i REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO ENSEIGNEMENT SUPERIEUR, UNIVERSITAIRE ET RECHERCHES SCIENTIFIQUES « E.S.U.R.S » UNIVERSITE OFFICIELLE DE RUWENZORI «U.O.R. » B.P: 560 BUTEMBO FACULTE DE DROIT DEPARTEMENT DE DROIT PRIVE ET JUDICIAIRE ANALYSE DE L’INCRIMINATION DE L’INFRACTION TENTEE EN DROIT POSITIF CONGOLAIS Par : MUMBERE KINANGA Jackson Mémoire présenté et défendu en vue de l’obtention du Diplôme de Licence en Droit. Directeur : Charles KAKULE KALWAHALI Professeur Encadreur : Flavien KASEREKA KIZITO Assistant ANNEE ACADEMIQUE : 2013-2014 ii EPIGRAPHE « Commettre une infraction, c’est faire volontairement du Tort au mépris de la loi » (ARISTOTE) « Les actes délictueux sont, à l’instar des conduites humaines, des comportements psychologique, c’est-à-dire que les actes générateurs des crimes, s’impriment d’abord dans le psychique de l’individu avant de s’exprimer sous la forme du passage à l’acte criminel.» iii DEDICACES A toutes les familles KINANGA et MUTEMBE ; A nos parents qui nous ont aidé à emprunter toujours le chemin de l’effort permanent ; Pour tous les efforts et sacrifices consentis pour notre éducation ; A nos frères et sœurs ; A nos camarades étudiants ; A toutes nos connaissances ; Nous dédions ce travail. MUBERE KINANGA Jackson iv REMERCIEMENTS La rédaction du présent travail n’a été possible que grâce au concours moral et intellectuel des personnes à que nous voudrions ici rendre un hommage appuyé: Nous tenons à remercier de prime abord notre Dieu, le maître suprême de temps et de circonstance, de nous avoir permis, ainsi que notre œuvre scientifique de mémoire, de voir le jour. Nos remerciements vont ensuite à l’Université Officielle de Ruwenzori, pour nous avoir rendu aujourd’hui un produit fini à travers sa formation. A travers elle, nos sentiments de gratitude s’adressent plus particulièrement au Professeur KAKULE KALWAHALI Charles, en sa qualité de directeur du présent mémoire, mais également à l’assistant KASEREKA KIZITO Flavien, en sa qualité d’encadreur, qui, malgré leurs multiples occupations, ont accepté de contribuer à notre formation. C’est aussi le moment pour nous de faire hommage à tous les autres professeurs, chefs de travaux, assistants qui ont contribué, sans relâche, à notre formation universitaire. Si nous puissions un jour dire que nous avons été formés à l’UOR, c’est grâce à eux. Nous remercions nos parents, KASEREKA KOMBI et KAVIRA MUTEMBE, pour nous avoir montré le chemin de l’effort et de la patience ; dans toute action, ils se sont imposés de sacrifice afin de nous rendre utile. Nos remerciements s’adressent aussi à nos tuteurs KAMBALE KOMBI et KAVUGHO SIVIYIRWA ; grâce à eux, nous avons pu endurer les cinq années d’études universitaires à l’U.O.R. Que nos frères et sœurs, cousins et cousines, neveux et nièces, oncles et tantes trouvent ici, sans les citer nommément, l’expression de nos remerciements pour tout ce qu’ils ont fait pour la réalisation de ce travail. Nous remercions infiniment tous ceux qui n’ont ménagé aucun effort pour apporter le nécessaire à la réussite de ce travail. Que le bon Dieu leur accorde la joie, la paix et l’abondance. A vous tous qui nous êtes liés par la foi, et par toute sorte d’amitié, nous demandons d’accepter l’expression de nos très sincères remerciements. Nous remercions enfin, tous ceux dont nous avons dû malheureusement taire les noms, mais qui nous ont été d’une grande utilité pour la confection de ce mémoire. Nous sommes conscients que ces simples lignes de papier ne suffiront jamais pour récompenser leur incommensurable contribution. Mais si vous lisez ce travail, sachez qu’il est aussi votre œuvre. Sans vous, nous n’aurions sincèrement abouti à rien. Nous sommes fiers de vous remercier. MUBERE KINANGA Jackson v SIGLES ET ABREVIATIONS Al : Alinéa Art : Article B.C : Bulletin des arrêts d la cour de cassation Cass. : Cassation CPC : Code Pénal Congolais CPF : Code Pénal Français CRIM : Chambre Criminelle D.C : Dalloz critique D.D.H.C : Déclaration des Droits de l’Homme et de Citoyen D.P : Dalloz périodique FD : Faculté de Droit Idem : Dans la même ouvrage In : Dans In fine : A la fin J.C.P : Juris-Classeur Périodique J.O : Journal Officiel Kin : Kinshasa L.G.D.J : Librairie Général de Droit et Jurisprudence N° : Numéro Opc.cit : Dans l’ouvrage cité P : Page P.U.F : Presse Universitaire Française P.U.Z : Presse Universitaire du Zaïre R.D.C : République Démocratique du Congo R.S.C : Revue de Science Criminelle S. : Recueil Sirey T.F.C : Travail de Fin de Cycle U.C.G : Université Catholique du Graben U.O.R : Université Officielle de Ruwenzori U.O.S : Université Officielle de la Semuliki UCL : Université Catholique de Louvain UNKIN : Université de Kinshasa Vol (V) : Volume 1 INTRODUCTION I. Présentation du sujet Les affaires pénales sont glissantes, dit-on, car la condamnation amène le prévenu soit à la privation de la liberté, soit à la mort, soit au payement des dommages et intérêts. C’est pourquoi il est demandé au juge répressif d’avoir à part ses qualités scientifiques, le sens de l’humain et du social1. Après observation, il arrive fréquemment devant les juridictions de jugement, des personnes qui, dans le souci de commettre un forfait se trouvent soit empêchées après avoir posé quelques actes extérieurs de commencement d’exécution à la lumière du principe « la tentative est punie de la même peine qu’une infraction consommée » les cours et tribunaux condamnent ces personnes pour avoir ainsi tenté de commettre une infraction quand bien même que le résultat n’a pas été parachevé. Dans la pratique nous constatons que l’infraction tentée est soumise au même régime répressif que celle réellement consommée, selon le principe prescrit à l’article 4 du code pénal congolais qui dispose : « la tentative est punie de la même peine qu’une infraction consommée »2 C’est dans cette angle que nous estimons en ces jours impérieux de parler de : « l’Analyse de l’incrimination de l’infraction tentée en droit positif congolais ». II. ETAT DE LA QUESTION Les questions relatives au droit criminel intéressent la plupart de juristes de notre siècle. Nous avouons d’ores et déjà que beaucoup ont donné leur point de vue sur l’incrimination de la tentative. C’est pourquoi nous n’avons pas la prétention d’offrir une étude non pourvue d’emprunts. Ainsi, Raymond Saleilles, dans son ouvrage « l’individualisation de la peine », 1 R. BANGOBANGO, Appréciation souveraine du juge dans la détermination de la proportionnalité entre l’attaque et la riposte : cas d’une victime-agresseur originel, TFC inédit, U.C.G, Fac de Droit, 2001-2002, p.24. 2 Article 4 du décret du 30 janvier 1940 portant code pénal congolais tel que modifié et complété à ce jour par la loi N° 06/018 du 20 juillet 2006, JO.RDC, Numéro spécial, 47 eme édition. 2006, p6. 2 s’est intéressé à la conséquence de la conception subjective du code pénal qui insiste sur l’importance de la puissance de nuire et l’intention criminelle de celui qui n’a pu réaliser son projet qu’à raison des circonstances extérieures.3 L’auteur de la tentative se voit appliquer les mêmes règles que l’auteur de l’infraction consommée. On pourrait se demander si l’échelle des peines infligées est proportionnée aux méfaits sanctionnés mais en pratique il semble que le juge puisse modérer la peine prononcée à l’égard de l’auteur de la tentative.4 L’article 4 du code pénal congolais considère qu’une tentative, pour être punie, doit notamment avoir connu un commencement d’exécution. A ce propos Mulambulya dans son travail de fin de cycle s’est demandé quand est-ce qu’on peut dire qu’une infraction a connu un commencement d’exécution, car il est claire que dans le code, le législateur n’a pas été précis5. Cette imprécision laisse aussi bien à la jurisprudence qu’à la doctrine de se positionner derrière telle ou telle tendance. La contribution de nos devanciers nous a largement permis d’aborder la question qui fait l’objet de la présente étude. C’est pourquoi, quant à nous, nous nous sommes plus intéressé à l’analyser de l’incrimination de l’infraction tentée en Droit positif congolais pour permettre de mettre à jour un sujet qui a tant été oublié par la société, car la peine prononcée à l’égard du délinquant qui a tenté de commettre un forfait ne doit être établie que si elle est nécessaire, c’est-à-dire si elle est proportionnelle à la gravité portée par l’infraction dans la société. Dans le souci d’éviter de nous écarter de notre champ d’étude, la pertinence de poser quelques questions s’avère indispensable à titre de problématique, auxquelles nous nous efforçons d’apporter les réponses provisoires en guise d’hypothèse. R. SALEILLES, L’individualisation de la peine, Ed Eres, Paris, 1989, p170 P. GARRAUD, Précis de Droit Criminel, 15e édition, Paris, 1934, p.194. 5 P. MULAMBULYA, Analyse du régime répressif en droit congolais : cas de menace, TFC inédit, U.O.S, FAC de Droit, 2007-2008, p.11. 3 4 3 III. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES 1. PROBLEMATIQUE Il est de justesse que tout auteur d’une œuvre scientifique puisse poser en avance certaines questions qui font l’objet de sa réflexion aux quelles il entend proposer des pistes des solutions ; c’est la problématique de tout travail scientifique. La problématique est alors définie comme : « l’expression ou la préoccupation majeure qui circonscrit de façon précise et déterminée la clarté absolue des dimensions essentielles de l’objet et l’étude que le chercheur se propose de mener »6. Elle est en outre définie comme une approche ou une perspective théorique que l’on décide d’adopter pour traiter un problème posé à la question du départ7. L’article 4 du code pénal congolais prévoit, à son alinéa 2, que « la tentative est punie de la même peine que l’infraction consommée »8. Nous avons constaté que cela pose problème. Le législateur congolais n’a pas fait allusion à la notion de proportionnalité des peines aux faits pénalement condamnés. De notre part, nous ne voyons pas une analogie directe entre ces deux infractions, car la résolution de commettre une infraction n’est pas égale à l’infraction achevée. Après avoir constaté cet aspect des choses dans l’interprétation dudit article, plusieurs questions nous sont venues en esprit concernant la tentative punissable. Quel est le souci du législateur congolais en prévoyant des sanctions égales aux auteurs ayant commis l’infraction tentée et ceux qui l’ont réellement consommée ? Autrement dit, la tentative a-t-elle le même degré de gravité que l’infraction consommée pour qu’elle soit punie de la même peine que l’infraction consommée ? Quand est-ce qu’on peut dire qu’une infraction tentée a connu un commencement d’exécution ? 6 WENU BECKER, Recherche scientifique, théorie et pratique, Presses Universitaires de Lubumbashi, 2004, p.13. 7 QUIVY et VAN CAMES HONDT ; Manuel de recherche et sciences sociales, Paris, Bordas, 1998, p85 8 Code pénal congolais, article 4, op.cit. 4 Telles sont des questions aux quelles la présente étude se propose de donner des éléments des réponses. Mais quelles en sont les hypothèses ? 2. HYPOTHESES L’hypothèse est définie par Rongere comme étant la proposition des réponses que l’on se pose à propos de l’objet de la recherche formulée en des termes tels que l’observation et l’analyse puissent fournir une réponse.9 L’hypothèse est une réponse provisoire dont on vérifiera le bien ou le mal fondé de la question que l’on se pose10. Au regard de ce qui précède, nous émettons les hypothèses suivantes : 1. L’incrimination de l’infraction tentée constituerait une manière de lutter contre la criminalité et donnerait une leçon et un moyen pour décourager les délinquants potentiels qui n’ont encore abouti au résultat. C’est pourquoi l’application du principe « la tentative est punie de la même peine qu’une infraction consommée » n’est pas à abroger, mais à modifier car le résultat de l’infraction tentée n’est pas le même que celui de l’infraction consommée. Il ya lieu d’accorder des larges circonstances atténuantes à celui qui a tenté de commettre l’infraction. 2. Il semblerait qu’on considère comme acte de commencement d’exécution de la tentative, celui posé par une personne vivante et pénalement responsable, avec une intention criminelle, irrévocable qui tend directement et immédiatement à l’accomplissement du crime. IV. CHOIX ET INTERET DU SUJET Pour le professeur Ngasha, tout chercheur doit mettre en exergue l’intérêt de son sujet de recherche et cela à trois niveaux ; niveau scientifique, social et personnel. Pour la science, l’enseignement universitaire ne consiste pas seulement à transmettre des connaissances théoriques et pratiques déjà 9 RONGERE, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 1971, p.220. M.DUVERGER, Méthode de sciences sociales, Paris, PUF, 1961, p.50. 10 5 constituées. Il consiste aussi à initier les étudiants à l’organisation de la recherche en vue de la production des connaissances scientifiques nouvelles. C’est pour cela que ce travail constitue un ajout aux travaux scientifiques existant en la matière. Il ouvre aussi une porte aux chercheurs futurs qui peuvent vouloir abonder dans notre sens, celui d’analyser l’incrimination de l’infraction tentée. Sur le plan social ou pratique, notre travail va contribuer à la promotion de la vie sociale, en ce sens qu’il constitue une interprétation, voire même une critique du régime répressif de l’infraction tentée. Par ce travail nous souhaiterions proposer au législateur de modifier la peine à la personne qui a tentée de commettre une infraction et non pas la condamner comme celle qui a réellement consommée l’infraction car le droit pénal est une discipline sensible qui met en jeu les droits les plus fondamentaux de l’homme : la vie, la liberté, l’honneur,… Personnellement, ce travail nous permettra de connaître, à partir de notre recherche le contenu de l’article 4 du code pénal congolais et le pourquoi d’égalité des peines à la personne qui a tenté de commettre une infraction et celle qui l’a complètement consommée. C’est dans ce souci que nous avons voulu apporter notre contribution à la question d’actualité de l’analyse de l’incrimination de la tentative de manière que ce travail soit pour les futurs chercheurs un manuel d’information sur l’infraction tentée que le juge punit sévèrement comme si l’auteur a abouti au résultat cherché. Les autres chercheurs, soucieux d’apporter les amendements sur le régime répressif de l’infraction tentée en droit congolais peuvent aussi s’inspirer du présent travail de manière que le législateur soit persuadé davantage que le droit pénal est un droit protecteur, un droit de resocialisation des délinquants dans la société, qui expose à un avenir désespéré à l’encontre de celui qui a réalisé le résultat, c’est-à-dire parachevé le dessein cherché par lui. 6 V. METHODES ET TECHNIQUES UTILISEES 1. METHODE Tout travail scientifique exige l’usage d’une démarche méthodique qui puisse permettre au chercheur de collecter, d’interpréter et d’analyser les données qu’il aura recueillies. Grawitz et Pinto, définissent la méthode comme : « l’ensemble d’opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre la vérité qu’elle poursuit, la démontre et la vérifie »11. Dans le cadre du présent travail, nous avons estimé que notre objectif ne pouvait être atteint qu’à la suite de l’utilisation de la méthode exégétique qui consiste à l’interprétation et l’explication des règles de Droit, d’où particulièrement le seul contenu des lois. L’utilisation de cette méthode nous permettra d’interpréter les textes des lois et va nous aider à comprendre les dispositions légales du droit commun régissant le régime répressif de l’infraction tentée. 2. TECHNIQUES La méthode doit s’appuyer sur certain nombre des procédés qui ne sont autres que les techniques de recherche, définit d’ailleurs comme étant : « un outil, un instrument au moyen concret utilisé par le chercheur pour récolter ou traiter les informations »12. Ainsi, l’usage efficient de la méthode susmentionnée nous oblige à faire recours à la technique documentaire qui nous permet de compulser les différentes publications de nos devanciers. M. GRAWITZ et PINTO, Méthode en sciences sociales, cité par J. NDAGHALA dans le cours d’initiation à la recherche scientifique, UOR, 2009-2010, p.9. 12 M. GRAWITZ et PINTO, Méthode en sciences sociales, cité par J. NDAGHALA, op cit p.23. 11 7 VI. DELIMITATION DU SUJET Notre travail ne présente pas d’intérêt d’être limité dans le temps, mais plutôt dans l’espace. Le champ spatial de notre travail est l’étendue du territoire de la République Démocratique du Congo où la loi sous examen est appliquée. VII. SUBDIVISION DU TRAVAIL Hormis l’introduction et la conclusion, le présent travail est subdivisé en deux grands chapitres: L’Analyse de la tentative punissable en droit congolais (chapitre premier) et le fondement de punir la tentative comme une infraction consommée et le cas de participation criminelle (chapitre deuxième). 8 CHAPITRE PREMIER ANALYSE DE LA TENTATIVE PUNISSABLE EN DROIT CONGOLAIS L’énoncé classique « pas d’infraction sans activité matérielle » est l’un des principes fondamentaux de notre législation pénale. Le droit pénal congolais admet la répression de certains comportements bien que l’infraction n’ait pas été conduite jusqu’à son terme. Il ya bien volonté délictuelle mais il n’ya pas accomplissement total de l’élément matériel13. Il arrive alors que le législateur rend punissable la situation déjà atteinte à un certain stade alors que tous les éléments constitutifs de l’infraction visée ne sont pas encore réunis. Le législateur considère qu’à ce stade la dangerosité du délinquant reste la même, même si celui-ci n’a pas atteint son but à la suite d’une circonstance indépendante de sa volonté. Ainsi, l’étude de l’analyse de la tentative punissable en droit congolais, nous conduira à parler de la notion sur la tentative punissable (I) et des conditions de la tentative punissable (II). SECTION I : NOTIONS SUR LA TENTATIVE PUNISSABLE La tentative est une notion importante car elle fixe la limite entre les comportements qui peuvent faire l’objet de poursuites pénales et ceux qui ne le peuvent pas14. La pensée criminelle est un mouvement psychologique, elle échappe à toute responsabilité. Tant que cette conception ou cette résolution reste renfermée dans la conscience, il ne saurait être question de la punir car elle est encore inconnue du pouvoir social. En effet, la loi sociale ne règle que les rapports des hommes entre eux, et ces rapports ne peuvent être troublés que par des actes. 13 P. GARRAUD, op.cit, p.208. J. VERHAE GEN ; Cours de Droit pénal et procédure pénale, notes d’Etudiants, UCL, Louvain-la-Neuve, 1977-1978, p117. 14 9 Il est impérieux de définir la tentative d’une infraction ( §1) avant de parler sur les différentes formes des tentatives punissables prévues dans l’article 4 du code pénal congolais (§2). §1. DEFITION DE LA TENTATIVE La plupart des infractions graves supposent toute une activité complexe, parfois longue dans le temps et qui conduit le délinquant à poser les actes, à réunir les moyens matériels et humains devant permettre la réalisation du résultat prohibé par la loi pénale. Cette série d’acte, d’attitudes et des faits constituent ce qu’on appelle « l’iter criminis » ou le chemin vers le crime15. La question qui s’est posée au législateur était de savoir s’il ne fallait punir que le délinquant qui est allé jusqu’au bout de son forfait, ou plutôt, s’il était aussi possible d’intervenir lorsque le délinquant n’était qu’à certains agissements tendant vers la réalisation du crime. Le législateur congolais, à l’instar de la plupart des codes pénaux actuels, a opté pour la dernière solution. Cependant une autre question demeure en punissant les actes tendant à la réalisation du crime, quelle étape faut-il prendre en compte et à quelle condition ? C’est ce genre de problème que nous voudrions résoudre dans ce paragraphe consacré à la définition de la tentative punissable. L’institution de la tentative punissable a été imaginée pour faire face à la situation crée par l’agent dont l’activité criminelle a été inachevée, n’a pas conduit au résultat qu’il recherchait. Il faut relever que la punissabilité de la tentative contrarie a priori le principe de légalité, puisqu’elle intervient alors qu’un des éléments constitutifs de l’infraction manque16. C’est en vue de pallier à cette atteinte à un principe fondamental, que la loi définie la tentative L’article 4 du code pénal congolais prévoit ce qui suit : « il ya tentative punissable lorsque la résolution de commettre l’infraction a été 15 NYABIRUNGU mwene SONGA, Traité de droit pénal général congolais, 2e ed, Editions universitaires africaines, Kinshasa, 2007, pp. 208-215. 16 NATHALIEHUSTIN-DENIES et DEAR MANN, l’infraction inachevée en droit pénal comparé, Bruylant, Bruxelles, 1997, p.240. 10 manifestée par des actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution de cette infraction et qui n’ont été suspendus ou qui n’ont manqué leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur ».17 Il ressort de cette définition qu’il ya tentative punissable lorsque l’infraction projetée prévue par la loi s’est manifesté par un commencement d’exécution, et que celle-ci n’a été suspendue ou qu’elle n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur. On est d’accord que la tentative doit se manifester par des actes extérieurs qui acheminent vers l’infraction. Pour que la tentative existe, il faut que le délinquant ait accompli un acte rentrant dans la définition telle qu’elle est donnée par la loi. Par exemple que le voleur ait mis la main sur l’objet qu’il se propose de soustraire, que le meurtrier ait porté le premier coup, celui qui est surpris entrain de forcer le meuble dans lequel se trouve la somme d’argent ou l’objet qu’il veut soustraire se rend coupable sans contestation possible d’une tentative de vol, comme celui qui est arrêté au moment où il se précipite un poignard à la main sur sa victime se rend coupable d’une tentative de meurtre. La définition légale indique ou nous montre qu’il ya deux formes de tentatives punissables. §2. FORMES DES TENTATIVES PUNISSABLES PREVUES DANS L’ARTICLE 4 DU CODE PENAL Après analyse de l’article précité, il ressort qu’il existe deux sortes de tentatives punissables : Celle qui manque son effet parce qu’elle a été interrompue par une cause extérieur (A) et celle qui manque son effet alors que tous les actes d’exécution ont été réalisés (c’est l’hypothèse de l’infraction manquée) (B) 17 Article 4 du code pénal congolais. 11 A. La tentative suspendue ou interrompue La route qui mène à l’accomplissement d’une infraction est jalonnée par trois étapes : d’abord la pensée criminelle ; la résolution criminelle et enfin l’exécution. Le droit pénal ne punit pas en principe le simple projet tant qu’il ne se manifeste pas par des actes extérieurs. De même, les simples actes ne sont pas eux aussi punissables, à moins qu’ils ne constituent eux-mêmes un délit (tel le port d’une arme prohibée). Le criminel ne devient punissable que quand il entre dans la phase d’exécution de son projet. Il devient punissable avant que l’exécution de son projet soit achevée : c’est à cet acte d’exécution d’une infraction non complètement achevée qui constitue, selon l’article 4 du code pénal, la tentative. On considère comme infraction : « toute tentative manifestée par un acte tendant à l’exécution d’un crime et impliquant sans équivoque l’intention irrévocable de son auteur de commettre l’infraction, si elle n’a pas été suspendue ou si elle n’a manqué son effet que par les circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ». La tentative est considérée comme infraction en elle-même » car le même article à son alinéa 2e prévoit que la tentative est punie de la même peine que l’infraction consommée. Comme nous venons de le dire précédemment, la tentative se présente selon l’esprit de la loi sous deux formes différentes ; elle peut être inachevée ou achevée. Elle est inachevée lorsque l’agent n’a pu mener à leur fin les actes qu’il a entrepris ; voulant tuer, il est empêché de tirer sur sa victime, parce que son arme est relevée par un tiers. Dans ce cas là nous dirons que l’auteur est interrompu ou suspendu par une cause extérieure à sa volonté. La tentative est achevée quand l’exécution étant complète, le résultat voulu n’a pas cependant été atteint : Ainsi le meurtrier a tiré, mais sont coup a dévié. Dans le premier cas, l’infraction est tentée ; elle est manquée dans le second.18. Ainsi, Garraud distingue la tentative simple ou délit tenté, quand l’infraction est imparfaite au point de vue de son exécution 18 P. GARRAUD. Op cit. 12 de la tentative complète ou délit manqué, c’est-à-dire quand elle est imparfaite au point de vue de son résultat.19 B. L’infraction manquée ou Délit infructueux Garraud dit que l’infraction manquée est une tentative infructueuse parce que l’agent a accompli tous les actes d’exécution sans parvenir au succès final, au résultat escompté20. Il ajoute en disant que la tentative infructueuse recouvre deux hypothèses : l’infraction manquée et l’infraction impossible. L’hypothèse de la tentative manquée est prévue par l’article 4 du code pénal congolais qui prévoit ce qui suit : « il ya tentative punissable lorsque la résolution de commettre l’infraction a été manifestée par des actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution de cette infraction et qui m’ont manqué leur effet que par des circonstances de la volonté de l’auteur ». L’infraction manquée diffère de l’infraction tentée ou suspendue en ce sens que les actes extérieurs n’ont pas été interrompus. Tous les actes incriminés par la loi ont été complètement exécutés, cependant, le résultat n’a pas été atteint par suite d’une circonstance fortuite. Par exemple le meurtrier a tiré mais son coup a dévié. L’infraction manquée n’est concevable que pour les infractions requérant pour leur consommation un résultat déterminé. Elle est donc exclue en cas d’infraction formelle21. Le délit manqué remplit deux conditions : - L’accomplissement de tous les actes d’exécution et - L’échec de ces actes, non imputable à l’agent L’action s’est déroulée dans sa totalité mais le résultat recherché par l’auteur n’a pas pu être atteint. On considère dans ce cas que la tentative est punissable car l’échec ne peut pas être assimilé à une cause de désistement volontaire ; l’agent a manifesté sont hostilité aux valeurs de la 19 Idem. 20 Idem. 21 A. MWANAMOLO, Cours de Droit pénal général, inédit U.O.R, G2 2010-2011, p. 59. 13 société.22 Ainsi il ya délit manqué dans le cas d’un meurtrier maladroit qui manque sa victime ou quoique mortellement blessée, la victime est sauvée par la médecine23. Il se sera puni pour empoisonnement si après avoir administré du poison à sa victime, lui fait un contre poison qui la sauve. Il sera puni car l’infraction d’empoisonnement est consommée lorsqu’on administre volontairement des substances qui peuvent donner la mort ou des substances qui, sans être de nature à donner la mort, peuvent, cependant, gravement altérer la santé. Le fait d’administrer du contre poison à sa victime n’est qu’un repentir actif et en principe, le repentir laisse subsister de façon entière la responsabilité pénale du délinquant. Ce n’est que lorsque l’infraction a débuté dans son exécution qu’il est utile de s’interroger sur la question du désistement, c’est-à-dire avant que l’infraction soit consommée. Rappelons ici que l’ « error personae » ne constitue pas un délit manqué24. Si l’auteur, voulant atteindre x, il atteint y qu’il prenait pour x, le meurtre sera consommée25. Dans l’hypothèse de « l’aberratio ictus » l’auteur rate sa cible par maladresse et atteint une autre personne qui meurt par exemple, ce n’est pas non plus une infraction manquée26 Cette hypothèse de l’ « aberatio ictus » se réalise lorsque le mal que l’on avait l’intention de faire à une personne déterminée est tombé sur une autre personne que l’agent n’avait pas en vue27. A ce stade la doctrine congolaise estime dans ce cas que, l’auteur sera poursuivi pour deux infractions en concours idéal, l’une intentionnelle et l’autre non intentionnelle. Si par exemple : dans l’intention de tuer Joseph, Jacques tire un coup de balle et atteint Jacob. Si Jacob est blessé ou tué, Jacques sera poursuivi pour homicide ou coup et blessures 22 Idem. 23 A. PROTHAIS, Tentative et Attentat, Paris, éd LGDJ, 1985, p. 366. 24 MWANAMOLO, Op. Cit, p. 59. 25 Idem. 26 Ibidem. 27 J.J. HAUS, cité par NYABIRUNGU, Droit pénal Zaïrois, éd Droit de société, DES, Kinshasa, 1989-1995. 14 par imprudence sur la personne de celui-ci et pour tentative de meurtre sur la personne de Joseph, victime initialement prévue. Si Joseph et Jacob sont tués, Jacques sera poursuivi pour homicide volontaire sur la personne de Joseph et homicide involontaire sur la personne de Jacob28. Il sied de signaler le danger accru de cette infraction que l’auteur a eu même le temps de tiré pour dire que l’infraction a manqué sur la personne visée mais a atteint la personne non visée par l’auteur. Pour qu’une tentative soit réalisée, il faut que l’agent commette une action en rapport direct avec la consommation de l’infraction, ce qui n’est pas le cas en matière d’infraction impossible, qui ressemblerait à l’infraction manquée mais « non punissable en droit congolais » mais que la jurisprudence Française réprime en l’assimilant à l’infraction tentée29, on estime que l’auteur de l’infraction impossible manifeste aussi un caractère dangereux. 1. L’infraction impossible La question dite du délit impossible ou de la tentative impossible divise la doctrine et la jurisprudence. On peut définir l’infraction impossible comme étant celle dont le résultat recherché par l’auteur n’a pu être atteint soit par manque d’objet ou soit par l’inefficacité des moyens utilisés30. Notons que c’est une tentative non susceptible de résultat. L’infraction est irréalisable par exemple du fait de l’inexistence de l’objet de l’infraction. Par exemple on essaie de tuer quelqu’un qui est déjà mort ou de l’inefficacité des moyens employés. Quand par exemple on essaie de tuer quelqu’un avec une arme non chargée. Notons qu’il existe deux types d’impossibilités : l’impossibilité absolue et l’impossibilité relative. La première est celle dont les moyens utilisés par l’auteur sont radicalement impuissant à réaliser une infraction. Par exemple : vouloir expulsé une grossesse par l’usage de l’aspirine. 28 SHAKIRA, Notes de cours des étudiants, FD/Kis, 2003, cité par A. MWANAMOLO, op cit, p. 77. 29 Cour de cassation, chambre criminelle, du 15 Mars 1994, 93-81. 607, inédit, cité par A. VITU, G et LAVASSEUR ; le meurtre d’une personne déjà morte, Paris, 1986, p. 204. 30 A. MWANAMOLO, Op Cit, p. 59. 15 La deuxième est celle dont, l’agent qui, en voulant commettre un fait infractionnel confond les moyens. Donc les moyens en soi, étant efficace à donner la mort mais par imprudence, le criminel le confond31. Par exemple : un criminel, voulant tuer x par des substances chimiques déjà mis dans une bouteille de la bière, l’agent par imprudence donne à son cible une bouteille de turbo. S’il n’ya pas eu consommation de l’infraction ce n’est pas en raison d’une interruption volontaire ou non de l’action mais en raison de la survenance d’un événement. La question qui se pose est celle de savoir si la tentative impossible est punissable ? - Pour la théorie objective, l’infraction impossible n’est pas punissable parce que le résultat recherché par l’agent est radicalement irréalisable, les moyens utilisés ne peuvent pas produire le résultat et qu’il n’ya pas de préjudice ni à la société ni à la victime éventuelle. La thèse de l’impunité de l’infraction impossible est soutenue par des auteurs libéraux Feuerbach, Rossi, …. Qui estiment que la sanction de l’infraction impossible est inutile car pas de trouble causé à l’ordre public.32 La théorie subjective, quant à elle, préconise la répression systématique de l’infraction impossible : il faut punir toutes les résolutions criminelles lorsqu’elles se manifestent par des actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution de l’infraction projetée même si l’impossible matériel est radical, car le crime poursuivi est en soit possible33. La thèse de la répression de l’infraction impossible est soutenue par Saleilles, Garofalo, de Vabres,… ces auteurs Martèlent en disant que bien que le délit soit impossible à atteindre le résultat dont on n’a en vue, l’exécution d’un acte est contraire aux bonnes mœurs et constitue une véritable dangerosité sociale, un état d’esprit hostile aux valeurs de la société.34 31 R. KASEREKA, La fonction préventive de la peine en droit congolais, Mémoire inédit, U.C.G, 2003-2004, p. 23. 32 .P. 33 A. VITU, et G. LAVASSEUR, Op cit, p. 80. 34 .C.G. POKAM et alli, la tentative en matière pénale, www. Kalata.com. 16 P.BAUZAC, Traité de Droit pénal et criminologie, Tome I, 2e édition, Paris, Librairie Dalloz, 1970, p.334 La tendance subjective en matière d’infraction impossible tend à mettre en relief le caractère dangereux de tout individu, qui traduit une intention criminelle. Ils ajoutent en disant que si l’auteur n’a pas atteint le résultat, c’est en raison des circonstances qu’il ignore, qui fond obstacle à ce qu’il ne puisse pas atteindre son but. S’agissant de la théorie intermédiaire, la première punit l’impossibilité relative tandis que la seconde rend punissable l’impossibilité absolue. Exemple : Tirer des coups de feu dans une pièce dont la victime est momentanément absente (impossibilité relative) ou tenter de donner la mort à un cadavre (impossibilité absolue). Pour toutes ces tendances concernant la tentative punissable en général, le droit positif congolais adopte la théorie subjective qui, quant à elle, cherche à réprimer toutes les intentions criminelles qui sont manifestées par un commencement de l’exécution de l’infraction dont on a en vue. C’est pour cela que, d’une façon à une autre l’hypothèse de l’infraction impossible est prévue à l’article 4 du code pénal qui stipule ce qui suit : « Il ya tentative punissable que lorsque la résolution de commettre une infraction a été manifestée par les actes extérieurs qui forment un commencement de l’exécution de cette infraction et qui n’ont été suspendu ou qui n’ont manqué leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur ». Nous sommes convaincus que l’auteur de l’infraction impossible tente de commettre une infraction et il est animé par une intention criminelle, celle de commettre un fait infractionnel déjà prévu dans le code pénal congolais. Le législateur congolais prend en considération, non pas le résultat de l’infraction, mais la perversité de son auteur. L’infraction impossible est aussi socialement grave puisqu’elle relève le caractère dangereux et l’intention criminelle de celui qui l’a projetée ; autrement dit l’exécution d’un acte constitue une véritable dangerosité sociale, un état 17 d’esprit hostile aux valeurs protégée de la société35. On démontre toujours le caractère grave de l’infraction tentée alors que l’infraction impossible est autant dangereuse. Il est parfaitement rationnel de dire, avec la chambre criminelle, que ce qui ne peut être consommé peut cependant être tenté, en d’autres termes qu’un commencement d’exécution est logiquement concevable et punissable, malgré le fait que la victime soit déjà morte à l’insu du coupable, ce qui n’est qu’une circonstance indépendante de la volonté de ce dernier36. Le législateur congolais pouvait accorder à l’auteur de la tentative des larges circonstances atténuantes au lieu de lui punir comme l’auteur qui est allé jusqu’au bout. Il est probable que les troubles publics causés par le tentateur sont moins graves que par rapport à ce dernier. Certaines législations prévoient une peine diminuée par rapport à celle qui est retenue pour l’infraction consommée. Ainsi, le code pénal suisse prévoit l’atténuation de la peine en cas d’infraction tentée à son article 22 alinéa 1. Il prévoit ce qui suit : « le juge peut atténuer la peine si l’exécution d’un crime ou d’un délit n’est pas poursuivie jusqu’à son terme ou que le résultat nécessaire à la consommation de l’infraction ne se produit pas ou ne pouvait pas se produire »37. En déclarant punissable, toute tentative en droit congolais pousserait elle-même le malfaiteur à l’exécution complète de l’infraction car pour la tentative on punit le délinquant pour ce qu’il a voulu faire plutôt que pour ce qu’il fait. Nous pensons avoir parlé de la notion de la tentative punissable mais qu’en est-il alors de ces conditions pour qui elle soit punissable ? 35 R. SALEILLES, at alli, Essai sur la tentative et plus particulièrement sur la tentative irréalisable, 2 e éd, Paris, 1897, p. 357. 36 A. VITUet G. Lavasseur, le meurtre …d’une personne déjà morte, cour de cassation (chambre criminelle), Paris, Janvier 1986. 37 Voir article 22 du code pénal suisse du 21 décembre 1937. 18 SECTION II : LES CONDITIONS DE LA TENTATIVE PUNISSABLE Nous avons tantôt dit que la plupart des infractions graves supposent toute une activité complexe, parfois longue dans le temps et qui conduit le délinquant à poser des actes sans lesquels l’infraction ne peut être poursuivie. Ce processus criminel, pense aussi Nyabirungu38 implique plusieurs activités, notamment la phase de la conception intérieure du dessein criminel, la conviction profonde que se fait l’agent sur l’utilité et même l’opportunité de son acte, la préparation matérielle de cet acte criminel ainsi que son exécution proprement dite. Ainsi, il ya des conditions sine qua non pour rendre une tentative punissable : commencement la d’exécution résolution (§2) ainsi criminelle que (§1), l’absence l’existence de d’un désistement volontaire (§3). §1. LA RESOLUTION CRIMINELLE La résolution criminelle est l’intention de délinquer. Cette dernière est un élément essentiel de la tentative punissable. On ne peut donc concevoir une tentative non intentionnelle39. L’intention est la conscience et la volonté d’accomplir ou de s’abstenir d’accomplir un acte. En droit pénal, on parle alors de dol. La résolution criminelle est l’intention de commettre un acte que l’on sait être interdit par la loi. La résolution criminelle doit être déterminée. Il faut que l’agent ait eu le projet de commettre un meurtre, un vol, un viol, … Jean- Paul Doucet définit la résolution criminelle comme une décision prise par un individu, après délibération en son for intérieur, de commettre l’infraction à laquelle il songe depuis quelque temps. Elle précède l’accomplissement des actes préparatoires et plus encore le commencement d’exécution40 38 NYABIRUNGU Mwene SONGA, op cit, p159. J.J. HAUSS, op cit, N°431. 40 J.P. DOUCET, « le jugement pénal », 3eéd. N°1, Paris, 1784, p.96. 39 19 Si l’on ne parvient pas à prouver qui en exécutant ce fait l’agent a eu le dessein d’accomplir tel crime, quoique l’auteur veut agir dans une intention coupable, le crime qu’il a voulu exécuter peut demeurer incertain, parce que le fait étant susceptible d’explication différente ne manifeste pas un projet criminel déterminé41. Illustrons ceci par un exemple : un cuisinier professionnel se rend au marché et se procure notamment du poison qu’il souhaite pulvériser dans la nourriture de son patron, qu’il veut tuer par empoisonnement. Et avant qu’il ne pulvérise ce poison dans la nourriture, donc pendant qu’il prépare cette nourriture, le maître de la maison, faisant un tour dans la cuisine, découvre le poison qu’il connaît pour tant bien. Pour quelle infraction ou tentative faudra-t-il l’incriminer ? On ne peut pas poursuivre ce cuisinier pour empoisonnement car il n’a pas effectivement consommé cette infraction encore moins pour tentative d’empoissonnement42. Est-ce que le fait d’acheter ou de se procurer du poison est une infraction ? De l’analyse minutieuse et intégrale du code pénal congolais, il n’y a aucune disposition qui incrimine, ni implicitement ni explicitement le fait de se procurer du poison. La résolution criminelle sera déterminée par le fait lui-même d’aveu de l’agent ou les circonstances de l’espèce. En somme, la résolution criminelle ne suffit pas à elle seule pour rendre la tentative punissable mais faudra-t-il qu’il ait un commencement d’exécution ? §2. L’EXISTENCE D’UN COMMENCEMENT D’EXECUTION La résolution criminelle qui reste cachée ne relève que de la justice « divine ». Il appartient qu’à Dieu de sonder les consciences confidentielles. L’auteur peut le communiquer à une autre personne, dans le but d’obtenir leur approbation, de les consulter sur les moyens d’exécution. Cependant, même si ce projet est prouvé par témoins ou par écrit, son 41 J.J. HAUSS op cit, N°433. A. PROTHAIS, Tentative et Attentat, Paris, éd. LGDJ, cité par P. AKELE, cours de Droit pénal spécial, FD, Unkin, 2001-2002, p. 82 42 20 auteur échappe à toute responsabilité pénale car la loi ne punit pas le dessein de commettre un crime bien qu’il soit constaté43. En effet, comme nous l’avons dit, la loi sociale ne règle que les rapports des hommes entre eux et ces rapports ne peuvent être troublés que par des actes. Donc la résolution criminelle ne prend place dans le concept de tentative que pour autant qu’elle soit extériorisée par des actes matériels constituant un commencement d’exécution de l’infraction que l’agent a projeté. La loi ne définit pas malheureusement ce qu’elle entend par le commencement d’exécution et il n’existe pas un critère qui permet de le distinguer des actes préparatoires. Selon Garraud, il ya commencement d’exécution si l’acte accompli par l’agent tend « directement et immédiatement à la perpétration du crime ou du délit. L’acte accompli comme commencement d’exécution univoque, c’est-à-dire c’est-un acte qui ne peut s’expliquer que par l’intention criminelle de son auteur, alors que l’acte préparatoire est équivoque, c’est-à-dire susceptible de diverses interprétations »44. Le commencement d’exécution est donc le moment où le droit pénal peut intervenir pour sanctionner un individu qui tente de commettre une infraction, il est l’instant précis où débute l’infraction ou la tentative d’infraction. Cette définition du commencement d’exécution ne permet pas toutefois de dégager le critère qui sépare les actes préparatoires des actes d’exécution. Dans cette recherche de critères deux tendances s’opposent : l’une envisageant le commencement d’exécution d’un point de vue purement matériel et l’autre l’envisage d’un point de vue psychologique. a. La tendance objective D’après les partisans de cette tendance, il y a commencement d’exécution lorsque l’agent a commis un des faits qui figurent parmi les éléments constitutifs de l’infraction. 43 P. GARRAUD, op cit, p2 44 Idem. 21 Dans ce concept objectif, un acte ne peut être considéré comme formant l’élément matériel de la tentative que s’il réunit les deux conditions suivantes : - il faut que cet acte présente un rapport direct et immédiat avec l’infraction que l’agent a en vue, - que ce rapport résulte de l’acte lui-même Si nous appliquons la théorie à l’infraction de vol, par exemple, nous dirons qu’il y a commencement d’exécution lorsque l’agent pose la main sur le bien convoité et s’apprêter ainsi à se l’approprié45. Par contre, s’il introduit sa main dans la poche de sa victime, on peut retenir la tentative punissable même si l’acte ne figure pas parmi les éléments constitutifs du vol car en introduisant la main dans la poche, l’intention était de voler mais par imprudence, il croise vide la poche de sa victime, ou en voulant toucher la poche, il ya quelqu’un qui intervient, c’est-à-dire un élément extérieur de sa volonté ou une circonstance ignorée par l’agent, constitue un obstacle pour que le fait soit consommé46. Ici, le commencement d’exécution du vol peut exister, alors même qu’il n’y a pas eu encore soustraction. De même, il faudrait considérer comme commencement d’exécution d’une infraction, le fait de croiser un criminel escaladé un mur d’une clôture ou l’effraction d’une porte car ces actes révèlent une intention criminelle et ils aggravent l’infraction de vol47. Comme dit précédemment, le commencement d’exécution requiert deux éléments l’un objectif, celui de la proximité de l’acte matériel d’exécution de la commission de l’infraction et un élément subjectif qui est l’intention irrévocable de commettre l’infraction. 45 M.S. NYABIRUNGU, Droit pénal Zaïrois, Kinshasa, Editions Droit et société « DES », p. 109. 46 Idem. 47 M. MERLER, Droit pénal complémentaire, Paris, PUF, 1957, PP. 152-153. 22 b. La tendance subjective Pour les tenants de cette théorie, l’acte préparatoire est un acte équivoque qui laisse sans réponse la question de savoir si l’agent est animé d’une résolution criminelle et laquelle infraction il veut commettre48. Tandis que le commencement d’exécution est un acte univoque qui révèle la volonté de commettre une infraction déterminée. Vidal et Magnol estimaient qu’il y a commencement d’exécution quand l’agent s’est décidé à courir le risque de l’entreprise, quand il a entendu en quelque sorte couper les ponts derrière lui49. Pour nous, le commencement d’exécution est constitué quand les actes accomplis par l’agent lors de son arrestation attestent chez lui une volonté criminelle irrévocable, c’est-à-dire l’acte par lequel l’individu commence à réaliser atteste son intention criminelle, celle d’atteindre son but50. Par exemple : le fait pour le mari qui, muni du fusil qu’il vient d’acheter pour abattre son « rival x » et ayant connaissance de son lieu de résidence ; se présente au domicile de ce dernier, pointe le canon de son arme sur lui et met le doigt sur la détente dans une attitude qui laisse deviner ses intentions. Au stade des actes préparatoire, il n’est pas toujours aisé de connaître la vraie intention de l’agent, tant qu’elles ne sont pas avouées par lui-même. Selon Nyabirungu Mwene Songa, le critère de la distinction des actes d’exécution et des actes préparatoires doit prendre en compte à la fois l’activité matérielle et la résolution criminelle51. Le commencement d’exécution doit être déterminé à la fois par la distance matérielle et morale. C’est le cas par exemple d’un voleur qui a introduit frauduleusement sa main dans la poche de sa victime. Celle-ci est matériellement séparée par une petite distance du résultat de son acte. 48 P. GARRAUD, op cit, p. 53. 49 VIDAL et MAGNOL, Droit Criminel et science pénitentiaire, cours, 9 eme édition, Volume 2, Paris, Rousseau, 1949, P150, cité par PIERRE AKELE, cours de Droit pénal, général, FD, unikin, 2004-2005, p. 115. 50 Nos analyses sur l’acte d’exécution d’une infraction qui révèle de lui-même un but de l’auteur. 51 M. S. NYABIRUNGU, op cit, p.380. 23 La distance morale est aussi courte car le fait d’avoir été vu l’aurait empêché de voler52 C’est ainsi qu’a été retenu comme tentative punissable de vol : le fait d’un individu surpris à l’intérieur d’une maison entrain d’ouvrir un coffre fort, …..53 §3. ABSENCE DE DESISTEMENT VOLONTAIRE L’article 4 du code pénal congolais exige pour qu’il ait tentative punissable, que les actes d’exécution n’aient été suspendus que par des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur. Il y a donc tentative punissable lorsque l’auteur ne suspend pas spontanément, de son propre chef la résolution de commettre un crime ou un délit, mais met fin à sa tentative à la suite d’un événement extérieur, à savoir la réaction de la victime, le danger accru de surprise en flagrant délit ou n’importe qu’elle autre menace extérieure. Disons ici donc qu’après un commencement d’exécution, l’auteur punissable cesse de l’être s’il renonce à son entreprise coupable. Pour prévenir l’infraction, la loi confère une force exonératoire au désistement. La tentative volontairement arrêtée échappe à l’incrimination légale. Autrement dit, le désistement volontaire est la renonciation à un projet déterminé par la seule volonté de l’argent, sans intervention d’une cause extérieure. Le motif du désistement importe peu, que l’agent se soit arrêté par pitié, par remord, par peur physique ou par crainte de châtiment, dans le but évident de politique criminelle et sur le plan social, la loi décide, afin d’encourager le délinquant jusqu’à la dernière minute de son projet criminel qu’il n’est pas punissable, bien qu’il ait commencé l’exécution s’il arrête volontairement lui-même, s’il se désiste volontairement sur le plan moral. Celui qui a l’intention de commettre un crime, mais abandonne son projet criminel ne mérite pas d’être puni54. Le désistement n’est 52 M. S. NYABIRUNGU, op cit, p.380. 53 Crim. 16 janvier, 1956, 85-461, cour de cassation, chambre criminelle française, note A. PROTHAIS, Op cit, p. 222. 24 cependant qu’une cause d’impunité que s’il est antérieur à la consommation de l’infraction. A l’inverse, une fois l’infraction consommée, le délinquant ne peut plus l’effacer en s’efforçant d’en réparer les conséquences. On parle dans ce cas de repentir actif. C’est le cas d’une personne qui tire un coup de fusil sur la victime et se précipite pour la soigner, essaie d’extraire la balle si elle est médecin. Le repentir actif ne détruit pas le caractère délictueux de l’acte accompli qui reste punissable. Le juge peut en tenir compte pour accorder au coupable des circonstances atténuantes55. Nous allons conclure ce chapitre en disant qu’en principe l’infraction doit être consommée pour être punie. Mais il existe certaines exceptions comme le cas de la tentative punissable, que le juge punit comme une infraction achevée, et partant, décourage les potentiels candidats criminels. 54 J. LARGUIER, Droit pénal Général, 15e édition, Paris, 2001, p24. 55 C.G. POKAM et alli, Op cit, www.kalata.com. 25 CHAPITRE DEUXIEME LE FONDEMENT DE PUNIR LA TENTATIVE COMME UNE INFRACTION CONSOMMEE ET LE CAS DE PARTICIPATION CRIMINELLE Le fondement de réprimer l’infraction tentée comme une infraction consommée se justifie par plusieurs arguments. De prime abord, la position adoptée par le législateur du code pénal congolais résulte d’une conception plus subjective visant à assimiler l’auteur de la tentative à l’auteur de l’infraction consommée. Cette conception se vérifie quand le code pénal prévoit la même peine pour l’auteur de la tentative que pour l’auteur de l’infraction consommée. Ainsi nous traitons dans ce chapitre du fondement de la répression (I) avant d’aborder le cas de la participation criminelle en matière de la tentative (II). SECTION I: FONDEMENT DE REPRIMER LA TENTATIVE COMME UNE INFRACTION CONSOMMEE L’auteur de la tentative est assimilé à l’auteur de l’infraction consommée, c’est le principe dit de l’assimilation énoncé par l’article 4 du code pénal alinéa 2 qui dispose que « la tentative est punie comme une infraction consommée ». Ce même principe est repris dans plusieurs législations étrangères, comme c’est le cas de l’article 121-4 du code pénal français qui prévoit ce qui suit : « l’auteur de l’infraction est celui qui commet ou tente de commettre un crime ou un délit »56. De même cette assimilation est prévue par l’article 94 du code pénal camerounais qui dispose que « toute tentative manifestée par un acte tendant à l’exécution d’un crime ou d’un délit ….. est considéré comme le crime ou le délit lui-même ». Lire l’article 121-4 du Nouveau code pénal Français adopté le 22 juillet 1992 et entrée en vigueur le 1 er Mars 1994. 56 26 Ces législations attachent une grande importance à l’intention criminelle manifestée par la tentative, assimilent, en ce qui concerne la répression, la tentative à l’infraction consommée. L’étude du fondement de la répression de la tentative au même pied d’égalité que l’infraction consommée, nous conduira à parler de la justification de l’incrimination (§1) et de sa critique (§2). §1 JUSTIFICATION DE L’INCRIMINATION La répression de la tentative est subordonnée à deux conditions que nous avons présentées plus haut, à savoir : un commencement d’exécution et l’absence de désistement volontaire. La première condition constitue l’élément matériel de la tentative. Le commencement d’exécution requiert ainsi deux éléments, l’un subjectif qui est l’intention irrévocable de commettre l’infraction et l’élément objectif, celui de la proximité de l’acte matériel d’exécution de la commission de l’infraction. La deuxième condition par contre constitue un élément moral. L’existence de cette condition est liée à la première, car si l’on ne constate pas le commencement d’exécution on ne peut rechercher un élément moral. Au contraire si le commencement d’exécution se vérifie et que la personne se désiste volontairement, l’auteur de la tentative ne pourra pas être poursuivi. La réunion de ces deux éléments permet aux termes de l’article 4 du code pénal d’incriminer une tentative criminelle qui n’a pas été achevée57. Et à ce stade, le législateur congolais considère que l’agent a manifesté son hostilité aux valeurs de la société. Après un commencement d’exécution, l’auteur punissable cesse de l’être s’il renonce à son entreprise coupable. Pour prévenir l’infraction, la loi confère une force exonératoire au désistement volontaire. Selon l’esprit de la loi, la tentative volontairement interrompue échappe à l’incrimination. Le législateur décide, afin d’encourager le délinquant jusqu’à la dernière minute de son projet criminel, qu’il n’est pas punissable, bien qu’il ait commencé 57 M.S. NYABIRUNGU, op cit, P.405. 27 l’exécution, s’il arrête volontairement lui-même, s’il se désiste volontairement sur le plan moral, celui qui a l’intention de commettre une infraction, mais abandonne son projet criminel ne mérite pas d’être puni. C’est pourquoi l’agent qui n’interrompt pas de lui-même ses actes criminels, se voit appliquer les mêmes règles que l’auteur de l’infraction consommée, le législateur considère que si l’infraction n’a pas été consommée, c’et en raison de la survenance d’un événement l’empêchant de la consommer. Autrement dit, la dangerosité du délinquant reste la même, même si celui-ci n’a pas atteint son but à la suite d’une circonstance indépendante de sa volonté58. Le législateur insiste sur l’importance de la puissance de nuire et l’intention criminelle de celui qui n’a pu réaliser son projet qu’à raison des circonstances extérieures. L’auteur de la tentative comme dit précédemment se voit monter autour lui, les mêmes mesures de répression que l’auteur de l’infraction complètement achevée qu’il s’agisse de la prescription d’action publique, des peines complémentaires ou des circonstances aggravantes. On pourrait alors se demander si l’échelle de peines infligées est proportionnée aux méfaits sanctionnés. Le législateur, en punissant ainsi la tentative a le souci de prévenir, de décourager en sanctionnant aussi durement les auteurs stoppés malgré eux que les auteurs des infractions consommées59. Nous devons comprendre que le système de répression mis en place en République Démocratique du Congo concernant la tentative est avant tout dissuasif en permettant d’intimider la plupart des délinquants potentiels. Le législateur congolais n’avait d’autres intentions que de mettre en exergue la fonction préventive de la peine. Mais malgré cette prévention, il ya plusieurs législations étrangères qui punissent la tentative moins sévèrement que l’infraction consommée. D’après l’article 52 du code pénal belge par exemple, la tentative de crime est punie à la peine immédiatement inférieure à celle du crime même. 58 59 Idem. C.G. POKAM et alli, Op cit. 28 Le législateur congolais, assimile la tentative et l’infraction consommée quant à leur répression. Esika Makambo écrit à ce sujet qu’il semblerait qu’après réflexion que cette solution d’assimilation s’impose et se justifie parfaitement par des considérations des valeurs sociales que la loi veut défendre. »60. Il ajoute en disant que si le législateur assimile la tentative à l’infraction consommée, cela constitue pour lui une politique criminelle ; d’éduquer, de prévenir les délinquants potentiels qui tenteront de commettre les actes pouvant troubler l’ordre public. Il est incontestable que le délinquant qui a fait tout ce qui dépendait de lui pour arriver à la consommation de l’infraction et qui a été arrêté par des circonstances indépendantes de sa volonté, et aussi dangereux pour la société que celui qui n’a pas rencontré d’obstacle sur le chemin du crime. Il n’existe, dès lors, en principe, aucune raison de les traiter différemment. Cette approche ne fait pas l’unanimité, elle est suivie des critiques. §2. CRITIQUE DE LA DITE REPRESSION Nous n’avons pas l’intention de défendre en totalité un délinquant de l’infraction tentée et de dire que l’infraction tentée doit rester impunie comme l’infraction impossible. Il est nécessaire et utile d’infliger une peine à l’auteur responsable de l’infraction tentée parce qu’il constitue un danger pour la société et que la sanction permet au délinquant de s’amender. De ce fait, le législateur congolais ne doit pas rester indifférent à cet effet, ni exagérer dans la sanction infligée à l’auteur de l’infraction tentée. Dans le cas concret, si une personne a tenté de tuer sera-t-elle puni comme celle qui a tué réellement sa victime ?, la réponse est positive car l’article 4 alinéa 2 dit que : « la tentative est punie de la même peine que l’infraction consommée ». Prenons le cas par exemple de l’infraction de meurtre, s’il arrivait que le criminel a tenté de le commettre, il serait puni comme celui 60 ESIKA MAKOMBO eso Bina, le code pénal zaïrois a noté, éd ESIKA, Kinshasa, 1977, p.30. 29 qui a consommé la dite infraction et il sera puni à la peine de mort. Et si on mettait d’application stricte de l’infraction par rapport à sa sanction, on devait réellement exécuter celui qui a tenté de la commettre et celui qui l’a consommée. La répression des infractions en Droit congolais se fonde sur le principe de la légalité des délits et des peines tel que préconisé par Marquis de Beccaria, qui visait la certitude des châtiments au lieu des peines arbitraires61, d’où l’expression « Nullum crimen nulla poena sine lege, Nulla poena sine crimen » qui se traduit littéralement en ces termes : « Il n’ya pas des crimes ni des peines sans loi ni des peines sans crimes ». Il sied de signaler que ce principe semblerait impartiale pour ce qui concerne l’article 4 du code pénal dans son contenu littéral qui stipule : « la tentative est punie de la même peine qu’une infraction consommée » ; sûr mais hélas ! On pourrait alors se demander si l’échelle des peines infligées au tentateur est proportionnée aux méfaits sanctionnés. Le législateur n’a pas prévu la proportionnalité de la sanction à la faute commise par l’auteur. Le principe de la proportionnalité des peines est confirmé par l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui prévoit que : la loi établisse des peines strictes et évidemment nécessaires62, c’est-à-dire la peine ne doit être établie que si elle proportionnelle à la gravité portée par l’infraction dans la société. Il est évident que le législateur ne laisse pas impuni l’infraction tentée mais il faut qu’il la sépare de l’infraction consommée. N’est-ce pas que cette dernière doit réunir tous les éléments constitutifs de l’infraction ? à savoir : l’élément matériel et l’élément moral. Le premier est prouvé par le résultat cherché par l’auteur tandis que la deuxième par l’intention criminelle. Pourquoi le législateur confond ces deux infractions par rapport à la répression alors que l’autre a un seul élément qui est moral ? Ceci étant, l’on constate que le régime de répression de la tentative est sévère en RDC. Et lorsqu’on observe la société congolaise 61 M. BECCARIA, cité par ANTOINE MWANAMOLO, cours de droit pénal général, inédit, UOR, 2010-2011 p. 15. 62 Lire l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 27 Août 1789. 30 aujourd’hui, on note une recrudescence de tentative des infractions et pourtant le système de répression mis en place est de nature à dissuader la plupart des potentiels délinquants. Le système répressif a donc quelque failli et fait l’objet de critiques. Cette sévérité de la répression a été critiquée par l’école classique au nom de la justice et même de l’équité63. Les théoriciens de cette école voulaient proportionner la rigueur de la peine, non seulement au degré de l’immoralité que contient l’acte mais encore au trouble social qu’il a causé. Lorsqu’il n’ya qu’un commencement d’exécution, disaient-il, il est certains que ce trouble est moins grave. Et ils ajoutaient : « si l’on assimile l’auteur de la simple tentative, on l’encourage à persévérer dans son entreprise criminelle ; il n’a aucun intérêt à s’abstenir mais de la mener jusqu’au bout »64 Dans ce même ordre d’idée, Garraud affirme ce qui suit : « en déclarant punissable l’infraction tentée comme celle consommé pousserait elle-même le malfaiteur à l’exécution complète de l’infraction »65 car il sait d’avance que même s’il n’arrive pas au bout, les règles de la répression sont les mêmes que pour l’infraction consommée qu’il s’agisse des peines complémentaires ou des circonstances aggravantes. Ces objections de l’école classique ont exercé une influence certaine. Ainsi, dans la plupart des codes pénaux promulgués en Europe depuis la deuxième moitié du XIXe et XXe siècle, l’auteur de la simple tentative bénéficie d’une atténuation de la peine. Il en est par exemple des codes Belge de 1967, Allemand de 1871, Italien de 1889, Danois de 1933, Suisse de 1839 et bien d’autres encore. On se rend compte que notre code pénal assure au maximum la défense de la société au détriment de la protection individuelle. En effet, une infraction porte toujours atteinte à une valeur sociale protégée. Mais en ce qui concerne la tentative, le trouble comme nous l’avons dit ci-haut est moins grave car l’auteur n’a pas mené son action 63 C.G POKAM, at alii, Op cit, www.Kalata.com. 64 P. BAUZAC et J. PINATEL, op.cit, p.34. 65 P. GARRAUD, op.cit. 31 jusqu’au bout. Pourquoi donc punir aussi sévèrement alors qu’il n’a pas atteint son objectif ? De plus, la politique criminelle de l’heure vise la réinsertion sociale du délinquant. En punissant de la sorte, on s’éloigne de plus en plus de ce but et on ne lui donne pas de réelles chances de s’amender. Ayant été interrompu dans son entreprise, le tentateur devrait faire l’objet d’un traitement spécial. Le législateur et même le juge devraient plutôt s’attacher à sa personnalité pour lui donner les moyens de ne plus revenir sur son acte. Il est important de relever que contrairement à certains auteurs, notre militantisme ne porte pas sur la dépénalisation de la tentative, mais plutôt sur une révision de sa répression. Nous espérons que lorsque l’occasion lui sera donnée, le législateur révisera le régime de répression de la tentative dans le sens de la réadaption sociale du délinquant. Ce faisant, il convient de dire que la notion de la tentative en cas de plusieurs participants est une notion sur laquelle, il est intéressant de se pencher dans notre travail afin de savoir le sort réservé à ces auteurs si pas complice ou coauteurs de la tentative. SECTION II : LA PARTICIPATION CRIMINELLE EN MATIERE DE TENTATIVE PUNISSABLE Certaines questions en matière de tentative sont complexes et délicates à résoudre. Ce faisant, comme nous le savons, en droit pénal général, le cas de l’infraction consommée et commise par un seul agent est relativement simple. Mais alors, il arrive très souvent que l’infraction soit tentée et que, en même temps, elle soit commise par plusieurs personnes ; celles-ci pouvant du reste avoir des rôles différents. Cette hypothèse présente de grands intérêts au point de vue criminologique (nous pensons ici aux bandes des délinquants) et au point de vue juridique en ce qui concerne ici les qualifications qui peuvent être retenues car chaque agent (délinquant) a eu son rôle pour que l’infraction soit tentée ou consommée. 32 Ainsi, nous analysons successivement dans cette section, la participation à une tentative d’infraction (§1), la tentative de participation à une infraction (§2) et à fin l’abandon d’une tentative d’infraction en cas de pluralité des participants (§3). §1. LA PARTICIPATION A UNE TENTATIVE D’INFRACTION Elle se rencontre très souvent et elle est fréquente. En effet, les malfaiteurs se réunissent pour mieux assurer le succès de leur entreprise criminelle. C’est le cas par exemple en matière de vol, voire en matière de coups volontaires ;…Seulement, il arrive que l’infraction montée par les divers agents ne soit pas consommée, le cours de son exécution étant interrompu par l’arrivé de la police ou de n’importe quelle personne. On peut d’abord supposer que tous les participants sont à égalité, plusieurs coauteurs procèdent au commencement d’exécution d’un cambriolage, l’un d’eux commençant à s’emparer d’un objet ou à fracasser une porte alors que les autres n’ont pas encore touché à aucun objet ou n’ont commis aucun acte de dégradation. Que décider à l’égard de ces derniers si le premier est amené à interrompre ses agissements par l’effet d’une cause extérieure ? Vat-on dire que la tentative de vol commise par le premier s’étend aux autres ? Va-t-on au contraire décider que la tentative de vol ne peut être imputée à chacun qu’à partir du moment où il a mis la main sur un objet ? Cette querelle évoque la définition du commencement d’exécution et implique qu’on s’y attache. Devant l’absence de toute définition par l’article 4 du code pénal congolais, la doctrine française étant hésitante, certains auteurs objectivistes considèrent que le commencement d’exécution est un acte qui fait partie de l’infraction comme élément constitutif ou comme circonstance aggravante66. D’autres auteurs, subjectivistes eux, s’attachent à la volonté irrévocable : pour eux, il ya commencement d’exécution « quand il existe entre le mal qu’a commis l’agent et le but qu’il se propose, une distance morale si faible que, laissé à lui-même, il l’aurait presque certainement franchie »67 ou encore quand 66 ORTOLAN, Eléments de Droit Pénal, 5e éd, Paris, 1886, 1, N° 1012. 67 DONNE DIEU de VABRES, Traité élémentaire de droit criminel, 3e éd, Paris, 1949, N° 123. 33 « l’agent s’est montré décidé à courir les risques de l’entreprise, quand il a entendu couper les ponts derrière lui »68 La jurisprudence actuelle, quant à elle, exige à la fois une intention irrévocable et un lien de causalité entre l’intention et les actes, ce qui implique que le commencement d’exécution soit assez proche dans le temps de la consommation proprement dite69. Voilà les idées directrices en matière de commencement d’exécution, idées dégagées du reste en règle générale à l’occasion d’un agent unique, ou de plusieurs mais ceux-ci étant à égalité de comportement. Projetons ces idées dans notre hypothèse de participation à une tentative d’infraction en cas de pluralité des agents qui d’ailleurs a retenu notre attention. La conception doctrinale objective d’Ortholan va conduire forcement à l’impunité en ce qui concerne les agents qui n’ont pas encore mis la main sur un objet puisque seule la soustraction est un élément constitutif de vol et seule l’effraction une circonstance aggravante de ce délit. Dans notre exemple, au contraire, la conception subjective conduit à la répression de ces agents matériellement encore passifs. Cette conception est d’ailleurs la meilleure en ce que dans notre exemple tous les participants sont animés de la même intention et le fait que l’un seul d’entre eux ait réalisé un acte matériel ne saurait disculper les autres. Tous ont adhéré à l’acte matériel de l’un d’eux, de celui qui s’est peut-être montré le plus « courageux », mais qui bénéficie de l’adhésion psychologique. On conclura donc que la tentative commence pour tous les participants dès le moment où l’un d’eux entame le processus de commission de l’infraction. Bien qu’aucun arrêt à notre connaissance n’ait exprimé cette règle, il est sûr qu’elle est conforme au droit positif70. Une solution également répressive prévaut dans le cas où parmi les participants, on peut distinguer des complices et des auteurs. Si un auteur a commis un commencement d’exécution, le tiers qui l’aurait aidé ou assisté en qualité de complice est lui aussi pénalement 68 VIDAL et J. MAGNOL, op cit. 69 Crim. 8 novembre 1972, B C. N° 331, J. PRADEL et A. VARINARD, les grands arrêts du Droit criminel, 1984, I, 42, commentaire des arrêts. 70 J. PRADEL, Droit pénal général, 15e édition, Paris, Cujas, 2004, 343, note P. AKELE op cit, p. 35. 34 responsable même si ce tiers n’a fait que des actes préparatoires (qui, considérés seuls dans le cadre de la tentative échapperaient à la répression). Seule la qualification diffère : l’auteur principal sera condamné pour tentative de l’infraction alors que celui qui s’est borné à l’aider sera condamné pour complicité de tentative de l’infraction71. Cette affirmation se fonde sur le principe de la criminalité d’emprunt. La théorie de la criminalité d’emprunt veut dire que les actes accomplis par les complices « empruntent’ la criminalité de l’acte réalisé par l’auteur principal. C’est-à-dire en vertu de ce principe, le complice est punissable non sur la base d’une criminalité qui lui serait propre, mais en raison d’une infraction principale elle-même punissable. Le raisonnement est donc simple : l’auteur principal ayant commis une tentative, c’est-à-dire un acte punissable, le complice qui l’a aidé à commettre cette tentative est lui aussi punissable, pas besoin donc que l’auteur principal ait commis une infraction achevée pour que le complice soit punissable72. A.NOTRE POSITION SUR LA PARTICIPATION A UNE TENTATIVE D’INFRACTION Notons que celui qui commet l’infraction ou qui tente de la commettre n’est pas le seul à encourir la condamnation. Ceux qui l’ont aidé, ou ont provoqué son comportement sont en effet sanctionnés par le droit pénal. Signalons que la complicité n’est pas une infraction, mais une modalité de la commission de l’infraction : le complice est celui qui participe à l’infraction à côté de l’auteur (celui qui commet lui-même l’infraction où qui a tenté de la commettre). La complicité se distingue de la coaction dans le cadre de laquelle plusieurs participants commettent les mêmes actes infractionnels en même temps73. Dans la complicité, le complice ne participe pas personnellement à l’infraction commise par l’auteur, dans la coaction le coauteur commet l’infraction avec l’auteur. Le complice qui a participé à une tentative 71 Crim. 14 Avril 1904, S. 1907.I. 251, 28 Mai 1963. J.C, 1963 IV, 94. J. PRADEL, op cit, p.742. 73 Nos analyses sur les articles 21, 22, 23 du code pénal congolais Livre I. 72 35 d’infraction est censé avoir la même criminalité que l’acte de l’auteur principal car on présume que sans son aide l’infraction ou la tentative ne devrait pas se dérouler74. Nous disons que les coauteurs qui se sont réunis à commettre les actes dégradants sur le lieu du crime après une attente concertée avec ceux qui ont commis les actes, tous encourront les mêmes peines car tous ont été animés par une même intention, celle de commettre une infraction déterminée avec la conscience de participer à un acte infractionnel75. Nous signalons même que, si l’auteur principal n’exécute pas l’infraction envisagée par le complice, il faudrait selon notre raisonnement que le complice n’échappe à la responsabilité pénale car en aidant l’auteur principal, il manifeste un comportement dangereux à la société, il est animé par une intention criminelle dans son chef, celle d’aider l’auteur principal afin qu’il arrive au bout76. De même lorsqu’il ya eu tentative et que cette tentative n’est pas punissable par la loi par exemple lorsqu’il ya désistement volontaire de l’auteur principal et/ou lorsque l’auteur confond les moyens, il faut punir le complice ou provocateur qui avait incité l’auteur principal de commettre ces actes. Voici par exemple un individu qui donne mandat à un tiers de tuer une personne, donnant à ce tiers une arme et imaginé que ce dernier après avoir accepté, ne donne aucune suite au projet, par peur ou par toutes autres raisons. Pour le complice donneur d’ordre, la non exécution de l’infraction par le tiers peut être considéré comme un élément extérieur de sa volonté qui empêche que l’infraction ne soit commise (cet élément c’est le désistement volontaire de l’auteur à qui on a confié l’arme à fait d’aller exécuter la mission77. Ainsi toute tentative, selon Akele devrait être punissable, on n’a plus besoin de l’exigence de commencement d’exécution du moment que l’intention d’aller jusqu’au bout de la commission de l’infraction est certaine. 74 M. MOUDAGOU, L’importance des actes accomplis par le complice dans une commission d’une infraction, éd. OYEUC, Rabat, 1978, p. 32. 75 Nous devons cela du Magistrat Abery ROUMALIZA, magistrat près le parquet de Butembo. 76 Idem. 77 Crim. 28 ; Novembre 1972, Bull, N° 363, cité par P. AKELE, op cit, p. 57. 36 A ce stade Hauss affirme en disant que l’auteur moral ou intellectuel qui est le provocateur est souvent dangereux que même l’auteur matériel car ces agissements facilitent directement la commission d’une infraction78. Loin de nous, l’intention de défendre en totalité le délinquant de l’infraction tentée, l’auteur de l’infraction tentée comme le complice de l’infraction tentée doivent être puni ; le complice comme le tentateur ont eu l’intention de participer à l’infraction en montrant leur hostilité aux valeurs de société juridiquement protégés79. Cette dangerosité d’acte manifesté par un commencement d’exécution et de l’absence du désistement volontaire s’étend aussi au complice. La sanction infligée à l’auteur qui a tenté de commettre l’infraction s’inspire également de la sanction encourue à l’auteur qui a été jusqu’au bout, parce que son acte tendait directement et immédiatement vers la consommation de l’acte commis par le tentateur déterminé c’est-à-dire un acte qui a un rapport direct avec l’infraction dont il a en vue80. Rappelons qu’il n’ya pas infraction sans résolution criminelle, c’est ainsi que dans le chef de l’auteur de la tentative il ya une résolution criminelle, celle de commettre une infraction mais il a fallu qu’il ne soit pas directement puni comme celui qui est allé jusqu’au bout car les troubles causés par lui sont moins graves que celui qui a consommé l’infraction par conséquent la sanction à lui infligée serait moins grave que l’autre. La coaction quels que soient les agissements des différents participants en matière de tentative, démontre que les acteurs ont tous agi d’une manière criminelle, leur participation est englobée dans un ensemble auquel ils sont tous indissolublement attachés. La résolution criminelle, c’est-à-dire l’intention de delinquer existe dans le chef de chaque participant. Tous, par conséquent doivent être exposés à la même peine selon le prescrit de l’article 23 du code pénal congolais. Mais comme ils n’ont commis que les actes de la tentative, le législateur congolais devrait réduire la peine car 78 J.J. HAUSS, cité par A. MWANAMOLO, op cit, p. 67. 79 Cette même idée nous fait voir que certaines infractions requièrent une intention coupable de la part de l’auteur. On ne peut donc pas parler de l’infraction si l’intention n’existe pas car toute infraction recouvre des éléments matériel et moral (intention coupable). 80 M. MOUDAGOU, op cit, p. 53. 37 comme nous l’avons déjà dit le degré de gravité est encore moins grave par rapport à ceux qui sont allés jusqu’au bout. La répression de ces auteurs est justifiée au motif qu’ils ne se sont pas désistés volontairement, mais c’est en cause d’un événement extérieur qu’ils n’ont pas pu aboutir au résultat. §2. LA TENTATIVE DE PARTICIPATION A UNE INFRACTION Cette hypothèse de la tentative est plus délicate, une très grande variété de situations peut en effet apparaître. Le premier est assez aisé à résoudre, c’est celle dans laquelle le complice agit en vue de la commission d’une infraction, par exemple s’il conduit une femme non enceinte chez une avorteuse. Si l’on considère que le délit impossible échappe à la répression parce qu’il ne constitue pas une vraie infraction, on en déduira que l’auteur de la tentative d’avortement (agent ayant conduit la femme) n’est pas condamnable pénalement. Deux autres situations sont en revanche plus malaisées à résoudre. a) La première est celle dans laquelle il ya une tentative de complicité non suivie d’effet parce que l’auteur principal décide de ne pas agir ou parce que, après avoir envisagé d’agir, il ne donne plus suite à sa résolution. Par exemple un individu donne mandat à un tiers (tueur à gages) de tuer une personne, donnant à ce tiers une arme et même de l’argent pour forcer sa détermination. Supposons que le tiers, après avoir accepté l’argent et l’arme, ne donne aucune suite au projet, par peur ou pour toutes autres raisons. Il est évident que le tiers contacté échappera à toute répression faute d’avoir dépassé le stade des actes préparatoires. Mais que décider pour l’instigateur, le donneur d’ordres ? Sa tentative de complicité est-elle punissable en Droit congolais ? Le code pénal congolais est muet à ce sujet, aucune disposition ne répond à cette question. L’acte de provocation est dans notre droit un cas de complicité, celle-ci est visée par l’article 22 du code pénal congolais alinéa 2 et 3 qui énumère aussi la fourniture des moyens et l’aide ou assistance. Le 38 donneur d’ordre ne peut être réprimé que s’il ne rattache à un fait principal punissable, ce qui n’est évidemment pas le cas s’il n’ya qu’un acte préparatoire. Mais nous pensons que ce raisonnement conduit à une iniquité grave puisque la répression du donneur d’ordres va dépendre d’un fait qui est extérieur, à savoir la tentative d’assassinat. C’est pourquoi la doctrine a proposé des remèdes. Des auteurs ont soutenu que la provocation à une infraction pourrait être considérée comme une tentative de cette infraction, ce qui permettait de poursuivre le provocateur comme auteur principal81. Certains auteurs pensent que ce raisonnement se heurte à un problème cependant au fait que le provocateur n’a commis que des actes préparatoires, c’est-à-dire des actes qui ne constituent pas la tentative punissable. b) Une seconde situation délicate est celle dans laquelle l’auteur principal commet ou tente de commettre une infraction différente de l’infraction qui avait été envisagée par le complice : celui-ci a donc tenté de participer à une infraction qui n’a été ni réalisée ni même tentée puisque c’est une autre qui l’a été à sa place. Peut-on alors poursuivre le complice et, dans l’affirmation, sous quelle qualification ? on doit distinguer : si la différence entre les deux infractions tient à leurs éléments constitutifs, le complice ne peut pas être puni en fonction du résultat. Par exemple un individu qui remet un pistolet à un autre afin que celui-ci obtienne par intimidation le remboursement d’un prêt consenti à un tiers. Mais si l’individu auquel avait été remis le pistolet se querelle avec le concierge de l’immeuble où habite le débiteur et tue le concierge. Le donneur du pistolet n’avait pu envisager de telles complications et il serait complicité de meurtre, compte tenu du principe de donc puni pour la criminalité d’emprunt.82 Si au contraire les deux infractions sont identiques et ne diffèrent que par certaines de leurs circonstances, la seconde comportant seule par exemple une circonstance aggravante, le complice devra supporter celle-ci. Voici un complice qui fournit un état des lieux, mais l’auteur 81 R. COMBAL DIEU, « Le problème de la tentative de complicité ou le hasard peut-il être arbitre de la répression ? », RSC, Paris, 1959. 82 Crim, 13 Janvier 1955, D. 291, note A. CHAVANNE. 39 principal agit de nuit, en réunion avec d’autres et commet des violences. Le complice subira l’aggravation découlant de ces circonstances car « il devrait prévoir toutes les qualifications dont le fait était susceptible, toutes les circonstances dont il pouvait être accompagné »83. Que l’auteur principal n’ait commis une tentative ne change radicalement rien à la situation pénale du complice. Imaginons enfin que le complice fournisse un moyen qui n’a pas été utilisé par l’auteur principal, celui-ci commettant son délit ou sa tentative avec un autre moyen. Cette nouvelle forme de tentative de participation est- elle punissable ? L’article 22 alinéa 2 du code pénal congolais dispose que : le complice est celui «qui aura procuré des armes, des instruments ou tout autre moyen qui a servi à l’infraction sachant qu’ils devaient y servir ». La jurisprudence, pourtant plus répressive, estime qu’il importe peu que l’auteur ne se soit pas servi en fait du moyen mis à sa disposition par le complice84. De même, si après accord entre complice et auteur sur le mode d’exécution du crime, l’auteur choisit un autre modus operandi, le complice reste punissable85. On estime d’ailleurs que cette jurisprudence Française est en accord avec l’article 22 alinéa 2 du code pénal congolais, puisque le moyen offert et l’entente ont permis de renforcer la détermination de l’auteur et ont par conséquent « servi à l’action86 ». 83 Crim. 31 dec 1947, B.C N° 270. 84 Crim. 17 Mai 1962, B.C, N° 200, D. 1962, 473, cité par J. Pradel, In : Revue internationale de droit comparé. Vol 38 N°2, Avril –Juin, PP. 735-747. 85 Idem. 86 J. KAKULE LUNYEMWE, La répression de la complicité en droit congolais, U.C.G, 2000-2001, p.22. 40 NOTRE POSITION CONCERNANT LA TENTATIVE DE PARTICIPATION A UNE INFRACTION Comme il est dit en avance que la tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur, tout individu qui tente de participer à une infraction ou qui l’envisage à un tiers constitue aussi un danger grave pour la société. La conception subjective à laquelle nous nous alignons ; se fonde sur l’intention de l’auteur de l’acte. Selon cette conception, le commencement d’exécution est tout acte, même non incriminé, mais qui révèle l’intention de commettre l’infraction ; peut importe que l’acte accompli soit l’acte incriminé. Par exemple le fait pour un individu de conduire une femme supposée enceinte chez une avorteuse, révèle déjà une intention coupable dans le chef de celui qui accompagne. Il a une résolution bien sûr de commettre une infraction bien précise ; C’est par hasard que la médecine révèle que la femme chez qui on doit expulser le fœtus n’est pas grosse. Et cela pour nous, constitue une circonstance indépendante de la volonté de l’accompagnateur et de l’auteur principal. Selon l’esprit de l’article 4 du code pénal congolais, l’idée est de sanctionner un comportement anti- social, de punir un individu considéré comme nuisible pour la société en manifestant le germe de la criminalité. De tels agissements doivent être punis même si le fait se révèle impossible. Il est de même qu’un voleur qui plonge sa main dans une poche vide ; c’est en raison d’une circonstance ignorée par l’auteur que le résultat n’est pas obtenu bien qu’animé par une résolution criminelle. Le législateur congolais comme il en est aussi de la tendance subjective doit sanctionner toute les résolutions criminelles lorsqu’elles se manifestent par les actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution de l’infraction projetée. Le fait d’accompagner la femme chez l’avorteuse constituait un commencement d’exécution car le fait tendait directement à la commission d’un avortement qui est un comportement antisocial puni par la loi. La répression de ces actes permet à la société 41 congolaise de se défendre plus facilement contre les actes pouvant mettre à danger la vie des personnes. Il est aussi dangereux un individu qui donne mandat à un tiers d’aller commettre une infraction, ce dernier après avoir accepté l’ordre lui donné se désiste volontairement en court de route. Le donneur d’ordre sera poursuivi pour tentative d’assassinat, même si les actes commis par lui se révèlent préparatoire, mais cette préparation montre une résolution criminelle manifestée par le fait de donner à un tiers une arme et l’argent pour forcer sa détermination. Ces deux éléments tendent directement et immédiatement vers l’exécution de l’assassinat. Ainsi, il est évident que le juge, en réprimant, doit tenir compter de quelque éléments de fait ; comme le trouble social est moins grave, aussi le complice de ces actes doit se voir appliquer une peine moins élevée par rapport à celui qui a consommé l’infraction. Une autre situation est que l’auteur principal commet une infraction ou une tentative d’infraction différente à celle qu’a envisagée le complice ou donneur d’ordre après qu’il est fourni à son envoyé les moyens nécessaire de commettre une infraction, et que ce dernier se ravise, il est évident que le complice soit toujours poursuivi, car il constitue un danger grave pour la société. Même si l’infraction paraît différente à celle qu’il a envisagée il importe peu que les moyens fournis n’ont pas été utilisés par l’auteur principal. Hauss nous détermine l’étendue de la responsabilité du complice (donneur d’ordre). Il dit ce qui suit : - Si le provocateur a donné un ordre indéterminé, la question est à apprécier selon le cas : si l’auteur avait des raisons de croire qu’il agissait conformément aux ordres reçues le provocateur répondra aussi à l’infraction commise. - Si l’ordre donné est exécuté partiellement ou d’une manière imparfaite, le provocateur sera poursuivi pour l’infraction réellement réalisée. - Si le provocateur se désiste à temps, en retirant tous les moyens fournis à l’auteur principal, et d’une manière expresse, l’agent qui, malgré ce 42 désistement dont il est au courant, continue son entreprise criminelle, agit exclusivement pour son compte87. Ce faisant, le complice de l’infraction tentée ou manquée mérite toujours une sanction car il manifeste un caractère dangereux aux valeurs de la société qui sont protégées. §2. L’ABANDON D’UNE TENTATIVE D’INFRACTION EN CAS DE PLURALITE DES PARTICIPANTS. Il est mieux pour le présent paragraphe de nous poser la question de savoir, dans quelle hypothèse la loi assure l’impunité d’un participant à une infraction en cours de commission, l’abandonnant volontairement mais en coopération avec d’autres ? Nous pensons que cette question est importante dans le cadre de ce travail scientifique car elle pose le problème de savoir si tous les participants à une infraction en cours d’accomplissement constituent un ensemble indissoluble au point de rendre indifférents les bons sentiments qui animent l’un d’eux à un moment antérieur à la consommation. Normalement et même sur le plan de la politique criminelle, il est tout à fait souhaitable qu’un participant qui renonce à temps puisse échapper à toute répression88. Cependant des règles techniques compliquent la matière et aboutissent à des solutions différentes selon que les participants sont tous des coauteurs ou qu’ils sont les uns auteurs et les autres complices. Le cas de la coaction pose des difficultés inégales, il est évident tout d’abord qu’au stade préparatoire, tout participant peut se retirer comme il l’entend et son retrait lui assurera l’impunité dès lors que les agissements n’ont pas atteint le stade du commencement d’exécution89. Un problème se pose cependant lorsque le coauteur se retire alors qu’il avait apporté une contribution nécessaire à l’accomplissement de l’infraction. La simple passivité et même son départ des lieux du crime ne 87 J. J. HAUSS, cité par ANTOINE MWANAMOLO, op. cit, P. 67. La même idée apparaît avec la règle que les actes préparatoires échappent à la répression : c’est en effet là un bon moyen d’inviter l’auteur à ne pas aller au-delà. 89 Impunité également des autres coauteurs s’ils se désistent. V . crim. 20 mars 1974, B. C, N° 124, acquittement de cambrioleur qui se laisse persuader par sa tentative. 88 43 saurait suffire pour constituer à son profit un abandon salvateur. Il doit faire davantage et supprimer la persistance des effets de sa contribution90.par exemple en reprenant à ses coparticipants le matériel qu’il leur avait confié ou qu’il avait mis en commun en vue de réaliser l’infraction. A défaut, il doit faire un sérieux effort pour récupérer les moyens mis en commun. Cette solution ne parait avoir été affirmée par aucun arrêt ; mais elle s’impose puisque le désistement pour assurer l’impunité doit être volontaire c’est-à-dire traduire l’intention de ne passer à l’acte. Les remarques particulières doivent être faites à propos de l’infraction d’association de malfaiteurs. On sait que le concept d’association de malfaiteurs se trouve au cœur même de la notion criminologique de banditisme et elle constitue l’une des formes les plus dangereuses de la criminalité nationale et internationale91. C’est pourquoi le législateur a cru devoir l’incriminer en soi, indépendamment même des crimes ou délits qu’elle a pour but de préparer car, il est juste qu’en soi ces agissements sont dangereux pour la paix sociale. Comme nous l’avons dit, l’abandon de toute infraction contre les personnes ou les biens assure l’impunité à celui qui se retire. Mais notonsle, législateur joue la carte de l’incitation à la délation mutuelle des malfaiteurs92. Pour que l’impunité soit assurée à l’argent qui abandonne l’association il faut : - L’agent doit dénoncer aux autorités compétentes qu’il y’a un groupe d’association de malfaiteurs ; - La dénonciation doit être faite avant toute poursuite ; - L’agent doit identifier les autres malfaiteurs. Cependant la dénonciation n’est qu’une excuse absolutoire, pas une cause d’impunité de sorte que si aucune peine ne peut être prononcée à l’encontre du délateur, celui-ci reste responsable pénalement du délit 90 J. PRADEL, OP, cit, P745. M. CULIOLI, Encyclopédie Dalloz, Répertoire de Droit pénal, V, « Association de malfaiteurs », N° 5 et 6. 92 J. PRADEL, op,cit , p. 745. 91 44 d’association de malfaiteurs ou de sa complicité comme fauteur93 . La révélation n’absout pas le délit d’association de malfaiteurs ou sa complicité ; non les crimes contre les personnes ou les biens qui auraient pu être commis en exécution de l’association, règle imposée par la lettre de l’article 156 de notre code pénal94. A côté de la délation, un agent peut utiliser une autre forme d’abandon des projets criminels : en se retirant purement et simplement de l’association s’il en était membre ou en cessant de lui fournir des moyens d’existence s’il était complice, un tel retrait n’a juridiquement aucun intérêt puisque l’infraction d’association de malfaiteurs est consommée dès qu’il y a entente pour préparer des crimes. Ce retrait voudra tout juste comme repentir actif mais tardif, c’est-à-dire en pratique comme circonstances atténuantes. L’hypothèse de l’association de malfaiteurs nous a déjà donné l’occasion d’évoquer la complicité. Cependant cette théorie donne lieu à des applications beaucoup plus générales qu’il faut maintenant envisager. Nous imaginons ici le cas d’un auteur et d’un complice, l’un des deux décidant d’abandonner avant la réalisation d’une tentative punissable. Si c’est l’auteur principal qui abandonne, toute répression devient impossible. L’auteur principal ne peut évidemment pas être puni puisqu’il n’a par hypothèse pas dépassé le stade des actes préparatoires qui échappent à la répression, sauf cas particuliers95. Quant au complice, il est également hors du droit pénal. Il ne peut être réprimé que si le fait principal est objectivement punissable. En effet, on peut participer à une infraction tentée. C’est pourquoi Stéphanie et Levasseur ont écrit : « si l’on peut être poursuivi comme complice d’une infraction tentée par un tiers, on ne peut pas l’être pour avoir tenté d’être complice. S’il y a un complice de tentative, il n’ya pas de tentative de complicité faute de fait principal punissable96. L’abandon du coauteur pose plus de difficultés ; que décider du coauteur qui tente de 93 Par conséquent le délateur est condamné et sa condamnation est inscrite au casier judiciaire, cité par ch. DUPEYRON, « L’infraction collective », R.S.C. 1973. 94 On peut admettre cependant que la délation voudra circonstances atténuantes pour ces crimes au cas où le délateur se verrait impliqué pour leur commission par ricochet en quelque sorte. 95 Par exemple association de malfaiteurs. 96 G. STEPHANIE ET G. LEVASSEUR, Droit pénal général, 16e éd. Dalloz, Paris, 1997, p.168. 45 participer à une infraction et qui se ravise après la participation au premier rendez-vous dans le but de préparer l’agression contre la victime alors que son homologue continue et commet l’infraction ou même seulement sa tentative ? Est-ce que le coauteur ou complice va-t-il pouvoir invoquer son abandon pour obtenir sa relaxe ? Cette question s’est posée en jurisprudence française et avait donné lieu à un arrêt de la chambre criminelle du juin 195597. L’affaire plus connue est la fameuse affaire Fesch et Blot ; deux individus qui s’étaient entendu pour se procurer de l’argent, fût-ce au prix de violences, auprès d’un changeur. Rendez-vous est pris avec celui-ci, Fesch lui parlant et Blot faisant le guet. Le changeur indiquant qu’il n’a plus d’argent. Un deuxième rendez-vous est pris par le lendemain. Mais Blot déclare à Fesch qu’il ne pourra pas l’accompagner, étant retenu à son Bureau à l’heure du rendezvous. Fesch se rend donc seul avec son arme, tue une personne98. Après arrestation de Fesch et Blot, la chambre d’accusation les renvoie tous deux en cour d’assises. Mais la cour suprême casse l’arrêt de renvoi, l’activité de Blot ne pouvant se rattacher à un fait principal punissable puisque lors du premier rendez-vous, rien ne s’est produit. On peut pourtant penser avec la doctrine dominante que les deux rendez-vous constituaient un tout, « une action unique quoique complexe »99. Le premier rendez-vous avait bien pour but de préparer l’agression contre le changeur. Dans cette affaire le coauteur n’avait pas vraiment coupé les ponts avec l’auteur et sa responsabilité pénale devrait être toujours engagée. Sans doute, le complice ou coauteur peut-il se dégager après avoir apporté une aide ? Mais il ne suffit pas qu’après avoir prêté son concours, il refuse à agir de l’entreprise criminelle. Il faut qu’il agisse positivement pour anéantir totalement les conséquences des agissements qu’il avait commis de l’acte primitivement. Il faut qu’il fasse tout pour empêcher l’exécution de l’acte principal. Blot n’aurait pu se dégager qu’en avertissant le changeur de l’agression dont il 97 J.C.P. 1955, II. 8851, note R. VOUIN et R.S.C. 1956. 98 J.P PRADEL, Op cit, p. 474. 99 A. LEGAL, op.cit. 46 allait être victime ou encore en alertant la police. Une simple abstention ou l’absence le jour du crime étaient insuffisantes100. Nous pensons que l’abandon simple du coauteur à une tentative d’infraction peut être assimilé au repentir actif qui n’est une cause d’impunité du délinquant. L’abandon peut inciter le juge en rendant son jugement d’appliquer à l’agent les circonstances atténuantes car malgré lui, il a eu l’intention de se raviser de son projet criminel. Au demeurant, le législateur aurait pu envisager dans le code pénal que : l’agent qui n’a pas eu du courage d’abandonner son entreprise criminelle sera puni à une peine élevée que par rapport à celui qui l’a fait. Il serait évident et justifié dans cet angle, car le trouble de l’ordre public causé par ces deux agents n’est pas similaire même si la doctrine française martèle en disant que « tous les coauteurs ou coparticipants à une infraction en cours d’accomplissement constituent un ensemble indissoluble ». Celui qui se retire du projet criminel sera moins sanctionné car il a eu la volonté de n’est pas participer à l’infraction ; fort malheureusement son désistement étant bien sûr volontaire est inopérant. Nous avons compris que le fait essentiel dans la répression de l’infraction, c’est la volonté criminelle manifestée qui est importante. La loi pénale est élaborée par le législateur pour punir ceux qui manifestent la volonté de la violer. Le désistement n’a de valeur que lorsqu’il est certain, c’est-à-dire s’il empêche la consommation de l’infraction. La loi ne se préoccupe certainement pas des motifs qui ont déterminé l’agent, elle exige seulement que le désistement dépende de sa volonté libre et spontanée, qu’il ait sa base dans une résolution prise librement par l’auteur ; quelqu’en soit le mobile, la crainte, les remords, la répugnance morale ou physique, la déception sur la valeur minime de l’objet qu’il voulait voler. En d’autres termes, la loi distingue seulement deux situations : celle dans laquelle la tentative « n’a été suspendue ou n’a manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur et celle 100 A. CHAVANNE, « complicité », cité par J.P PRADEL, op cit, p. 747. 47 où l’obstacle à la consommation de l’infraction dépend « de la volonté de son auteur ». C’est dans cette mesure que celui qui simplement abandonne la tentative d’infraction en cas de pluralité de participants sera puni car il n’a pas pu suspendre les actes de tous les participants et plus encore malgré sa volonté de se raviser n’a pas constitué l’obstacle à la tentative punissable. Il n’en reste pas moins que celui qui participe à une attente criminelle et qui abandonne cette tentative de participation et sans révéler ce danger là aux autorités compétentes, traduit toujours la volonté de ne pas se conformer à la loi. 48 CONCLUSION GENERALE Nous voici à présent arrivé à terme de notre travail. Si au début de notre travail nous avons commencé par faire un aperçu général de l’état de la question, nous sommes appelés à placer juste quelques mots sur tout le travail et bien sûr vérifier si nous avons atteint les objectifs principaux que nous nous sommes assignés pour cette recherche qui, à titre de rappel, portait sur « l’analyse de l’incrimination de l’infraction tentée en droit positif congolais ». En effet, cette analyse s’est articulée autour des questions suivantes : Quel est le souci du législateur congolais en prévoyant des sanctions égales aux auteurs ayant commis l’infraction tentée et ceux qui l’ont réellement consommée. Nous nous sommes demandé si la tentative a le même degré de gravité que l’infraction consommée pour qu’elle soit punie de la même peine que l’infraction achevée. Nous avons aussi porté un regard vigilant sur la problématique du commencement d’exécution d’une infraction tentée. Autrement dit quand est-ce que on peut dire qu’une infraction tentée a connu un commencement d’exécution ? A l’égard de cette problématique nous avons proposé les hypothèses ci-après : La punissabilité de la tentative constituerait une manière de lutter contre la criminalité et donnerait une leçon et un moyen pour décourager les délinquants potentiels qui n’ont encore abouti au résultat escompté. Au demeurant, l’article 4 du code pénal congolais considère qu’une tentative, pour être punie, doit notamment avoir connue un commencement d’exécution, cependant, le législateur ne précise pas quand est-ce qu’on peut dire qu’une infraction a connue le commencement d’exécution. C’est ainsi qu’on considère comme acte du commencement d’exécution de la tentative, celui posé par une personne vivante et pénalement responsable, avec une intention criminelle, univoque qui tend directement et immédiatement à l’accomplissement du crime. La méthode 49 exégétique, suivie de la technique documentaire, nous ont aidé à bien réaliser et vérifier nos hypothèses. Le présent travail a été réparti à deux chapitres dont le premier a traité de l’analyse de la tentative punissable en Droit congolais et le second a porté sur le fondement de punir la tentative comme une infraction consommée et le cas de participation criminelle. Au niveau du premier chapitre, nous avons parlé de la notion de la tentative punissable en portant un regard sur sa définition et les différentes formes des tentatives prévues dans l’article 4 du code pénal congolais. Ce faisant, le droit pénal congolais est régi par un principe de la légalité des peines et des infractions. Ainsi le législateur congolais, pour éviter des problèmes et des atteintes à ce principe, a prévu dans le code pénal à son article 4 ce qui suit : « Il y a tentative punissable lorsque la résolution de commettre l’infraction a été manifestée par des actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution de cette infraction et qui n’ont été suspendus ou qui n’ont manqué leur effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur ». Nous avons constaté qu’il y a un débat des doctrinaires pour la tentative ou l’infraction impossible, les uns militent pour son impunité et les autres pour sa répression. Notre position concernant la tentative impossible est qu’elle soit punie, car la non survenance du résultat constitue une cause extérieure de la volonté de son auteur ; l’auteur a manifesté une intention criminelle face aux valeurs protégées de la société. Aussi nous avons parlé des conditions qui caractérisent la punissabilité de la tentative. La première condition c’est le commencement d’exécution : la tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur. Le commencement d’exécution qui est l’élément matériel et est constitué quand les actes accomplis par l’auteur lors de son arrestation attestent chez lui une volonté irrévocable. La seconde condition est la résolution criminelle qui est l’intention de délinquer : cet élément est essentiel car on ne peut pas concevoir une tentative non intentionnelle. La troisième condition, enfin, est 50 l’interruption involontaire des accomplis par l’agent. Ce désistement doit être externe et même étranger au délinquant car si celui-ci se désiste spontanément avant d’avoir réuni tous les éléments de l’infraction, il n’y a plus de tentative et par conséquent l’agent échappera à la répression. Dans le deuxième chapitre qui a porté sur le fondement de punir la tentative comme une infraction consommée et le cas de la participation criminelle, nous avons constaté que l’assimilation du tentateur à l’auteur qui est allé jusqu’au bout est justifié par des raisons de prévention, d’intimidation, de décourager les délinquants potentiels, animés par les intentions criminelles. L’institution de la tentative punissable a été imaginée par le législateur pour faire face à la situation créé par l’agent dont l’activité criminelle a été inachevée, n’a pas conduit au résultat qu’il cherchait en raison d’un élément extérieur de la volonté de son auteur. C’est pourquoi on sanctionne aussi durement les auteurs stoppés malgré eux que les auteurs des infractions consommées. Et il est évident que le criminel qui a fait tout ce qui dépendait de lui pour arriver à la consommation de l’infraction et qui a été arrêté par des circonstances indépendantes de sa volonté soit considéré comme aussi dangereux pour la société que celui qui n’a pas rencontré d’obstacle sur le chemin du crime : il n’existe, dès lors, en principe, aucune raison de le traiter différemment. Cependant, nous avons remarqué que le législateur congolais a exagéré, en punissant la tentative comme l’infraction consommée, car la tentative n’a pas le même degré de gravité que l’infraction consommée. Autrement dit, les troubles publics causés par le tentateur sont moins graves que l’auteur qui est allé jusqu’au bout et il est incontestable de traiter ces deux individus différemment. Il est nécessaire et utile d’infliger une peine à l’auteur responsable de l’infraction tentée mais il serait encore utile de revoir la manière de sa répression. La seconde section de ce chapitre a été centrée sur la participation criminelle en matière de tentative punissable. En matière de participation criminelle à une tentative d’infraction, le commencement d’exécution pour tous les participants commence lorsque l’un seul d’entre eux a réalisé un acte matériel de commission de l’infraction. La doctrine et 51 jurisprudence présument que tous les participants ont adhéré à l’acte matériel de l’un d’eux, de celui qui s’est montré le plus courageux. Tout agent ayant participé à une tentative d’infraction dans l’angle du complice ou coauteur d’une tentative d’infraction doit subir les conséquences de son agissement. Les coauteurs d’une tentative seront punis comme l’agent principal, vue qu’ils auront coopéré directement à l’exécution de la tentative, les complices par contre seront punis la moitié de la peine de l’auteur qui a commis la tentative. De même, il peut arriver qu’un agent tente de participer à une infraction ou tente d’être complice à une infraction, après avoir donné des instructions à l’auteur mais ce dernier décide de ne pas agir, après avoir envisagé d’agir, il ne donne plus suite à sa résolution, il a été dit que ce dernier échappera à la répression mais son complice sera poursuivi pour tentative d’infraction qu’il a envisagé ; car nous l’avons souligné, la non exécution de la mission par l’agent envoyé, constitue pour le complice une circonstance indépendante de la volonté du complice donner d’ordre et donc il est animé par une intention criminelle ; il est un individu dangereux pour les valeurs de la société. Un autre cas que nous avons étudié dans ce travail est celui d’un criminel qui se désiste volontairement à la commission d’une infraction mais en coopération avec d’autres. Il est dit que cet agent bénéficiera des circonstances atténuantes si et seulement si il agit positivement pour anéantir totalement les conséquences des agissements qu’il avait commis. Il faut qu’il fasse tout pour empêcher l’exécution de l’acte principal, par exemple en avertissant la victime de l’infraction ou même en alertant la police. Ainsi la dénonciation a été considéré comme une excuse absolutoire et non pas une cause d’impunité car l’infraction d’association de malfaiteurs est consommée dès qu’il ya entente pour préparer des crimes. Eu égard à ce qui précède, nous ne prétendons pas avoir épuisé toute la matière car nous sommes conscient de nos limites. Ainsi donc, certes que notre travail porte des points fort mais aussi des insuffisances et pour cela, nous en appelons à d’autres chercheurs de poursuivre des recherches dans ce domaine afin de nous compléter et de corriger les imperfections qui se seraient glissées. 52 BIBLIOGRAPHE I. TEXTES DES LOIS. 1) La déclaration des Droits de l’homme et du citoyen du 27 Août 1789. 2) Décret du 30 juin 1940 portant code pénal congolais. 3) Code pénal Camerounais du 12 Juin 1967. 4) Code pénal Suisse du 21 Décembre 1937. 5) Code pénal Français du 1er Mars 1994. 6) Code pénal Belge du 08 Juin 1867. II. OUVRAGES. 1) DONNEDIEU de VABRES, Traité élémentaire de droit criminel, 3e éd, Paris, 1949. 2) DOUCET (J.P), Le jugement pénal, 3e éd, Paris, 1784. 3) DUVERGER (M), Méthode des sciences sociales, Paris, P.U.F, 1961. 4) GARRAUD (P), Précis de Droit criminel, 15e éd, Paris, 1934. 5) LAVASSEUR et VITU (G), Le meurtre d’une personne déjà morte, Paris, 1976. 6) LARGUIER (J), Droit Pénal Général, 15e éd, Paris, 2001. 7) MERLER (M), Droit pénal complémentaire, Paris, P.U.F, 1957. 8) MOUDAGOU (M), L’importance des actes accomplis par les complices dans la commission d’infraction, éd OYEUC, Rabat, 1978. 9) NATHALIE HUSTIN-DENIES et DEAR MAN, L’infraction inachevée en droit comparé, Bruylant, Bruxelles, 1997. 10) NYABIRUNGU (M.S), Traité de Droit pénal général congolais, 2e éd, Editions universitaires Africaines, Kinshasa, 2007. 11) NYABIRUNGU (M.S), Droit Pénal Zaïrois, éd Droit des sociétés, DES, Kinshasa 1989. 12) ORTHOLAN, Eléments de Droit Pénal, 5e éd, Paris 1886. 13) POKAM (C.G) et alli, la tentative en matière pénale, www.kalata.com. 14) PROTHAIS (A), Tentative et Attentat, Paris, éd. LGDJ, 1985. 15) QUIVY et VAN CAMES HONDT, Manuel de recherche et sciences sociales, Paris, Bordas, 1998. 16) RONGERE, Méthode des sciences sociales, Paris, P.U.F, 1971. 53 17) SALEILLES (R), l’individualisation de la peine, éd Eres, Paris, 1989. 18) SALEILLES, at alli, Essai sur la tentative et plus particulièrement sur la tentative irréalisable, 2e éd, Paris 1897. 19) STEPHANIE (G) ET LEVASSEUR (G), Droit pénal général, 16 e éd, Dalloz, Paris, 1997. 20) WENU BECKER, Recherche scientifique, Théorie et pratique, Presses Universitaires de Lubumbashi, 2004. III. REVUES. 1) COMBAL DIEU, « Le problème de la tentative de complicité ou le hasard peut-il être arbitre de la répression ? » in R.S.C, Paris 1959. 2) PRADEL (J), Tentative et abandon en cas de participation de plusieurs personnes à une infraction. In revue internationale de Droit comparé, Vol 38 N°2. Avril-Juin. III. TFC ET MEMOIRES. 1) BANGOBANGO (R), Appréciation souveraine du juge dans la détermination de la proportionnalité entre l’attaque et le riposte : cas d’une victime agresseur original, TFC inédit, U.C.G, 2001-2002. 2) KASEREKA (R), la fonction préventive de la peine en Droit congolais, Mémoire inédit, U.C.G, 2003. 3) KAKULE LUNYEMWE (J), la répression de la complicité en Droit congolais, TFC inédit, U.C.G, 2000-2001. 4) MULAMBULYA (P), Analyse du régime répressif en Droit congolais : cas de menace, TFC inédit U.O.S, Beni, 2007-2008. NOTES DE COURS 1) MWA NAMOLO (A), cours de droit pénal général, U.O.R Butembo, 2010-2011. 2) NDAGHALA, Cours d’initiation à la recherche scientifique, U.O.R. Butembo, 2009-2010. 3) VERHAEGEN (J), Cours de Droit pénal et procédure pénal, UCL, Louvain-la-Neuve, 1977-1979. 54 TABLE DES MATIERES EPIGRAPHE .......................................................................................... ii DEDICACES .........................................................................................iii REMERCIEMENTS ................................................................................ iv SIGLES ET ABREVIATIONS ................................................................... v INTRODUCTION .................................................................................... 1 I. Présentation du sujet ............................................................................... 1 III. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES ...................................................... 3 1. PROBLEMATIQUE ................................................................................................. 3 2. HYPOTHESES ........................................................................................................ 4 IV. CHOIX ET INTERET DU SUJET .............................................................. 4 V. METHODES ET TECHNIQUES UTILISEES ................................................ 6 1. METHODE ............................................................................................................. 6 2. TECHNIQUES ........................................................................................................ 6 VI. DELIMITATION DU SUJET ...................................................................... 7 VII. SUBDIVISION DU TRAVAIL .................................................................... 7 CHAPITRE PREMIER ............................................................................. 8 ANALYSE DE LA TENTATIVE PUNISSABLE EN DROIT CONGOLAIS ......... 8 SECTION I : NOTIONS SUR LA TENTATIVE PUNISSABLE .............................. 8 §1. DEFITION DE LA TENTATIVE ............................................................................... 9 §2. FORMES DES TENTATIVES PUNISSABLES PREVUES DANS L’ARTICLE 4 DU CODE PENAL .......................................................................................................... 10 SECTION II : LES CONDITIONS DE LA TENTATIVE PUNISSABLE................ 18 §1. LA RESOLUTION CRIMINELLE ........................................................................... 18 §2. L’EXISTENCE D’UN COMMENCEMENT D’EXECUTION ....................................... 19 §3. ABSENCE DE DESISTEMENT VOLONTAIRE ....................................................... 23 CHAPITRE DEUXIEME ......................................................................... 25 LE FONDEMENT DE PUNIR LA TENTATIVE COMME UNE INFRACTION CONSOMMEE ET LE CAS DE PARTICIPATION CRIMINELLE .................. 25 SECTION I: FONDEMENT DE REPRIMER LA TENTATIVE COMME UNE INFRACTION CONSOMMEE........................................................................ 25 §1 JUSTIFICATION DE L’INCRIMINATION ................................................................ 26 §2. CRITIQUE DE LA DITE REPRESSION ................................................................. 28 SECTION II : LA PARTICIPATION CRIMINELLE EN MATIERE DE TENTATIVE PUNISSABLE.............................................................................................. 31 §1. LA PARTICIPATION A UNE TENTATIVE D’INFRACTION ....................................... 32 A.NOTRE POSITION SUR LA PARTICIPATION A UNE TENTATIVE D’INFRACTION...... 34 §2. LA TENTATIVE DE PARTICIPATION A UNE INFRACTION..................................... 37 NOTRE POSITION CONCERNANT LA TENTATIVE DE PARTICIPATION A UNE INFRACTION ............................................................................................. 40 §2. L’ABANDON D’UNE TENTATIVE D’INFRACTION EN CAS DE PLURALITE DES PARTICIPANTS. ....................................................................................................... 42 CONCLUSION GENERALE .................................................................... 48 55 BIBLIOGRAPHE ................................................................................... 52 I. TEXTES DES LOIS. ............................................................................. 52 II. OUVRAGES. ........................................................................................ 52 III. REVUES. .............................................................................................. 53 III. TFC ET MEMOIRES. ........................................................................ 53 NOTES DE COURS ..................................................................................... 53