COLLEGE DE MEDECINE D’URGENCE DE BOURGOGNE Rédacteurs Dr PIETA Sylvain(Pôle urgences Chalon sur Saône) Date Avril 2015 Validation Dr SAGNOL Pascal(Cardiologie Chalon sur Saône) Approbation Bibliographie 1. Guidelines for the diagnosis and management of syncope(ESC). European Heart Journal 2009;30:2631-71. 2. Kouakam C. Syncope: ce qu’il ne faut pas manquer. Journal Européen des Urgences et de Réanimation 2013;25:24-31. 3. HAS, mai 2008. Pertes de connaissance brèves de l’adulte, prise en charge diagnostique et thérapeutique des syncopes: Recommandations. LES SYNCOPES 1/Définition La syncope est une perte de connaissance brève due à une hypoperfusion cérébrale globale transitoire et caractérisée par un début rapide, une durée brève et un retour à un état de conscience spontané et complet. 1 Figure 1: Place des syncopes parmi les pertes de connaissances (PDC) (1) Elle se différencie des altérations incomplètes de la conscience comprenant la cataplexie, les Drop Attack, les pseudo-syncopes psychogènes, l’AIT carotidien. Une authentique perte de connaissance brève peut être liée à un mécanisme n’impliquant pas une hypoperfusion cérébrale globale, traumatique ou non comme dans l’épilepsie, les causes métaboliques (hypoglycémie, hypoxie, hypocapnie), les intoxications (CO), l’AIT vertébrobasillaire. 1Classification physiopathologique des syncopes 2/Classification physiopathologique Elle est fondée sur l’analyse des mécanismes à l’origine de l’hypoperfusion cérébrale globale, conséquence d’une défaillance brutale de la pompe cardiaque pouvant être occasionnée par une tachycardie ou une bradycardie extrême, ou une brusque hypotension, d’origine réflexe ou orthostatique. 2 Figure 2: Classification physiopathologique des syncopes (1) 3/Evaluation initiale L’évaluation initiale permet d’identifier la cause de la syncope dans la moitié des cas environ. Le tableau ci-dessous détaille la classification des syncopes en 3 grands groupes étiologiques. 3 Syncope réflexe • Vasovagale, en réponse à un stress émotionnel ou orthostatique • Situationnelle: Toux, Eternuement, Miction, Défécation… • Hypersensibilité du Sinus Carotidien • Formes atypiques, par leur présentation ou l’absence de facteur déclenchant Syncope par hypotension orthostatique • Dysfonction primaire du Système Nerveux Autonome: Atrophie cérébrale, Parkinson… • Dysfonction secondaire du Système Nerveux Autonome: Diabète, Amylose, Insuffisance rénale… • Hypotension orthostatique iatrogène: Alcool, Médicaments… • Déplétion volémique: Hémorragie, Diarrhée… Syncope cardiovasculaire • Arythmie primaire • Bradycardie: Dysfonction sinusale, Bloc Auriculoventriculaire, Dysfonction de stimulateur • Tachycardie: Supraventriculaire ou Ventriculaire (idiopathique, secondaire à une cardiopathie structurelle ou à une canalopathie) • Maladie structurelle • Cardiaque: Valvulopathie, Syndrome Coronaire Aigu, Cardiomyopathie Hypertrophique, Masses intracardiaques, Tamponnade, Anomalies de naissance des coronaires, Dysfonction de prothèses valvulaires • Autre: Embolie Pulmonaire, Dissection Aortique, Hypertension Artérielle Pulmonaire Tableau 1: Classification étiologique des syncopes (1) Cette évaluation initiale repose d’abord sur un interrogatoire minutieux du patient et des témoins, faisant préciser les antécédents, décrire la chronologie du malaise, rechercher les circonstances favorisantes, les prodromes, les signes d’accompagnement, le mode de récupération. L’entourage doit être contacté si nécessaire. Elle repose aussi sur des examens complémentaires simples, systématiques pour certains, plus rares ou exceptionnels pour d’autres. 4 Interrogatoire du patient et témoins éventuels Toujours Examen clinique avec mesure TA couché et debout ECG Echographie cardiaque Parfois Examens biologiques selon l’orientation diagnostique Massage Sino-Carotidien Imagerie cérébrale Jamais Echographie-Doppler des TSA sauf pour le diagnostic différentiel Tableau 2: Evaluation initiale 4/Orientation diagnostique Au terme de l’évaluation initiale, le diagnostic est certain ou reste inconnu. Les éléments cliniques évocateurs d’un diagnostic sont détaillés ci-dessous: 5 Syncope réflexe (ou neuromédiée) • • • • • • • • Absence de maladie cardiaque Longue histoire de syncopes récidivantes Après une vue, un son, une odeur ou une douleur déplaisants, inattendus, soudains Station debout prolongée, lieu chaud ou surpeuplé Pendant ou après un repas Lors d’une rotation de la tête ou d’une pression au niveau du cou (sinus carotidien) Après un exercice, une quinte de toux, un éternuement Nausées ou vomissements associés Syncope par hypotension orthostatique • • • • Après un passage en position debout Introduction ou modification pomologique récente d’un médicament vasopresseur Station debout prolongée ou en fin d’exercice, lieu chaud ou surpeuplé Contexte de neuropathie dysautonomique (diabète, amylose…) ou de syndrome parkinsonien • Contexte d’anémie, d’hémorragie ou déplétion volémique Syncope cardiovasculaire • • • • • • • Contexte de maladie cardiaque structurelle Antécédents familiaux de mort subite inexpliquée, de maladie « électrique » cardiaque Survenue pendant l’effort ou en position allongée Palpitations de début brutal immédiatement avant la syncope Patient porteur de stimulateur ou défibrillateur cardiaque Prise d’antiarythmiques ECG anormal ou suggérant un trouble du rythme ou de la conduction - Bloc de branche gauche, ou bloc de branche droit + hémibloc, ou QRS > 120 ms - Bloc auriculoventriculaire du 2ème ou 3ème degré - Bradycardie sinusale inappropriée < 50 bpm, ou pause > 3 s, en l’absence de médicaments - Tachycardie ventriculaire non soutenue - Aspect évocateur de Brugada, de repolarisation précoce, de dysplasie arythmogène du VD - Intervalle QT long ou court - Préexcitation ventriculaire - Onde Q ou troubles de la repolarisation suggérant une cardiopathie ischémique Tableau 3: Eléments cliniques d’orientation (1) 5/Stratification du risque Elle est indispensable chaque fois que la cause de la syncope n’est pas clairement identifiée au terme de l’évaluation initiale. Une syncope à risque se définit comme une syncope dont la cause pourrait conduire à une mort subite indépendamment de la perte du tonus postural et des conséquences de la chute. 6 L’objectif de la stratification du risque est d’identifier les patients exposés à une mort subite d’origine cardiaque en cas de récidive. Dans ces cas, une hospitalisation ou une évaluation intensive s’imposent. Maladie cardiaque ou coronaire sévère • Insuffisance cardiaque ou notion de FEVG altérée • Antécédents d’infarctus du myocarde • Autre cardiopathie connue (CMH,valvulopathie…) Eléments cliniques ou ECG suggérant une syncope d’origine rythmique • • • • Antécédent familial de mort subite cardiaque Survenue pendant l’effort ou en position allongée Palpitations au moment de la syncope ECG anormal (cf Tableau 3) Comorbidités importantes • Anémie sévère • Désordres électrolytiques Tableau 4: Critères de haut risque en cas de syncope inexpliquée Parmi les scores proposés pour cette stratification du risque, le score EGSYS (Evaluation of Guidelines in Syncope Study) est le plus performant. 7 Score EGSYS Palpitations avant la syncope +4 ECG anormal ou cardiopathie connue +3 Syncope pendant l’effort +3 Syncope en position allongée +2 Prodromes -1 Facteurs prédisposants ou favorisants -1 Total - 2 à 10 Un score supérieur ou égal à 3 indique un risque élevé (21% de mortalité à 2 ans) et une probabilité de syncope cardiaque avec une sensibilité de 92% et une spécificité de 69% (5). Il est proposé pour guider la prise en charge des patients à l’issue de l’évaluation initiale. Score Probabilité de syncope cardiaque CAT proposée >4 80 % Hospitalisation 4 35 % Hospitalisation 3 10 % Avis cardio avant décision < 3 et syncopes récidivantes 1 % Examens ambulatoires < 3 et première syncope 1 % Sortie sans examen Tableau 5: Score EGSYS et aide au diagnostic 8 6/Traitement des syncopes en fonction du diagnostic L’hospitalisation permet une prise en charge rapide avec surveillance monitorée et selon le cas exploration électrophysiologique ou implantation d’un dispositif (stimulateur ou défibrillateur). Les explorations ambulatoires comportent selon l’orientation un test d’inclinaison, un enregistrement Holter de 24 heures ou de longue durée, éventuellement implantable. Les objectifs du traitement sont la prolongation de la durée de vie, la limitation des blessures et la prévention des récidives. L’importance et la hiérarchie de ces objectifs dépendent avant tout de la cause de la syncope. Figure 3: Traitement des syncopes 9 10