CR - Fethi benslama deradicalisation

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Les ressorts de la radicalisation et de son traitement – Fethi Benslama – Observatoire de la fraternité 93 – 05/10/16
Transcription de la soirée débat
« Fraternité, Parlons en ! »
Les ressorts de la radicalisation
et de son traitement,
animée par Fethi Benslama
Le 5 octobre 2016
Les textes ci-après sont la retranscription des interventions orales durant la soirée débat
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ALLOCUTIONS D'OUVERTURE
ALINE ARCHIMBAUD,
SÉNATRICE
DE
SEINE-SAINT-DENIS
Bonsoir à tous, je vous souhaite la bienvenue au nom de l'ensemble de l'équipe de l'observatoire de
la fraternité. Bienvenue à Fethi Benslama, merci pour sa présence et merci à lui de bien vouloir
nous consacrer son temps et sa réflexion sur les ressorts de la radicalisation et sa prévention.
Merci aux CEMEA et à leur président Alain Sartori qui nous accueillent dans de superbes
conditions. Je rappelle que les CEMEA sont mobilisés aux côtés des signataires de l'appel de
l'observatoire. Enfin, merci aux membres de l'observatoire et aux amis de l'observatoire d'être
présents. Surtout, merci aux jeunes présents dans la salle et qui sont assez nombreux ce soir, je
crois que c'est quelque chose de très important.
Dans des débats comme ce soir, ce qui nous intéresse c'est de comprendre, expliquer, analyser. La
série d'événements tragiques qui nous a bouleversés, on ne peut pas en rendre compte avec le
langage ancien, avec des réponses simplistes prises dans l'urgence. Les réponses doivent être
partagées avec les experts d'une part, mais surtout avec ceux qui vivent quotidiennement ces
situations, et qui ont en une connaissance aiguë. Ce qu'on a constaté avec l'observatoire c'est cette
précipitation dans des débats fabriqués pour diviser, ces généralisations hâtives, ces leçons données
à l'emporte pièce, ces amalgames. Sur le plan législatif, les empilements de textes sont eux aussi
hâtifs et pas en phase avec la réalité. Ces défaillances, on essaye d'y remédier modestement.
Comprendre pour agir, c'est notre responsabilité ici, dans cette salle et ailleurs. Nous sommes
complémentaires pour construire un monde de la fraternité dans la vie quotidienne. Il faut qu'on
protège toutes les populations, y compris les plus stigmatisées, il faut qu'on construise des terrains
défavorables aux violences, aux extrémismes. La complexité de la situation ne doit pas paralyser
notre action mais nous emmener sur la voie de solutions multidimensionnelles.
Dans ces débats, il nous faut garder une atmosphère sereine, d'écoute et de respect. Abandonner nos
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jugements hâtifs et essayer de partir du concret pour essayer de comprendre.
ALAIN SARTORI,
PRÉSIDENT
DES
CEMEA ÎLE
DE
FRANCE
Bonsoir à tous. D'abord nous sommes très heureux au nom des CEMEA Île de France et des
CEMEA nationaux, dont les représentants sont dans la salle ce soir, d'accueillir cette initiative de
l'Observatoire de la fraternité.
La Fraternité est un beau mot, un pilier de la République. On parlait d'égalité, de liberté, mais dans
ce monde, ce qui tend à la fragmentation et à la division des personnes entre elles c'est l'absence de
fraternité. C'était urgent d'en parler et de redonner tout son sens à ce mot. Vous êtes ici dans un
espace de formation, dans une salle où de nombreux étudiants et stagiaires du centre de formation
de l'ARIF des CEMEA sont présents parmi nous ce soir et j'en suis très heureux. Il faut que la
jeunesse participe à ces espaces, merci à vous d'être venus.
L'enjeu pour nous, c'est d'être un lieu de confrontation et d'appréhension du vivre ensemble : pas
seulement sur la question de la convivialité, mais surtout dans l'apprentissage du conflit. C'est un
espace de rencontre, d'expression de points de vus différents. Si on ne crée pas ces espaces, on crée
les conditions de la violence. Quand il n'y a pas de conflit, il y a de la violence. Une des ambitions
de l'observatoire de la fraternité, c'est de créer ces conditions et ce soir sur un thème pas simple.
Merci à Fethi Benslama d'avoir répondu à l'invitation de l'Observatoire.
Merci à vous tous d'être venus dans cette salle ce soir. A vous regarder, je vois là un bel exemple de
cette France et de la République.
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Les ressorts de la radicalisation et de son traitement
FETHI BENSLAMA
Bonsoir, je suis très heureux de venir parler sous ce titre d'Observatoire et de Fraternité qui
réunissent à la fois la volonté de comprendre mais aussi de savoir ce qui nous reste du mot de
fraternité une fois devant les difficultés. J'ai répondu très vite positivement à l'invitation car je
trouve que c'est ce type d'initiatives qui aujourd'hui doit contribuer à ce dont je parlerai, le
traitement de la radicalisation. Il y a plusieurs traitements mais il y en a un absolument nécessaire
qui est dans cette alliance entre la société civile et les politiques, sans laquelle on ne peut pas arrêter
ce qui nous arrive aujourd'hui.
Je vais vous parler de ce que j'ai compris, en tant que chercheur qui travaille sur l'Islam sous l'angle
particulier de l'évolution de la subjectivité, c'est à dire l'individualité des musulmans dans leur
intimité. On parle d'eux en groupe, en tant que masse, mais pas de ce qui se passe dans leur intimité,
de ce qui les conduit à être si différents. Je suis aussi un praticien et d'ailleurs je suis de chez vous.
J'ai travaillé en Seine Saint Denis, dans la cité des 4000 par exemple, et cela pendant 15 ans. Le
public d'ici je le connais, j'ai vu les jeunes, leurs enfants, leurs parents.
Cette question de la radicalisation, n'est pas aussi simple qu'on le dit. C'est quelque chose de très
complexe parce que la notion de radicalisation c'est celle des personnes qui adoptent des modes
d'être, des conduites extrêmes qui peuvent menacer la société, mais pas nécessairement. Tous les
radicalisés ne sont pas violents.
Aujourd'hui, la radicalisation prend un caractère épidémique, c'est bien là la difficulté. Jusqu'à l'été
on comptait en France 12 000 signalés radicalisés (ce sont les chiffres du ministère de l'Intérieur).
Aujourd'hui, c'est beaucoup plus. Je vais y revenir.
La radicalisation, est devenue aujourd'hui un phénomène quasiment planétaire. Notion née en 2001
après les attentats aux États-Unis, les Américains l'ont imposée à travers les recherches qu'ils
mènent sur la radicalisation. Avant on parlait d'extrémisme, d'intégrisme, de fanatisme... tous ces
mots ont disparu, la radicalisation s'est installée pour désigner toutes formes de conduite extrême.
Les chercheurs en sociologie se sont mis à étudier comment ça se passe, le phénomène de
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radicalisation, quels trajets il emprunte... A partir de là, ce mot est devenu commun à tous les pays
et traduit dans toutes les langues.
On peut le récuser, mais dans la réalité il s'impose aux politiques, aux chercheurs, aux services de
sécurité.
Qu'est ce qu'on y met ? Quelles sont ces 12000 personnes signalées ? On n'en sait pas beaucoup de
choses. Depuis la constitution de ce fichier des « radicalisés », les chercheurs demandent d'y avoir
accès afin de savoir qui ils sont, d'où ils viennent... Le ministre de l'Intérieur a promis l'ouverture de
ce fichier, pour le moment nous n'y avons toujours pas accès.
Pour pouvoir penser la lutte la lutte contre la radicalisation, il faut savoir ce que c'est. Aujourd'hui
chacun a un petit bout de connaissance, mais personne n'en n'a de vision globale. Quels sont ces
gens ? Comment les a t on repérés ? Les populations sont différentes, il n'existe pas de profil de
radicalisé, il n'existe pas de profil psychologique. Bref, on ne peut pas lutter à l'aveugle. Nous
sommes en panne dans la compréhension et la recherche parce qu'on n'ouvre pas ce big data gardé
par le ministère de l'Intérieur. On ne peut pas mener une politique véritable de prévention et de lutte
contre la radicalisation violente, et je souligne violente, si nous ne connaissons pas le fait même.
Aujourd’hui, on ne connaît que l'expérience empirique. Et aujourd'hui, il n'y a pas de politique autre
que la politique sécuritaire. Je ne suis d'ailleurs pas compétent pour en parler, c'est le travail de la
police et heureusement qu'elle existe.
En revanche, la politique de la prévention ne relève pas que des compétences de la police. S'il existe
aujourd'hui une politique sociale, une politique de la ville, la politique de traitement de ce qui
apparaît comme la « radicalisation » n'existe pas. Certes, de nombreux spécialistes apparaissent,
j'appelle ça l'über-radicalogie. Ce sont des personnes qui n'ont jamais rencontré un jeune ! L’État
leur jette une manne financière, à l'aveugle, parce qu'il « faut bien faire quelque chose ». En avril
2014, l’État a commencé à pointer le problème alors même que cela faisait des années que les
praticiens tiraient la sonnette d'alarme. À ce moment, le ministère de l'Intérieur a chargé la
commission interministérielle pour la lutte contre la délinquance qui est devenue « commission
interministérielle pour la lutte contre la délinquance et de la radicalisation », de faire quelque chose.
Je ne mésestime pas les difficultés face à ce phénomène nouveau, mais les retards à agir sont
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extraordinaires ! Par exemple, on a travaillé sur la configuration d'un premier centre après les
attentats de 2015. Il vient juste d'ouvrir il y a quelques jours. Pourquoi tant de temps ? C'est vous
dire qu'il y a une lenteur incroyable pour traiter ce problème et ce, malgré les énergies, les
chercheurs... Ce qu'il faut qu'on comprenne aussi, c'est que la France a pourtant les moyens de
traiter ce problème.
Quelques éléments statistiques
Aujourd'hui, le ministère de l'Intérieur compte plus de 12 000 cas de « radicalisés ». Le signalement
est dans la réalité souvent celui des parents inquiets, de l'entourage proche, de l'école, parfois ces
signalements sont abusifs... Mais la plupart du temps, ce sont les parents. Ce sont des policiers
expérimentés, à la retraite qui filtrent ces signalements. Ils engrangent une quantité de données
impressionnante.
25% des personnes signalées sont mineures. Les deux tiers ont entre 15 et 25 ans. Le reste, ce sont
des trentenaires qui relevaient, il y a peu, de la tranche des 15-25 ans. Si cette tranche est très
importante c'est parce que c'est la tranche de l'adolescence, de l'âge juvénile. Aujourd'hui,
l'adolescence commence de plus en plus tôt, et finit de plus en plus tard. On constate un phénomène
mondial de l'extension de la transition juvénile (pour beaucoup de raisons). En conclusion, les 2/3
des personnes signalées sont en transition juvénile. Très bizarrement, cette donnée n'a jamais été
commentée.
35% des personnes signalées sont des femmes. Ce chiffre aujourd'hui augmente, on tend à un
équilibrage entre les deux sexes.
40% des signalés sont convertis. La notion de « converti » est délicate. Lorsqu'on parle de converti
la personne peut être d'une famille musulmane sécularisée, mais si le jeune donne des
manifestations de pratique religieuse, on considère qu'il est converti. Il faut donc pondérer ce
chiffre. Les policiers disent qu'il y a 25% de radicalisés hors famille musulmane. Ce phénomène va
donc au delà d'enfants de tradition de famille musulmane.
Jusqu'à là, les sociologues raisonnaient en mettant en rapport les classes défavorisées et radicalisées.
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Aujourd'hui 30% des radicalisés appartiennent à la classe sociale défavorisée. 60% appartiennent à
la classe moyenne et 10% à la classe supérieure. Ce phénomène n'est plus non plus corrélé avec la
banlieue. Les corrélations sociologiques ne tiennent plus la route.
Le phénomène excède donc la dimension seulement sociale. Elle existe encore, mais plus de
manière déterminante. C'est un paramètre mais pas un facteur. La différence ? Un facteur intervient
absolument nécessairement. L'Islam est un paramètre mais pas un facteur. Il y a plein d'autres
paramètres, ce qui explique la difficulté de la notion.
La radicalisation ne débouche pas nécessairement sur le djihadisme et sur la violence. C'est une
voie, mais aujourd'hui les personnes se radicalisent de plus en plus tôt et de plus en plus rapidement.
Il s'est donc passé quelque chose dans la stratégie mais avant de parler stratégie je voudrais vous
parler de la dimension géopolitique de la radicalisation.
La dimension géopolitique de la radicalisation
A partir de 91, première guerre du Golf : nous avons de 1991 jusqu'à 2016, un quart de siècle de
guerre dans les pays du Moyen Orient et du Maghreb. Soit parce qu'il s'agit d'expéditions miliaires
des grandes puissances, soit parce qu'il s'agit de guerre civiles, de guerres régionales, de massacres,
de génocides... Les populations réfugiées se comptent en millions, l'Algérie c'est plus de 100 000
morts. On a donc sur 25 ans un paysage de guerre continue. Comment après ces années, n'arriveraiton pas à des générations de gens qui veulent faire la guerre ?
Nous mêmes, les Français, étions en guerre bien avant que la Président de la République ne le dise.
Nous avons des bases militaires en Afrique, au Moyen Orient, nous vendons des armes... Résultat,
tous les pays qui ont une histoire coloniale ont connu le terrorisme. La Belgique, l'Angleterre,
l'Espagne. Ce sont dans les pays complètement engagés dans des processus de guerre et qui ont des
intérêts, qu'on peut par ailleurs comprendre, mais qui sont des pays en guerre depuis des années,
sauf quand Chirac a dit non à la deuxième guerre du Golf, et là, il s'est passé quelque chose.
Cette dimension géopolitique il ne faut pas l'oublier. La guerre a pour effet de faciliter l'expression
des pulsions les plus sauvages et même quand les gens ne sont pas dans la guerre, mais à coté.
Certaines personnes se soulagent au pouvoir. Nous savons aussi que la guerre pousse au sacrifice,
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alimente la cruauté, la haine y compris par le spectacle qu'elle donne. Aujourd’hui ce spectacle est
augmenté par nos écrans. Et tout ça, on le voit.
La guerre amène certaines personnes, pour toutes sortes de raisons, à vouloir en être. Parmi ces
jeunes qui vont sur le terrain, certains sont là pour faire cette guerre, pour être des héros, sauver des
gens, pour l'aventure. D'autres, ne savent pas pourquoi ils y vont. Il y a des jeunes qui partent par ce
qu'ils veulent grandir. Cela nous permet d'arriver à la question centrale : pourquoi la majorité des
personnes dites radicalisées, ont entre 15 et 25 ans ? Tout ce que je vais dire ne veut pas dire qu'ils
ne sont pas responsables. Ils sont responsables tant du point de vue pénal que psychologique. Ce ne
sont pas des fous. Quelques uns le sont, mais la folie est, je le rappelle, quelque chose de très précis.
Pour le comprendre il faut les rencontrer, les écouter.
La transition juvénile
D'abord, la transition juvénile se caractérise par deux difficultés.
La question de l'idéal : j'étais un enfant, des idéaux m'ont été transmis, même si j'étais malheureux.
A l''adolescence, qui est un processus physique et psychique, les idéaux ne sont plus opérants.
L'adolescent doit substituer à ces idéaux de nouveaux idéaux qui sont sociaux. Mais cette phase de
transition est un moment extrêmement difficile. L'adolescent est « à plat », déprimé, a le sentiment
de ne plus rien valoir, il est gagné par la mésestime de lui même, et n'arrive pas à embrayer sur la
montée. Quand un jeune a rencontré des problèmes, il ne trouve pas le chemin de cette montée.
C'est à cet instant qu'il peut « dévier », de la conduite pathologique, à la conduite délinquante. Et
puis un jour, ce jeune, au plus bas, fait une rencontre. Il trouve une offre qui répond à sa quête
d'idéal. On l'appelle l'offre de radicalisation. Il est preneur car elle le sort, elle lui donne, elle le
remonte. Il devient quelqu'un, il est reconnu, missionné, c'est un héros. Il sort par le haut. Ça veut
dire que ça apparaît comme un auto traitement, une guérison pour un jeune en mal de ce passage.
Dans la pratique, c'est un phénomène qu'on rencontre très souvent chez ces jeunes radicalisés. Ils
disent tous la même chose ! Le discours est tellement stéréotypé, qu'il permet d'évacuer les
difficultés. Or, quand vous parlez comme tout le monde vous perdez votre singularité. Chacun
d'entre nous est quelqu'un qui ne ressemble à personne d'autre. S'il abandonne ce particulier, il ne
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lui arrive plus rien, il peut être capable de tout et il se passe tout.
Cette quête de l'idéal et de l'offre inhérente à la radicalisation afin de fournir des idéaux à ces jeunes
en difficulté est très forte et consistante. Elle permet à chacun de se tirer de l'impasse dans laquelle
il est.
En revanche, la radicalisation et le passage à l'acte violent ne sont pas automatiquement connectés.
Il n'existe pas de prévisibilité chez ces jeunes radicalisés. Quand bien même certaines personnes
apparaissent dangereuses, on ne sait pas prévoir un potentiel passage à l'acte.
Pour résumer, la radicalisation est une offre d'idéal adressée à des gens en panne de transition
juvénile et leur donne les moyens d'en sortir. C'est une auto guérison.
Dans la pratique, si l'on dit à quelqu'un « venez on va vous dé-radicaliser », non seulement le terme
est absurde, mais en plus personne n'acceptera de lâcher une solution qu'il a trouvée. Le terme de
« radicalisation » est intéressant sur un point. Dans radicalisation il y a racine. Et effectivement, ce
que j'ai vu dans la pratique, ce sont des jeunes qui cherchent un enracinement. La question est :
pourquoi trouvent-ils là dedans des racines et pas ailleurs ? On ne peut pas savoir de façon générale,
seul le cas par cas peut apporter des réponses.
La transition juvénile est marquée par un brouillage incroyable des frontières. D'abord, entre le moi
et l'autre, qui est moi qui est l'autre, je suis moi même un autre mais l'autre c'est quoi. Ensuite, entre
la vie et la mort, le masculin et le féminin etc. Si cette série de frontières nous apparaît à nous
aujourd'hui claire, ce moment de transition se marque par un brouillage qui nécessite une recherche
pour rétablir ces frontières. Certains n'y arrivent pas, pour toutes sortes de raisons, mais il s'agit bien
là de l'identité fondamentale et non culturelle. Cette identité, de la personne humaine n'est pas
donnée, elle se construit.
L'offre de radicalisation évoquée plus tôt, permet de régler cette question des frontières et de
manière très précise.
La dimension historique de l'Islam des radicalisés
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Dans l'histoire de la guerre et du jihadimse, un élément est essentiel. Les mouvements terroristes, de
jihadisme sont impliqués dans ces guerres et sont même nés de ces guerre. La première école est
celle de l'Afghanistan, durant laquelle on a armé les fondamentalistes. D'ailleurs, sur le
fondamentalisme, il faut garder à l'esprit que toutes les religions connaissent le fondamentalisme, y
compris les bouddhistes ou les hindouistes. L'Islam a son fondamentalisme, la seule différence étant
qu'il a été armé par le jeu géopolitique des puissances. En Afghanistan, les fondamentalistes sont
devenus pour les puissances occidentales une arme extraordinaire pour se défendre contre les
soviétiques. Puis ces fondamentalistes sont allés ailleurs se battre avec les moyens qu'ils avaient
appris. Puis il y a eu la guerre en Bosnie, avec ses massacres de populations etc.
A partir années 2004 / 2005, les mouvements djihadistes comprennent que le modèle AlQuaida est
limité, qu'il faut passer à un autre système qui ne serait plus vertical, pyramidal avec un centre de
commandement qui forme. La limite à cette organisation était que les services de renseignements
savaient à quoi ils avaient à faire.
A partir de là, sont apparues, 1800 pages sur internet : « le Djihad pour tous ». Internet permet de
passer d'une organisation de type vertical à une organisation horizontale. Elle permet de toucher le
plus grand nombre, de toucher tous ces jeunes en panne d'idéaux. Ces jeunes sont pris dans les filets
de la nouvelle offre. Cette offre change complètement la nature de la radicalisation. Avant, les
fondamentalistes étaient formés, structurés, recevaient une formation théologique, même mineure.
Désormais, ces personnes veulent aller combattre en Syrie avec « l'islam pour les nuls » !
Cette nouvelle génération n'est plus formée. Elle est constituée en grande partie de personnes
perdues, ce qui ne veut pas dire qu'elles ne sont pas responsables, qu'elles sont dénuées de
sensibilité. Mais parmi ces gens, certains vont très mal, voire très très mal. Cet engagement leur
donne l'impression d'échapper à leur mal être. Cette nouvelle organisation permet de recruter « tout
le monde », n'importe qui. La médiatisation, la visibilité est un point essentiel (même si les
journalistes ne veulent pas l'entendre !). Le médiatique est la continuation de la terreur par d'autres
moyens. Quand Mohammed Merah envoie en direct grâce à sa caméra go pro les images de ses
actes à Al Jazeera, il s'agit bien de la continuation de la terreur. Quand un jeune n'était rien et veut
devenir quelqu'un, il a besoin d'une reconnaissance mondiale, internationale, il veut être montré. Le
terroriste de Nice par exemple, avait sa carte d'identité sur lui parce qu'il voulait être en phase avec
les médias. Le grand chef qui a remplacé Ben Laden dit que la moitié du djihad est médiatique, ce
qui continue à alimenter cette image et permet de rencontrer de nouveaux jeunes fascinés par les
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actes, par la violence. Qui, dans nos sociétés est susceptible de tomber le plus dans cette
fascination ? Les plus fragiles qui peuvent devenir les plus dangereux. Dans cet ensemble
d'éléments, on trouve le spectre de la difficulté humaine, allant du « petit gars paumé » à des cas
pathologiques. C'est pour cela qu'il n'y a pas de profil de jeune radicalisé.
La radicalisation : une enveloppe à beaucoup de symptômes
Mon hypothèse de travail c'est que la radicalisation est une enveloppe à beaucoup de symptômes,
une sorte d'habillage. On appelle cela l'enveloppe des symptômes. On y trouve par exemple des
paranoïaques, des mélancoliques ou autres, qui trouvent une enveloppe pour se sacrifier, au lieu de
faire une tentative de suicide.
Le Monde a publié il y a quelques mois une conversation de la mère d'un des jeunes terroristes du
Bataclan. La mère déclare que son fils va se suicider et qu'il est bipolaire. Cette enveloppe peut
potentiellement envelopper n'importe quoi. Certaines données enveloppées sont plus dangereuses
que d'autres, comme par exemple une haine effroyable. On ne peut pas confondre une personne qui
fait la guerre avec une personne qui commet un attentat terroriste. Ce sont deux choses
complètement différentes. D'ailleurs, le gouvernement va devoir s'emparer un jour ou l'autre de
cette question du traitement des guerriers. Le jeune pris dans un tourbillon pour régler ses
problèmes et trouver une issue, s'il n'est pris très tôt en charge, c'est très difficile de le retrouver.
C'est pour ces raisons que la dé-radicalisation est une supercherie monstrueuse. Il faut bannir ce mot
de notre vocabulaire.
L'offre de radicalisation : sur quoi porte-elle pour convaincre autant ?
La clef de voûte c'est ce qu'on appellerait la justice identitaire, c'est à dire le moment où ce jeune se
sent préjudicié. Il lui est raconté que l'histoire des musulmans est une histoire d'injustice qui
demande une vengeance. On confond sa propre injustice à celle de la communauté humaine à
laquelle il appartient. On lui demande de venir un vengeur, celui du Dieu de l'Islam. Cette histoire
de l'Islam repose sur la théorie de son humiliation depuis la chute de l'empire Ottoman. À cette
époque, l'Islam est un empire, pas seulement une religion. La naissance de la Turquie, premier état
laïque, marque l'effondrement de l'empire. Les provinces deviennent des États artificiels, le Liban,
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la Jordanie, la Syrie, l'Irak … Cet effondrement de 1924 est un traumatisme, qui voit naître dès
1928 le mouvement des frères musulmans, qui eux veulent rétablir l'empire et s'opposent aux Étatsnations. Leur théorie repose sur l'humiliation, ressemble à l'Allemagne après le traité de Versailles.
S'ils s'opposent frontalement à l'Occident, ils font aussi reposer la faute sur les musulmans euxmêmes, ces musulmans devenus partisans des lumières occidentales. Pour ces derniers, il faut
adopter une partie de la théorie des lumières afin de réveiller les lumières de l'islam. On a donc une
lutte contre les nationalistes, partisans de l’État-nation et les « anti-lumières » pour le rétablissement
de l'empire Ottoman, les islamistes. Cette théorie de l'islamisme ne tiendrait pas la route si elle
n'était pas appuyée sérieusement sur des bases historiques. On demande aujourd'hui la relève de cet
idéal, et aux gens de s'y identifier.
La dignification et l'accès à la toute puissance
« on va vous donner la dignité que vous n'avez pas. Avec cette dignité vous allez devenir un héros,
un homme missionné ». Imaginez les effets que ça peut produire sur quelqu'un qui se sentait trois
fois rien !
Repentir et purification
La revendication des attentats du 13 novembre, c'est la purification. Ces gens sont coupables d'être
délinquants, mais cette purification leur permet de pouvoir sortir de la délinquance tout en
continuant leurs actes mais désormais, au nom d'une loi supérieure. Les conduites antisociales
peuvent trouver refuge dans un cadre, celui que Dieu autorise.
L'offre créatrice de demande
Un élément très important décisif dans les passages à l'acte violent, c'est une offre :
L'offre, c'est ce qui crée la demande. Le jeune en transition juvénile n'a pas de demande. L'offre de
radicalisation est suffisamment puissante pour créer de la demande !
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L'effacement des limites entre la vie et la mort.
Cet élément touche les fantasmes inconscients de beaucoup d'adolescents. Les adolescents font
beaucoup de tentatives de suicide (TS). On en compte 250 000 enregistrées par l'intervention des
services médicaux dans toute la France, dont 1 000 qui causent la mort. C'est une réalité beaucoup
plus grave que les accidentés de la route. Les TS ne sont pas nécessairement réalisées pour mourir.
Il peut s'agir d'appels au secours ou d'une volonté de vouloir revivre. Ces frontières entre la vie et la
mort tremblent à un certain moment de la vie. Ce tremblement peut justement laisser place à une
offre théorisée et construite visant à dire que la mort n'est rien. Qu'après cette mort, on trouve une
vie meilleure, supérieure. Elle devient ce qui enfante une vie plus sublime. Voire même que la mort
est déjà là ! Dans le livre de David Thomson, Les Français jihadistes, un jeune dit à sa mère :
« Dieu a déjà décidé de ma mort avant ma naissance ». Pour un psychologue, ça veut dire que la
scène originaire du sujet est une scène de destruction. Évidemment, Allah ne décrète pas la mort
avant la vie, ça n'existe dans aucun texte de l'Islam, mais ça touche ces fantasmes, ces tremblements
dans la frontière entre la vie et la mort. Ces jeunes sont souvent récupérés au moment de ces
tremblements, moment où on leur propose ce sacrifice, il s'agit de convertir le désir de mourir en
sacrifice. Il ne s'agit donc pas d'un lavage de cerveau, ni d'une secte. Il s'agir de toucher la faille,
dans un mouvement planétaire.
Jugement dernier et fin du monde
Certains jeunes disent qu'ils vont participer à la fin du monde, qu'il s'agit de la prophétie. Dans cette
problématique du jeune, le plus grand affolement c'est la question du sens de la vie. Le jugement
dernier arrête tout, le sens est clos. Clore le sens, ça la religion sait le faire, quelle qu'elle soit. Elle
fabrique du sens avec n'importe quoi. Plus le monde s'affole, plus les repères construits tremblent,
plus la religion prend de la place et c'est pour cela qu'elle peut avoir un avenir.
Conclusion
Je vous ai dressé un tableau de ce que veut dire radicalisation. Vous voyez que ça ne veut plus rien
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dire. C'est une notion descriptive, comportementale mais elle ne dit ni quoi, ni comment, ni
pourquoi. C'est une enveloppe dans laquelle il y a beaucoup de choses : du social, du géopolitique,
du malheur individuel.
Si on ne traite pas les radicalisés violents comme responsables on ne peut rien faire. Pour aider ces
jeunes, il faut trouver les ressources dans le droit commun. La France a un réseau incroyable, mais
il faut former nos travailleurs sociaux, nos psychologues, nos éducateurs... Par exemple, lorsqu'on a
collé l'étiquette de « dé-radicalisation » au premier centre créé en Indre et Loire, les jeunes sont
partis ! C'est donc à la société civile, aux associatifs de remettre du lien. C'est par ce chemin qu'on
peut les aider à sortir de la possibilité d'aller vers la violence.
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Débat avec la salle
Public : sous l'angle de la question identitaire, vous avez parlé de la forme d'errance dans laquelle
ces jeunes se trouvent, est-ce qu'il n'y a pas peut être un dysfonctionnement dans l'accompagnement
à travers l'éducation ou l'école ?
Public : j'ai lu dans un article d'un de vos confrère qu'on avait positionné ces personnes comme des
héros. Et que cela cristallisait, donnait envie à d'autres personnes d'entrer dans la violence, que cette
médiatisation permettait l'escalade de la violence chez ces jeunes.
Public : Concernant les personnalités des jeunes, dans les portraits dressés, la plupart avaient un
manque du père, souvent parti avant la naissance ou peu après. Pouvez vous en parler ?
FB : Pour répondre à la première question. S'il y a des controverses sur le nombre de musulmans en
France, le chiffre le plus bas est celui de 3 millions. 12 000 radicalisés sur 3 millions ce n'est même
pas 1%. Pourquoi n'y a t il qu'eux ? Sont-ce les seuls en errance ? La question est donc plus
complexe, la radicalisation est faite de choix individuels, de personnel, d'une rencontre, de hasard.
La vie est faite de beaucoup de contingences. Sur la dernière question, il n'y a pas d'unique
problématique. Il peut y avoir le cas du père, mais pas forcément. Je vous invite à faire du cas par
cas et de ne surtout pas entrer dans le discours homogénéisant. Enfin, la médiatisation héroïque
contribue à créer une attirance pour ce désir héroïque de devenir quelqu'un. C'est pour ça qu'il faut
anonymiser les terroristes.
Public : Je suis pas travailleuse sociale mais j'ai l'impression que la clef du traitement individuel est
bonne, mais triste : quel autre idéal collectif ?
FB : Nous vivons un moment de crise de la civilisation dont il faut prendre conscience, et qui est
très difficile à traiter. Ce n'est pas la pauvreté qui rend les gens cruels, qui en font des tueurs.
L'histoire le prouve. Ce qui nous arrive c'est le résultat d'une culture de l'individualisme qui aboutit
aujourd'hui à la question essentielle. Je constate que les jeunes que j'ai aujourd'hui en cours ne sont
pas les étudiants d'il y a 25ans. Ils ne comprennent pas les institutions, se fichent complètement du
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Les ressorts de la radicalisation et de son traitement – Fethi Benslama – Observatoire de la fraternité 93 – 05/10/16
lien social etc. C'est ça le problème. La crise contemporaine de ce monde c'est celle de
l'individualisme encouragé par le capitalisme sauvage. Il s'agit de traiter les gens par leur
individualité pour les amener à détruire le monde. On a beaucoup d'idéaux en France (culture, art de
vivre, cuisine etc), si on amène les jeunes à voir ce qu'on a c'est extraordinaire.
En plus de ce problème civilisationnel, on a un problème de personnalité politique. Quand je vais
dans les ministères ou voir les parlementaires, j'ai en face de moi des gens qui ne comprennent pas
le monde dans lequel ils sont. Ils pensent avoir les réponses avant que les problèmes ne se posent. A
l'inverse, les conseillers qui ne sont pas sortis des moules type ENA, sont bons. La France a donc
les ressources.
Public : Mon fils a reçu un sms l'invitant à aller combattre. Nous nous sommes demandés comment
il avait pu recevoir ce message, nous sommes donc allés au commissariat, ce qui a semblé le
soulager.
FB : Le parent ne doit pas fermer les yeux, il doit se référer à l'autorité, la police, l'Etat. Le jeune ça
le rassure, il peut être entendu. Il faut restituer la place des institutions. Ils ne sont pas que nos
enfants mais aussi ceux des institutions. Ceux qui détruisent n'ont pas d'institution.
Public : Lorsqu'on parle des jeunes qui se font sauter au nom de leur communauté religieuse, je
pense à tout ce qui a pu s'écrire sur le Rwanda, le nazisme. L'autre est vécu comme une espèce de
non être ou un être inférieur. On constate une absence totale de respect de ce qu'est l'autre. Ce truc
là m'étonne toujours. On se trouve dans un pays dans lequel le respect de la vie de l'autre est
important, mais là cet élément est devenu complètement nié. Vous avez parlé de la frontière vie /
mort, pouvez vous développer ?
FB : vous touchez là un problème fondamental. Il faut de l'autre mais s'il n'est pas mon semblable je
ne peux pas le percevoir parce qu'il faut qu'il y ait de l'autre et du même en même temps pour avoir
un rapport. L'identification permet de réaliser ça : s'identifier à quelqu'un qui n'est pas moi, qui se
perçoit à la fois autre mais qui a des similitudes avec moi. Ce processus peut se rompre chez les
êtres humains. C'est le seul qu ne se contente pas d'être de son espèce. Un lion est un lion. Les êtres
humains peuvent s'identifier à n'importe quoi, des animaux, des dieux, des objets, ils peuvent
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réduire les autres à des choses. Donc il y un problème chez l'espèce humaine. C'est une espèce
ouverte, qui n'est pas constituée fermée. La constitution de l'humanité se fait par l'identification qui
peut se perdre dans certaines circonstances et produit des processus de dés-identification. Cette désidentification peut être une bonne chose, c'est le cas de l'enfant qui doit se dés-identifier de ses
parents, sinon il en reste une copie pâle. Lorsqu'on arrive à une dés-identification totale, l'autre
devient tout autre et je peux le massacrer.
Il existe un autre stade : l'in-identification.
J'ai fait un travail sur les testaments de ceux qui commettent les attentats suicides. Il existe un
moment où ils ne sont plus des être humains, ils sont devenus des êtres supérieurs qui vont
disloquer leur corps et celui des autres. Il n'a plus sa représentation de lui en humain et donc ni des
autres. Il a franchi une étape où il est devenu autre. La qualité de l'humain qui repose sur le rapport
de similitude avec l'autre peut se perdre dans certaines circonstances. Les circonstances historiques
peuvent favoriser ça. Comment expliquer comment l'Allemagne qui était un pays très civilisé a pu
produire autant de nazis ? Des éléments de discours peuvent conduire à l'in-identification. A ce titre
il faut que nous refusions de déshumaniser ces terroristes. On ne peut pas enlever à quelqu'un sa
filiation. C'est un acte de déshumanisation.
Public : Comment peut on pousser une personne à sortir de la dissimulation ?
Public : Tout le monde doit être concerné pour faire en sorte que ces jeunes ne voient pas l'autre
comme une bête. Je crois qu'il faut commencer dans les familles et stopper les discours selon
lesquels la religion musulmane est la mère des religions, que l'autre qui boit de l'alcool est un
animal, un être inférieur etc.
FB : il y a beaucoup de migrants qui se sentent coupables de leur exil qui ont le sentiment que c'est
une erreur à réparer. Un des moyens de ségréguer, c'est de se créer un pays différent du pays d'où
l'on est. Ils peuvent faire porter à la génération suivante des problèmes qu'ils n'ont pas réglés eux
mêmes. Les enfants portent les symptômes des parents. C'est pour ça qu'il faut travailler avec les
familles. Un jeune peut échapper, ça arrive, mais les parents ont une responsabilité par rapport à ça.
Sur la dissimulation, la réalité humaine est une réalité de dissimulation, heureusement. Comment
savoir ? C'est très difficile. Il faut respecter les semblants. Il faut attendre, écouter, se mettre en
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relation, peut être dira t il quelque chose ?
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