme stimulants, peuvent en
revanche favoriser les insomnies (ex.: moclobĂ©mide = Mocla-
mine et autres inhibiteurs des mono- amines oxydases). Il en
va de mĂȘme pour l’anxiĂ©té: des benzodiazĂ©pines administrĂ©es
Tableau35.3.
Caractéristiques pharmacocinétiques des principales BZD et apparentés hypnotiques.
DCI Noms
commerciaux
AfïŹ nitĂ©s T max (h) Demi- vies
d’élimination (h)
Principaux
métabolites actifs
Demi- vies d’élimination
des métabolites actifs (h)
Benzodiazépines hypnotiques ayant une demi- vie moyenne et prolongée
Estazolam Nuctalon 1 Ă  1,5 10 Ă  30 nombreux
FlunitrazĂ©pam Rohypnol ++++ 1 Ă  1,5 15 Ă  30 norïŹ‚ unitrazĂ©pam 20 Ă  40
Loprazolam Havlane +++ 1 Ă  4 8 Ă  10 0
Lormétazépam Noctamide ++++ 1 à 1,5 10 à 12 0
Nitrazépam Mogadon +++ 1 à 2 18 à 30 0
Témazépam Normison ++++ 0,75 à 4 5 à 8 oxazépam (5 %) 4 à 15
Hypnotiques non benzodiazépiniques
Zolpidem Stilnox 0,5 Ă  3,5 2 Ă  10 0
Zopiclone Imovane 1 Ă  3,5 5 Ă  8 N- oxyde 4,5
CHAPITRE 35. TRAITEMENT DE L’INSOMNIE
691
Ă  trĂšs faible dose, dans une perspective simplement anxio-
lytique, peuvent sufïŹ re Ă  rĂ©guler le sommeil.
Le traitement médicamenteux est privilégié, à court
terme, dans les insomnies occasionnelles (sur 2 Ă  5 jours
par exemple) ou dans les insomnies d’origine somatique, dùs
lors que le traitement de la cause est impossible ou insufïŹ -
sant (sans excéder 4 semaines en général). Si la majorité des
insomnies relĂšvent de l’hygiĂšne de vie, un traitement mĂ©dica-
menteux peut toutefois s’avĂ©rer nĂ©cessaire. Il faut alors prĂ©-
venir le risque de survenue d’une dĂ©pendance (voir infra), en
prescrivant un traitement discontinu. Les insomnies sévÚres
ou organiques peuvent, elles, imposer un traitement quoti-
dien sur une période aussi limitée que possible.
Les hypnotiques ayant une demi- vie courte (zopiclone,
zolpidem) sont recommandés dans le traitement des insom-
nies d’endormissement mais il faut proscrire leur utilisation à
posologie plus élevée dans les insomnies de maintien (surve-
nant en milieu ou en ïŹ n de nuit), qui nĂ©cessitent le recours
à un composé de demi- vie moyenne ou prolongée (lorméta-
zĂ©pam, nitrazĂ©pam, estazolam) (tableau35.3). La mĂ©latonine
(Circadin) est indiquĂ©e de façon assez sĂ©lective dans l’insom-
nie du sujet ĂągĂ© de plus de 55ans, sur une pĂ©riode qui est,
comme tous les hypnotiques, limitée (ici à 3 semaines).
Selon le terrain
Pathologies associées
InsufïŹ sance respiratoire
Les benzodiazĂ©pines doivent ĂȘtre administrĂ©es avec prudence
ou, souvent, totalement évitées, chez les patients atteints
d’une insufïŹ sance respiratoire sĂ©vĂšre en raison du risque
d’apnĂ©es. On privilĂ©gie alors le recours Ă  des antihistami-
niques Ă  des produits type zolpidem (Stilnox) ou zopiclone
(Imovane), mieux tolĂ©rĂ©s, voire Ă  la mĂ©latonine, dont l’usage
reste cependant assez marginal. Pour autant, un syndrome
d’apnĂ©e du sommeil installĂ© constitue une contre- indication
absolue Ă  l’utilisation des hypnotiques benzodiazĂ©piniques et
des composés apparentés.
InsufïŹ sance hĂ©patique
La demi- vie de la zopiclone (Imovane) sera augmentée, allant
jusqu’à 9heures ; le temps requis pour obtenir le pic plasma-
tique sera aussi allongé. En conséquence, une posologie limi-
tée à 3,75 mg/j (demi- dose) sera alors préconisée. (Voir cha-
pitre 36 « Traitement de l’anxiĂ©tĂ© » pour les benzodiazĂ©pines.)
Il en va de mĂȘme pour le zolpidem (Stilnox), pour lequel la
demi- vie pourra atteindre alors prùs de 10heures. Il est donc
souvent sufïŹ sant de limiter l’administration Ă  5 mg/j en ce cas.
Une insufïŹ sance hĂ©patique sĂ©vĂšre constitue une contre-
indication absolue à l’administration de ces deux produits
comme Ă  celle des benzodiazĂ©pines. L’usage de la mĂ©latonine
est dĂ©conseillĂ© chez l’insufïŹ sant hĂ©patique.
InsufïŹ sance rĂ©nale
Elle impose d’adapter la posologie de la zopiclone (Imovane),
sans excĂ©der un comprimĂ© par jour (voir chapitre36, « Trai-
tement de l’anxiĂ©tĂ© » pour les benzodiazĂ©pines). La prudence
s’impose lors de l’usage de la mĂ©latonine.
Myasthénie
Cette affection représente une contre- indication relative à
l’emploi de benzodiazĂ©pines apparentĂ©es comme des benzo-
diazĂ©pines elles- mĂȘmes. Dans ce cadre, ces produits ne seront
administrĂ©s qu’exceptionnellement et sous surveillance mĂ©di-
cale accrue.
Glaucome par fermeture de l’angle,
rétention urinaire
Ce type de pathologie constitue bien sûr une contre- indication
à l’emploi d’antihistaminiques en raison de leur composante
anticholinergique.
Chez la personne ùgée
La posologie d’un traitement hypnotique doit ĂȘtre systĂ©ma-
tiquement réduite chez la personne ùgée, pour prévenir tout
risque de confusion mentale, d’effets sĂ©datifs rĂ©siduels (risque
de chute avec fracture du col) ou d’hypotension artĂ©rielle
(voir le chapitre 36, « Traitement de l’anxiĂ©tĂ© » sur les ben-
zodiazépines).
D’une façon plus spĂ©ciïŹ que, la biodisponibilitĂ© de la zopi-
clone (Imovane) est augmentĂ©e, passant d’environ 80 % chez
le sujet jeune à plus de 90 % chez celui de plus de 75ans. Son
catabolisme est, en revanche, fortement rĂ©duit et l’élimination
sous forme inchangée domine. La demi- vie augmente aussi
sensiblement, passant de 3- 6heures à 8heures ou plus. Mais
le produit ne semble pas pour autant s’accumuler aprùs admi-
nistration réitérée.
Le volume de distribution du zolpidem (Stilnox) est réduit
avec, en corollaire, augmentation des concentrations sériques
maximales et de la demi- vie.
Rappelons que la mĂ©latonine (Circadin) n’a d’indication,
prĂ©cisĂ©ment, que chez le sujet de plus de 55ans, oĂč elle est
prescrite dans le traitement de l’insomnie idiopathique avec
sommeil de mauvaise qualité. Son absorption est réduite de
50 % chez le sujet ùgé.
Chez l’enfant
Le recours Ă  des hypnotiques doit ĂȘtre absolument proscrit
chez l’enfant, en dehors des troubles du sommeil s’intĂ©grant
dans un tableau psychopathologique avéré et en dehors du
cas particulier que représentent les parasomnies. La médica-
tion familiale est pourtant fréquente dans ce domaine (ben-
zodiazĂ©pines et niaprazine, Nopron) et n’amĂ©liore guĂšre la
symptomatologie, en Ă©tant pour autant responsable d’une
somnolence diurne et d’une fatigue chronique. La prise en
charge des insomnies du nourrisson et de l’enfant passe avant
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