
Bertil Cottier Les droits des médias CFJM
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seulement, (…), une condition de l'exercice de la liberté individuelle et un élément
indispensable à l'épanouissement de la personne humaine; elle est encore le fondement
de tout Etat démocratique: permettant la libre formation de l'opinion, notamment de
l'opinion politique, elle est indispensable au plein exercice de la démocratie. Elle mérite
dès lors une place à part dans le catalogue des droits individuels garantis par la
constitution et un traitement privilégié de la part des autorités ».
Le terme générique de liberté de l’information recouvre diverses libertés plus
spécifiques telles la liberté de l’art, la liberté de la langue ou la liberté des médias. Cette
dernière expression a aujourd’hui supplanté celle de liberté de la presse, tombée en
désuétude en raison de la diversification des moyens de communication de masse.
Alors que la CEDH traite de la liberté de l’information dans une seule disposition (l’art.
10), la Constitution suisse lui en consacre deux: l’art. 16, intitulé liberté d’opinion et
d’information, et l’art. 17, appelé liberté des médias. Cette différence est cependant
plus formelle que substantielle, ces dispositions tendant toutes à assurer une
communication plurale et indépendante. La Constitution suisse a toutefois l’avantage
de préciser quelques éléments importants.
D’abord, elle interdit expressément l’arme des tyrans qu’est la censure
(art. 17. al. 2). L’interdiction ne vise toutefois que la censure dite
préalable ; autrement dit, l’Etat n’est pas en droit de contrôler (ni de
bloquer) les produits médiatiques avant leur publication (sauf mesures
provisionnelles ; voir page 35, lettre D) ou leur diffusion. En revanche,
s’il s’avère ensuite qu’un article de presse ou une émission télévisée était
illicite (p. ex. parce que son contenu était diffamatoire ou
pornographique), les autorités sont en droit d’intervenir.
Ensuite, l’art. 17 al. 3 reconnaît expressément le secret rédactionnel, soit
le privilège des journalistes de refuser de témoigner sur les sources d’une
information confidentielle. Nous détaillerons plus avant les modalités
d’exercice de ce privilège (cf. III.21) ; à ce stade, on se contentera de
souligner que la consécration constitutionnelle du secret rédactionnel est
un signal fort, qui met en exergue le rôle primordial de cette institution
dans un régime démocratique.
Enfin, l’art. 16 al. 1 garantit la libre formation des opinions. En
conséquence, l’Etat doit s’abstenir de toute forme de propagande. Plus
concrètement, l’activité journalistique n’est pas de son ressort ; ainsi, il
n’est pas en droit d’éditer un quotidien d’information générale ou
d’exploiter une station de radiodiffusion.
On notera finalement que notre constitution ne prévoit aucune mesure concrète
tendant à assurer le pluralisme des médias, quand bien même celui-ci est toujours plus
menacé par la concentration des organes de presse et la disparition de nombreux titres
en manque de ressources financières. Plusieurs propositions de norme
constitutionnelle tendant à octroyer à la Confédération la compétence de réguler le