CULTURE
mardi 10 janvier 2006 [11]
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«Toc Toc», une pièce de Laurent Baffie actuellement au Palais Royal à Paris
Un Baffie pas si toqué
Laurent Baffie a écrit et mis en scène «Toc Toc», une comédie sur les
troubles obsessionnels compulsifs
Après le succès de sa première
pièce, Sexe, magouilles et cul-
ture générale, Laurent Baffie,
le trublion du PAF, renoue
avec le théâtre pour Toc Toc,
une comédie attachante por-
tée par une composition à la
fois juste et enlevée.
■ Pour sa deuxième mise en scène
au théâtre, Laurent Baffie aura
particulièrement soigné sa distri-
bution: Daniel Russo, Marilou
Berry (Monologues du Vagin,
Comme une Image), Bernard Dhé-
ran (de la Comédie française), So-
phie Mounicot (de la série H sur
Canal+), Claire Maurier (la mère
de Jean-Pierre Léaud dans Les 400
Coups), Yvon Martin, et Marie Cu-
velier composent la fine équipe.
De son passage derrière la caméra
pour Les clés de Bagnole qui n'aura
rencontré qu'un public averti,
Baffie récidive dans son rôle de
provocateur.
«N'y allez pas, c'est une merde»,
scandait l'affiche de son Nanard
cinématographique; et bien cette
fois, dès la première réplique de la
première scène de Toc Toc, on est
fixé: «Allez tous vous faire
enc…!», lâche Bernard Dhéran à
l'adresse du public. Nouvelle pro-
vocation! Du moins le pense-t-on
avant d'apprendre que ce dernier
est atteint de coprolalie, une ma-
ladie plus connue sous le nom de
syndrome Gilles de la Tourette,
un trouble obsessionnel compul-
sif (toc) qui le pousse à proférer
des insanités sans qu'il puisse en
contrôler le débit.
Le décor est planté et les pa-
tients se bousculent bientôt dans
la salle d'attente du Dr Stern, émi-
nent spécialiste des tocs dont on
dit que la méthode révolution-
naire guérit d'un mal moderne de
plus en plus répandu, les obses-
sions psychologiques en tout
genre.
Le rire comme palliatif
La palette des «Toqués» triés sur le
volet est jubilatoire: de la noso-
phobique (obsédée par la pro-
preté) à la dingue de la vérifica-
tion, en passant par la jeune pali-
lalique timide (qui répète tout
deux fois) et le taximan arithmo-
maniaque (qui ne peut s'empêcher
de tout calculer), sans oublier le
jeune homme incapable de mar-
cher sur les lignes droites, tout y
passe pendant près de deux heu-
res. C'est donc une comédie «en
attendant», non pas Godot, mais
le fameux Dr Stern, le sauveur en
quelque sorte, coincé entre deux
avions. Et c'est bien là que réside la
force de l'intrigue. Ce n'est pas
nouveau, mais ça fonctionne ad-
mirablement, car de cette attente
forcée entre toqués pourrait bien
germer un début de guérison.
Laurent Baffie est donc parvenu
à concilier rire et réflexion sans
jamais tomber dans le déplacé:
«Ce n'est pas parce qu'il y a une
réflexion que ça met à l'abri du
rire», souligne Baffie l'auteur ré-
servant un finale qui, s'il n'est pas
imprévisible pour les spectateurs
les plus avertis, ne manquera pas
de faire mouche et de convaincre
les plus sceptiques.
Du rire pour deux bonnes heu-
res, et de la réflexion pour tout un
temps avec une pièce généreuse et
très divertissante.
■Christophe Trentini
«Toc Toc», écrit et mis en scène par
Laurent Baffie, jusqu'au mois de
juin au Palais Royal à Paris. Ren-
seignements par téléphone au
0033142974000.
Sur le podium: Jean-Louis Aubert
Origine: France
Style: pop/rock
Discographie: Plâtre et ciment
(1987), Bleu, blanc, vert (1989),
H (1992), Stockholm (1997),
Comme un accord (2001) et Idéal
standard (2005)
Jean-Louis Aubert, c'est tou-
jours une valeur sûre de la chan-
son française. Au point qu'il est
fort probable que ses fans achè-
tent ses albums les yeux fermés,
sans même entendre la moindre
note d'un quelconque single.
L'artiste, qu'il est inutile de
présenter tant son parcours fait
office de référence dans l'histoire
musicale francophone, semble,
depuis quelque temps mainte-
nant, privilégier l'émotion aux
dépens des murs de sons qui
composaient, parfois, ses pre-
miers albums.
Comme un accord, album qui
sortait il y a quatre ans, marquait
déjà une certaine coupure. Idéal
standard (EMI), nouvel album de
l'ex-Téléphone, ne fait que
confirmer cette sensation.
Et s'il semble toujours qu'Au-
bert se réveille guitare, mange
guitare et pense guitare, au-
jourd'hui, ses pensées se sont
assouplies. Sa révolte aussi.
Du coup, ses nouveaux mor-
ceaux touchent le cœur, affinant
leurs précisions, développant de
nouveaux sentiments. Parle-moi,
premier single de ce nouvel al-
bum en est un bon exemple:
simplicité de rigueur mais effica-
cité frappante.
Appréciation
Et grâce au tube Sur la route – duo
interprété avec Raphael, son fils
spirituel –, Aubert a aujourd'hui
réussi à quelque peu rajeunir son
auditoire. Chose que doit proba-
blement lui envier un certain
Johnny...
■Romuald Collard
www.jeanlouisaubert.emi-
artistes.biz/
Rue des galettesRue des galettes
Soulfly:
l'originalité en plus
La réputation de Max Cavalera
en matière de riffs dévastateurs
n'est plus à faire. Mais à la diffé-
rence de ces anciens frères d'ar-
mes de Sepultura, confinés dans
un métal sous-original, Soulfly
innove, tente et expérimente. A
petites doses bien sûr (un passage
planant par-ci, une fin flamenco
par-là...), histoire sans doute de
ne pas trop dérouter la cohorte
de fans. Du coup, Dark Ages
(Roadrunner) devient le meilleur
album du groupe à ce jour.
En concert à la Rockhal le 11 février.
Korn: attention
à la répétition
Avec Korn, c'est un brin diffé-
rent. Le groupe de Bakersfield a,
lui, carrément révolutionné le
métal, sorti de grands albums et
se retrouve aujourd'hui dans une
position de leader incontesté, à
la limite du culte. Oui, mais
voilà: See you on the other side,
nouvel album du groupe, et pre-
mier chez le géant EMI, est
quand même loin d'être de la
trempe de ses deux premiers ou-
vrages. A force de se répéter, on
finit souvent par irriter...
Stream of Passion:
lyrisme et gros riffs
Stream of Passion est le projet
parallèle d'Arjen Lucassen, guita-
riste hollandais leader du groupe
Ayeron. A ses côtés, Marcella Bo-
vio, chanteuse lyrique déjà pré-
sente sur le dernier Ayeron. La
formule fonctionne parfaite-
ment au rebours des inaudibles
Within Temptation ou autre
Nightwish. Embrace the storm (In-
sideOutMusic / Sony-BMG), pre-
mier album du groupe, s'avère
être une bien belle surprise.
■RC
PhotomatonPhotomatonDeux pianistes nous ont quittésDeux pianistes nous ont quittés
Yuri Boukoff, d'origine bulgare
Le pianiste français d'origine bulgare Yuri Boukoff est mort à l'âge de
82 ans samedi à son domicile de Neuilly-sur-Seine, dans la banlieue
parisienne, a-t-on appris hier par ses proches.
Né à Sofia le 1
er
mai 1923, d'une mère cantatrice d'origine russe et
d'un père officier de marine, Yuri Boukoff est très tôt initié au piano
et formé par Brzoniowski et surtout Andrei Stoyanov. Après un
premier récital à l'âge de 15 ans à Sofia, après la Seconde Guerre
mondiale, un premier prix au Concours national de Bulgarie lui valut
une bourse pour la France où il est devenu élève du virtuose Yves Nat
au Conservatoire national supérieur de musique (CNSM) de Paris. Un
premier prix de piano obtenu en 1946, il perfectionna ses connais-
sances musicales auprès du compositeur et chef d'orchestre Georges
Enesco, les pianistes Edwin Fischer et Marguerite Long.
Yuri Boukoff, riche de ses expériences, remporta divers lauriers
comme lauréat des Concours de Genève en 1947, Marguerite Long en
1949, Diemer en 1951 et Reine Elisabeth en 1952, ce qui lui ouvrit
une carrière internationale. En 1964, il avait obtenu la nationalité
française. Il fut le premier pianiste européen en 1956 à faire une
tournée en Chine. Son répertoire le portait vers la période roman-
tique mais il ne négligeait pas le répertoire du XX
e
siècle, signant
notamment une intégrale des sonates de Prokofiev et jouant aussi ses
contemporains comme Pierre Wissmer dont il créa le 3
e
concerto de
piano en 1974.
Les obsèques de Yuri Boukoff se dérouleront jeudi en l'église
Saint-Roch, la paroisse parisienne des artistes du spectacle.
Helena Sa e Costa, d'origine portugaise
L'une des plus grandes pianistes portugaises du XX
e
siècle, Helena Sa
e Costa, est décédée dimanche soir à l'âge de 92 ans dans la ville de
Porto, a annoncé hier la famille de l'artiste.
Professeur au conservatoire national de Lisbonne et au conserva-
toire de musique de Porto, elle a compté parmi ses élèves les pianistes
portugais Adriano Jordao et Pedro Burmester. Issue d'une famille de
pianistes, elle s'est produite au cours de sa carrière dans de nombreux
pays européens notamment en Allemagne, où elle a étudié, et aux
Etats-Unis. Les obsèques sont prévues mardi matin à Porto. (AFP)