diplome interuniversitaire autisme

publicité
UNIVERSITE BORDEAUX II UNIVERSITE MONTPELLIER I UNIVERSITE TOULOUSE III
FACULTE DE MEDECINE DE BORDEAUX
_________________________________________________________________________
DIPLOME INTERUNIVERSITAIRE AUTISME
L’ADULTE AUTISTE EN INSTITUTION
ELEMENTS CONSTITUTIFS DE REFLEXION
POUR UN PROJET DE PRISE EN CHARGE
Mémoire soutenu par Bernard MARTIN
Directeur de mémoire :
Jury :
Monsieur le Professeur LAZARTIGUES
Monsieur le Professeur M. BOUVARD
Madame le Docteur C. MARTIN
Monsieur le Docteur J. P. RENERIC
1
Avant de vous donner ce mémoire pour lecture, nous tenons à remercier toutes les
personnes qui nous ont apporté, aide, soutien, disponibilité et conseils avisés tout au long
de cette année. Ces remerciements sont plus particulièrement adressés à :
Monsieur Le Professeur LAZARTIGUES
Directeur de mémoire
Madame Anne GIRAUD SAUVEUR
Fondation France Telecom
pour son soutien financier
Madame Gabrielle PRUNY
Présidente de l’A.I.P.S.H. - Lorient (56)
Association pour l’Insertion Professionnelle et Sociale des Handicapés
Monsieur Alain PLANSON
Directeur du secteur social de l’A.I.P.S.H. - Lorient (56)
Monsieur Michel LE CORFF
Directeur Administratif C.H.S. CHARCOT - Caudan (56)
Madame Catherine NORMIER
pour son livre « Bleu Marine » et son accueil
Monsieur Nicolas NORMIER - Paris (75)
Architecte Urbaniste
et tous nos partenaires de Ouest Réseau Autisme
2
SOMMAIRE
- INTRODUCTION
- 1ère PARTIE
- CHAPITRE I Définition ......................................................
p. 3
- CHAPITRE II Classifications ................................................
p. 6
Classification Internationale des Handicaps ..... p. 8
Intégration des concepts ................................. p. 10
- CHAPITRE III Facteurs d’hétérogénéités
Données épidémiologiques
....................... p. 11
Facteurs d’évolution ....................................... p. 12
Pathologies associées à l’autisme .................... p. 14
Troubles associés à l’autisme ........................... p. 15
Autres troubles ...............................................
p. 17
-RESUME ................................................................................
p. 20
-2ème PARTIE
- L’EXISTANT
- CHAPITRE I L’enfance dans le secteur psychiatrique ............
L’adulte dans le secteur psychiatrique ...............
L’enfance dans le secteur médico-social ............
A la frontière du sanitaire et du médico-social ...
L’adulte dans le secteur médico-social ..............
Types de financements
Financements état ...........................................
Financements aide sociale ..............................
Financements mixtes ......................................
Tableaux récapitulatifs ....................................
p. 21
p. 22
p. 24
p. 25
p. 27
p. 28
p. 29
p. 29
p. 31
- CHAPITRE II Situations étudiées
Etablissement médico-social ............................ p. 33
Etablissement sanitaire .................................... p. 36
3
- CHAPITRE III Evaluation du dispositif autisme en Bretagne
Evaluation quantitative ...................................
Evaluation qualitative .....................................
p. 38
p. 39
- RESUME ...............................................................................
p. 42
- 3ème PARTIE
- L’INSTITUTION
- Introduction ............................................................................
p. 43
- CHAPITRE I Circulaire du 25 avril 95 ..................................
Du sanitaire vers le médico-social ...................
Les attentes des parents ..................................
Les attentes des professionnels .......................
p. 44
p. 45
p. 46
p. 48
- CHAPITRE II Le projet .......................................................
Les objectifs généraux ...................................
Projet de vie et projet architectural ................
Implantation géographique.......................
Architecture ..................................................
Organisation structurelle ...............................
p. 49
p. 50
p. 53
p. 53
p. 55
p. 59
- CHAPITRE III Le projet de vie .............................................
Le projet pédagogique ..................................
L’évaluation ..................................................
Le projet éducatif individualisé ......................
Activités individuelles et de groupes ..............
Les parents et le lieu de vie ............................
p. 60
p. 60
p. 64
p. 65
p. 67
p. 71
- CHAPITRE IV Le personnel ................................................
Formation du personnel ..............................
Réunions, régulations, supervisions ..............
p. 71
p. 74
p. 75
- RESUME ..............................................................................
p. 76
- CONCLUSION .....................................................................
p. 78
- BIBLIOGRAPHIE
4
INTRODUCTION
L’autisme à n’en pas douter est depuis quelques années sous les feux de l’actualité.
De nombreuses publications, recherches, émissions de radio et de télévision sont
consacrées à ce sujet très sensible. Longtemps l’autisme a été sujet de débats houleux, de
théories dogmatiques ; les écoles de pensée se sont affrontées sans jamais vraiment
s’écouter. On a beaucoup parlé d’autisme, de l’autisme infantile, beaucoup moins des
personnes adultes autistes ! ! ! et encore moins des endroits ou elles se trouvaient ! ! !
Sous l’impulsion des familles regroupées en associations, de l’état, des régions, une
définition officielle de l’autisme a vu le jour, l’autisme est devenu cause nationale de santé
publique, l’autisme est devenu un handicap. La circulaire VEIL AS/EN n°95/12 du 27 avril
1995 et l’ordonnance de 1996 ont tracé les grandes lignes de ce que devra être la prise en
charge de l’autisme en France :
Droit au diagnostic, droit à la prise en charge thérapeutique, pédagogique et éducative des
enfants, adolescents et adultes atteints du syndrome autistique, collaboration avec les
familles.
Dans chaque région un Comité Technique Régional sur l’Autisme a vu le jour, les Centres
Ressources de l’Autisme commencent à se mettre en place.
Aujourd’hui les conflits se sont un peu apaisés, le débat sur les origines de l’autisme n’est
pas clos, mais les uns et les autres commencent à se parler, à s’écouter. En ce qui concerne
la prise en charge des personnes autistes, sur les bases de la circulaire 95/12 du 27 avril
1995, dite “circulaire VEIL ” un consensus semble avoir été trouvé.
Malgré tout le travail qui a été accomplit depuis quelques années, nous le savons, la
réalité de la prise en charge des personnes adultes autistes n’est pas particulièrement
réjouissante.
Trop d’adultes autistes sont encore à la charge de leurs familles, sans solutions
satisfaisantes, à la recherche du centre qui “ voudra ” bien les recevoir dans des conditions
acceptables.
Trop d’adultes autistes sont dans les institutions psychiatriques sans prise en charge
éducative et thérapeutique.
Trop d’adultes autistes sont dans les établissements médico-sociaux sans véritable prise en
charge spécifique.
En règles générales, l’absence de diagnostic, l’absence de références théoriques,
l’incompréhension des situations problématiques liées à la pathologie autistique auxquelles
ils sont confrontés mettent les professionnels en difficulté.
Les rapports de l’IGAS et de l’ANDEM, la circulaire du 27 avril 1995 et la loi de
1996, le glissement souhaité et observé du sanitaire vers le médico-social laisse préjuger de
5
nouvelles perspectives dans le champ de la prise en charge des personnes autistes. Des
établissements vont se restructurer, des unités spécifiques vont apparaître, de nouveaux
établissements vont voir le jour.
C’est la prise en charge des personnes autistes, et plus particulièrement leur prise en charge
en institution qui sera l’objet de ce mémoire.
De l’écriture du projet à la conception de ces nouveaux lieux d’accueils, de la prise en
charge éducative, pédagogique et thérapeutique au projet de vie de l’adulte autiste nous
pensons qu’il faut proposer de nouveaux modèles.
Notre démarche tout au long de cette recherche s’articulera autour d’une redistribution des
frontières qui séparent l’éducation et le soin, le lieu de vie et la prise en charge, la ville et
ces nouveaux citoyens trop longtemps exclus.
C’est à partir d’une définition de l’autisme, et des pathologies autistiques, d’une
description clinique, épidémiologique et sémiologique de ce syndrome que nous allons
dans la deuxième partie de ce mémoire étudier les modes de prise en charge des personnes
autistes en France. De l’enfance à l’âge adulte, nous nous proposons de passer en revue
l’ensemble des équipements sanitaires ou médico-sociaux qui peuvent être impliqués à un
moment ou à un autre de la vie d’une personne autiste . Pour illustrer la prise en charge
actuelle nous étudierons deux institutions morbihannaises qui accueillent des adultes
autistes, l’une dans le champ du médico-social, l’autre dans le sanitaire.
La troisième partie sera consacrée, à partir des nouvelles dispositions (circulaire
VEIL) à l’institution. C’est à dire comment, à partir d’une idée, élaborer un projet et
proposer une prise en charge globale, cohérente et harmonieuse à des personnes adultes
autistes, souvent très déficitaires, dans un lieu qui ne soit pas vécu comme institutionnel.
Ce travail à pour objectif, à partir de notre expérience dans le domaine de l’autisme,
de proposer un tour d’horizon le plus complet possible sur les éléments à prendre en
compte lors de l’élaboration d’un projet d’établissement, sur les modes de prise en charge
que l’on y mettra en œuvre ainsi que sur les professionnels qui devront y intervenir.
6
1ère PARTIE
CHAPITRE I
1.1 DEFINITION
En 1943, Léo KANNER, (1) Psychiatre américain d’origine autrichienne, à travers
l’histoire de 11 enfants (huit garçons et trois filles) décrit pour la première fois un
syndrome qu’il nomme “autisme infantile précoce ”. Dans cet article, “autistic disturbances
of affective contact ” paru dans la revue Nervous Child, L. Kanner ne définit pas le terme
autisme. Il utilise le mot créé par BLEULER (2) en 1911 pour désigner la tendance
pathologique de certains malades à se couper de leur environnement.
Pour L. Kanner, le trouble fondamental le plus frappant “pathognomonique ” est
l’incapacité de ces enfants à établir des relations de façon normale avec des personnes et
des situations et cela dès le début de leur vie. Autres caractéristiques relevées par L.
Kanner, “l’obsession anxieuse de la permanence ” qui se traduit par une résistance aux
changements, par un désir quasi obsessionnel de l’immuabilité. “ Les changements des
routines quotidiennes, de meubles, de schèmes ; d’ordre dans lequel des actes quotidiens
sont effectués peuvent les mener au désespoir ” (1). Les stéréotypies, gestes que l’enfant
exécute de façon rythmique soit en se balançant ou en faisant d’autres mouvements tels
que des gestes de grattage, tapotage, mouvements d’agitation des doigts devant les yeux,
en faisant tourner inexorablement tout objet susceptible de le faire. Pour L. Kanner, ces
activités et l’ardeur extatique qui les accompagnent, indiquent clairement la présence d’une
“gratification orgastique masturbatoire ”(1).
Les troubles du langage : sur les 11 enfants observés, 8 ont acquis la “capacité de parler ”.
Lorsque les enfants ont acquis le langage, celui-ci est très particulier et est marqué par un
certain nombre d’anomalies caractéristiques.
L’inversion pronominale : l’enfant utilise la deuxième ou la troisième personne pour parler
de lui. L’absence de communication spontanée et la répétition écholalique ont entraîné ces
phénomènes grammaticaux particuliers chez chacun des enfants verbaux. Les pronoms
personnels sont répétés exactement comme ils ont été entendus sans changements pour
s’adapter à une nouvelle situation.
La répétition écholalique : l’enfant est amené à répéter les mots ou les combinaisons de
mots comme un perroquet. Ces mots sont redits en écho immédiat mais ils peuvent être
aussi “stockés ” et dits un peu plus tard, on parlera alors “d’écholalie retardée ”. Dans un
autre article daté de 1946, L. Kanner souligne que ces phénomènes d’écholalie différée
peuvent donner au langage un aspect incohérent et dépourvu de sens mais il précise que
ces écholalies sont en fait une substitution métaphorique dont le sens est personnel à
l’enfant et non communicable à autrui, directement lié à une expérience vécue
antérieurement. Certains enfants surinvestissent le langage et peuvent développer un néo-
7
langage. La signification de ce langage reste idiosyncrasique et totalement personnelle à
l’enfant.
L’accès au oui : souvent difficile, c’est un concept que ces enfants mettent des années à
acquérir. Ils sont incapables de l’utiliser comme concept général d’acquiescement. Pour L.
Kanner, en ce qui concerne les fonctions de communication, il n’existe pas de différences
fondamentales entre les huit enfants parlant et les trois enfants mutiques (on utilise
actuellement les vocables verbaux et non verbaux pour désigner ces mêmes enfants). Le
langage verbal ou non verbal est très rarement et très difficilement utilisé en fonction
communicative.
L’intelligence : Dans cet article, L. Kanner laisse penser aux lecteurs que tous ces enfants
sont intelligents. “ Ils sont indubitablement dotés de bonne potentialités cognitives ”. Leurs
visages donnent à la fois l’impression d’une grande profondeur d’esprit. Nous verrons plus
tard que la réalité est bien différente.
Le développement physique : L. Kanner décrit des enfants qui paraissaient normaux,
cependant, il souligne que 5 d’entre eux avaient une tête relativement grosse, plusieurs
étaient un peu gauches dans leurs démarches ainsi que dans leurs activités motrices
cérébrales. Il note que tous étaient très adroits dans la coordination motrice fine. Nous
savons aujourd’hui que 15 à 20 % des enfants autistes sont sujets aux crises d’épilepsie.
Les parents : en 1943, L. Kanner note que tous les enfants sont issus de familles
extrêmement intelligentes mais aussi que dans le groupe “très rares sont les pères et les
mères réellement chaleureux ”. Kanner conclut cet article en émettant une hypothèse qui
selon lui, supposerai que ces enfants sont venus au monde avec une incapacité à établir le
contact affectif habituel avec les personnes, il poursuit en notant “il semble qu’ici nous
ayons des exemples purs de troubles autistiques innés du contact affectif ”.
En 1969, lors de l’assemblée générale de la Nationale Society for Autistic Children,
aujourd’hui, Autism Society of América, L. Kanner dit à l’assistance que dès le début, il
avait parlé de l’origine organique de l’autisme. Il fit part de son indignation à l’idée que
l’on se soit servi de son article pour désigner les mères d’être responsables de l’autisme de
leur enfant. Il souligne le fait que par la suite, il écrivit un livre “à la défense des mères ” et
déclara avec émotion “parents, je vous acquitte ”.
En 1944, le Docteur Hans ASPERGER (3), Psychiatre autrichien, publie un article
en allemand “die Autistichen psychopatten im Kirdesalter ”. Il y décrit un groupe de 4
garçons de 6 à 11 ans présentant un tableau clinique qu’il nommera Psychopathie
Autistique. “ La principale anomalie de la psychopathie autistique est une perturbation des
relations vivantes avec l’environnement, perturbation qui explique toutes ces anomalies ”
(3).
Les différences fondamentales entre les enfants décrits par L. Kanner et par H.
Asperger sont que tous les enfants décrits par ce dernier parlaient avant l’entrée à l’école.
8
Leur vocabulaire était entendu et leur grammaire relativement correcte. Certains parlaient
“comme des adultes ”, mais avaient une tendance à monologuer sur des sujets particuliers.
Bien qu’isolés socialement, les enfants décrits par H. Asperger avaient conscience
de l’existence de l’autre bien que leur approche soit inappropriée et mal perçue. VAN
CREVELEN (4) fut le premier occidental à avoir attiré l’attention sur les travaux de H.
Asperger mais ce n’est qu’en 1981, avec la publication des travaux de LORNA WING (5),
que l’on parla de Syndrome d’Asperger et qu’on fit le lien avec l’autisme de Kanner. Nous
pouvons considérer aujourd’hui qu’en 1943/1944, L. Kanner puis H. Asperger posèrent les
bases et les fondements du concept d’autisme.
9
CHAPITRE II
2.1 CLASSIFICATIONS
Pendant de longues années, la notion d’autisme fut considérée comme une entité
spécifique mais finalement rattachée à la schizophrénie infantile. En France, cette notion
fut moins utilisée, on préféra parler de psychose infantile puis psychose précoce. De cette
classification sont issues les notions de psychoses déficitaires puis dysharmonies
évolutives introduites par R. Misès et J.L. Lang.
C’est à partir des années 70 que l’autisme infantile est devenu objet d’un intérêt
croissant, intérêt qui ne se dément toujours pas aujourd’hui. A partir de cette époque, un
grand nombre de travaux, de recherches ont abouti à l’élaboration de la notion de
syndrome pour définir l’autisme. Cet état de fait, le quasi-consensus a amené l’autisme à
être considéré comme un trouble précoce et global du développement.
En 1977, la classification de l’OMS : la classification internationale des maladies
CIM 9 en vigueur à cette époque fait l’objet de vives critiques aux USA ainsi que dans
d’autres pays. Les débats qui en suivirent suscitèrent de nouveaux systèmes de
classification.
En 1981, paraît la troisième édition de la classification de l’association
psychiatrique américaine : Le DSM III. Cette classification apporte un changement radical
dans le débat sur l’autisme : aussi bien au niveau des termes qu’au niveau des concepts
fondamentaux, de la nosographie et de la clinique. L’abandon de la notion de psychose
infantile repositionne le syndrome autistique dans la catégorie “Persuasive
Developpemental Disorders ” traduit en français par “Troubles Envahissants du
Développement (T.E.D.) et est décrit comme étant des déviations du développement des
fonctions psychologiques fondamentales impliquées dans l’acquisition des aptitudes
sociales et du langage ”. Ces changements fondamentaux par rapport aux classifications
antérieures traduisent les positionnements théoriques voir idéologiques.
En 1987, le DSM III dans sa version révisée DSM III R ne distincte plus que deux
catégories de TED : Le trouble autistique (1/3 de l’ensemble des TED selon le DSM III) et
les TED non spécifiés.
En 1988, sur l’initiative de R. MISES (6), la classification française des troubles
mentaux de l’enfant et de l’adolescent, la CFTMEA, reprend les travaux français antérieurs
et maintient la référence à la notion de psychose infantile et les répartit en 5 grandes
catégories .
En 1993, la Classification Internationale des Maladies de l’OMS dans sa 10ème
édition adopte une position intermédiaire vis à vis de la monographie dans le domaine
10
clinique (C. BURSZTEJN) (7). Elle reprend la notion de troubles envahissants du
développement et en donne une description très proche du DSM III, cependant, elle
distingue l’autisme atypique faisant référence au retard mental profond et fait référence au
syndrome d’Asperger, la CIM 10 subdivise les TED en huit catégories .
En 1994, la DSM IV se rapproche beaucoup de la CIM 10. Elle subdivise les TED
en 5 grandes catégories dans lesquelles on retrouve le syndrome d’ASPERGER et le
syndrome de RETT.
1977
CIM 9
EVOLUTION DES CLASSIFICATIONS
1980
1987
1988
1993
DSM III
DSM III-R
CFTMEA
CIM 10
Psychoses spécifiques
Troubles Globaux
Troubles Envahissants
de l'enfance
du Développement
du Développement
Autisme Infantile
Autisme infantile
Trouble autistique
syndrome complet
Psychoses
Autisme infantile
1994
DSM IV
Troubles Envahissants
Troubles Envahissants
du Développement
du Développement
Autisme infantile
Trouble autistique
précoce type Kanner
stade résiduel
Psychose
Désintégrative
TGD débutant
dans l'enfance
TED non spécifié
Autres formes
Autisme atypique
de l'autisme infantile
syndrome complet
stade résiduel
Psychose Infantile
Pychoses précoces
Autre trouble
Atypique
déficitaires
désintégratif de
Troubles désintégratifs
l'enfance
de l'enfance
Psychose de
Dysharmonies
Trouble
l' Enfant
évolutives
hyperkinétique associé
(Schizophrénie
à un retard mental
forme de l' enfance)
et des mouvements
stéréotypés
Psychoses de type
Syndrome de Rett
Syndrome de Rett
Syndrome d'Asperger
Syndrome d'Asperger
Autres TED
(incluant l'autisme
schizophrénique
Pshychoses
dysthymiques
TED non spécifié
atypique)
11
De ces classifications, nous retiendrons les principaux éléments diagnostiques qui
sont autant de critères essentiels dans la définition du syndrome autistique :
- Déficience qualitative de l’interaction sociale réciproque,
- Déficience qualitative de la communication verbale et non verbale ainsi que de
l’imagination,
- Répertoire nettement restreint d’activités et de centres d’intérêt, résistance aux
changements, stéréotypies
Ces trois éléments prépondérants sont aussi appelés “triade de l’autisme ” lorsqu’ils
sont associés, L. WING 1989 (8) . A ces éléments, il convient d’ajouter l’apparition de ces
symptômes avant l’âge de trois ans (un peu restrictive, cette donnée est souvent remplacée
par la notion de prime enfance).
2.2 CLASSIFICATION INTERNATIONALE DES HANDICAPS
Nous l’avons vu, les classifications sont déterminantes dans l’approche que nous
pouvons avoir de l’autisme. Sortir du champ de la psychose, définir ce que l’on appelle
aujourd’hui syndrome autistique, c’est à dire, un éventail de symptômes qui, réunis,
permettent un diagnostic, nous amène à penser la notion de handicap au sens de la
classification internationale des handicaps appelée aussi schéma de Wood.
Cette approche est essentielle, car elle va déterminer le type d’action de prise en
charge et préciser les grands axes de la politique sociale du pays en matière d’autisme (du
sanitaire vers le médico-social).
La Classification Internationale des Handicaps est un manuel de classification des
conséquences des maladies. Elaborée en 1980 sur l’initiative de l’OMS, la CIH doit
l’essentiel de sa conception au professeur Philipp WOOD (9) de l’Université de
Manchester. Dans cet ouvrage, les concepteurs ont dégagé trois axes afin de définir au plus
près la notion de handicap : Déficience, incapacité, désavantage.
C’est ce concept que je vais m’efforcer de définir avant de faire le lien avec la
notion d’autisme.
La conséquence des maladies : la situation repose avant tout sur le concept de
maladie illustrée par le schéma suivant :
ETIOLOGIE
-
PATHOLOGIE
-
MANIFESTATION
Nous y associerons la notion de syndrome au sens collection de symptômes.
Les classifications des maladies sont autant d’instruments efficaces pour aborder les
troubles pouvant être traités ou guéris, cependant, cela reste insuffisant dans la mesure où
12
elles ne couvrent pas le domaine des conséquences de ces mêmes maladies ou troubles
(syndromes). Il convient alors de décliner la chaîne des phénomènes inhérents à la situation
initiale : maladies (troubles, syndromes), déficiences, incapacités, désavantages.
Déficiences :
“ Dans le domaine de la santé, la déficience correspond à toute perte de
substance ou altération d’une structure ou fonction psychologique, physiologique
ou anatomique ” (9). La déficience, dont le rôle consiste à une description de
l’individu à un certain moment est neutre par rapport à un certain nombre de
caractéristiques associées. Elle n’est pas contingente à l’étiologie, elle peut être
congénitale ou acquise.
L’incapacité
“dans le domaine de la santé, une incapacité correspond à toute réduction
(résultat d’une déficience) partielle ou totale, de la capacité d’accomplir une activité
d’une façon ou dans les limites considérées comme normales pour un être humain ”
(9). L’incapacité correspond donc à un écart par rapport à la norme en terme
d’action de l’individu. Ce concept est caractérisé par un excès ou une diminution
des comportements ou activités normales.
Désavantage :
“ Dans le domaine de la santé, le désavantage social pour un individu donné
résulte d’une déficience ou d’une incapacité qui limite ou interdit
l’accomplissement d’un rôle normal (en rapport avec l’âge, le sexe, les facteurs
sociaux et culturels) ” (9).
Nous noterons trois caractéristiques importantes de ce concept :
1 - un certain poids est attribué à la déviation de la norme structurelle, fonctionnelle
ou d’exécution.
2 - l’évaluation dépend des normes culturelles
3- en ce qui concerne la première caractéristique, l’évaluation est habituellement
faite au désavantage de l’individu concerné.
Nous pouvons dire aussi que le désavantage augmente selon l’incapacité de
l’individu de se conformer aux normes de son environnement. C’est donc bien d’un
phénomène social dont il s’agit.
13
2.3 INTEGRATION DES CONCEPTS
Congénitales
ETIOLOGIES
Acquises
MALADIES ou TROUBLES
(Situation intrinsèque)
(syndrome autistique)
DEFICIENCE
(Extériorisée)
Atteinte organique,
altération des fonctions
INCAPACITE
(objectivée)
Fonctionnel, limitation des gestes
et actes élémentaires dans la vie
quotidienne
DESAVANTAGE
(socialisé)
Social, limite dans l’accomplissement
d’un rôle dans la société considéré comme
normal
Appliqué à l’autisme, ce concept de handicap est déterminant. Cependant, il est
objet de bien des combats idéologiques. Sortir l’autisme du champ de la maladie
(psychose) c’est aussi en quelque sorte, sortir du champ exclusivement sanitaire. La notion
de handicap nous renvoie donc à cette notion, très en vogue actuellement de
décloisonnement du sanitaire et du social, nous reviendrons sur ce thème plus tard.
14
CHAPITRE III
FACTEURS D’HETEROGENEITES
3.1 DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES
Etude de Prévalence.
Dans les années 70, les études épidémiologiques donnaient un taux de prévalence
de l’ordre de 2 à 4 pour 10 000 naissances.
A partir des années 80, les chiffres de prévalence sont de l’ordre de 4 à 5 pour 10
000. Ces chiffres ont été confirmés par trois études épidémiologiques françaises, ce qui
permet d’estimer le nombre de personnes autistes en France à environ 6 à 8 000 enfants et
de 17500 à 23700 adultes (ANDEM 94) (10). Le sex ratio varie suivant les études mais
indique une forte prévalence de garçons par rapport aux filles (près de 4 garçons pour 1
fille). Il est à noter que, en règle générale, les filles sont plus touchées que les garçons.
Utah FRITH (11) citant une étude de LORD, SCHOPLER et REVICK (12) et analysant les
résultats, indique qu’il serait erroné de considérer les filles plus autistiques que les garçons,
simplement, les filles semblent avoir des problèmes supplémentaires plus graves.
Lorma WING (13), se référant à une grande étude réalisée à Londres, conclue également
que la proportion de garçons par rapport aux filles augmente avec l’aptitude.
La fin des années 90 a vu le taux de prévalence de l’autisme très largement
augmenter. Les études de S. BARON-COHEN, K. SAUNDERS, S. CHAKRABARTI (14)
et la méta analyse de C. GILLBERG, et L. WING (15) confirment l’idée que, tout au
moins en Europe, le taux de prévalence de l’autisme serait de 10 pour 10000, que le
syndrome d’Asperger serait encore plus fréquent 30 pour 10000 et que les troubles
envahissants du développement non spécifiés (selon le D.S.M IV) seraient encore plus
commun, peut être jusqu'à 50 pour 10000.
Nous noterons que la France, pour sa part et pour l’instant s’est arrêtée au taux de
prévalence de l’autisme de 4 à 5 pour 10000.
Autisme et retard mental
Léo Kanner en 1943 avait laissé supposer que les enfants autistes avaient une
intelligence normale “ils ont une physionomie remarquablement intelligente ”. Cette
hypothèse n’a pas été vérifiée et l’on peut considérer aujourd’hui qu’au contraire, dans 75
% des cas, l’autisme est associé au retard mental.
Les différentes études, notamment RUTTER et LOCKYER (16) à Londres mettent
en lumière la répartition par tranche de QI :
15
QI < à 50
QI entre 50 et 70
40 % des cas observés
30 % des cas observés
QI > à 70
30 % des cas observés
En 1985, FREEMAN et RITVO (17) publient une étude longitudinale ayant pour
objet de préciser le mode d’évolution possible (étude portant sur 62 enfants autistes de
deux à six ans). 77 % des enfants avaient un QI dénotant un retard mental. Il s’avère que
sur 5 ans et malgré leur participation à divers programmes pédagogiques, leur QI, à
quelques exceptions près, était demeuré stable.
En outre, le QI est un facteur de prédictibilité important dans le devenir des
personnes autistes. Les enfants ayant un QI inférieur à 70, ont un mauvais pronostic. Leur
difficulté dans le domaine du langage et de la communication seront importantes. Il est
vraisemblable qu’ils éprouveront de grandes difficultés d’apprentissage, que les troubles
du comportement seront très prégnants (automutilation, stéréotypies etc...). Au contraire,
les enfants ayant un QI supérieur à 70 ont un bien meilleur pronostic : Ils font des progrès
plus rapidement et ont une meilleure insertion sociale (BARTAK et RUTTER 76) (18).
3.2 FACTEURS D’EVOLUTION DE L’ENFANCE A L’AGE ADULTE
“ Léo KANNER en 1971 a réalisé une étude de suivi pour les 11 enfants qui avaient
été à l’origine de sa publication princepts ” (19). Il précise, dans cet article, que les
résultats de ce suivi sur près de 30 ans ne se prêtent pas à des considérations statistiques.
Sur les 11 enfants :
-2 d’entre eux ont suivi des études secondaires et ont un emploi salarié. Ils mènent
une vie autonome et résident chez leurs parents,
-1 seul a un emploi protégé
-6 sont hospitalisés, n’ont pas d’activités, ni de programmes de soins adaptés
-1 est décédé
-1 n’a pas été retrouvé
Trois personnes n’ont pas acquis le langage verbal, quatre l’utilisent de façon
limitée et non appropriée dans son usage social.
Pour illustrer l’évolution de l’enfance à l’âge adulte, nous reprendrons une étude
réalisée en 1990 dans le département de l’Hérault. Cette étude couvre l’ensemble des
personnes autistes et souffrant de psychose infantile, nées entre 1966 et 1973. Sur les 61
sujets d’étude, 7 n’ont pas été retrouvés et 2 sont décédés. La moyenne d’âge était de 21
ans (17-24 ans).
Les résultats de cette étude ont été les suivants :
Concernant le langage :
16
-sans langage
-langage rudimentaire
-difficulté de prononciation
-anomalie caractéristique
27%
16%
14%
23%
- la déficience intellectuelle est fréquemment associée : QI < 40 pour 63 % et QI > 55 pour
24 % des sujets.
- troubles délirants chez 2 personnes sur 29 qui ont un langage élaboré ; chez dix autres,
bizarreries du cours de la pensée.
- épilepsie : 21 % ont souffert d’épilepsie, 13 % sont encore traités et près de 10 % ont un
handicap moteur associé.
- 71 % des personnes n’ont pas acquis la lecture, 11,5 % savent compter et peuvent faire
les deux première opérations.
Les résultats de cette étude décrivent un état des lieux pour des adultes qui ont été
pris en charge plus de 15 ans auparavant. Elle vise à mettre en lumière “des éléments
existants lors du diagnostic ou au début de la prise en charge dont la présence rend compte
pour une part de la variété des évolutions ultérieures ” (20).
Cependant la plupart des études réalisées sur ce sujet mettent en évidence
l’importance en tant que facteurs prédictifs, du niveau intellectuel au moment du
diagnostic, de l’âge de l’apparition du langage et de la sévérité du tableau clinique précoce.
L’association de ces différents facteurs est très significative sans pour autant introduire une
fatalité du pronostic.
La déficience intellectuelle associée à l’autisme est un facteur de mauvais
pronostic. Un Q I > 70 a une valeur prédictive pour différencier les bons et les moyens
devenirs.
La non apparition du langage avant l’âge de 5 ans est reconnue comme facteur
péjoratif, cependant il faut tenir compte de l’existence ou non d’une communication non
verbale ainsi que des capacités de compréhension.
L’existence d’une épilepsie n’est pas en soi un facteur péjoratif sauf si elle est
associée à une déficience mentale sévère.
En ce qui concerne les modalités de prise en charge RUTTER et LOTTER (21)
trouvent un meilleur pronostic lorsque l’enfant a bénéficié d’une scolarité (ce résultat est à
modérer car il peut être lié aux facteurs d’intelligence et de langage). BARTAK (22) quant
à lui met en évidence le caractère positif pour l’évolution d’un environnement structuré.
17
3.3 PATHOLOGIES ASSOCIES A L’AUTISME
Un certain nombre de pathologies sont associées à l’autisme. Chacune d’entre elles
comporte des particularités et réalise un “phénotype comportemental ” qui est une des
voies pour établir des hypothèses physiopathologiques sur le fonctionnement
(dysfonctionnement de type autistique). D. SAUVAGE (23)
PATHOLOGIE ASSOCIEES A L'AUTISME
Epilepsie
spasmes en flexion,
autres épilepsies (30% dans la plupart des études),
Anomalies chromosomiques
gonosomiques: syndrome de l'x fragile (8 à 10%),
Autres anomalies : xyy, xxx,
autosomiques,
trisomie 21,
chromosome 15 (syndrome de Prader-Willi et d’Angelman),
Cas d'autisme associés à une anomalie des chromosomes 1, 2, 3,
4, 5, 46, 8, 9, 10, 11, 13, 17, 18, 22.
Phénylcétonurie,
Trouble du métabolisme des purines,
Prénatales: rubéole congénitale, Cytomégalovirus,
Herpès simplex virus,
Virus de l'immunodéficience humaine, Toxoplasmose,
Tréponéma pallidum.
Postnatales: Encéphalite herpétique, méningites bactériennes
(Haemophilus influenzae)
Phacomatoses: Neurofibromatose de Von Recklinghausen,
Sclérose tubéreuse de Bourneville.
Syndrome d'alcoolisme fœtal
Syndrome de Cornelia de Lange
Hypomélanose de Ito
Maladie de Joubert
Syndrome de Moebius
Syndrome de William-Beuren
Fibroplasie rétro lentale
Maladies métaboliques
Maladies infectieuses
Maladies et syndromes
Constitués
L'autisme aujourd'hui CREAI Alsace/ORHIAL (J. MALVY, d'après différentes sources de la littérature)
Toutes ces affections qui sont souvent associées au retard mental et sont sources de
troubles divers compliquent la prise en charge de la personne autiste, car, au tableau de
l’autisme (triade des déficiences) s’ajoute des lésions organiques et neuro-sensorielles.
18
3.4 TROUBLES ASSOCIES A L’AUTISME
Langage
Les troubles du langage sont une constante dans le tableau clinique de l’autisme. Ils
se manifestent de la façon suivante : Absence de langage (50 % des cas).
Dans un certain nombre de cas, le langage verbal et non verbal est totalement
absent. Il s’agit souvent de personnes autistes très régressées, (repliées sur elles-mêmes),
mutiques. Dans d’autres cas, seul le langage verbal est absent. Le langage verbal, bien que
qualitativement altéré, existe et peut servir de support à la communication. Lorsque le
langage est présent, le plus souvent il apparaît de façon retardé et est marqué par un certain
nombre d’anomalies. Il est constitué de mots isolés, souvent déformés, difficilement
compréhensibles et ayant une faible valeur communicative. Dans certains cas, l’enfant peut
progresser, associer les mots, faire des phrases, enrichir son vocabulaire et s’adapter à la
syntaxe. Cependant, il persiste longtemps des anomalies telles que : l’incapacité à utiliser
correctement les pronoms.
L’inversion pronominale
L’enfant parle de lui à la deuxième ou à la troisième personne (utilisation du tu
pour le je). Certains enfants autistes apprennent à utiliser correctement les pronoms,
cependant, il arrive qu'ils généralisent l'apprentissage de façon totalement littérale.
Ex : Jacques à qui un visiteur demandait “bonjour Jacques, vous allez bien ? ” Jacques, très
sérieux répondit “oui, nous allons bien ”.
L’accès au oui
Souvent très difficile, l’enfant autiste peut répondre positivement en répétant la
question.
Les répétitions écholaliques
L’écholalie, cette particularité à “répéter en écho ” les mots ou des bribes de
phrases plus ou moins compréhensibles est présente chez les ¾ des enfants autistes
verbaux (U.FRITH) (11). Ces fragments de discours, souvent entendus antérieurement,
peuvent cependant avoir une fonction communicative. Il peut s’agir d’une fonction
substitutive dont le sens est totalement personnel à l’enfant, faisant référence à une
expérience vécue antérieurement et donc très difficile à décoder.
Le langage métaphorique
Certains enfants autistes utilisent un “néo-langage ” difficilement compréhensible si
l’on ne connaît pas parfaitement l’enfant. Cette utilisation d’expressions particulières hors
contexte, reste très mystérieuse. La signification de ce langage reste idiosyncrasique et
19
totalement personnelle à l’enfant. (nous connaissons un jeune autiste utilisant cette forme
de langage, capable de “décoder pour le non initié ”, ses formules métaphoriques si
particulières empruntées à l’électronique).
Les troubles de la communication
Nous venons de le voir, l’utilisation du langage chez la personne autiste présente
néanmoins un certain nombre d’anomalies. Ces perturbations langagières ne sont pas sans
influence sur les fonctions communicatives.
L’usage communicatif du langage dans ses aspects tant verbal (mot, inversion
pronominale, phrases idiosyncrasiques) que non verbal (prosodies, gestes, mimiques) reste
très problématique surtout dans le domaine de la communication spontanée.
La communication expressive
Extraordinairement restreinte et très peu conventionnelle, la communication
expressive, chez la personne autiste est parfois très énigmatique. Le besoin et l’envie de
communiquer peuvent être initiés par des attitudes curieuses : brusqueries, bousculades,
tapes, cris. Les personnes autistes ont également beaucoup de mal à utiliser la
communication non verbale. Très rarement elles utilisent le regard direct comme signe
préliminaire à la communication. Le geste de montrer du doigt (proto-déclaratif) n’est pas
acquis spontanément et doit être enseigné.
L’immuabilité (Sameness)
Elle constitue un des traits particuliers de l’autisme “le besoin incoercible d’établir
et de maintenir des repères ” dont la stabilité fait l’objet de vérifications diverses. R.
MISES (24). Les résistances aux changements sont les signes symptomatiques du besoin
d’immuabilité (objet à la même place, emplois du temps et routines réglés “comme du
papier à musique ”). Lorsque ce bon ordonnancement est bouleversé, les phénomènes de
résistances apparaissent souvent et se traduisent par des troubles du comportement
d’intensité variable (problème de comportement majeur, passage à l’acte).
Stéréotypies et rituels
Ces comportements répétitifs s’intègrent aux manifestations précédentes. Elles
peuvent être plus ou moins complexes et plus ou moins étranges (remuer les doigts devant
le visage, faire des arabesques avec ses bras et ses doigts, marcher sur la pointe des pieds,
tourner sur soi-même de façon mécanique). Parfois, la présence d’objets donne à ces
stéréotypies un caractère particulier (agiter des ficelles devant ses yeux, faire tourner un
livre entre ses paumes). Parfois, s’organisent des “ activités plus complexes qui ont pour
but de vérifier l’immuabilité du cadre de vie ”. R.MISES (24).
Les rituels prennent parfois une part importante dans la vie des personnes autistes et
20
de leur entourage. La mise en place de rituels limite la part “d’improvisation ” dans la vie
quotidienne (rituels d’habillage, ritualisation des horaires). Tout changement dans cette
organisation, “le grain de poussière ”, est source d’angoisse et vécu douloureusement par la
personne autiste.
3.5 AUTRES TROUBLES
Les troubles de l’alimentation
Souvent présent, ce trouble se caractérise par des comportements inadaptés face à la
nourriture : refus d’absorber des aliments solides, phénomène de mérycisme, épisode
boulimique, refus de se nourrir, grande anxiété et angoisses majeures lors de la prise des
repas, absorption de substances non comestibles.
Les troubles du sommeil
Présents comme les précédents, les troubles du sommeil se traduisent par des
phases d’insomnies plus ou moins agitées ou tout à fait calmes ; l’enfant est immobile les
yeux grands ouverts. Les agitations, cris et hurlements sont très difficiles à calmer.
Les troubles sphinctériens
Enurésie, encoprésie sont souvent présents et témoignent de troubles graves dans
l’organisation de la personne. On peut associer ces dérèglements aux troubles du transit,
diarrhées, constipation ainsi qu’aux phénomènes d’angoisses qui accompagnent les selles
par exemple.
Les troubles psychomoteurs
Les troubles psychomoteurs de la personne autiste sont nombreux et complexes car
ils associent plusieurs ordres de troubles. Certains dus au syndrome autistique
(développementaux et comportementaux associés aux troubles de la communication) et
d’autres dus aux pathologies associées comme le retard mental, les anomalies
neurologiques qui ont leur symptomatologie propre : modification du tonus (hypertonie,
hypotonie), des réflexes, épilepsie etc.
Même si de nombreux enfants autistes ont un bon développement moteur ils présentent
cependant très tôt des particularités de leur psychomotricité (postures inhabituelles,
démarche particulière comme par exemple marcher sur la pointe des pieds, agitation des
doigts, hyperactivité ou au contraire manque d’initiative). Certain ont beaucoup de mal à
accepter le contact physique, enfin l’enfant autiste n’utilise pas ou peu de gestes expressifs
pour communiquer, “ il n’imite pas ou peu spontanément les postures ni les mouvements
d’autrui ”. SAUVAGE. D (25).
21
Les troubles de la conduite
Ils comportent un certain nombre de bizarreries, de lubies, de conduites étranges et
immotivées, des colères subites, des périodes d’hyperactivité avec des phénomènes
agressifs ou auto-agressifs, des attitudes d’instabilité, de type hypomaniaque ou des
attitudes de repli dépressif.
L’automutilation
Parfois présents, ces troubles d’auto agressivité mutilatoire posent d’énormes
problèmes à la personne autiste elle-même ainsi qu’à son entourage (parents, éducateurs,
soignants).
On peut dissocier deux grandes causes de mutilation :
- Les phénomènes sont “intégrés ” dans le fonctionnement de la personne, c’est une
forme de stéréotypie.
- L’automutilation est une réponse à une frustration plus ou moins forte. Les
troubles de la communication et de la compréhension empêchent une réponse cohérente, la
personne autiste “répond ” par un trouble automutilatoire. Le seuil de tolérance à la
frustration peut être très bas dans certains domaines, les phénomènes d’automutilation
seront d’autant plus difficiles à réguler.
Les troubles de l’angoisse et de l’anxiété
Ces troubles peuvent prendre des formes et des intensités diverses. Ils s’expriment
le plus souvent lors de changements, de bouleversements même minimes dans la vie ou
l’entourage de la personne. L’intensité de ces troubles peut être tout aussi diverse.
Certaines manifestations de l’angoisse peuvent se traduire par des troubles majeurs du
comportement pouvant aller jusqu’au passage à l’acte.
Ce tour d’horizon des pathologies et des troubles associés à l’autisme clos cette
première partie. La deuxième partie, consacrée à l’existant, montrera si besoin est la
complexité et la multitude des possibilités de trajectoires possibles pour une personne
autiste
22
1ere PARTIE
RESUME
En 1943 et 1944, Léo Kanner et Hans Asperger posèrent les bases et les
fondements de concept d’autisme en décrivant deux groupes d’enfants.
En 1994, la classification américaine DSM IV se rapproche de la Classification
Internationale des Maladies CIM 10.
De ces classifications, nous retiendrons la notion de troubles envahissants du
développement ainsi que les principaux éléments diagnostiques :
-déficience qualitative de l’interaction sociale
-déficience qualitative de la communication
-répertoire d’activités et d’imagination restreints
La classification internationale des handicaps élaborée par le Pr P. Wood dégage
3 axes pour définir la notion de handicap :
-déficience
-incapacité
-désavantage.
Appliqué à l’autisme, le concept de handicap est déterminant à plus d’un titre. Il
permet, entre autre, de sortir du champ exclusivement sanitaire et d’envisager de
nouvelles formes de prise en charge.
Les différentes études de prévalence ont donné jusqu'à maintenant des taux de
prévalence de l’ordre de 4 à 5 personnes autistes pour 10 000.
Les dernières études, notamment celles de C. Gilbert et L. Wing (15) tendent à
démontrer que le taux de prévalence de l’autisme pourrait être plus important (10 /10000
pour l’autisme, 30/10000 pour le syndrome d’Asperger et 30 à 50 pour les TED non
spécifiés).
Le retard mental est associé à l’autisme dans 70 % des cas, l’épilepsie est très
souvent présente : 30 % des cas. L’autisme est très souvent associé à d’autres pathologies
et à de nombreux troubles.
23
2ème PARTIE
L’EXISTANT
Dans cette deuxième partie, après avoir fait l’inventaire des structures sanitaires et
médico-sociales pouvant accueillir et prendre en charge les enfants, adolescents et adultes
autistes et afin d’illustrer concrètement les modes de prise en charge des adultes autistes,
nous étudierons deux établissements, l’un médico-social, l’autre sanitaire.
Ces établissements sont situés en Bretagne, dans le département du Morbihan, et
sont à notre avis, des exemples représentatifs de ce qui se fait en général (hors les trop
rares établissements spécialisés dans la prise en charge de l’autisme) dans notre pays.
Nous terminerons cette deuxième partie par l’évaluation du dispositif autisme en
Bretagne en nous référant à l’étude et aux questionnaires de l’Observatoire Régional de
Santé de Bretagne (ORSB) 1996.
CHAPITRE I
DE L’ENFANCE ET DE L’ADOLESCENCE VERS L’AGE ADULTE (règles générales)
1.1 DANS LE SECTEUR DE LA PSYCHIATRIE
1.1.1 ENFANTS ET ADOLESCENTS
Les enfants et adolescents suivis ou pris en charge en pédopsychiatrie le sont en
règle générale de la façon suivante :
C.M.P : Centre Médico Psychologique. Ces unités d’accueil en milieu ouvert
organisent les actions de préventions, de diagnostics, de soins ambulatoires et les
interventions à domicile. Ils ne sont pas spécialisés en autisme et mettent en œuvre des
thérapies psychodynamiques.
C.P.E.A. : Hôpitaux de jour, Centre Psychologique pour l’Enfant et l’Adolescent.
Les hôpitaux de jours assurent les soins polyvalents, individualisés et intensifs. Ces soins
sont pratiqués dans la journée, parfois à temps partiel. Il est possible selon les cas, que soit
mises en places des prises en charge conjointes avec soit le milieu médico-éducatif (I.M.E.
par exemple) ou avec l’Education Nationale au travers soit de classes normales ou de
24
classes intégrées CLISS.
Il y a parfois la nécessité d’avoir recours à des prises en charge totales. L’Hôpital
Spécialisé répond à ces cas en proposant des services d’hospitalisation à temps complet.
Ces services, centres de crises sont des lieux d’accueil (le plus souvent de quelques lits)
permettant des prises en charges intensives et de courte durée (cf. urgence, détresse).
Autre formule, l’hôpital de nuit qui propose une prise en charge thérapeutique de
fin de journée ou une surveillance de nuit voir de week-end. L’hôpital de nuit vient en
relais à une prise en charge de journée (soit hôpital de jour ou autre formule sanitaire, soit
médico-éducatif, I.M.E. par exemple).
Les textes de référence qui régissent ces équipements sont l’Arrêté du 14 mars 1986
relatif aux équipements et service de lutte contre les maladies mentales comportant ou non
des possibilités d’hébergement.
Dans tous les cas, la prise en charge est essentiellement soignante se référant à des
théories psychodynamiques. Il n’y a pas de prise en compte en tant que telle de la
symptomatologie autistique et donc pas de prise en charge spécifique.
Dans ce secteur sanitaire de l’enfance et de l’adolescence (la pédopsychiatrie) les
suivis et les prises en charge s’arrêtent à l’âge de 16 ans. La psychiatrie adulte prend le
relais à partir de cet âge.
1.1.2 A l’AGE ADULTE (sans hébergement)
Les C.M.P : Centres Médico Psychologiques, qui, sous différentes formes peuvent
poursuivre le travail effectué par la pédopsychiatrie.
Les hôpitaux de jour, les centres d’accueil thérapeutiques à temps partiel, les
ateliers thérapeutiques qui sont des techniques de soins particuliers (ergothérapie) en vue
de ré-entraînement à l’exercice d’une activité (sociale ou professionnelle).
Les services d’hospitalisation à domicile qui sont une prise en charge thérapeutique
à domicile nécessitée par l’état de dépendance du patient.
25
1.1.3 A l’AGE ADULTE (avec hébergement)
Les services d’hospitalisation à temps complet fonctionnent sous forme de
pavillons rattachés à une clinique en fonction du découpage sectoriel de la zone couverte
par le centre hospitalier spécialisé.
Les centres de crises : l’hôpital de nuit fonctionnent de la même façon que les
unités de pédopsychiatrie.
Les appartements thérapeutiques sont des unités de soins à visée d’insertion sociale
mis à disposition du patient hospitalisé, pour des durées limitées et nécessitant néanmoins
une présence continue plus ou moins importante de personnel soignant.
Les appartements associatifs accueillent des patients stabilisés manquant
d’autonomie pour lesquels ces appartements deviennent le domicile. Leur gestion, confiée
à une association loi 1901, est souvent rattachée aux équipes de psychiatrie du secteur.
Les maisons thérapeutiques et centres de post-cure ont un même type d’accueil que
les unités de moyen séjour. Ils interviennent après la phase aiguë de la maladie avec pour
objectif le retour vers l’autonomie.
Les placements familiaux thérapeutiques : adaptés aux malades mentaux de tous
âges, qui sont accueillis dans des familles d’accueil. Le maintien ou le retour à domicile ou
dans leur famille naturelle ne paraît pas possible ou souhaitable. Ces placements sont
parfois utilisés pour des malades sans famille dont le maintien à l’hôpital ne se justifie
plus.
Pour ce qui concerne les personnes autistes et leurs familles, le passage à l’âge
adulte est crucial. Le passage de la pédopsychiatrie vers la psychiatrie adulte est souvent
appréhendé douloureusement.
Lorsque les familles le peuvent et que le comportement de leur enfant autiste le
permet, les parents refusent l’hospitalisation. Nous observons alors un retour à domicile.
Le principal grief qui est fait contre l’hôpital à ce moment est que la psychiatrie ne prend
pas suffisamment en compte la “spécificité autistique ”. Le plus souvent, ces jeunes adultes
sont orientés vers la clinique de leur secteur et intègrent un service d’hospitalisation à
temps complet (pavillon).
Dans ces services, le manque d’harmonisation des pratiques ne permet pas
d’effectuer des prises en charges spécifiques. La prise en charge est essentiellement
soignante et le soin psychodynamique repose sur la psychothérapie institutionnelle.
Les populations soignées sont très hétérogènes, les personnes autistes, les personnes
souffrant de psychoses déficitaires non guéries à l’âge adulte, les grands schizophrènes
vivent ensemble dans des conditions d’hébergement “laissant souvent à désirer ”.
26
L’inconfort, le manque d’intimité, la promiscuité font partie de la réalité de ses prises en
charges. Nous pouvons même considérer que ces populations sont assez délaissées et
souffrent d’un manque de suivi médical flagrant ainsi que d’un manque d’investissement
des personnels soignants.
1.2 DANS LE SECTEUR MEDICO SOCIAL
1.2.1 L’ENFANCE
Ce sont les C.D.E.S. qui orientent, à partir d’une prescription médicale, les parents
d’enfants et d’adolescents vers les établissements les plus adaptés au regard de la nature de
la pathologie de leur enfant.
Les C.D.E.S. Commissions Départementales d’Education Spéciale ont été crées par la loi
d’orientation en faveur des personnes handicapées (loi n° 75 du 30 juin 1975). Elles sont compétentes à
l’égard de tous les enfants, adolescents handicapés physiques, sensoriels ou mentaux de leur naissance
jusqu'à l’âge de 20 ans.
Ses missions sont :
- D’orienter vers les établissements d’éducation spéciale
- De décider de l’attribution de l’allocation d’éducation spéciale
- De fixer un taux d’incapacité de l’enfant ou de l’adolescent
- De se prononcer sur le maintien éventuel en établissement spécialisé des
adolescents ayant atteint l’âge de 20 ans.
Les Etablissements d’éducation spéciale pouvant accueillir les enfants autistes sont
dans ce secteur généralement :
Les I.M.E : Instituts Médico Educatifs qui dispensent soins et éducation aux enfants
de 3 à 20 ans atteints de déficiences à prédominance intellectuelle avec troubles
neuropsychiques. Les I.M.E. sont très souvent composés d’un I.M.P. (Institut médico
pédagogique) qui dispense soins et éducation pour les enfants de 3 à 14 ans (possibilité
d’hébergement de semaine).
Les I.M.PRO : Instituts Médico Professionnels pour adolescents et jeunes adultes
de 14 à 20 ans, avec possibilité d’accueil jusqu'à 25 ans (disposition CRETON) dispensent
les mêmes soins que l’IMP avec en plus un enseignement pré-professionnel adapté
(possibilité d’hébergement de semaine).
Les I.R. : sont des instituts de rééducation qui dispensent soins et éducation à des
enfants présentant essentiellement des troubles du caractère et du comportement
(rééducation psychothérapeutique sous contrôle médical).
27
Les établissements pour polyhandicapés accueillent des enfants et adolescents
infirmes moteurs et infirmes moteurs cérébraux avec ou sans troubles associés. (Possibilité
d’hébergement total).
Les placements familiaux spécialisés (familles d’accueil). Les placements familiaux
thérapeutiques sont adaptés aux enfants malades mentaux accueillis dans une famille
d’accueil pour lesquels le maintien ou le retour à domicile ou dans leur famille naturelle
ne paraît pas possible ou souhaitable.
Tous ces établissements sont régis par des textes de référence que sont les annexes
XXIV du décret du 09 mars 1956, circulaire 89-18 et 89-19 du 30 octobre 1989 et annexe
XXIV ter du même décret. En ce qui concerne les placements familiaux thérapeutiques, le
texte de référence est un arrêté du 1er octobre 1990.
1.2.2 SANITAIRE ET MEDICO SOCIAL
A la frontière du sanitaire et du médico-social nous trouvons ces structures :
Les C.R.A. : Centres de Ressources Autisme ils ont pour mission, l’élaboration de
bilans diagnostiques précoces, la contribution à la formation au dépistage de l’autisme des
médecins et des professionnels exerçant sur l’aire de déserte des C.R.A, la contribution à la
définition d’un guide pratique sur le dépistage des syndromes autistiques, d’effectuer des
recherches sur les origines des troubles autistiques et leurs évolutions ainsi que sur les
modes les plus pertinents de prise en charge, d’être conseil auprès des équipes techniques,
des C.D.E.S et des COTOREP, d’offrir des prestations de conseils et d’orientations aux
familles, d’animer des réseaux régionaux en matière de prise en charge et d’expertise à la
demande des établissements accueillant des personnes autistes, d’élaborer une
documentation et les outils de vulgarisation sur les problèmes de l’autisme
Le C.M.P.P. : Centre Médico Psycho Pédagogique de diagnostic et de soin.
Structure de prévention, traitement en ambulatoire ou à domicile des enfants inadaptés
mentaux dont l’inadaptation est liée aux troubles neuropsychiques ou à des troubles du
comportement en vue de réadapter l’enfant en le maintenant dans son milieu naturel.
Les C.A.M.S.P. sont des Centres d’Actions Médico Sociales Précoces, structures de
prévention, de diagnostics et de soins en ambulatoire pour enfants ayant moins de 6 ans et
atteints de déficiences mentales, sensorielles ou motrices.
Les S.E.S.S.A.D. : Services d’Education Spécialisée et de Soin à Domicile sont des
structures légères destinées à maintenir ou à réintégrer l’enfant handicapé dans son milieu
naturel en assurant les soins, le soutien éducatif et le suivi nécessaire. En outre, ils doivent
apporter un soutien psychologique à la famille.
Les classes intégrées accueillent de 6 à 10 enfants handicapés. Installées dans une
28
école ordinaire, elles fonctionnent avec les services d’aide à l’intégration CAMSP et
SESSAD, avec un instituteur le plus souvent spécialisé et un auxiliaire. Les enfants
suivent, selon leur niveau, les activités scolaires et partagent les temps communs avec les
autres élèves de l’école.
Les classes d’intégration scolaire C.L.I.S. accueillent de façon différenciée les
élèves selon leur type de handicap. L’objectif étant de permettre à chacun de suivre un
cursus scolaire. Des programmes éducatifs individualisés sont proposés. Tout comme les
classes intégrées, les CLIS peuvent faire appel aux services d’aides à l’intégration. Il est à
noter qu’actuellement, il existe quelques CLIS pour enfants autistes. Elles mettent
généralement en œuvre des approches éducatives cohérentes inspirées du modèle
T.E.A.C.C.H. (Treatment and Education of Autist and Communication Handicaped
Children) (44).
A noter que l’article 4 de la loi du 30 juin 1975 précise que les enfants et
adolescents handicapés sont soumis à l’obligation éducative. Ils satisferont à cette
obligation en recevant, soit une éducation ordinaire, soit, à défaut, une obligation spéciale
déterminée en fonction des besoins par les C.D.E.S. L’article 1 de la loi d’orientation sur
l’éducation du 10 juillet 1989 stipule “l’intégration scolaire des jeunes handicapés est
favorisée ”.
Dans pratiquement tous ces établissements, il n’y a pas de prise en charge
spécifique pour les enfants et adolescents autistes. L’absence de diagnostic précis, dans la
majorité des cas, l’imprécision du diagnostic résultent parfois de la prudence du
professionnel à vouloir “enfermer l’enfant avec une étiquette ”, en utilisant le terme
autisme. Le plus souvent, les termes psychoses ou troubles psychotiques à tendance
autistique sont utilisés.
La plupart des Etablissements (IMP, IMPRO) font référence à une méthode de prise
en charge, du moins pour les aspects éducatifs, la méthode Montessori, la référence à
Piaget et quelques établissements à la méthode TEACCH. (livre blanc Autisme UNAPEI)
(26)
Toutefois, dans la majorité des cas, il n’y a pas de prise en charge spécifique de
l’autisme. Assez souvent, le projet thérapeutique est mis en avant, ensuite vient le projet
pédagogique puis éducatif. L’inspiration psychanalytique reste sous-jacente dans la plupart
des cas. Les enfants autistes pris en charge dans ces établissements le sont de façon
indifférenciée. Ils posent, en règle générale, beaucoup de problèmes et lors des périodes de
crises, sont envoyés vers l’hôpital spécialisé. La collaboration entre les établissements du
secteur médico-éducatif et du secteur psychiatrique n’est en général, pas organisée en
fonction d’un projet de prise en charge mais l’hôpital intervient seulement lors des
périodes de crises. Cet état de fait est vécu difficilement par les personnels soignants de
l’hôpital.
29
1.2.3 L’AGE ADULTE
A l’âge adulte, dans le secteur médico-social intervient la COTOREP (Commission Technique
d’Orientation et de Reclassement Professionnel). La COTOREP prend le relais de la CDES pour les adultes
handicapés d’au moins 20 ans (possibilité d’obtenir des dérogations à partir de 18 ans).
La COTOREP est organisée autour de deux pôles de compétences :
- emploi, formation professionnelle
- aides sociales et financières, placements en établissements.
La première section de la COTOREP prend des décisions concernant :
- la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé
- l’appréciation de l’aptitude au travail
Elle reconnaît s’il y a lieu, la qualité de travailleur handicapé et le classe selon ses
capacités professionnelles dans l’une des catégories A, B ou C. La personne peut être
orientée :
- Vers un emploi en milieu ordinaire
- Vers une pré orientation
- Vers une formation
- Vers un emploi dans un établissement de travail protégé.
La deuxième section de la COTOREP (aides sociales, financières, placements)
prend des décisions concernant la demande d’aide matérielle et sociale et l’orientation vers
les établissements médico-sociaux.
- Elle apprécie le taux d’incapacité de la personne et décide de l’attribution de la
carte d’invalidité,
- Elle décide de l’attribution de l’allocation,
- Elle décide de l ‘orientation du demandeur vers un établissement social ou
médico- social.
La COTOREP est composée d’un secrétariat permanent et d’une équipe technique
comprenant des professionnels médicaux et sociaux. Les établissements sociaux et médicosociaux pouvant accueillir les personnes autistes se répartissent en trois catégories en
fonction de leur financement : financement Etat, financement région (aide sociale),
financements mixtes.
1.3 TYPES DE FINANCEMENTS
1.3.1 LES ETABLISSEMENTS RELEVANT DU FINANCEMENT ETAT :
Structure de travail protégé, le C.A.T. : Centre d’aide par le Travail. Ces
établissements qui recherchent l’épanouissement de la personne handicapée par le travail
30
offrent des activités diverses à caractère professionnel ainsi qu’un soutien médico-éducatif
et social.
L’aptitude potentielle à travailler doit être inférieure au 1/3 de celle d’un travailleur
non handicapé. Le statut de la personne handicapée en CAT n’est pas un statut de salarié
mais de travailleur handicapé.
Les ressources en terme de rémunération pour le travail accompli appelé “salaire
direct ” sont calculées en fonction de la capacité de travail et peuvent varier de 5 à 110 %
du SMIC, elles sont à la charge du CAT.
Un complément versé par l’Etat, Allocation Adulte Handicapé, salaire direct
complément de ressources, ne peut dépasser 110 % du SMIC. Les textes de référence sont
la loi n° 75534 du 30 juin 1975 ainsi que différents décrets : 77.1465 du 28 décembre 1977
et 77.1546 du 31 décembre 1977 ainsi que la circulaire du 8 décembre 1978 relative aux
CAT.
Les Ateliers protégés : A.P. sont en principe destinés aux personnes handicapées
jouissant d’une grande autonomie.
Les Maisons d’Accueil Spécialisées M.A.S. ont pour vocation, d’accueillir en
hébergement complet 24 h / 24 et 365 jours par an en semi-internat ou en accueil
temporaire les personnes handicapées sans autonomie et dont l’état nécessite une
surveillance médicale et des soins constants (loi de 1975, décret 78.1211 du 28 décembre
1977).
L’admission sur décision de la COTOREP concerne les personnes handicapées
adultes qu’un handicap culturel, moteur ou somatique grave ou une association de
handicaps intellectuels, moteurs ou sensoriels, rendent incapable de se suffire à ellesmêmes dans les actes essentiels de l’existence et tributaire d’une surveillance constante.
Elle exclut les malades mentaux dont l’état nécessite des traitements actifs et un soutien à
caractère psychiatrique.
Les M.A.S doivent assurer de manière permanente aux personnes qu’elles accueillent :
- L’hébergement et les besoins de la vie courante,
- L’aide et l’assistance constante qu’appelle l’absence d’autonomie,
- Les soins médicaux et paramédicaux (ergothérapie, kinésithérapie,
psychomotricité...)
- Les activités d’éveil, occupationnelles, d’épanouissement, d’animation et
d’ouverture à la vie sociale et culturelle,
- Elles ne proposent pas d’activités de travail.
Les C.H.R.S. qui sont des Centres d’Hébergement et de Réadaptation Sociale pour
adultes et familles connaissant de grandes difficultés sociales (possibilité d’accueil
d’urgence ou de longue durée), décret du 20 novembre 1953 et décret n° 76526 du 15 juin
1976.
31
1.3.2 FINANCEMENTS AIDE SOCIALE (Conseil Général)
Les foyers occupationnels F.O. ou appelés aussi Foyers de Vie accueillant des
adultes handicapés à autonomie réduite ne pouvant pas travailler mais ne nécessitant
toutefois pas de surveillance, ni de soins constants comme dans les M.A.S. Ils fonctionnent
en internat complet 365 jours par an et proposent des activités de socialisation et
occupationnelles.
Les foyers d’hébergement pour travailleurs handicapés assurent l’hébergement et le
suivi des personnes handicapées travaillant en C.A.T. ou A. P.
1.3.3 FINANCEMENTS MIXTES
Les F.D.T. : Foyers à double tarification destinés aux adultes gravement handicapés
avec une dépendance totale ou partielle. La tarification comporte deux volets :
- Une prestation de soins (sécurité sociale) comprenant les charges de personnel,
paramédicale et les médicaments,
- L’aide sociale départementale (via un prix de journée, hébergement).
L’accueil des malades mentaux stabilisés a été rendu possible par la circulaire n°
243 du 22 avril 1988 dès lors que leur état ne nécessite plus de soins actifs en
établissements psychiatriques.
Les établissements du secteur médico social pour adultes pour la plupart d’entre
eux, ne font pas référence à une quelconque méthode particulière en ce qui concerne la
prise en charge des personnes autistes. Tout comme pour les enfants, le manque de
diagnostic précis est flagrant et la confusion autisme / psychose est encore plus
dommageable pour une prise en charge adaptée à l’autisme. Très peu de C.A.T. font
référence à une méthodologie de prise en charge spécifique à l’autisme. “ Les C.A.T. en
général, et les travaux qu’ils proposent ne sont pas adaptés à la population des autistes ”,
(livre blanc UNAPEI) (26).
Dans les foyers de vie et les Maisons d’Accueil Spécialisées, le constat est le
même : très peu de prise en charge spécifique à l’autisme. Le manque de moyens est très
souvent évoqué, le projet individuel intervient en second lieu “l’important est de sécuriser
la prise en charge ” (Livre blanc UNAPEI) (26).
Dans de nombreux établissements, les problèmes de comportements des adultes
autistes focalisent l’attention. Pour la plupart d’entre eux, ils ne font pas le lien entre le
manque de prise en charge spécifique de l’autisme et les troubles du comportement.
L’absence de références théoriques, la résistance de certains établissements à s’inspirer
d’une méthodologie conduit dans de nombreuses situations, à un manque de rigueur dans
les prises en charge, à une incohérence dans les approches d’un intervenant à un autre,
32
d’un moment de la journée à un autre (UNAPEI Livre blanc) (26). Ce qui conduit
inéluctablement pour la personne autiste à une incompréhension des situations vécues. La
réaction à cette situation se traduit par un comportement inadapté (trouble). Ce trouble
devient moyen de communication de la non-compréhension de la situation, “la boucle est
bouclée ”.
La collaboration et les relations avec les partenaires institutionnels notamment la
psychiatrie selon le livre blanc de l’UNAPEI sont rares “les liaisons avec la psychiatrie
sont de faible niveau voire inexistantes ”. Cependant, plusieurs établissements, l’hôpital
psychiatrique du secteur constitue la seule alternative en cas d’échec ou de crise.
La formation des personnels dans le domaine de l’autisme est faible voire
inexistante, de nombreux établissements ne sont pas prêts et ne se préparent pas à l’accueil
d’une personne autiste.
En conclusion, les établissements pour adultes du secteur médico-social, à de trop
rares exceptions près, ne sont pas “armés ” pour accueillir et pour prendre en charge de
façon cohérente et harmonieuse les personnes autistes.
33
Tableaux des structures dans le domaine sanitaire et médico-social
ENFANTS ET ADOLESCENTS
SANITAIRE
Etablissements
Définitions
SANS
HEBERGEMENT
CMP
Centre médicopsychologique
SOCIAL ET MEDICO-SOCIAL
Etablissements
IME
Définitions
Institut médico-éducatif
Centre d'accueil
(=IMP +
IMPRO)
Hôpital de jour
IMP
Institut médicopédagogique
Centre d'accueil
IMPRO
Institut médicoprofessionnel
Thérapeutique
à temps partiel
IR
Institut de rééducation
C.A.T.T.P
Service
d'hospitalisation
à domicile
Etablissements
pour
polyhandicapés
AVEC HEBERGEMENT
PFS
Placement familial
spécialisé
Service
d'hospitalisation
à temps complet
Centre de crises
Hopital de nuit
Centre de
post-cure
STRUCTURES A LA FRONTIERE DU SANITAIRE ET DU MEDICO-SOCIAL
CRA
Centre ressource autisme
CMPP
Centre médico psycho-pédagogique de diagnostic et de soins
CAMSP
Centre d'action médico-social précoce
SESSAD
Service d'éducation spécialisée et de soin à domicile
CLIS
Classe d'intégration scolaire
34
ADULTES
SANITAIRE
Etablissements
Définitions
MEDICO-SOCIAL
Etablissements
Définitions
SANS
HEBERGEMENT
CMP
Centre médicoPsychologique
FINANCEMENT
ETAT
C.A.T.
Centre d'aide par le
Travail
Centre de crise
A.P.
Atelier protégé
H.J.
Hopital de jour
M.A.S.
Maison d'Accueil
Spécialisée
CATTP
Centre d'accueil
Thérapeutique à temps
Partiel
CHRS
Centre d'hébergement
et de Réadaptation
FINANCEMENT
AIDE SOCIALE
F.O.
Foyer occupationnel
ou de vie
Foyer
d'hébergement
Ateliers
thérapeutiques
Service
d'hospitalisation
à domicile
AVEC
HEBERGEMENT
Service
d'hospitalisation
à temps complet
FINANCEMENT
MIXTE
FDT
Foyer à double tarification
Appartements
associatifs
Centre de crise
Hôpital de nuit
Appartements
thérapeutiques
Appartements
associatifs
Maison
communautaire
ou thérapeutique
Centre de
post-cure
P.F.T
Placement familiale
Thérapeutique
35
CHAPITRE II
EXEMPLES DE SITUATIONS ETUDIEES
2.1 UN ETABLISSEMENT MEDICO SOCIAL
L’exemple que nous avons choisi dans le champ du médico-social est une Maison
d’Accueil Spécialisée qui se situe dans le sud du Morbihan. Le Directeur de cette MAS
nous a reçu et nous a donné un certain nombre d’informations concernant l’accueil des
personnes autistes dans son établissement.
Cette M.A.S a été créée par arrêté de Monsieur le Préfet de Région le 11 janvier 1981.
Elle a été érigée en établissement public cantonal autonome par arrêté du Commissaire de
la République le 31 juillet 1984. Placé sous tutelle de la D.A.S.S., l’établissement a ouvert
ses portes le 1er septembre 1984.
Population accueillie :
Cette M.A.S reçoit des handicapés adultes des deux sexes de plus de 16 ans, atteints
d’un handicap congénital ou survenu pendant l’enfance ou l’adolescence, atteints de
déficiences intellectuelles en majeure partie (QI < 30), sensorielles et pour certains, de
déficiences motrices et somatiques.
Agrément :
La M.A.S est passée de 36 adultes handicapés à son ouverture à 48 en 1986, puis
l’effectif est passé à 60 en avril 1988. Conformément au décret du 28 décembre 1978.
La M.A.S assure toute l’année :
- L’hébergement
- L’aide et l’assistance constante que nécessite l’état de santé de ses personnes
- La surveillance médicale, poursuite des traitements et rééducations, activités
occupationnelles dites “de vie sociale ”, sorties, animations destinées à améliorer les acquis
et prévenir la régression.
Urbanisme et Architecture :
L’établissement est implanté en milieu périurbain tout près d’une petite ville de
3500 habitants et à proximité de VANNES. L’architecture est de style éclaté :
- Bâtiments administratifs, (bureaux, salle de réunion, pataugeoire et salle de
kinésithérapie).
- Bâtiments de services généraux (cuisines, ateliers, réfectoire du personnel et
buanderie).
- Une grande salle servant pour les réunions générales et les fêtes
- Quatre unités d’hébergement constituant les lieux de vie pour les personnes
36
handicapées. Chaque unité s’organise autour d’un espace central composé d’un patio fermé
qui sert de promenoir et qui s’ouvre sur 15 chambres.
Organigramme :
L’organigramme est composé de personnel soumis au statut de personnel
hospitalier, il comprend :
Direction :
1 Directeur
1 Cadre infirmier
Services généraux :
2 adjoints d’administration
1 ouvrier d’entretien
2 cuisiniers
1 lingère
Service médical et de soins :
5 infirmiers(es)
8 aides soignant(es)
26 agents de service hospitaliers
4 aides médico psychologique
5 veilleurs de nuit
soit l’équivalent temps plein de 55.5 postes. Le ratio total du personnel est de 0.925. Le
ratio d’encadrement hors direction et services généraux est de 0.8. Le suivi médical est
confié à des médecins psychiatres ainsi qu’à des médecins généralistes. Un médecin de
rééducation surveille le maintien et l’autonomie physique de chacun, le masseur
kinésithérapeute sous sa directive œuvre contre les déficiences inhérentes au handicap
physique.
Le projet de vie :
L’objectif poursuivi est d’offrir aux personnes handicapées un cadre de vie
accueillant et propice au maintien de leurs possibilités d’autonomie. Des activités
occupationnelles, des activités ludiques occupent une place prépondérante dans
l’organisation des journées.
Déroulement d’une journée type
- Lever, toilette, traitements, petit déjeuner
- Temps libre
- 10 h 30 : activités dans l’unité de vie en groupe de vie ou en groupe de niveau
- 11 h 30 : repas
- Après midi : promenades, ateliers, jeux, temps libre, goûter
- 17 h - 18 h 30 : activités en unités, écoute musicale, jeux
- 18 h 30 : dîner
37
- 19 h 30 : toilette, coucher, appareillage.
Comme nous pouvons le constater, cette maison d’accueil n’est pas équipée pour
prendre en charge de manière satisfaisante les personnes atteintes d’autisme. Cependant,
quelques personnes autistes y résident, non sans poser de nombreux problèmes au point
que l’ancienne direction, apprenant l’ouverture d’une structure spécialisée en autisme à
Lorient, l’interpelle et demande expressément d’admettre au moins une personne autiste
dans cette nouvelle structure. Ce ne fut pas possible, les admissions de cette maison
d’accueil, la Villa Cosmao, étant déjà arrêtées.
Aujourd’hui, de nombreuses personnes adultes autistes sont sans solutions de prise
en charge. Elles sont pour la plupart d’entre elles dans leur famille. Les parents des jeunes
autistes qui ont eu la chance d’être pris en charge dans des structures plus ou moins
adaptées à leur pathologie (sanitaire ou médico-sociale), n’acceptent pas que leur enfant
intègre un établissement qui ne soit pas un tant soit peu spécialisé dans l’autisme.
Ils revendiquent, à juste titre, la continuité dans les prises en charges, le suivi des
thérapies éducatives et de soins. Les M.A.S classiques, comme celle que nous venons de
présenter n’ont pas les moyens d’offrir ce type de prestations :
- Les prises en charges et les activités sont essentiellement axées sur le soin et
ce pour d’évidentes raisons physiologiques
- Le personnel, peu nombreux et non formé à l’autisme est très ancré dans ses
pratiques
- Les prises en charges sont généralistes, absolument pas spécifiques
- L’environnement et l’aménagement des locaux ne sont pas adaptés à l’autisme
- La moyenne d’âge des personnes handicapées dans ces établissements se situe très
souvent autour de 40 ans et plus, l’écart d’âge entre les anciens résidants et les nouveaux
peut rebuter certains parents.
Evidemment, on peut se demander “n’est-il pas possible de faire un effort, de
prendre en considération ce que l’on sait de la prise en charge des personnes autistes et
ainsi répondre aux problèmes posés ? ”
La direction de cette M.A.S a considéré qu’elle était devant un problème majeur et
que :
- Tenter de changer les pratiques
- Réorganiser l’environnement
- Former le personnel
- Redéfinir le projet d’établissement étaient un pari risqué et qu’il y avait peu de
possibilités pour que la réussite soit au bout de ce travail. Devant ce constat, confrontée à
la demande spécifique des parents d’enfants, d’adolescents et d’adultes autistes, elle a
décidé de répondre par un “ autre chose ailleurs ”. Le projet d’un établissement plus petit,
24 places, conçu, adapté, organisé pour recevoir des personnes autistes a été déposé auprès
des services compétents.
38
2.2 UN ETABLISSEMENT SANITAIRE
L’équipement sanitaire que nous avons choisi pour illustrer les modes de prises en
charge actuelles des personnes adultes autistes est un Centre Hospitalier Spécialisé en
Psychiatrie situé dans le sud Ouest du département du Morbihan.
Cet hôpital ouvert depuis 1971, dispose de 260 lits d’hospitalisation complète, de
196 places d’hôpital de jour et de nuit, pour le secteur adulte et de 6 lits d’hospitalisation
complète, de 70 places d’hôpital de jour et de 2 lits d’hospitalisation de nuit pour le service
infanto-juvénile. L’effectif en personnel était au 31.12.1999 de 667 agents, + 82 contrats
C.E.S. (contrat emploi solidarité).
En ce qui concerne les personnes adultes autistes, elles sont hospitalisées dans trois
pavillons correspondant au trois cliniques qui composent les secteurs de psychiatrie adulte.
Au total, 42 personnes des deux sexes présentant une pathologie lourde vivent dans ces
pavillons. Si l’on s’en réfère aux éléments diagnostiques fournis par l’hôpital pour la
population qui nous intéresse, 22 personnes sur les 42 souffrent d’autisme et ont d’autres
troubles envahissants du développement (catégorie CIM 10 F80-F89). Les diagnostics
somatiques associés répertoriés font état d’épilepsie (17 patients), situs inversus (cœur à
droite), troubles du transit, troubles de la glande thyroïde.
Les handicaps majeurs répertoriés sont aussi présents : incontinence, repas édenté,
trouble de la marche, déplacement en fauteuil, surdité.
Ces personnes ont un âge moyen compris entre 35 et 44 ans et vivent depuis
longtemps à l’hôpital (88 % depuis plus de 10 ans, dont certains depuis l’ouverture de
l’hôpital en 1971). Ces personnes sont originaires en grande majorité du secteur de
l’hôpital et ont été admises à 60 % à partir d’un service de psychiatrie de l’établissement
ou d’un autre établissement (service infanto-juvénil pour la plupart). Pour 10 d’entre eux,
une démarche d’orientation en secteur médico social a déjà été effectuée.
Ces pavillons, unités de soins, sont rattachés administrativement à un poste central
de commandement (P.C.) et sont placés sous la responsabilité d’un cadre infirmier. En
moyenne, car il peut y avoir des petites différences en fonction du nombre de patients par
pavillon, l’équipe soignante par pavillon est composée de 12 infirmiers(es), de 3 à 4 aides
soignant(es) et de 1 à 2 agents de service hospitalier (ASH).
En ce qui concerne l’équipe soignante, elle travaille sur l’ensemble de l’année en 3
x 8 h, ce qui donne journellement et en moyenne 2 soignants le matin, 2 le soir + 1
personne intervenant à la journée. Cette équipe est souvent renforcée par 1 aide soignant, la
nuit, 2 infirmiers surveillent le pavillon.
Chaque pavillon est composé de chambres (très peu de chambres individuelles) de
39
3 à 4 lits, d’une salle à manger, d’un séjour, d’un salon et de sanitaires auxquels il convient
d’ajouter les espaces réservés aux professionnels.
L’organisation du travail se décompose comme suit : lever, toilette, petit déjeuner,
séjour, déjeuner, repos, séjour etc... Lorsque l’organisation le permet, quelques activités
sont proposées aux patients. Ces activités, à vocation thérapeutique, (terre, graphisme) sont
assurées par les soignants. Des promenades sont aussi organisées dans le parc de l’hôpital.
Nous le voyons bien, la prise en charge des personnes adultes autistes à l’hôpital
n’est pas particulièrement adaptée :
- Pas de projet individuel pour ces personnes donc pas ou peu de prise en charge
individuelle. Chaque pavillon a un projet de soin global, la prise en charge se réfère à la
psychothérapie institutionnelle (les lieux, l’environnement, le groupe est soignant),
l’organisation des soins est très hospitalière, les soins sont essentiellement médicaux
(préparation, distribution des traitements chimiothérapiques).
- Pas de structuration de l’environnement, les locaux sont peu adaptés à la prise en
charge de ces personnes. Ils ont été conçus en fonction d’un projet hospitalier en tant que
locaux de soins (salle commune). L’organisation de ces locaux ne préserve absolument pas
l’intimité des personnes, la promiscuité y est de mise.
- Pas de personnel formé spécifiquement à l’autisme. Le personnel, en grande
majorité issu du corps des infirmiers psychiatriques n’a pas été formé pour prendre en
charge ces pathologies. Souvent désarmées, sans solutions éducatives, très peu soutenues
par le corps médical qui ne s’intéresse que très peu à ces populations, les équipes
soignantes sont confrontées aux difficultés liées à la prise en charge de ces populations.
Pour conclure, tout comme nous beaucoup de soignants que nous avons rencontrés,
considèrent que l’hôpital qui est un lieu de soins, ne devrait pas être un lieu de vie. Bien
sur, les personnes autistes, pour la plupart d’entre elles, n’ont jamais eu d’autre alternative
que l’hospitalisation totale. Le manque de structures, de lieux de vie adaptés à leurs
pathologies ont fait qu’elles n’ont jamais pu bénéficier de solutions plus adaptées.
Depuis quelques temps, un groupe de travail s’est constitué à l’hôpital dans le but
de proposer la création d’un dispositif permettant une articulation et une coordination dans
la prise en charge des patients concernés :
- L’un sanitaire avec des lits de crise en hospitalisation complète, un hôpital de jour
et une équipe ambulatoire,
- L’autre, médico-social avec un lieu de vie et un accompagnement pour les soins
pour 40 patients souffrants d’autisme et de troubles envahissants du développement (bien
sûr, les 22 personnes autistes diagnostiquées font partie de ce projet).
En outre, l’hôpital a décidé que le projet médico-social devrait être conduit avec le
concours d’un partenaire extérieur. Ce partenaire est une association qui œuvre depuis de
nombreuses années dans le domaine de l’autisme et avec qui l’hôpital gère une structure
d’hôpital de jour pour jeunes adultes autistes : le Centre pour l’Education et la Relation
40
KER HEOL à Lorient.
Nous notons avec satisfaction que les orientations qui guideront ce projet pourront
être puisées auprès de plusieurs sources : stratégies éducatives s’inspirant de TEACCH,
stratégies pédagogiques, corporelles, sensorielles et relationnelles et qu’elles pourront
s’articuler autour de références communes au centre pour l’éducation et la relation KER
HEOL, et à la Maison d’Accueil Spécialisée VILLA COSMAO.
Nous voyons poindre là, la référence à la notion de réseau de prise en charge de
l’autisme.
CHAPITRE III
3.1 EVALUATION QUANTITATIVE DU DISPOSITIF AUTISME EN BRETAGNE
Selon l’étude de l’ORSB effectuée en 1996 (Observatoire Régional de Santé de
Bretagne) “autisme : Force et faiblesse du dispositif en Bretagne ” (27), le nombre des
personnes adultes autistes recensées dans les établissements médico-sociaux est de 245 et
de 355 dans les établissements du secteur psychiatrie générale. 600 adultes autistes sont
ainsi dénombrés.
Si l’on applique le taux de prévalence repéré par l’ANDEM, il devrait y avoir en
Bretagne 820 à 1150 personnes autistes ou atteintes du syndrome autistique. L’ORSB note
que l’effectif dénombré est donc en deçà, l’insuffisance du dénombrement en secteur
psychiatrique et en établissements médico-sociaux est une réalité : “ Par ailleurs, la
difficulté d’un consensus autour de la définition de l’autisme est encore plus difficile chez
les adultes ”.
Dans le secteur médico-social, les adultes sont surtout pris en charge en foyer de
vie, foyer occupationnel, M.A.S. Seuls quelques adultes travaillent en secteur protégé
C.A.T ou A.P.
3.2 EVALUATION QUALITATIVE
Dans les établissements médico-sociaux de Bretagne, les personnes autistes sont
accueillies majoritairement parmi les autres adultes handicapés mentaux dans des unités
spécifiques plus larges avec des déficients profonds ou avec des polyhandicapés. Seuls, 4
établissements médico-sociaux sur 37 pensent qu’il serait judicieux de créer des
établissements spécifiques en raison de la “complexité de la prise en charge ”. La moitié
des établissements élaborent des projets individuels écrits et transmis aux parents et
cherchent à “constituer des réseaux ”.
41
En ce qui concerne le travail avec les familles : seuls 10 établissements sur 30 le
perçoivent comme moyennement satisfaisant et 4 sur 30 comme étant difficile avec “peu
de travail spécifique entre familles et professionnels ”, et ont une divergence de perception
sur le handicap et la maladie.
Dans les établissements médico-sociaux, la référence à la psychanalyse dans la
prise en charge des adultes reste prédominante (16 sur 30), mais la psychothérapie
institutionnelle et l’importance apportée à la vie quotidienne sont nommée (6 fois).
Un seul établissement lié au CHS signale la complémentarité entre la pratique
“TEACCH ” et la psychiatrie relationnelle.
L’étude met aussi en lumière, le manque de formation spécifique suivi par les
équipes, très peu d’établissements ont mis en place des plans de formation spécifique à
l’autisme. L’ouverture vers l’extérieur n’est pas généralisée, seuls 4 établissements ont
établi des protocoles écrits de collaboration. “ L’ouverture vers l’extérieur reste assez
limitée ”.
Les problèmes rencontrés
La majorité des établissements médico-sociaux jugent le diagnostic d’autisme
imprécis. La moitié jugent les prises en charge inadaptées, faute de moyens en personnel,
en matériel ou à cause d’une formation insuffisante “les adultes autistes sont aspirés par les
méthodes utilisées pour les personnes présentant une déficience intellectuelle ”.
Les filières
Les difficultés pour trouver une structure d’accueil sont réelles. Du point de vue
qualitatif, la moitié des établissements médico-sociaux signalent un “manque de
continuité ” et les ruptures entre les structures enfants et adultes, ainsi que les prises en
charge en pédopsychiatrie et en psychiatrie adulte. Il en est de même pour les méthodes
utilisées.
Il manque des places en accueil de jour pour 17 établissements médico-sociaux sur
30 en accueil temporaire et en hébergement. Les listes d’attente sont longues et les familles
ont des souhaits notamment :
- Que soit reconnu le droit au diagnostic
- Que l’autisme soit reconnu comme handicap mental (reconnaissance importante
aux yeux des parents car il en découle une prise en charge spécifique)
- Que soit reconnu le libre choix dans la prise en charge de la personne autiste et
que les parents puissent choisir une approche psychanalytique, éducative ou mixte
42
- Que soit donnée une meilleure information aux parents, aux associations sur les
structures existantes ainsi que sur les techniques de prise en charge par les établissements
- Que les associations de parents et les parents soient reconnus comme
interlocuteurs. “ Les parents veulent être partie prenante de l’éducation de leurs enfants ”.
Cela ne peut qu’améliorer la qualité de vie de l’enfant, de l’adolescent, de l’adulte autiste
- Que soit mis en place un programme de formation spécifique au handicap de
l’autisme
- Que les prises en charge soient globales.
Les établissements font eux aussi des remarques et des propositions en terme :
- De formation
- De méthode, de pratique “la pathologie autistique est trop complexe pour que les
professionnels l’enferment dans une seule pratique voire une seule théorie ”. “ Toutes les
techniques et prises en charge éducatives, pédagogiques et thérapeutiques se veulent être
autant d’outils au service de l’évolution de la personne autiste. L’essentiel étant de
développer au maximum l’autonomie chez chacun d’eux et de construire leur identité, leur
personnalité ”
- De création en terme de structures d’accueil
- De diagnostic
- De partenariat “promouvoir un partenariat actif avec les autres structures et
institutions du secteur ”.
En conclusion, l’étude de l’O.R.S.B.(27) met bien en lumière les difficultés
quantitatives et qualitatives de l’accueil et de la prise en charge de l’autisme en Bretagne.
“ Le parcours de la personne autiste ou atteinte de syndromes autistiques, va de la
psychiatrie à la psychiatrie ”. Les jeunes enfants sont souvent pris en charge dans les inter
secteurs de pédopsychiatrie, à partir de 6 ans, ils sont en général dans les établissements
médico-sociaux et après 20 ans, nombre d’entre eux retournent dans les hôpitaux
psychiatriques. Certains psychiatres signalent cependant l’inadaptation de leur prise en
charge pour les deux tiers des adultes autistes.
L’insatisfaction des professionnels est importante, le diagnostic est jugé trop tardif,
trop imprécis et les prises en charge inadaptées. La qualité du travail avec les familles,
n’est, en général, pas jugée satisfaisante et enfin, les manques sont perçus à certains âges
clés, notamment à l’adolescence et à l’âge adulte (manque de places et discontinuités
qualitatives).
43
2eme PARTIE
RESUME
Les services et structures pouvant intervenir à un moment ou à un autre dans la
trajectoire de vie d’une personne autiste sont nombreux et divers. Nous les avons classés
ici en plusieurs catégories : du secteur sanitaire : enfants, adolescents et adultes, du
secteur médico-social : enfance, adolescence et âge adulte.
Concernant le secteur médico-social adulte nous avons étudié les différents modes
de financement.
Deux exemples de situation d’établissements recevant des personnes adultes
autistes dans le champ du sanitaire et du médico-social ont été étudiés : il s’agit d’un
établissement hospitalier spécialisé et d’une maison d’accueil spécialisée. Ces deux
établissements sont situés dans le département du Morbihan
Cette deuxième partie se termine par l’analyse quantitative et par l’évaluation
qualitative du dispositif autisme en Bretagne. Nous reprenons ici les éléments des
questionnaires de l’Observatoire Régional de Santé en Bretagne.
Un certain nombre d’éléments de ces analyses permettront de poser les limites de
ces types de prises en charge. Nous pouvons d’ores et déjà en lister quelques unes :
-situation géographique excentrée
-locaux et environnement inadaptés
-projets ne prenant pas en considération la spécificité de la pathologie et des
troubles autistiques
-formation du personnel non spécifique à l’autisme
44
3ème PARTIE
L’INSTITUTION
INTRODUCTION
La troisième et dernière partie de ce mémoire va être consacrée à l’institution. Des
dispositions administratives aux attentes des parents et des professionnels, nous nous
proposons d’essayer de poser les bases de ce que pourrait être un établissement spécialisé
accueillant des personnes adultes autistes.
De l’écriture du projet d’hébergement et du projet de vie des résidants, de son
articulation avec le projet architectural et de son implantation géographique aux profils de
postes des professionnels qui interviendront et mettront en œuvre les projets, nous
définissons dans cette 3ème et dernière partie, les préalables indispensables au bon
fonctionnement d’un établissement accueillant des personnes adultes autistes.
Nous orienterons nos réflexions au regard des constats et limites des situations
étudiées précédemment, en nous référant à nos expériences vécues dans le domaine de la
prise en charge de l’adulte autiste en institution, à nos rencontres effectuées dans le cadre
des formations, colloques, réseaux ainsi qu’à nos lectures
Nous ne traiterons pas dans ce mémoire des aspects budgétaires liés à un tel projet.
45
CHAPITRE I
1.1 LA CIRCULAIRE DU 25 AVRIL 1995
Compte tenu et en raison des difficultés tant quantitatives que qualitatives dans la
prise en charge des personnes autistes, trois rapports d’étude nationaux demandés par Mme
Simone VEIL, alors Ministre d’Etat aux Affaires Sociales, à la Santé et à la Ville, ont été
réalisés :
- L’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) en octobre 1994 “la prise en
charge des enfants et adolescents autistes ” (28)
- L’ANDEM (Agence nationale pour le développement de l’évaluation médicale)
novembre 1994 “l’autisme ”(10)
- La DAS (Direction de l’Action Sociale) janvier 1995 “proposition pour l’accueil
des adultes autistes ” (29)
Ces trois rapports font le point sur la situation des personnes autistes en France en
1994 :
- Sur l’estimation de la fréquence de l’autisme et des psychoses infantiles (Taux de
prévalence)
- Sur les différentes théories explicatives (le rapport de l’ANDEM a retenu une
définition minimale en tenant compte des définitions de la CIM 10 du DSM III et de la
C.F.T.M.E.A.)
- Sur l’évaluation à court et à long terme des résultats des thérapeutiques et des
modalités de prise en charge
- Sur l’importance et la difficulté du diagnostic précoce
- Sur l’orientation et les systèmes de prise en charge à dominante psychiatrique ou à
dominante éducative
- Sur l’itinéraire des enfants atteints d’autisme et leur devenir à l’adolescence et à
l’âge adulte.
Ces rapports ont servi à l’élaboration de la circulaire AS/EN n° 95-12 du 27 avril
1995 relative à la prise en charge thérapeutique, pédagogique et éducative ainsi qu’à
l’insertion sociale des enfants, adolescents et adultes atteints de syndromes autistiques.
Cette circulaire a été rédigée conjointement par les Ministres des Affaires Sociales
et de la Santé et par l’Education Nationale. Elle souligne “l’impérieuse nécessité de
promouvoir des programmes d’action fondés sur des techniques adaptées aux enfants,
adolescents et adultes autistes comprenant six principales composantes :
- Dépistage,
- Soins,
- Education,
- Socialisation,
- Insertion,
46
- Accompagnement de l’entourage en s’inscrivant dans un réseau de prise en charge
gradué, coordonné et de proximité ” et prévoit un plan d’action régional pour l’autisme
pour 5 ans.
Ce plan d’action doit répondre à 4 principaux objectifs :
1° Articulation avec les procédures en vigueur en matière de planification en santé
mentale et médico-sociale dans le respect du libre choix des familles.
2° Contenu des actions à dominante sanitaire en faveur des enfants les plus jeunes
et à dominante médico-sociale pour les adolescents et les adultes en intégrant les
composantes pédagogiques et éducatives dans les premiers cas et la composante
thérapeutique dans le second cas, sans oublier la composante sociale. “ Il est également
impératif d’assurer un accompagnement de la personne favorisant son épanouissement, son
autonomie et son insertion sociale ”. Circulaire AS/EN n° 95-12.
3° Les projets doivent prendre en compte la spécificité des personnes accueillies
induisant l’élaboration de projets individuels.
4° Le plan régional doit promouvoir une organisation en réseau entre les divers
services et institutions.
1.2 DU SANITAIRE VERS LE MEDICO SOCIAL
Un artifice législatif
La loi de réforme hospitalière du 31 décembre 1970 a donné aux établissements
hospitaliers, la personnalité morale et juridique les détachant ainsi des collectivités
territoriales.
La loi du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées, a séparé le sanitaire du
médico-social en précisant que “sont les institutions sociales ou médico-sociales, tous les
organismes publics ou privés qui accueillent, hébergent ou placent dans les familles des
mineurs ou des adultes qui requièrent une protection particulière ”.
La mission nationale d’appui en santé mentale sous la responsabilité du Dr Gérard
MASSE (30), articulée avec la direction générale de la santé et la direction
des hôpitaux, installée en 1993 et reconduite en 1996 pour trois ans, s’intéresse dans son
champ d’intervention, à des thèmes transversaux. Sa force de médiation permet la
recherche consensuelle de solutions évolutives, voire innovantes.
Dans un article de septembre 1999, paru dans la revue CNEH, le Dr MASSE (30)
47
conclut ainsi : “ les objectifs s’imposent à court terme : recentrer le sanitaire sur le soin, le
médico-social sur la qualité de vie, s’y aider mutuellement, travailler plus ensemble ”.
Le Dr Massé, dans cet article, précise que, historiquement, la psychiatrie a assumé
une fonction d’hébergement pour des patients sans autres solutions d’accueil. Il note aussi,
que leur prise en charge actuellement manque “cruellement ” de structures adaptées, que
ces problèmes spécifiques ne peuvent être abordés que par une articulation forte entre le
sanitaire et le médico-social. Auparavant, dans ce même article, il soulignait que la prise en
charge des personnes concernées relevait de réponses à “dominante ” médico-sociale.
1.3 LES ATTENTES DES PARENTS
Dans un grand nombre de cas les réalisations qui ont vu le jour ces dernières années
l’ont été sous l’impulsion des familles. Des familles regroupées dans des associations de
portée nationale, Sésame Autisme, Autisme France ont fait avancer la réflexion sur
l’autisme et sur sa prise en charge.
A Lorient c’est en juillet 1987 qu’une association l’A.I.P.S.H (Association pour
l’Insertion Professionnelle et Sociale des Handicapés) dont la vocation est jusqu’alors la
prise en charge de personnes atteintes de déficience motrice est sollicitée par son trésorier,
grand-père d’un adolescent autiste.
Un groupe de parents d’adolescents et de jeunes adultes autistes de la région se constitue
autour de cette personne, leur projet étant la mise en place d’une structure d’accueil de jour
dans une démarche plus éducative que psychiatrique. L’A.I.P.S.H après de nombreux
contacts, recherches, déplacements met en forme ce projet. L’association multiplie les
échanges, en organisant des réunions avec les associations, les professionnels, les hôpitaux
spécialisés. Fin 1989 L’ A.I.P.S.H dépose un projet auprès du Conseil Départemental de
Santé Mentale. De son coté l’hôpital spécialisé propose un projet de soin pour jeunes
adultes psychotiques. La D.D.A.S.S propose en réponse une convention pour une fusion
des deux projets.
En janvier 1991 un consensus est obtenu pour la création d’un centre d’accueil de
jour pour jeunes adultes autistes qui s’articule autour d’une convention partenariale.
En septembre 1992 Michel GILLIBERT, Secrétaire d’Etat aux Handicapés
inaugure KER HEOL Centre pour la Relation et l’Education qui scelle, à Lorient l’alliance
de la psychiatrie et des stratégies éducatives.
Forte de cette expérience positive, soutenue par les parents l’A.I.P.S.H obtient en 1996 les
crédits nécessaires à la création de la première Maison d’Accueil Spécialisée pour
personnes autistes de Bretagne la VILLA COSMAO.
Aujourd’hui l’hôpital spécialisé a un projet de création d’un établissement médicosocial pour 40 adultes autistes et ou souffrant de troubles envahissants du développement.
La direction a choisi de continuer dans la voie du partenariat et a officiellement sollicité
48
l’A.I.P.S.H pour être leur partenaire dans cette réalisation.
Certes l’exemple Lorientais est à plus d’un titre exemplaire, il fait beaucoup d’envieux car
nous savons que généralement cela ne se passe pas aussi harmonieusement.
Beaucoup de familles sont à la recherche d’une solution pour leur enfant. Les
modèles qu’on leur a présentés jusqu’ici ne les satisfont pas spécialement (qu’ils soient du
sanitaire ou du médico social d’ailleurs).
Leurs attentes se font plus précises car l’autisme a été très médiatisé, les associations de
parents ont un réel pouvoir. Les parents sont las d’attendre, ils veulent savoir, ils veulent
comprendre :
- Ce qui concerne le diagnostic de l’autisme ;
- Quels seront les soins dont pourra bénéficier leur enfant ;
- Quelles possibilités éducatives existantes peuvent lui être offertes ;
- Quels seront les choix parmi les différentes structures d’accueil ;
- Les parents veulent être aidés mais tiennent à être partie prenante dans ce qui se
fait pour leur enfant ;
- Les parents veulent qu’on leur fasse confiance ;
- Les parents souhaitent exercer des choix en matière de soins ;
- Les parents attachent une grande importance à la prise en charge éducative ;
- Les parents veulent construire l’avenir de leur enfant. B..FRANC. (31).
Les familles sont intéressées au projet qui sera mis en œuvre pour leur enfant. Elles
expriment leurs attentes, leurs besoins, leurs espoirs, elles doivent pouvoir s’assurer d’un
projet de vie spécialisé dans l’accueil de l’autisme. Il faudra donc que les familles soient
associées, dans la plus grande transparence, dans la mise en œuvre du projet de
l’établissement puis des projets individualisés. “ Les parents attendent des professionnels
un partenariat réel ”. C. PREFAUD. (32) . Nous verrons plus tard sous quelle forme il
conviendra de mettre en œuvre cette collaboration.
Nous terminerons ce paragraphe en pensant à la fratrie des personnes autistes que
nous ne devons pas oublier ni ignorer et à qui nous devons informations et soutien
psychologique s’il le souhaite.
1.4 LES ATTENTES DES PROFESSIONNELS
“ Il traînait dans le pavillon d’une pièce à l’autre, avec dans les tripes tout son refus
contre la cruauté qui règne dans ces pavillons où sont parqués ceux qu’on ne voit pas, ceux
qui depuis des générations d’infirmiers, de psychiatre, ne sont pas… ou ne sont moins que
des hères ”
“ La psychose infantile, l’autisme ça existe… et il trimbalait sa rage dans les couloirs.
STOP ! ! FINI ! CA DOIT CHANGER. Il décide de s’occuper de ces enfants, sans dire ce
qu’il a eu au fond de lui car les mots ne servent pas à grand chose parfois ! ”
“ Que vont-il devenir? Quelles structures peuvent les accueillir, dans quelles conditions et
quelles prises en charge ”. M.C MOULINIER (33)
49
Les professionnels qui travaillent auprès de ces populations ont aussi des attentes.
Le centre KER HEOL à Lorient est né de l’impulsion des parents, certes, mais aussi de la
volonté des professionnels (de l’hôpital et de l’association) d’aboutir à l’élaboration d’un
projet d’établissement ambitieux et innovant, de la volonté de travailler ensemble au profit
des personnes autistes et de leurs familles, en tenant compte de leur différences, dans le
respect des identités professionnelles de chacun.
Ce partenariat (contre nature à l’époque) se proposait de mettre en œuvre un projet qui
répondait , à l’attente des parents pour leurs enfants, mais aussi à l’attente des
professionnels :
- Bénéficier d’un plan de formation spécifique à l’autisme.
- Mise en place d’un cadre institutionnel permettant de développer des actions
éducatives et thérapeutiques.
- Travailler dans le domaine de la socialisation dans le souci de lutter contre
l’exclusion de la personne autiste.
- Etre en lien avec les familles.
- de travailler en réseau
De nombreux professionnels, qu’ils soient issus du sanitaire ou du médico- social
attendent de leurs directions, de leurs responsables que soient dégagés des moyens,
financiers, humains, que soit mise en œuvre une véritable politique de prise en charge de
ces pathologies.
- Ils attendent des structures de petites tailles à dimension humaine.
- Ils attendent des lieux dissociés (hébergement, lieu d’éducation, lieu de soin)
- Ils attendent que les établissements prennent en compte la spécificité de la prise en
charge de l’autisme.
CHAPITRE II
2.1 LE PROJET
Fort de ces observations, conscient de la nécessité de proposer un “modèle
transversal ” qui puisse à la fois s’ancrer dans les pratiques médico-sociales et dans les
pratiques sanitaires, nous allons maintenant nous efforcer de définir ce que pourrait être
une structure d’accueil pour ces personnes autistes. Ce lieu de vie doit répondre à
l’ensemble des nécessités que la prise en charge de ses personnes requièrent. Afin de
proposer un modèle qui soit cohérent et adapté à l’ensemble de la problématique posée par
la personne autiste, pour inventer cet “autre chose ” qui s’inscrive dans la réalité, certes
complexe de ces personnes, nous devons élaborer un projet. “ Dire d’une réalité quelle soit
complexe c’est quelle est le lieu de convergence de plusieurs dimensions irréductibles, il
n’y aurait pas lieu de faire un projet si les choses n’étaient pas complexes, s’il n’y avait pas
50
de problèmes, s’il n’y avait pas de questionnements ” J.P BOUTINET (34). A partir d’un
certain niveau de complexité on ne peut plus agir par bricolage, par tâtonnement, on doit
s’appliquer à simplifier, à rendre lisible la pensée, l’idée. C’est sans doute pour cela que le
projet nous renvoie à l’idée de projection, de futur. Nous ne faisons pas de projets dans
l’urgence le projet est de l’ordre du médiat et non de l’immédiat. Le projet vient du latin
projecère qui étymologiquement veut dire jeter en avant. Nous devons anticiper avant de
réaliser, nous devons conceptualiser, passer par la méthodologie, et la méthodologie d’un
projet de ce type c’est un dessin (architectural) et un dessein (une idée une intention)
2.2 LE PROJET D’ETABLISSEMENT
Le projet d’établissement doit dans ses grandes lignes définir un certain nombre d’éléments.
Il doit présenter les “acteurs ”. Les initiateurs, les concepteurs puis les bénéficiaires du
projet, il doit définir les orientations, la philosophie générale, préciser les textes de
références auquel il se réfère, proposer un modèle d’organisation institutionnelle et de prise
en charge de la personne accueillie, proposer un organigramme et les grandes lignes du
budjet.
Le projet s’inscrit dans un réseau
Pour parler du réseau nous nous réfèrerons à notre expérience afin de développer
cet aspect du projet. En 1992 KER HEOL inaugure une nouvelle voie dans la prise en
charge de l’autisme. Dès le début KER HEOL puis la VILLA COSMAO par la suite ont
développé un réseau de collaboration diversifié visant à la socialisation des personnes
autistes. Ces partenaires ont joué un rôle prépondérant dans l’approche que les
professionnels de ces structures ont eu du projet individualisé. Nous citerons entre autres
partenaires, les municipalités de la région de Lorient et les fermes pédagogiques, les salles
de sport et autres équipements sportifs et culturels, une maison des jeunes, le centre
hospitalier spécialisé et ses ateliers chantiers, un hôpital de jour avec lequel KER HEOL et
la VILLA COSMAO sont en étroite relation, une école primaire, une association culturelle
qui développe une approche originale autour de la créativité et de la relation et France
Télécom qui met à disposition des personnes autistes du réseau, dans son entreprise un
local aménagé et nous confie des petits travaux manuels à effectuer (pliages, comptages,
démontages de tatoos).
KER HEOL a initié une autre forme de réseau : la collaboration inter
établissements.
Depuis 1992 sous l’impulsion des professionnels de KER HEOL et de St QUIHOUET
(établissement public médico-social qui venait d’ouvrir une section pour adolescents
autistes près de St BRIEUC) un réseau de professionnel s’est construit. La VILLA
COSMAO puis le Centre du PONT COET (accueil d’enfants autistes près de VANNES)
ont été les premiers à rejoindre ce réseau. Après l’organisation de journées à thèmes, les
responsables de ces établissements ont décidé de mieux coordonner leurs actions au sein
d’une association à l’échelle régionale bretonne. “ Ouest Réseau Autisme est
l’aboutissement d’une volonté, partagée entre plusieurs professionnels, parents et
51
établissements, de dépasser le découpage des pratiques professionnelles à partir de secteurs
administratifs de prises en charge pour tendre vers des synergies interprofessionnelles ” .
(A THOMAS, Présidente de O.R.A) (35)
A l’instar de ce qui se fait à Lorient, le réseau permet de développer des axes de
travail de socialisation très originaux, il permet aux professionnels de sortir de leurs
institutions, de rencontrer d’autres professionnels, de bâtir des projets en commun
(vacances péniche pour les adultes autistes de Ker Héol et de la Villa), de mettre en
commun leurs moyens pour des actions éducatives ou festives. La création d’un réseau
devra être intégrée au projet initial du lieu de vie.
2.3 LES OBJECTIFS GENERAUX (Philosophie du projet)
Tout projet doit, à partir des éléments qui le compose, fixer les grands objectifs
généraux de la future réalisation. Ces grands objectifs concernant l’organisation de la
structure et la prise en charge des personnes autistes accueillies, définis en mots clés,
doivent permettre de percevoir la philosophie sous-jacente du projet.
En ce qui concerne le modèle que nous allons présenter, ces mots clés indiquent
clairement, outre la philosophie générale, les grandes orientations de ce
projet. L’objectif général du projet étant, au regard de ses capacités et de ses potentialités,
d’aider la personne autiste accueillie
- A accéder à un mieux être dans tous les secteurs de la vie quotidienne
- De lui assurer le meilleur épanouissement possible de la personnalité
- D’optimiser la qualité de sa relation avec son environnement.
AUTONOMIE
-
COMMUNICATION
-
SOCIALISATION
MIEUX ETRE
EPANOUISSEMENT
CITOYENNETE
EDUQUER
-
SOIGNER
52
Le lieu de vie doit permettre à chacun de ses résidants de poursuivre son chemin, son
évolution, non seulement de maintenir ses acquis mais de continuer à développer des
capacités, des savoir-faire, des savoir être en fonction de ses potentialités et ce, dans un
environnement adapté.
Dans ce cadre et afin de tendre vers ces objectifs, l’établissement devra mettre en
œuvre tous les moyens prévus afin que chacun soit guidé, soutenu, stimulé et qu’il puisse,
à son niveau, être acteur de sa vie, accéder au statut de sujet.
- l’Autonomie :
Que l’autonomie de chacun soit respectée au niveau où elle se trouve et augmentée
chaque fois que cela sera possible. “ Ce domaine doit être une priorité car c’est celui qui
donnera à la personne atteinte d’autisme, le maximum de chance de s’intégrer à la
société ”. T. PEETERS. (36)
L’apprentissage à l’autonomie dans les domaines courants de la vie, hygiène et
soins personnels (se laver, se brosser les dents, se raser, se coiffer, prendre une douche,
gérer son hygiène menstruelle, choisir ses vêtements etc...) les repas (manger et boire seul,
avoir une bonne tenue à table), les déplacements (dans un environnement connu ou dans un
environnement
différent),
les
routines
et
les
organisations quotidiennes, “comprendre afin de ne pas dépendre ” (emploi du temps,
activités etc...), l’autonomie personnelle et sociale (temps libre, faire les courses seul ou
accompagné) permettront à chacun d’acquérir une certaine indépendance qui facilitera son
intégration dans la communauté ainsi que dans la vie sociale. Tous ces apprentissages
devront être hiérarchisés en fonction des priorités et s’inscrire dans le projet de vie de la
personne autiste.
- La Communication
Chacun doit pouvoir à son niveau communiquer avec son entourage, se faire
comprendre, c’est la base même de la relation. La communication, qu’elle soit verbale ou
non verbale, sera suscitée, développée. “ Il faudra rechercher la forme de communication la
mieux adaptée et la plus utilisable pour chacun ” T. Peeters (36). L’enseignement de la
communication alternative devra être une priorité pour les personnes non verbales. Il ne
faudra pas négliger les difficultés et les problèmes que la communication pose aussi aux
personnes autistes verbales. Pour ce faire, le développement des moyens de
communication dits alternatifs se fera en fonction du niveau de chacun. Développée dans le
cadre des stratégies éducatives pour l’autisme du programme TEACCH, l’utilisation du
geste, de l’objet, de l’image (pictogrammes ou photos), des mots écrits, sans oublier la
parole, ont montrés leur efficacité et seront utilisés dans le lieu de vie.
Adapter à chacun son niveau de communication, lui permettra d’appréhender et de
comprendre tous les moments de la journée, d’exprimer ses besoins et ses demandes ainsi
53
que d’établir la relation avec autrui.
- La Socialisation
La socialisation étant le meilleur gage de l’intégration, elle sera constamment
recherchée : tout d’abord dans les temps collectifs du lieu de vie, dans les activités de
groupe proposées aux différents moments de la vie de l’institution puis dans la
participation aux activités à l’extérieur.
Il s’agira alors de développer ou de faire acquérir l’intérêt pour les relations inter
personnelles, l’intérêt pour les relations inter sociales, pour la reconnaissance de l’autre.
Nous le verrons, le choix de l’implantation urbaine ou périurbaine nous semble très
adapté. La communauté urbaine offre de multiples possibilités d’intégrations, d’échanges.
Afin de travailler ce domaine, il ne faudra pas hésiter à faire appel, à s’associer, à
s’appuyer sur les personnes extérieures au lieu de vie pour accompagner les personnes
autistes vers l’intégration sociale. Par exemple, l’animateur sportif pour découvrir certaines
activités sportives, le professeur de danse pour les activités d’expression corporelle, le
professeur
de
musique
pour
les
ateliers musicaux, l’animateur socio-culturel pour des activités au sein de maison de
quartier, les bénévoles pour des actions ciblées comme l’accompagnement d’une personne
autiste au club de modélisme, le commerçant chez qui l’on va régulièrement. “ Il faut tout
un village pour élever un enfant ” disait G. MAGEROTTE (37). Avec lui, nous retenons ce
principe, c’est là, un facteur important pour la socialisation.
2.4 ARTICULATION ENTRE LE PROJET DE VIE ET LE PROJET ARCHITECTURAL
Pour Nicolas NORMIER (38), Architecte Urbaniste concepteur de la maison du
21ème siècles à St Dié dans les Vosges, c’est le projet pédagogique et le projet éducatif qui
sont la grille de lecture du projet architectural avec lesquels il forme “une trilogie
indissociable ”. Il précise ensuite que le projet éducatif individuel est le moteur, la raison et
le sens du projet architectural.
Mais avant de nous intéresser au projet architectural proprement dit, je vais aborder
un problème, à mes yeux, essentiel, à savoir, l’implantation géographique, l’environnement
social, culturel, sanitaire.
Les personnes handicapées et plus encore les personnes souffrant de pathologies
mentales ont longtemps été exclues de la société. L’autisme n’échappe pas à cette règle et
ce n’est pas la médiatisation importante de ces dernières années qui fera changer
complètement cet état de fait.
L’implantation dans la ville, dans la cité d’un équipement pour des personnes
54
souffrant d’autisme devra être “un jalon d’un urbanisme d’intégration ”. N. NORMIER.
(38)
Une chance pour les personnes autistes dans la mise en place d’un lieu fondé sur
l’espoir. Une chance pour le quartier d’accueil en posant comme postulat l’intensification
des échanges sociaux ainsi que l’identification à la communauté citadine.
Il faudra replacer le monde de l’exclusion dans un champ d’espérance en faisant
d’un nouveau mode de prise en charge de l’exclusion une chance pour les personnes
autistes et leurs familles ainsi qu’une chance pour la ville.
2.5 L’IMPLANTATION GEOGRAPHIQUE
La question du lieu entre la prise en charge des personnes souffrant d’autisme et du
lieu qui leur sera dévolu doit se poser. Il nous semble essentiel que le choix de
l’implantation de la structure doive s’inscrire dans une logique de réflexion globale qui
prend en compte la spécificité de la pathologie et la nature du projet de prise en charge que
l’on veut y développer. En fonction du lieu choisi, la question de l’architecture devra alors
se poser, nous y reviendrons.
La phase de réflexion sur la définition des lieux doit, à notre avis, se nourrir des
expériences antérieures. A l’implantation rurale, parfois intéressante lorsque le projet
s’articule autour d’une ferme pédagogique par exemple, nous préférons une implantation
urbaine ou périurbaine.
La ville offre un certain nombre d’avantages. Il est assez aisé d’y développer un
projet architectural audacieux respectant l’environnement tout en y suivant un cahier des
charges établi en fonction du projet.
La présence d’un tissu social existant permet de développer la notion de
socialisation des personnes accueillies, de mettre en pratique des apprentissages sociaux
indispensables à la vie en société, en somme, d’accéder à la citoyenneté. Le voisinage, les
commerces (magasins, cafés, restaurants), les équipements sportifs (terrains de sport,
piscine, centre équestre etc...) les équipements sociaux (terrains d’aventures, parcours vita,
jardins publics, centres sociaux, maisons de quartier etc. ...) les équipements culturels
(cinémas, théâtres, médiathèques, bibliothèques, salles de spectacles) sont autant d’outils,
de supports pédagogiques de travail, de socialisation que l’on peut utiliser.
Sur ce point, il conviendra de préparer l’arrivée des “résidants ” en informant le
voisinage de la nature de la pathologie et de la spécificité du projet de prise en charge, en
rencontrant les responsables des magasins et des divers équipements sociaux et culturels
afin de leur expliquer les objectifs développés en matière de socialisation.
55
A chaque fois que cela sera possible, il nous paraît intéressant de passer une
“convention de partenariat ”. L’expérience que nous avons de ce travail de proximité
(rencontres, explications, dédramatisation des situations, passage de convention de
partenariat) est largement positive.
En effet, notre présence dans le tissu social d’un quartier de Lorient prouve que le
travail en amont à porté ses fruits.
Nombre de personnes du quartier connaissent les professionnels qui travaillent dans
la structure, pour beaucoup d’entre elles, elles connaissent également les résidants et les
nomment par leur prénom. L’embauche d’une personne du quartier pour effectuer des
heures de remplacement en qualité de maîtresse de maison a aussi beaucoup contribué à
notre insertion.
La présence des commerces à proximité permet de travailler et de développer les
compétences sociales : Faire les courses pour les différentes activités : cuisine, pâtisserie
etc... Acheter les produits d’hygiène personnelle et tout ce dont on a besoin, aller prendre
un pot après une promenade, aller au restaurant, utiliser les équipements culturels et
sociaux, pour un certain nombre de personnes autistes peut être très motivant et être
moteur d’une évolution comportementale. Aller au terrain d’aventures, faire des parcours
vita permettent de développer des compétences motrices, ceci dans un environnement
naturel, ludique et stimulant.
Il nous paraît donc important de disposer de ce panel de possibilités. Une ville de
moyenne importance peut, me semble-t-il offrir tout ce dispositif. Toutes ces possibilités
vont bien sur profiter directement aux personnes autistes. La diversité des “supports à
l’insertion ” permettra aux professionnels de proposer des projets innovants, intéressants,
de sortir de l’institution, de lutter contre le “syndrome d’épuisement ” que l’on peut
rencontrer dans les établissements fermés, repliés sur eux-mêmes.
Elément important dans le choix du lieu d’implantation de l’institution, la présence
des équipements sanitaires, hôpitaux, hôpital spécialisé. Comme tout à chacun, la personne
autiste doit pouvoir bénéficier d’un suivi médical régulier. Nous le savons, la pathologie et
les troubles comportementaux ne permettent pas toujours les examens médicaux
ordinaires. Les équipes de prise en charge, qu’elles soient éducatives ou sanitaires, sont
très souvent confrontées à d’énormes difficultés lorsqu’il faut effectuer ces examens ou ces
actes médicaux. (dentaires, gynécologiques par exemple). Il est alors parfois nécessaire de
recourir à des anesthésies générales. La proximité d’un hôpital général permet de faire ces
examens et les soins nécessaires. Les professionnels de la structure peuvent travailler en
collaboration avec les équipes médicales pour la préparation de l’examen ainsi que pour le
réveil et éventuellement la prise en charge à l’hôpital.
La présence d’un centre hospitalier spécialisé à proximité permet de développer des
prises en charge conjointes : l’unité de crise est alors un équipement de grande importance,
56
elle peut répondre aux grands moments d’angoisses, aux difficultés comportementales
nécessitant par exemple la mise en œuvre d’un traitement chimiothérapique sous
surveillance médicale. Dans ce cas, une convention de partenariat peut être passée entre les
établissements. Elle définira les axes de la collaboration, la place des uns et des autres dans
le suivi et la prise en charge des personnes concernées.
2.6 L’ARCHITECTURE
Penser un établissement, c’est d’abord et avant tout penser un projet social. Cela
sous-entend d’intégrer la question architecturale dans la méthodologie du projet
y compris et surtout dans ses composantes pédagogiques, éducatives, sociales et
thérapeutiques. “ Veut-on soigner, éduquer, accueillir, veut-on susciter la communication,
offrir un cadre chaleureux, sécurisant, faciliter le repérage spationnel, induire des
sensations, des stimulations ou sécuriser ? ” . JR LAUBAT.
(39).
Alors de ces choix, l’importance des volumes, de l’espace comme étant
l’expression du projet éducatif et thérapeutique prendra toute sa valeur. Si nous nous
intéressons ici à la question de l’architecture c’est que jusqu'à maintenant, et dans la
majorité des cas, les modèles types qui se dégagent relèvent de compositions assez fixes
(typologie et organisation des locaux). Ces réalisations s’organisent autour d’une
composition tripartite :
- Un pôle administratif
- Un pôle médico-éducatif
- Un pôle hébergement.
On note également une forte stéréotypie des bâtiments, ce qui pose la question des
origines des décisions ! l’identité structurelle de ce type de réalisations repose sur la
reproduction d’un module, d’une organisation type. “ L’unité d’hébergement par exemple,
le plus souvent reproduite par duplicata géométrique (similitude, rotation, symétrie). Cet
aspect répétitif n’est pas anodin et marque l’image véhiculée par l’architecture des
institutions ”. Stephan COURTEIX, Architecture et Santé Mentale. (40) . Selon S.
Courteix, l’expérience nous montre qu’une démarche unilatérale menée par les décideurs et
les gestionnaires peut souvent mener à une répétition d’erreurs mal ou non diagnostiquées.
A l’inverse une démarche de réflexion pluridisciplinaire dans les phases
préliminaires permet d’une part de mettre les professionnels dans le dispositif de recherche
architecturale et d’autre part, de tirer profit des expériences antérieures vécues par chacun,
de nourrir la réflexion des savoirs et savoir-faire de tous les intéressés. Nous faisons ici
référence à la notion de l’appropriation des lieux par les personnes qui devront y travailler,
en terme d’organisation du travail bien sûr mais aussi organisation des échanges inter
personnels et enfin en terme de sécurité pour les patients et pour les personnels.
Penser l’espace architectural en fonction de ce que l’on veut y faire, l’articuler avec
57
le projet de l’établissement est, nous semble-t-il, le préalable indispensable à la poursuite
de l’étude. Trop souvent, la démarche est inverse, cherchant l’innovation ou l’esthétisme
avant de penser prise en charge. La création d’un tel espace nécessite de tirer profit des
équipements existants et d’être attentif aux points suivants :
- Le premier point concerne le modèle d’organisation que l’on veut mettre en
œuvre.
- Le deuxième point étant le statut du résidant, ce qui implique une forte réflexion
notamment sur la détermination des pôles spatio-temporels. Toute activité humaine
est ancrée dans ce référentiel incontournable.
Dans notre société, dans notre culture, tout s’articule autour de ces concepts, la
localisation dans le repère spatial et l’axe temporel qui rythme nos activités. Pour la
personne autiste, la notion de repère est fondamentale. L’espace doit être structuré en
fonction du projet de l’établissement et du projet de vie du résidant. Il doit avant tout, offrir
une lisibilité clairement exprimée par le jeu des couleurs, des matières, par les
changements d’ambiance. La conception de l’espace doit à la fois être ouverte (lieu
d’accueil) et à la fois protectrice et sécurisante, ouverte et contenante. Elle doit être aussi si
possible un compromis entre sécurité et découverte. Elle doit favoriser l’autonomie par une
identification des lieux (repères signifiants, symboliques).
L’organisation spatiale, l’étude des volumes, des surfaces, le choix des matériaux
utilisés, la réelle valeur structurante de l’ensemble sont autant d’éléments incontournables
dans l’approche architecturale d’un tel projet.
Les matériaux :
Le choix des matériaux ne doit pas être négligé, ils doivent être choisis en fonction
de leur résistance sans pour autant oublier les aspects chaleureux, accueillants, repérants.
Le travail sur le choix des matériaux en vue d’y solliciter les sens (notamment le toucher
et la vue) permet l’utilisation de différentes matières, de jouer sur les textures, sur les
couleurs, sur les odeurs. Il ne faudra pas oublier les aspects de sécurité, les matériaux ne
devant pas être “agressifs ” ou “abrasifs ”, il faudra penser à protéger les angles, choisir
les revêtements muraux pour qu’ils ne soient pas trop “durs ” afin de ne pas aggraver les
blessures en cas d’automutilation.
Les matériaux devront présenter une bonne acoustique afin d’éviter les phénomènes
de réverbération du son. Certaines personnes autistes présentent une hypersensibilité aux
bruits (sensorialité exacerbée, hyperacousie), d’autres sont très sensibles aux
rayonnements lumineux : l’éclairage devra alors être pensé en fonction des atmosphères
recherchées, ni trop agressif, ni trop froid, l’éclairage doit être sécurisant.
Les équipements et leur organisation structurelle
58
Il nous semble que la composition architecturale d’un établissement accueillant des
personnes autistes doit s’articuler autour de ces quelques idées forces : Quel que soit le
nombre total de résidants, il nous paraît souhaitable de constituer des groupes de vie de 8
personnes maximum. Il faudra rechercher la constitution de groupe “ relativement
homogène ”. Les niveaux de communication, d’autonomie, les affinités connues pourront
être autant de critères à prendre en compte.
Ces groupes de vie doivent pouvoir fonctionner de façon autonome, ce qui implique
des équipements sanitaires, de cuisine, de lieux collectifs. Les chambres devront être
équipées de placards, devront être pourvues de toilettes, douches ainsi que d’un coin
lavabo avec étagères et miroir.
Il nous semble indispensable que chaque chambre soit aménagée et décorée de
façon différente certes, mais qu’elles possèdent toutes un coin bureau avec chaise ainsi que
des étagères. Il ne faudra pas oublier les différentes prises, T.V., téléphone etc... Il ne nous
semble pas important que la surface des chambres soit démesurée. Les personnes autistes
les plus déficitaires ont pour la plupart d’entre elles, beaucoup de mal à investir leur
chambre. Une surface d’environ 20 m² nous paraît tout à fait correcte afin d’y développer
un programme tel que nous venons de le décrire. Cet espace sera à la fois contenant et
sécurisant.
Les lieux de vie collective
Les lieux de vie collective de la “maison ” devront disposer d’un ensemble sanitaire
si possible avec une baignoire, de toilettes dont au moins un permettant l’accès aux
personnes à mobilité réduite, d’une cuisine avec salle à manger, un salon modulable qui
permet de s’adapter aux événements de la vie en collectivité, de rangements et d’un local
ménage.
Si la disposition géographique le permet, un espace privatif (terrasse, pelouse,
fleurs) autorise les goûters et les repas au soleil.
Les espaces collectifs
Les espaces collectifs devront être traités de la même façon : volumes et espaces
étudiés en fonction des utilisations, ils devront être pensés modulables. Un espace cafétéria
peut être intéressant, cependant, ce genre de lieu n’est pas facile à gérer, à faire vire au
quotidien. Ce lieu devra toutefois être équipé de système vidéo et hi-fi.
Les lieux d’activités
Nous dissocions à ce moment de la réflexion les lieux en fonction de leur
destination thérapeutique ou éducative :
A l’intérieur :
59
- Les espaces thérapeutiques, lieux de soins psychiques ou corporels seront la
salle de psychomotricité et la balnéothérapie, la salle de soin de l’infirmerie sans oublier le
bureau des thérapeutes pour les entretiens, les thérapies relationnelles, les “temps de
parole ”.
- Les espaces d’activités éducatives, salle de travail individuel ou de groupe,
“occupationnelle ” ou cognitive, espace d’apprentissage où l’on travaillera à la
conservation de ses acquis et à l’apprentissage de nouvelles capacités.
- Espace informatique où l’on pourra avoir accès à de nouvelles formes
d’apprentissages cognitifs.
- Ateliers qui seront autant de lieux où l’on développera des compétences à “faire ”,
atelier art plastique, atelier bricolage.
A l’extérieur :
Très intéressant, un jardin d’ornement et potager pourra être cultivé. Ce support
pédagogique permet beaucoup d’applications éducatives.
Il peut être possible, si l’espace le permet, de créer un espace “petits animaux ” en
lien avec le jardin (cochons d’inde, lapins etc...).
Pour terminer, nous ferons l’inventaire des équipements de service à ne pas
oublier : locaux administratifs et techniques, bureaux, salle de réunion, salle de personnel,
local ménage, rangements spacieux, garage etc...
2.7 L’ORGANISATION STRUCTURELLE
L’organisation structurelle de l’espace doit permettre à la personne autiste de se
repérer dans son environnement, c’est à dire “que l’espace sera divisé en lieux parlants,
significatifs ”.Catherine MILCENT, (l’autisme au quotidien) (41) .
La nécessité d’adopter l’environnement à l’autisme devient évidente. “ le plus
grand degré d’organisation et la sobriété de l’environnement sont souhaitables ”. Catherine
MILCENT. (41) . L’organisation de l’espace, le choix des matières, le choix des couleurs
doivent permettre la lisibilité des lieux. La personne autiste débordée, submergée par les
stimulis sensoriels, par l’épuisement d’un travail d’organisation mentale, sera vide
“dépassée ” par son environnement, elle se trouvera très vite en grande difficulté face à un
environnement “illisible ” et déstructurant.
“ Créer une aire de vie, un lieu où la personne va se sentir bien, créer un cadre de
vie agréable c’est dire à quelqu’un : je te respecte, je crois en tes capacités ; avoir du
respect pour un sujet, c’est aménager son environnement ”. M. LEMAY
(42).
60
Tout cela nous amène à nous poser la question et à nous interroger sur la façon dont
la personne autiste perçoit, comprend et investit le monde qui l’entoure. Nous savons que
la personne autiste a besoin d’une structure externe pour se sécuriser. Nous avons pu aussi
observer que les phénomènes d’angoisse chez la personne autiste diminuent dès lors que
son environnement est structuré, lisible et prévisible, c’est à dire que les espaces aient été
pensés en fonction de ses déficits spécifiques. L’environnement physique de son espace de
vie doit être organisé en espace clairement et visuellement défini. Nous entendons ici,
l’environnement comme étant l’ensemble des conditions naturelles et culturelles avec
lesquelles la personne autiste est en interaction. Il s’agira pour nous et en fonction de ce
que nous savons de l’autisme, de penser son environnement comme étant un des éléments
essentiels dans l’organisation de son cadre de vie, de son projet de vie.
Les questions de lieu, d’architecture, de structuration de l’environnement et de
l’espace étant abordées, nous pouvons maintenant réfléchir à ce que pourrait être un projet
pour un lieu de vie pour des personnes adultes souffrant d’un trouble autistique.
CHAPITRE 3
LE PROJET DE VIE
Le projet de vie pour les résidants est la base du projet institutionnel, tout ce qui y
sera décliné, interventions éducatives, soignantes ou sociales au regard des objectifs fixés,
concourra à leur assurer un développement optimal et harmonieux.
3.1 LE PROJET PEDAGOGIQUE
Pour nous, le projet pédagogique est la base, le socle du projet de vie de chaque
résidant. Il définit, organise, structure la vie de l’institution autour du résidant. “ La
pédagogie est l’enveloppement mutuel et dialectique de la théorie et de la pratique
éducative ”. Jean HOUSSAYE, (15 pédagogues, leur influence aujourd’hui). (43).
C’est dans cette articulation spécifique du rapport théorie / pratique en éducation
que la pédagogie prend son origine, se crée, s’invente et se renouvelle. Pour ce qui nous
concerne, la pédagogie comme modèle d’organisation permet de faire ce lien théorie /
pratique et au-delà de l’action éducative proprement dite, s’immisce, s’insinue, s’inscrit
dans l’action, le faire, bref, dans le projet de vie de la personne autiste.
Nous l’avons vu, le projet pédagogique permet de développer les différentes
composantes du projet de vie de chacun. Conformément à la circulaire 95/12 du 27 avril
1995 et en accord avec ce texte, nous proposons trois axes de travail qui, ensemble,
étayeront le projet pédagogique :
61
1° L’éducation
2° Le soin
3° La socialisation.
EDUQUER : l’action éducative dans la prise en charge des personnes autistes est
essentielle. L’éducation étant l’action de développer chez l’autre les facultés morales,
physiques et intellectuelles, on recherchera les orientations qui ont fait leurs preuves: par
exemple, nous pourrons nous inspirer des principes éducatifs développés dans les stratégies
éducatives pour l’autisme du programme TEACCH (44), c’est à dire de façon
conceptuelle :
Poser un diagnostic : le principal instrument diagnostique du programme TEACCH est une
échelle appelée CARS (Childood Autism Ruting Scale) SCHOPLER. E., REICHLER. R.,
RENNER. B. (45). Nous pourrons bien sur nous servir d’autres outils diagnostiques
comme l’Autistic Diagnostic Interview, ADI-R, par exemple.
Procéder à une évaluation : deux tests standardisés de développement cognitif et moteur,
P.E.P. (Psycho Educational Profile) SCHOPLER. E., REICHLER. R. (46) maintenant
P.E.P-R et l’A.A.P.E.P. (Adolescent and Adult psycho Educational profile) MESIBOV. G.,
SCHOPLER. E., SCHAFFER.B. (47), permettent de construire un projet éducatif
individualisé (P.E.I.). Le P.E.I. s’appuie sur les réussites et les émergences repérées
pendant le test, il définit aussi le niveau de communication de la personne. Cette évaluation
permet de mettre en œuvre une prise en charge qui s’articule autour de 4 grands principes :
Visualiser : la personne autiste perçoit mais a de la difficulté à ajouter un sens à la
perception ; le support visuel est considéré comme “ alternative à la communication ”.
Adapté au niveau de la personne autiste, il va de l’objet concret à l’image, jusqu’aux
consignes écrites sans oublier la parole et le geste.
Structurer
- Le temps : pour la personne autiste, il est difficile de percevoir la notion du temps. Afin
de l’aider à se repérer dans le temps, il est nécessaire de matérialiser et de visualiser le
temps par des emplois du temps adaptés à son niveau de compréhension et de
communication.
- L’espace : les lieux doivent être repérés et repérant afin d’éviter la confusion. La
structuration de l’espace, pour être perçue, doit être matérialisée.
Prévoir : “ Qu’est ce que je fais après ? ”, “ Je vais où ? ”, “ Combien de temps ? ” . Il est
indispensable de pouvoir donner ces informations. Il convient de visualiser les actions, les
moments de la journée sur un planning visuel.
Généraliser : Intégrer les apprentissages dans un autre contexte le plus souvent, dans un
62
contexte social afin d’avoir un comportement et les aptitudes adéquats.
Des repères concrets, une prévisibilité dans le temps et des aides visuelles
permettent à la personne autiste d’organiser ses comportements, de mieux comprendre son
environnement matériel et social et d’inter-agir avec lui.
Nous le constatons, la philosophie TEACCH, dans sa dimension éducative, apporte
les outils et les moyens essentiels à l’évaluation, à l’observation ainsi qu’à la mise en
œuvre du projet individualisé.
Nous pourrons également nous inspirer :
- Des thérapies sensorielles visant à éduquer ou à rééduquer les 5 sens que sont : la vue,
l’ouïe, l’odorat, le toucher, le goût. Chez la personne autiste, le traitement des flux
sensoriels privilégie les fonctions archaïques au détriment des systèmes plus récents. “ De
cette instrumentation particulière découle une grande partie des particularités des conduites
rencontrées chez ces personnes ”. BULLINGER. A. (48)
- Des stratégies corporelles “ Mens Soma Incorpore Sano ”, le corps est le réceptacle des
émotions, des tensions, des angoisses. Il réagit physiquement de manière plus ou moins
contrôlée, suivant la situation, l’appréhension de bien ou de mal être de chacun. La
psychomotricité, la gymnastique, les promenades, le sport individuel ou collectif,
permettent de libérer les énergies au travers de ces activités qui sollicitent et mobilisent
activement le corps.
SOIGNER : la prise en charge de la personne autiste ne peut se faire que dans le cadre de
la globalité. Tous les aspects de la vie de la personne doivent être considérés. Il ne saurait y
avoir de modèle universel qui ne s’intéresserait qu’à une composante, qu’à une partie de la
prise en charge.
Pour nous, soigner, c’est prendre en compte et agir, autant que faire se peut, sur les
manifestations symptomatiques de la souffrance, souffrance physique, somatique,
souffrance psychique.
Chez la personne autiste, le rapport à la douleur, à la souffrance est parfois très
différent de la personne “ normale ”. Parfois, il n’y a pas de manifestation somatique à la
douleur physique, à la souffrance. Parfois, les manifestations sont “ différées ” se
traduisant par des comportements inhabituels, problématiques (crises comportementales
plus ou moins violentes par exemple). Nous nous
souvenons du
cas que nous a rapporté la mère d’un jeune garçon autiste de haut niveau : bien qu’étant
infirmière de formation, elle ne s’était aperçue qu’au dernier moment, (en repérant des
traces de sang dans les toilettes) que son fils souffrait d’une infection urinaire qui évoluait
vers une septicémie. A aucun moment, elle n’avais repéré les signes de douleurs chez son
fils, à aucun moment il ne s’était plaint.
63
Soigner des personnes autistes, c’est être attentif, c’est assurer un suivi médical
régulier, c’est prendre soin des corps “ prendre en compte les besoins de soins non
spécifiques apparaît très important ” : le confort des lits, des sièges, des chaussures, des
vêtements. Le respect des rythmes propres à chacun, l’attention portée au sommeil, à
l’alternance équilibrée des périodes d’activités et de repos... les petits soins quotidiens de
“ réparation ” et de “ réassurance ”. P. GABBAI. (49)
Autre composante du soin, comme le dit P. GABBAI, “ les soins spécifiques ”.
C’est pour nous, la dimension thérapeutique du projet. Tout comme le suivi médical, le
suivi thérapeutique de la personne autiste est très important et ne doit pas être négligé. Les
soins spécifiques à ces états autistiques associent la chimiothérapie aux thérapies d’étayage
et de suppléance psychique (entretiens, temps de parole, accompagnement relationnel).
Nous ne pensons pas que les psychothérapies basées sur le verbal soient une bonne
indication pour ces populations. Les thérapies à médiation corporelle peuvent occuper une
place privilégiée, balnéothérapie, psychomotricité, kinésithérapie, packing.
Enfin, nous attachons une place importante à la notion d’accompagnement qui,
étymologiquement, veut dire “ celui qui mange son pain avec ”. L’accompagnement
individuel lors de moments difficiles (crise d’angoisse, anxiété) sera indispensable. Le
professionnel présent, ne sera pas toujours un thérapeute chevronné, cependant, il devra
prendre soin, accompagner l’autre en souffrance. “ A ce niveau d’implication, la dimension
emphatique que devra développer le professionnel sera la base de son accompagnement.
Cela suppose chez lui, une capacité d’accueil de la souffrance, une capacité et une qualité
d’écoute, de présence rassurante et une maîtrise de ses propres émotions ” B. MARTIN,
A. RICHARD (58).
SOCIALISER : dès le début, écrit L. Kanner, il y a une solitude autistique extrême qui, si
possible, évite, néglige et se ferme à tout ce qui vient de l’extérieur. L. Kanner écrit plus
tard que cet isolement social ne devrait pas être considéré comme définitif, qu’il pouvait
arriver que l’on constate un développement dans le comportement social et finalement le
témoignage d’intérêt des enfants autistes pour autrui . T. PEETERS (50).
Les personnes autistes ont beaucoup de problèmes dans les interactions
sociales, leur projet de vie doit prendre en compte cette évidence. Les perspectives de
socialisation permettront de lutter contre l’exclusion propre à la pathologie. Il s’agira au
travers des activités développées à l’extérieur de l’institution (sportives, culturelles,
ludiques, quotidiennes) de prendre sa place dans la cité, de devenir citoyen.
Pour certains, l’accès à l’extérieur est très difficile (problèmes physiologiques
limitant les sorties par exemple). Il faudra alors faire le chemin inverse : c’est la cité qui
devra venir vers eux, en organisant des manifestations, des expositions, par exemple, en
faisant participer des bénévoles à la vie de l’institution, en réservant une place importante à
64
la famille, en faisant “ vivre la maison ”.
3.2 L’EVALUATION
L’évaluation a pour but de “dresser un portrait ” , de faire le point sur les
potentialités de la personne dans tous les domaines (communication, comportement,
autonomie, social, travail, corporel). Elle permet surtout l’élaboration du Projet Educatif
Individualisé. Dans ce domaine, un certain nombre de tests sont disponibles et pourront
être utilisés :
L’AAPEP regroupe trois séries de constatations
- 1 échelle d’observation directe (examen clinique)
- 1 échelle d’observation dans le lieu de résidence (interview des parents ou d’un
responsable du lieu de résidence)
- 1 échelle scolaire ou dans le lieu de travail (interview du responsable).
Les résultats de ces trois parties rassemblés fourniront la base du projet
“ individualisé ”. Chacune de ces trois échelles est divisée en six fonctions :
- Aptitudes pour le travail
- Aptitudes et comportements requis pour le travail
- Aptitudes aux loisirs
- Autonomie et aptitudes domestiques
- Aptitudes de communication
- Aptitudes sociales
Les critères d’évaluation pour chaque item composant ces échelles sont définies
en :
- Réussite (l’acquisition est totale, aucune aide n’est nécessaire)
- Emergence (l’acquisition est partielle, l’aide est nécessaire)
- Non réussie (l’acquisition n’est pas repérée, elle n’existe pas, quelle qu’en soit la
cause (physique, psychique, intellectuelle ou sociale).
L’originalité de cette échelle d’évaluation réside dans la formation du critère
d’émergence. Le P.E.I. pourra s’appuyer sur les réussites mais devra se centrer sur les
capacités émergentes.
Un certain nombre d’autres tests d’évaluation existent, ils permettront si besoin est
de compléter, d’affiner l’évaluation. Nous pensons plus particulièrement au WINELAND
(SPANOW 1986). Il s’agit d’un entretien semi structuré rempli par les parents à partir de
l’examen standardisé des compétences et du niveau d’activité de la personne dans son
65
milieu familier. Un certain nombre de domaines sont ainsi explorés : compétence dans la
vie quotidienne, socialisation, motricité, communication. Cette échelle permet entre autres,
d’apprécier le degré d’autonomie et de maturité du comportement social dans la vie
quotidienne. P. FERRARI (51).
Le bilan du langage : le niveau et les particularités du langage doivent être soigneusement
appréciés, il s’agira d’évaluer le langage spontané : présence ou absence de langage,
réponse / mimique, gestuelle posturale ou verbale du langage. Une grille d’évaluation
résumée du comportement pré-verbal ou verbal peut être utilisée. B. DANSART (52).
Le bilan psychomoteur : l’appréciation précise du développement moteur et des
particularités psychomotrices et posturales doit être effectuée :
- Examen neurologique (recherche d’une déficience motrice)
- Appréciation du développement psychomoteur et appréciation de la façon dont la
personne se sert de son corps (marche sur la pointe des pieds, tournoiements, stéréotypies
motrices, agitation désordonnée ou attitudes quasi catatonique, méconnaissance de son
schéma corporel). Une échelle du comportement psychomoteur a été mise au point. (PIRE.
1989) (53).
Ces tests, ces évaluations ont pour objectif de faire un bilan certes, mais surtout de
donner toutes les indications nécessaires à l’élaboration du projet individualisé. Les
résultats obtenus serviront de référence lorsque l’on évaluera les résultats du P.E.I.
3.3) PROJET EDUCATIF INDIVIDUALISE
Le projet individualisé est pour nous l’élément personnalisé du projet de vie. Il
prend en compte tous les éléments du projet pédagogique, l’éducation bien sûr, le soin et la
socialisation.
En France, c’est en 1989 que les nouvelles annexes XXIV ont rendu obligatoire le
projet pédagogique, éducatif et thérapeutique individualisé. Notons que cette exigence
figure à l’article 3 de ces mêmes annexes qui concerne la collaboration avec les parents.
Pour C. MILCENT (41) , le projet éducatif individualisé doit intégrer les trois
éléments suivants :
1) Le projet est-il réalisable, possible et réaliste ?
2) Sur quels intérêts et motivations de la personne autiste va-t-on s’appuyer pour
développer ses capacités ?
3) Quelles sont les priorités ?
La détermination des priorités est une tâche essentielle du professionnel. Ce sera en
66
fonction des objectifs retenus que l’on pourra juger de l’efficacité de la démarche.
“ Pour décider si on est bien arrivé à destination, il faut au moins connaître l’endroit
où l’on voulait aller ”. N. MONTREUIL, G. MAGEROTTE (54).
Le P.E.I. doit offrir une perspective dynamique et prospective de
l’individualisation. Il doit identifier les buts et objectifs à atteindre, les activités à assurer
pour chaque intervenant ainsi que les échéances à respecter. G. MAGEROTTE (55).
Le projet individualisé doit tenir compte de l’environnement institutionnel mais
surtout de l’environnement familial. Un certain nombre de ces adultes autistes regagnent
régulièrement le domicile familial pour le week-end, les vacances.
Il est important d’inclure le souhait de la famille dans le contenu du programme
individualisé. Par exemple, si pour la famille, la priorité est que leur enfant, à la maison
occupe seul son temps libre, nous en tiendrons compte dans l’élaboration du projet
individualisé et nous mettrons tout en œuvre pour lui faire acquérir ces aptitudes. Les
familles devront donc être associées à l’établissement du projet individualisé de leur
enfant.
Afin d’élaborer les projets individualisés, la “ grille des besoins ” dont parle P.
GABBAI (49), peut être d’un grand soutien. La construction du P.E.I. s’articulera autour
de 4 grands pôles de besoins essentiels :
- Besoin de “ soins ”
- Besoin de “ vie ”
- Besoin de “ mise en activité ”
- Besoin “ d’un cadre institutionnel ” physiquement et psychiquement adéquat
Besoins de “ soins ”
Dimension thérapeutique du projet de vie, ces besoins s’articulent autour des
besoins non spécifiques et des besoins spécifiques.
Besoins de “ vie ”
Quotidienneté, médiation vitale et triviale, il est absolument nécessaire de porter
une attention toute particulière à la vie quotidienne (alimentation, hygiène, tenue
vestimentaire). Le besoin de vie doit s’organiser autour des relations significatives et
affectivement investies au travers des émotions élémentaires, des joies et des peines d’une
vie quasi familiale.
Besoin de “ mise en activité ”
67
L’âge adulte ne doit pas signifier l’arrêt des apprentissages, l’abandon des espoirs.
Il faut au contraire, relancer le désir d’apprendre. L’éventail des activités doit être
largement ouvert : ateliers d’expression, ateliers culturels, atelier informatique, jardinage,
bricolage etc...
Sur ce plan, le programme TEACCH offre des outils de mise en œuvre de ces ateliers.
Nous n’oublierons pas le versant social du projet : animations festives, sports,
concerts, bibliothèque, cinéma, séjour de vacances, sorties restaurant... La liste n’est pas
exhaustive et il conviendra de s’appuyer sur les possibilités locales (plage, voile, péniche,
bateau, lorsque l’on a la chance, comme nous, de vivre au bord de la mer !..)
Besoin “ d’un cadre institutionnel ”
Le cadre institutionnel va fixer les règles, il va organiser, il va sécuriser. Il
permettra de mettre en adéquation les besoins des personnes autistes et les besoins des
personnels. Il s’agira alors de mettre en place une stratégie institutionnelle, “ les
interventions gagnent à s’appuyer sur des conceptions non univoques ” P. GABBAI. (49)
3.4 ACTIVITES INDIVIDUELLES ET DE GROUPES
Les activités individuelles et de groupes mises en œuvre dans le lieu de vie
serviront de support au projet éducatif individualisé de chacun. Elles rythmeront la vie de
l’établissement dans un souci de cohérence et d’harmonie.
Encadrés par des professionnels, le niveau d’implication de chacun sera
fonction de son P.E.I. et de ses potentialités. Les activités organisées viseront, à chaque
fois que cela sera possible, l’éveil des capacités motrices, sensorielles et communicatives.
Afin de mener à bien toutes ces activités, il faudra faire appel à des personnes
ressources, bénévoles ou professionnels. Nous pensons plus particulièrement, car nous
avons travaillé avec ces personnes, aux musiciens (soit pour l’animation, soit pour des
cours particuliers) aux artistes, peintres ou sculpteurs, à des retraités passionnés de
modélisme, de jardinage ou de couture etc... Elles ne prendront pas la place du
professionnel mais par leur compétence et leur disponibilité, l’épauleront et permettront la
permanence et le bon déroulement des activités.
Il conviendra de développer la notion de partenariat et de réseau, partenariat avec
d’autres établissements, avec les maisons de quartier, centres sociaux, Maison des Jeunes,
de mettre en commun des équipements, de mutualiser les moyens, bref de ne pas se
contenter d’être des consommateurs mais être acteur au sein d’un réseau.
Les activités de vie quotidienne
68
L’importance de ces activités se trouve dans un principe de vie simple “ je participe
à l’entretien et aux moments de vie de mon chez moi, à mon niveau, j’ai un rôle dans le
bon fonctionnement de mon lieu de vie ”. Ces activités concernent toutes les activités
domestiques inhérentes à la vie de la maison (autour du repas, autour de l’entretien des
locaux, de sa chambre).
Les activités autour de la nature
Ces activités quotidiennes concernent les petits travaux de jardinage (potager,
fleurs). Lorsque cela est possible, l’entretien d’un espace animalier (petits animaux), d’un
aquarium qui, en dehors de ses vertus apaisantes, peut faire l’objet d’un projet pédagogique
particulier.
Les activités manuelles
Chacun à son niveau pourra participer à ces ateliers qui mettent en jeu la motricité
fine, la coordination oculo-manuelle, la dextérité, l’utilisation d’outils :
- Création et confection d’objets simples en bois par exemple
- Approche des matériaux par la sculpture, par la composition (tableaux en relief,
demis coques etc...)
Les activités d’expression artistique - imagination
Ces activités permettent de susciter l’imagination et laissent un espace à
l’expression libre et spontanée. Les supports peuvent être le bois, la terre, le dessin, la
peinture, le moulage, la pyrogravure.
C’est un espace d’activités plurielles qui permet le passage d’un support à un autre,
qui permet aussi l’utilisation de matériaux collectés en promenade (par exemple travail sur
les saisons), qui permet enfin l’éveil à la sensorialité.
Les activités d’éveil
Autour des animaux et du jardin, l’objectif sera d’utiliser la médiation de l’animal
afin de développer le contact physique, les sens. Autour des activités cognitives plusieurs
axes possibles :
- Des ateliers cognitifs organisés selon les stratégies éducatives TEACCH pour
développer en fonction du niveau de chacun, la motricité fine, la coordination oculomanuelle, la mobilisation du corps et de l’esprit (rester assis le temps d’une tâche, se
concentrer), les stratégies cognitives (tris de formes, de couleurs, de textures, de mots). On
se servira, autant que faire se peut, d’objets visuels, quotidiens : les puzzles, les suites
logiques, les intrus, les mémoris etc...
- De petits travaux de secrétariat pourront également servir de support à ces
69
activités.
- L’atelier informatique permet d’aborder les stades essentiels de la cognition
- Le sensori moteur
- Du concret au symbolique
- Le langage
- Atelier para scolaire
Les activités physiques, corporelles
Mettre son corps en mouvement, libérer les énergies au travers des activités
sportives ou corporelles ; Promenades, marches sur des circuits, les lieux de sortie étant
choisis en fonction des buts recherchés. Il faudra mettre à profit, toutes les opportunités
offertes par la nature pour stimuler la motricité, l’éveil des sens, la communication
(apprendre à pointer du doigt pour montrer).
Le vélo, la piscine, les jeux de ballon, les parcours moteurs pratiqués régulièrement
permettront à certains de participer aux activités pratiquées dans le cadre du sport adapté.
(La fédération “ Sports adaptés ” organise régulièrement des rencontres sportives
auxquelles de nombreux établissements participent).
Les activités de rééducation sensorielles
En fonction du niveau de difficultés perceptivo - motrices, ces activités
s’organiseront autour des 5 sens :
- Le toucher : travail sur les textures, le chaud et le froid, ce qui gratte, qui est dur,
qui pique..
- La vue : travail à partir des poursuites visuelles, de la perception globale d’une
image, de la reconnaissance d’images..
- L’odorat et le goût : les ateliers cuisine, pâtisserie, seront un bon support de
travail, reconnaître les odeurs pour ne pas être submergé par ses sensations, reconnaître le
sucré, le salé, de doux, l’acide..
- L’ouïe : apprendre à reconnaître les bruits, maîtriser ses émotions lorsque l’on est
confronté à des bruits inconnus... Ecouter des musiques, reconnaître les instruments.
Les activités de loisirs et de socialisation
Ces activités ont pour objectif d’utiliser et de fréquenter les lieux, les espaces
publics et de s’y sentir à l’aise, en somme, de pouvoir vivre sa citoyenneté.
Elles permettent également les contacts et les échanges avec autrui. Les relations
sociales, l’insertion sociale sont, en effet, chez beaucoup de personnes autistes, les
70
difficultés majeures de leur pathologie. U. FRITH (11).
- Sorties, promenades en ville
- Activités dans les lieux publics (médiathèque, restaurants, cinéma, spectacles
divers)
- Commerces et marchés
- Centres de loisirs, piscines...
- Centres de vacances, campings, camps à thème.
Pour ces activités, il conviendra d’utiliser des moyens de transports différents,
l’utilisation des transports en commun (bus, train) sera le plus souvent recherchée.
Les activités spécifiques
Toutes les activités individuelles ou de groupe liées aux soins : séances de
psychomotricité, orthophonie, temps de parole, packing, thérapies spécifiques, atelier
conte, atelier musique et rythme, expression corporelle.
3.5 LES PARENTS ET LE LIEU DE VIE
Les parents seront représentés au “ conseil d’établissement ” et participeront à
travers cette instance à la bonne marche du lieu de vie. Ils rencontreront les professionnels
dans le cadre de réunions générales concernant la vie de l’établissement. Ils pourront avoir
un rôle de soutien en organisant et ou en soutenant toutes actions ou manifestations en
faveur de leurs enfants. Chaque famille pourra rencontrer le ou les professionnels référents de leur
enfant dans le cadre d’échange ayant pour objectifs :
- De mettre en mots et analyser les situations quotidiennes
- De déterminer les priorités pour la mise en place du projet éducatif individualisé
- De suivre et d’évaluer ensemble le projet éducatif individualisé
Ces rencontres seront programmées à l’occasion des synthèses. Afin d’assurer une
cohérence il sera nécessaire qu’un ou deux professionnels de l’établissement soient les
interlocuteurs privilégiés des parents. Ces personnes choisies dans l’équipe de prise en
charge assureront le rôle de référence, elles assureront la continuité de l’observation de
l’ensemble des professionnels et seront les garantes du projet individualisé.
Les parents pourront, à leur demande ou à l’occasion des comptes rendus de
synthèse, rencontrer le ou la psychologue et le médecin psychiatre de l’institution.
Les parents, la fratrie, la famille pourront solliciter l’établissement pour rencontrer leur
enfant, frère ou sœur dans son lieu de vie. Ils pourront également participer aux fêtes
organisées par les professionnels ou organisées en commun.
71
CHAPITRE 4
4.1 LE PERSONNEL
Pour terminer ce travail qui se veut être avant tout une recherche autour de la notion
de projet pour des personnes autistes, nous allons maintenant essayer de passer en revue les
questions liées à la constitution d’une équipe de professionnels qui aura la charge de mettre
en œuvre les projets individualisés dans le cadre du projet de l’établissement. La
constitution d’une telle équipe devra être réfléchie et argumentée, elle sera
pluridisciplinaire. Le ratio de personnel sera très sérieusement étudié et se situera
probablement dans une fourchette supérieure à 1 pour 1. Pour cela, quelque soit
l’orientation du projet, il nous paraît indispensable que le recrutement de tout le personnel
se fasse à partir de profils de poste élaborés et intégrés au projet de l’établissement.
Nous définissons ici quelques profils de poste.
- Le Directeur
Garant du projet institutionnel ainsi que du bon fonctionnement de l’institution il en
assure le suivi technique et matériel. Il anime l’équipe pluridisciplinaire dans un souci de
complémentarité, il a un rôle pédagogique auprès de l’ensemble de l’équipe. Il structure la
vie organisationnelle de l’institution et veille à la prise en charge globale de l’ensemble des
résidants. Il anime les réunions institutionnelles, il est en relation avec les familles, les
tutelles, les partenaires extérieurs. Il devra avoir une bonne connaissance de l’autisme et de
ses prises en charge.
- Le médecin psychiatre
Sa fonction est l’un des éléments qui fonde la collaboration inter-institutionnelle. Il
facilite la précocité des interventions spécialisées lorsqu’elles sont nécessaires. Il établit les
diagnostics étiologiques, (causes ou facteurs pouvant expliquer plus ou moins
complètement le développement et / ou la persistance des troubles observés)
. Il met en
place les stratégies thérapeutiques, médicamenteuses ou non, visant à l’amélioration des
troubles diagnostiqués. Il décide du transfert vers un centre hospitalier spécialisé lorsque la
prise en charge médico psychiatrique s’avère impossible ou si elle présente des risques
pour l’intéressé au sein du lieu de vie. Il est en lien avec les organismes tels que la
COTOREP, la CPAM et autres. Il informe les familles (lorsqu’elles le souhaitent) sur les
questions concernant son champ de compétences.
- Le / la psychologue
Il / elle a un rôle thérapeutique en intervenant directement auprès de l’adulte autiste.
Il / elle participe aux réunions institutionnelles centrées sur l’étude clinique de chaque
72
adulte autiste ainsi que sur l’analyse des pratiques. Il / Elle est garant des outils
d’évaluation utilisés et veille à ce que les données obtenues soient objectivées et servent au
développement du PEI. Il / Elle assure un rôle psychopédagogique auprès de l’équipe, il /
elle rencontre les parents dans le cadre d’échange formels.
L’encadrement médical
- Les infirmiers(es)
Responsables du secteur médical et thérapeutique, ils / elles sont garants, sous la
responsabilité du médecin psychiatre et du médecin généraliste du suivi médicale de
chaque résidant Ils / Elles sont chargés d’assurer la préparation et la distribution des
traitements. Ils / Elles sont en contact avec les médecins généralistes,
les médecins spécialistes, kinésithérapeute, orthophoniste, ainsi qu’avec l’ensemble
de l’équipe afin de cerner les problèmes de comportement liés à la santé. Ils / Elles
assurent l’organisation des visites médicales, et accompagnent les résidants lors des visites
médicales ou para médicales à l’extérieur (dentiste, ophtalmologiste etc). Ils / Elles
participent à l’information de l’équipe éducative et participent aux réunions
institutionnelles. Ils / Elles apporteront la technicité de leur formation, concourront à
l’élaboration du projet individualisé et seront les garants du travail relationnel de
l’ensemble de l’équipe en terme de :
- Respect de la personne, prise en compte de ses difficultés
- Pertinence du positionnement des professionnels face à la personne autiste
- Pertinence du positionnement des professionnels face aux problèmes de comportement.
L’encadrement éducatif
- Les éducateurs(trices)
Avec les infirmiers(es) ils / elles constituent le binôme référent de l’équipe
éducative.
Ils / Elles ont un rôle pédagogique auprès de l’équipe d’aide médico psychologique et
doivent partager leurs connaissances théoriques et pratiques pour un meilleur
accompagnement de la personne autiste. Ils / Elles, avec l’ensemble de l’équipe mettent en
place le projet individuel de chacun, recherchent les modes de communication adaptés à
chacun, préparent les activités. Ils / Elles suivent et sont garants des projets éducatifs
individualisés, ils / elles sont référents d’un groupe de personnes autistes, organisent et
participent à la prise en charge au niveau des activités relatives à l’autonomie quotidienne.
Ils / Elles diffusent les informations, participent aux réunions et favorisent la
pluridisciplinarité. Ils / Elles sont les interlocuteurs privilégiés des parents, et avec eux,
élaborent le projet éducatif individualisé, définissent les orientations, les priorités, et
établissent la communication nécessaire (cahier de liaison, rencontres)
73
- Les Aides Médico Psychologiques
Les AMP ont pour objectifs le respect de la dignité, de la qualité de la vie et de
l’épanouissement de la personne autiste. Ils favorisent le bien être des résidants en donnant
en permanence un sens à leurs vies. Sous la responsabilité des infirmiers(es) et des
éducateurs(trices) ils les accompagnent dans tous les actes de la vie quotidienne et leur
apportent tous les soins nécessaires à leur équilibre, ils ont fonction de soutien, d’éducation
et de stimulation pour tous les apprentissages visant à une meilleure autonomie. Ils sont les
acteurs principaux dans la mise en place des projets individuels, ils rendent compte de
leurs observations, de leurs analyses et participent à la dynamique institutionnelle. Ils
rencontrent les familles, leurs offrent écoute et disponibilité, ils entretiennent les relations.
La rééducation
-Le / La psychomotricien(ne)
La thérapie psychomotrice s’inscrit dans la prise en charge globale de la personne
autiste. Suivant le bilan psychomoteur il / elle permet d’accentuer la thérapie sur les
difficultés rencontrées dans ces différents domaines :
- Aspect moteur (coordination statique, dynamique, motricité fine)
- Aspect corporel (tonus, praxies, schéma corporel)
- Aspect spacio temporel (orientation spaciale, temporelle, vigilance)
- Aspect social (mémoire de perception, mémoire verbale, communication)
Il / Elle permet de maintenir les acquis de façon à conserver un maximum d’autonomie sur
le plan corporel. Il / Elle participe à la lutte contre la chronicisation, participe au
développement de la communication verbale et / ou gestuelle, à l’adaptation sociale. Il /
Elle peut participer à la revalorisation narcissique (confiance en soi induite par l’évolution
et les progrès constatés), permet d’éprouver du “ plaisir ” ( plaisir corporel, moment de
détente, de bien être, moment de prise de conscience de son enveloppe corporelle, de son
“ moi peau ”, plaisir de pouvoir ressentir les choses et de les communiquer, plaisir
d’échanger)
Nous avons repris dans cette liste de profils de poste les principales professions que
l’on sera amené à rencontrer dans ces lieux de vie, bien sur d’autres personnes pourront
intervenir : Les ergothérapeutes, les éducateurs techniques, les moniteurs d’éducation
physique et sportive, les aides soignants et les agents de service hospitalier, les agents de
service, les veilleurs de nuit. Il faudra alors préparer ces profils de poste avant de procéder
au recrutement.
4.2 FORMATION DU PERSONNEL
L’autisme est extrêmement exigeant pour les professionnels. Ils doivent faire
preuve de nombreuses qualités, auxquelles s’ajoute un concept nécessairement lié au
respect et à l’exercice des droits de l’individu et donc à une meilleure maîtrise de son
74
environnement. L’équipe doit “ comprendre la façon de penser et de travailler toute
particulière des personnes autistes, spécialement leur rigidité de pensée et d’action, leur
difficulté à généraliser et leur façon de prendre les choses au pied de la lettre ” L. WING.
(56). “ Toute la motivation, toute l’énergie du personnel ne peuvent compenser le manque
de spécialisation en matière d’autisme ”, GILLBERG ET PEETERS (57).
Outre la formation initiale de chacun des membres de l’équipe pluridisciplinaire, la
formation à l’autisme nous paraît être un élément indispensable dans la prise en charge de
l’autisme
et
être
le
gage
de
la
réussite
d’une
telle
entreprise. Il sera donc nécessaire de prévoir des stages de formations spécifiques à
l’autisme. Des organismes de formations spécialisées existent, ils dispensent des
enseignements théoriques et pratiques, des colloques sont organisés, ils font régulièrement
le point sur la recherche dans l’autisme. Il conviendra de prévoir dans les budgets les
sommes qui permettront au plus grand nombre de participer à ces formations et à ces
réunions. La prise en charge de l’autisme impose, à notre sens une formation
professionnelle continue, la rencontre avec d’autres professionnels, la confrontation
d’autres pratiques permet de confronter ses expériences, de se construire une identité
professionnelle forte. Ces formation communes seront un des éléments clés de la
cohérence du projet elles seront le ciment de l’équipe pluridisciplinaire.
4.3 REUNIONS, REGULATION DE L’EQUIPE, SUPERVISION
Pour mener à bien un projet d’une telle envergure, l’organisation structurelle du
lieu de vie devra intégrer des temps de réunion. Ce ne sera pas chose facile, les horaires
des personnels, la présence continuelle des résidants nécessitera souvent de “ jongler ”
avec les plannings. Cependant la rigueur de l’organisation, permettra la tenue de ces temps
de rencontre si important pour l’ensemble de l’équipe ainsi que pour la bonne marche de
l’établissement. Ces temps permettront la régulation de l’équipe, serviront à définir les
lignes de conduites, les orientations théoriques et pratiques des prises en charge, elles
permettront à chacun de se positionner dans le cadre du travail pluridisciplinaire afin
d’assurer l’harmonie et la cohérence du projet.
Confrontés à la complexité du syndrome autistique, à la complexité des
manifestations comportementales, les professionnels auront besoin de ces temps qui
permettront également de parler, de dire leurs émotions, “ parler des émotions lorsque l’on
est confronté à l’autisme, c’est d’abord et avant tout parler de ses propres émotions et plus
exactement rechercher les mots pour les dire ” (58)
Le médecin psychiatre et le / la psychologue auront un rôle déterminant dans
l’écoute, le suivi et la supervision de l’équipe. Il leur appartiendra en outre de veiller à la
bonne circulation de l’information, de la communication.
75
3ème PARTIE
RESUME
En 1995 et 1996, les dispositions concernant l’autisme ont eu des avancées
significatives en matière de dépistage et de prise en charge. L’autisme est entré dans le
champ des handicaps, les attentes des parents et professionnels se sont faites plus
précises, plus pressantes. Les pouvoirs publics ont répondu par un “ plan autisme ” qui
se caractérise par 4 principaux objectifs :
- l’articulation avec les procédures en vigueur en matière de planification en santé
mentale et médico-sociale dans le respect du libre choix des familles,
- la prise en charge à dominante sanitaire pour les enfants et médico-sociale pour les
adolescents et les adultes, en référence aux composantes pédagogiques et éducatives,
thérapeutiques et sociales,
- mise en œuvre de projets individuels spécifiques aux personnes autistes
- mise en réseau des divers services et institutions...
Installée en 1993, la “ Mission Massé ” repositionne la prise en charge de
l’autisme en France “ rencontrer le sanitaire sur le soin, le médico-social sur la qualité
de vie, travailler ensemble ” (30).
Des constats et limites de l’étude de la 2ème partie, nous posons, à ce moment, la
notion de projet en l’insérant dans un réseau conformément aux dispositions de la
circulaire 95. Les objectifs généraux définis expriment la philosophie générale du
projet :
- Accéder au mieux être dans tous les secteurs de la vie quotidienne,
- Assurer le meilleur épanouissement de la personnalité,
- Optimiser la qualité de la relation avec son environnement
Eduquer, soigner, socialiser seront les concepts clés qui mis en œuvre dans un
environnement adapté, structuré permettront à chaque personne autiste d’approcher au
plus près, au regard de ses capacités et potentialités les objectifs définis dans le projet.
L’implantation géographique et l’articulation entre le projet de vie et le projet
architectural sont à n’en pas douter la clé de voûte de la réussite d’un tel projet.
L’organisation structurelle de l’établissement et sa disposition spatiale serviront le projet
de vie et le projet pédagogique qui sera mis en œuvre dans cette structure.
L’action éducative est pour nous indissociable de la dimension soignante. Essentiel,
l’accès à l’éducation est avant tout un droit. La mise en œuvre de thérapie éducative
permet le développement des facultés physiques, morales et intellectuelles. Appliqué à
l’autisme l’éducation permet de développer des savoir-faire et des savoirs être qui
s’avéreront indispensables sur le chemin vers l’autonomie.
Le soin étant pour nous la prise en compte de la souffrance et de ses manifestations
76
symptomatiques, physiques, et psychiques. Il nous faudra être attentif car la notion de
souffrance, de douleur physique ou émotionnelle, la perception qu’en ont les personnes
autistes est parfois très différente de la nôtre et peut s’exprimer de multiples façons.
Enfin il faudra “ prendre soin ” de ces personnes qui ont tant de difficultés à exprimer
leurs besoins, leurs désirs, leurs souffrances.
La communication sous toutes ses formes sera constamment recherchée, qu’elle
soit verbale ou non verbale, adaptée au niveau de chacun elle permettra à la personne
autiste d’appréhender et de comprendre son environnement éducatif et relationnel,
d’exprimer ses besoins et ses demandes, d’établir une relation avec son entourage en
ayant la possibilité de signifier ses acquiescements et ses refus.
L’organisation pédagogique de cet établissement permettra de mettre en œuvre et
de développer tout un travail de socialisation. L’ouverture de la structure sur l’extérieur,
sur la cité, la fréquentation des lieux publics, culturels, sociaux, sportifs seront les outils
qui serviront la lutte contre l’exclusion et qui donneront au projet sa véritable dimension
sociale.
L’évaluation de la personne autiste permet l’écriture du projet individualisé qui
est l’élément personnalisé du projet de vie. Celui-ci reprend tout les éléments du projet
pédagogique : soin, éducation, socialisation, communication.
Nous ne pouvons pas imaginer un lieu de vie sans envisager les activités qui y
seront effectuées. Toutes les activités, de vie quotidienne, d’expression, d’éveil, de
rééducation sensorielle, de loisir et de socialisation serviront de supports et seront autant
d’outils qui étayeront les projets. Elles rythmeront la vie de la structure tout en donnant
du sens à la vie des personnes autistes.
Nous le savons le travail avec les familles est primordial dans la prise en charge
de l’autisme. C’est une composante clé de l’organisation de l’établissement.
Les parents seront représentés dans les instances de la structure (conseil d’établissement),
ils participeront, s’ils le souhaitent à l’élaboration du projet individualisé de leur enfant.
Ils seront invités aux réunions d’informations générales de l’établissement ainsi qu’au
moments festifs.
Le recrutement d’une équipe pluridisciplinaire constitue un point important dans
la création d’un établissement, ce recrutement devra être réfléchi et argumenté. Nous
pensons que les profils de postes préalablement définis assureront un recrutement de
qualité. Nous définissons ici les principaux profils de poste.
Nous terminons ce chapitre en abordant la notion de formation et de supervision
de l’équipe.
77
CONCLUSION
La perspective de construction de nouveaux établissements pour les personnes
autistes va voir arriver sur les bureaux des tutelles une multitude de projets. C’est à partir
de ces projets que va se dessiner la prise en charge des personnes adultes en France pour
les années à venir.
L’autisme aujourd’hui, malgré l’avancée des connaissances dans différents
domaines (génétique, épidémiologique, science cognitive, neurobiologie, recherche en
psychiatrie développementale et comportementale et de la psychanalyse), demeure une
affection mal connue.
Depuis quelques années nous avons vu paraître une multitude d’ouvrages,
d’articles, de publications, de recherches, des personnes autistes de haut niveau se sont
exprimées, nous pensons plus particulièrement à Temple GRANDIN, Donna WILLIAMS,
Georges HUARD. Leurs points de vue sur l’affection dont ils souffrent permettent
d’éclairer, d’étayer les recherches en cours notamment dans le domaine de la sensorialité.
Nous comprenons mieux maintenant comment les personnes autistes perçoivent le monde
qui les entoure, comment leur organisation intérieure et leur relation au monde extérieur
sont perturbées ( ces éléments seront alors essentiels et devront être pris en compte lors de
l’élaboration des projets de prises en charge).
L’autisme, trouble envahissant du développement touche garçons et filles, a sans
doute existé de tous temps, dans toutes les civilisations et dans toutes les cultures.
L’étiologie de ce syndrome est vraisemblablement multifactorielle, mais à ce jour les
origines de l’autisme ne sont toujours pas complètement connues.
Les dernières études européennes sur les taux de prévalence de l’autisme tendent à
démontrer que la France en reprenant les chiffres présentés par l’ANDEM ( 4 à 5 pour
10000 ) a très largement sous estimée la prévalence de l’autisme. L’Organisation Mondiale
de la Santé annonce 8 autistes pour 10000, si l’on intègre le syndrome d’Asperger et le
trouble envahissant du développement non spécifié selon le DSM IV et la CIM 10 le taux
de prévalence se situe autour de 90 pour 10000 !.
L’état des lieux de la prise en charge des adultes autistes en France fait apparaître
un manque tant quantitatif que qualitatif et ce dans les secteurs sanitaires et médicosociaux. Si nous mettons en perspective le taux de prévalence mis en évidence par les
dernières études nous voyons bien que le pays va devoir faire un effort considérable afin de
répondre à ces besoins
78
Les moyens dégagés par les plans autisme, définis par la circulaire de 95, pour la
création de places ont déjà permis la construction d’établissement. Le redéploiement des
moyens du sanitaire vers le médico-social et la poursuite de l’effort en matière de prise en
charge va permettre de nouvelles réalisations.
Il nous semble alors évident d’envisager une politique cohérente et globale de la
prise en charge de l’autisme en institution. Nous savons aujourd’hui, nos expériences en
témoignent, un certain nombres de choses sur l’accueil des personnes adultes autistes. La
présentation des projets qui seront exposés aux tutelles devront tenir compte de ces
expériences.
Nous aurons à cœur de défendre nos idées sur le handicap et l’exclusion, sur la
notion de citoyenneté, sur le respect que nous devons aux personnes autistes en imaginant
et en aménageant pour eux leur environnement, sur les outils que nous mettrons à leur
disposition afin de leur donner accès à la communication et à la relation, base de
l’accession à la fonction de sujet qui permet d’être, à son niveau, acteur de sa propre vie.
Nous n’oublierons pas le droit à l’information pour les familles ainsi que le droit et le
devoir de formation pour les professionnels.
Face à ces idées forces, nous proposons un modèle qui, au regard et en fonction des
différents environnements particuliers se veut, avant tout, être un guide à la réflexion pour
l’élaboration de projets d’accueil et de prise en charge de personnes adultes autistes en
institution.
79
Bibliographie
80
1. KANNER. L., « Autistic disturbances of affective contact », Revue Nervous child
volume 2, p 217-250, 1943.
2. BLEULER. E., « Demencia Praccox or the groups of schizophrenies », translated by
ZINKIN. J. 1911 - New York, international universities press. 1950.
3. ASPERGER. H., « die autistichen psychopatten im kirdesarder », Archiv für psychiatrie
und nervenkrankheiten, pp. 117, 76-136, 1944.
4. VAN CREVELEN. D A., « Early infantile autisme and autistic psychopaty »
journal of autism and childwood schizophrénia, 1, 82.6, 1971.
5. WING. W., « Asperger’s syndrome, a chinical account », Psychological médecine, 11,
115-130, 1981.
6. MISES. R..; FORTINEAU. J.; JEAMMET. P.; LANEZ. JL.; MAZET. P.; PLANTADE.
A.; QUENADA. N., « Classification Française des troubles mentaux de l'enfant et de
l'adolescent ». Psychiatrie de l'enfant. 31, pp67-134, 1988.
7. BURSZTEJN. C., « Evolution des concepts », in L'autisme, 50 ans après Kanner, sous
la direction de C. AUXILLOUX, MF LIVOIR-PETERSEN, ERES Sésame Autisme pp, 921, 1994.
8. WING. L., citée par HAPPE. F., « Autism, an introduction to psychological théory »,
London UCL Press, 1994.
9. WOOD. P., Classification Internationale des Handicaps, CTNERHI, diffusion P.U.F,
1988.
10. ANDEM. L'autisme in GEPNER. B, SOARES. I, FLEURETTE F, Paris, ANDEM,
1994.
11. FRITH. U., L'énigme de l'autisme, Paris, Editions O. JACOB, 1992.
12. LORD. C., SCHOPLER. E., REVICKI. D., « Sex différences in autism », Journal of
autism and dévelopmental disorder, 12, pp. 317-330, 1982, in FRITH. U., L’énigme de
l’autisme, Paris, Edition O. JACOB, p. 91, 1992.
13. WING. L., " sex ratio in early childhood autis and related condition psychiatry
rechearch ", 5, pp. 129-137, 1981. cité par U. FRITH., l'énigme de l'autisme, Paris,
Editions O.JACOB, 1992.
81
14. BARON-COHEN. S., SAUNDERS. K., CHAKRABARTI. S., « Does autism cluster
géographically ? A rechearch note », SAGE, Publications and the National Autistique
Society, 1999.
15. GILLBERG. C., WING. L., « Autism : not an extremely rare disorder », ACTA
PSYCHIATRICA SCANDINAVICA, 1999.
16. RUTTER M., LOCKYER L., « a five to fifteen years follow up study infantil
psychosis , I. Description of sample britihs journal of psychiatry ", 113, pp. 1169-1182,
1967. cité par FRITH. U., l'énigme de l'autisme, Paris, édition O. JACOB, p. 93, 1992.
17. FREEMAN. BJ., RITVO. E.R., NEEDLEMAN. R., YOKOTA. A., « The stability of
cognitive and languistic parameters in autism : a five year prospective study », journal of
the american academy of child psychiatry, 24, pp. 459-464, 1985. cité par FRITH. U.,
l'énigme de l'autisme, Paris, édition O. JACOB, p. 93, 1992.
18. BARTACK. L., RUTTER. M., COX. A., « A comparative study of infantile autism and
specific developmental language disorders : I. The children », British journal of
psychiatry, 126, pp. 127-145, 1975. . cité par FRITH. U., l'énigme de l'autisme, Paris,
édition O. JACOB, p. 202, 1992.
19. KANNER. L., « Follow-up study of eleven autistic children originally reported in
1943 », Journal of autistic and chilwood schizophrenia, 1, 2, p. 122-145, 1971. Cité par
AUXILLOUX. C., MISES. R., in, MISES. R., GRAND. P., Parent et Professionnels
devant l’autisme, édition du CTNERHI, p. 111, 1997.
20. AUXILLOUX. C., MISES. R., « Evolution de l’enfance à l’age adulte », in, MISES.
R., GRAND. P., Parent et Professionnels devant l’autisme, édition du CTNERHI, p. 115,
1997.
21. RUTTER. M., LOTTER. V., cités par AUXILLOUX. C., MISES. R., Parent et
Professionnels devant l’autisme, édition du CTNERHI, p. 116, 1997.
22. BARTAK. L., RUTTER. M., ., « Differences between mentally retarded and normally
intelligent autistic children », journal of autism and childwood schizophrenia, 6, p. 109120, 1976. cité par AUXILLOUX. C., MISES. R., in MISES. R., GRAND. P., Parent et
Professionnels devant l’autisme, édition du CTNERHI, p. 117, 1997.
23. SAUVAGE. D., « L'autisme et les pathologies associées », pp. 33-252, 42-252
L'autisme aujourd'hui, actualisation des connaissances, CREAI Alsace – ORHIAL, 1998.
24. MISES. R. , « Principaux aspects cliniques », Parents et professionnels devant
l'autisme, p. 34, MISES. R., GRAND. P. ; Editions CTNERHI, 1997.
82
25. SAUVAGE. D., PIRE. N., SIRET. M., GARREAU. B., COUTURIER. G.,
« TED
et soins en psychomotricité », in LELORD. G., SAUVAGE. D. ,L’autisme de l’enfant,
Edition MASSON, p 298, 1990.
26. LIVRE BLANC., « Les personnes autistes accueillies dans les établissements affiliés à
l’UNAPEI », Handicaps et référence, UNAPEI, p. 13-56, 1999.
27. MAYER.C., FRATTINI. M.O., ETOURNEAU. C., Autisme, forces et faiblesses du
dispositif en Bretagne, OBSERVATOIRE REGIONAL DE SANTE DE BRETAGNE, p.
21-67, 1996.
28. IGAS., « La prise en charge des enfants et des adolescents autistiques »
INSPECTION GENERALE DES AFFAIRES SOCIALES, 1994.
29. DAS., « Propositions pour l’accueil des adultes autistes », Ministère des affaires
sociales, de la santé et de la ville, DIRECTION DE L’ACTION SOCIALE, 1995.
30. MASSE. G., « La recherche des inadéquations et ses conséquences en termes
d’organisation dans la filière de soin », Mieux articuler le sanitaire et le médico-social en
psychiatrie, TECHNOLOGIE ET SANTE, CNEH, p. 41-50, 1999.
31. FRANC. B., « Les attentes des parents », in Parents et professionnels devant l'autisme,
pp. 335-342, MISES. R., GRAND. P. ; Editions CTNERHI, 1997.
32. PREFAUD. C., « Les attentes des familles » », in L'autisme, 50 ans après Kanner, sous
la direction de C. AUXILLOUX, MF LIVOIR-PETERSEN, ERES Sésame Autisme pp, 921, 1994.
33. MOULINIER. M.C., VIE SOCIALE et TRAITEMENT, 25 juin 1980.
34. BOUTINET. J.P., « Anthropologie du projet », Actes de la conférence, Université
Rennes 2 Haute Bretagne, 1995
35. THOMAS. A., « Editorial », Confluences n°1, Les mots d’ORA, OUEST RESEAU
AUTISME, 2000.
36. PEETERS. T., De l’adolescence à l’age adulte, EDINOVATION, 1990.
37. MAGEROTE. G., Congrès Autisme France, Paris, juillet 1997
38. NORMIER. N., « Projet pédagogique d’établissement », TURBULENCE, 1989.
39. LAUBAT. J.R., « L’architecture au service du projet d’établissement », LIEN
SOCIAL, n° 501, pp. 4-9, 1999.
83
40. COURTEIX. S., « Architecture et santé mentale », REVUE HOSPITALIERE DE
FRANCE, pp. 36-52, 1999.
41. MILCENT. C., L’autisme au quotidien, Edition O. JACOB, p. 108, 1991
42. LEMAY. M., Colloque, « De l’éducation spécialisée », Ploufragan, 22, IUFM de St
Brieuc, cité par, THOMAS. A., « autisme et environnement : une pratique », Education et
environnement, REPONSES INSTITUTIONNELLES, p, 46, 1998.
43. HOUSSAYE. J., Quinze pédagogues, leur influence aujourd’hui, Edition Armand
Colin, BORDAS, p. 11, 2000.
44. TEACCH., Treatment and éducation of autism and communication handicaped
children, Programme imaginé par, SCHOPLER. E., REICHLER.R.J., LANSING. M.,
Caroline du nord, USA, 1960, in MESSIBOV. G.B., Autisme : Le défi du programme
teacch, Edition PRO AID AUTISME, 1995.
45. SCHOPLER. E. ; REICHLER. R., RENNER. B., The childhood Autism Rating Scale,
(C.A.R.S.) Edition IRVINGTON PUBLISHERS, New York, 1986.
46. SCHOPLER. E., REICHLER. R., Psychoéducational profil, (P.E.P.) PRO-ED, Austin,
Texas, 1979.
47. MESIBOV. G., SCHOPLER. E ., SCHAFFER. B., Adolescent and Adult
psychoéducational profil, (A.A.P.E.P.) PRO-ED, Austin, Texas, 1988.
48. BULLINGER. A., « Approche instrumentale de l’autisme infantile », in Autisme et
régulation de l’action, Edition LES CAHIERS DU CERFEE, n° 13, pp. 147-163, 1996.
49. GABBAI. P., « Les interventions à l’âge adulte auprès de sujets autistes et
psychotiques à autonomie réduite », in, MISES. R., GRAND. P., Parents et professionnels
devant l’autisme ,Edition du CTNERHI, p ; 395-405, 1997.
50. PEETERS. T., L’autisme, de la compréhension à l’intervention, Edition DUNOD, p.
104, 1996.
51. FERRARI. P., L’autisme infantile, Que sais-je ?, Edition PUF, p. 54, 1999.
52. DANSART. B., « Grille d’évaluation du comportement pré-verbal et verbal », in,
FERRARI. P., L’autisme infantile, Que sais-je ?, Edition PUF, p. 55, 1999.
53. PIRE. N., « Echelle d’évaluation de comportement psychomoteur » ERCP, 1989, in,
FERRARI. P., L’autisme infantile, Que sais-je ?, Edition PUF, p. 54, 1999.
84
54. MONTREUIL. N., MAGEROTTE. G., Pratique de l’intervention individualisée,
Edition DE BOECK UNIVERSITE, p. 19, 1996.
55. MAGEROTTE. G., « L’individualisation des services pour personnes autistes », », in
L'autisme, 50 ans après Kanner, sous la direction de C. AUXILLOUX, MF LIVOIRPETERSEN, Edition ERES Sésame Autisme pp, 127-135, 1994.
56. WING. L., La recherche actuelle – le futur de la personne autiste, Rencontres de
Vichy, une stratégie pour l’autisme, UNAPEI, 1986, citée par, JOUBERT. M., ROGE. B.,
« Les prises en charge d’adultes autistes », in ROGE. B., NADEL. J., Autisme : l’option
biologique, 2. prise en charge, Psychologie Française, Edition PUG, p. 236, 1998.
57. GILLBERG. C., PEETERS. T., « L’autisme. Aspects éducatifs et médicaux »,
ANTWERPEN JANSSEN RESEARCH FONDATION, 1995, citée par, JOUBERT. M.,
ROGE. B., « Les prises en charge d’adultes autistes », in ROGE. B., NADEL. J.,
Autisme : l’option biologique, 2. prise en charge, Psychologie Française, Edition PUG, p.
236, 1998.
MARTIN. B., RICHARD. A., « Porte ouverte sur les émotions : A la recherche des
mots pour le dire » Confluences n°2, Les mots d’ORA, OUEST RESEAU AUTISME,
2000.
58.
85
Téléchargement