220Neurologies • Mai 2012 • vol. 15 • numéro 148
EN PRATIQUE
Au stade de plainte cognitive iso-
lée ou de MCI, les dosages suggé-
rés dans le
tableau 1
nous semblent
avoir bien plus d’intérêt. C’est
d’ailleurs à ce stade que la nor-
malité de l’imagerie permet aussi
d’escompter une régression signi-
ficative des dicultés du patient,
après traitement adapté. Les don-
nées de la littérature sur le sujet
restent néanmoins parcellaires
(16, 17). L’
observation n° 2
illustre ces
considérations.
LE BILAN BIOLOGIQUE N’EST PAS
PROPOSÉ DEVANT L’APPARENTE
ÉVIDENCE DU TABLEAU CLINIQUE
Cette circonstance clinique n’est
pas possible si l’on propose les
prélèvements sanguins systéma-
tiquement, ou si l’on s’est assuré
qu’ils ont été réalisés antérieure-
ment. Mais, comme nous venons
de le voir, il n’est pas rare que les
dosages soient prescrits quand la
démarche clinique piétine à l’issue
d’une imagerie normale.
C’est ici qu’émerge un piège cli-
nique : les données radiologiques
peuvent montrer des anomalies
patentes et écarter le clinicien des
considérations biologiques. Un
premier exemple est donné par
l’
observation n° 3
.
Un autre apparaît dans L’
observation
n° 4
: face à un tableau manifeste-
ment neurodégénératif, il devient
aisé d’oublier de vérifier certains
éléments biologiques fondamen-
taux et donc de priver le patient
d’un réel bénéfice clinique. En cas
de démence primitive d’évolution
rapidement progressive, nous re-
commandons ainsi de s’assurer
de l’absence de troubles carentiel,
endocrinien, métabolique, inflam-
matoire ou infectieux dont la mé-
connaissance viendrait aggraver le
tableau (19).
CONCLUSION
Les cas cliniques ici présentés
permettent d’armer qu’un bilan
biologique simple (dit de 1re in-
tention), tel qu’il avait été proposé
par la Haute Autorité de Santé en
2008, a une valeur opératoire et
permet de dépister facilement des
aections chroniques dont le dia-
gnostic peut s’avérer par ailleurs
ardu. Il est important de retenir
que les examens de 2e intention
(Tab. 1)
ne doivent pas être systé-
matiques mais guidés par les élé-
ments anamnestiques, cliniques
et radiologiques à la disposition du
praticien. Les examens de 1re in-
tention s’imposent s’ils n’ont pas
été préalablement réalisés.
Nos observations rappellent que
les anomalies sanguines peuvent
être révélées par des plaintes cogni-
tives subjectives ou un MCI et pas
seulement par un syndrome dé-
mentiel. Ainsi, le bilan de 1re inten-
tion nous semble devoir être systé-
matiquement proposé (ou vérifié)
en Consultation Mémoire, quel
que soit le niveau de gravité des
ObservatiOn n° 2
Mme D.G, 74 ans consulte pour des troubles cognitifs
apparus progressivement depuis 5 ans, se dévelop-
pant dans un contexte vasculaire (angor stenté),
dysimmunitaire (hépatite auto-immune) et dépressif
(dicultés familiales et conjugales) ancien. La plainte
est clairement alléguée par la patiente (dicultés
d’orientation topographique, troubles en mémoire à
court terme et en attention soutenue, oublis épars) et
vivement ressentie. L’examen neurologique est sans
particularité en dehors d’une hyporéflexie diuse.
Le bilan cognitif révèle un MMS à 28/30 associé à un
syndrome dysexécutif débutant.
L’imagerie est normale, éliminant l’hypothèse vas-
culaire des troubles. Le bilan biologique (selon la
HAS) révèle une hypercalcémie totale à 2,85 mmol/l
(N=2,2-2,4) confirmée par une hypercalcémie ionisée à
1,47 mmol/l (N = 1,15-1,37). Le complément d’investiga-
tion montre une hyperparathyroïdie (PTH augmentée,
non adaptée à la calcémie).
L’imagerie échographique confirme la présence d’un
adénome parathyroïdien G réséqué chirurgicalement.
A 3 mois postopératoire : MMS à 30/30 et disparition
de la plainte cognitive subjective. La famille signale
aussi des changements comportementaux importants
(reprise de nombreuses activités, moindre émousse-
ment aectif, moindre dysphorie)
Les tests de contrôle révèlent une amélioration du
statut cognitif puisque les troubles dysexécutifs ont
régressé et qu’il ne persiste qu’un trouble attentionnel
modéré.
Cette observation est en accord avec les données
classiques sur les adénomes parathyroïdiens (18)
et rappelle qu’il faut exiger la calcémie sur le bilan
biologique minimal à réaliser face à des troubles
cognitifs modérés et d’ancienneté variable. L’hypo-
réflexie était un petit indice en faveur du trouble
hypercalcémique.