5 mardi 10 janvier 2006 CULTURE [11] «Toc Toc», une pièce de Laurent Baffie actuellement au Palais Royal à Paris Rue des galettes Un Baffie pas si toqué Soulfly: l'originalité en plus plus en plus répandu, les obsessions psychologiques en tout genre. Après le succès de sa première pièce, Sexe, magouilles et culture générale, Laurent Baffie, le trublion du PAF, renoue avec le théâtre pour Toc Toc, une comédie attachante portée par une composition à la fois juste et enlevée. ■ Pour sa deuxième mise en scène au théâtre, Laurent Baffie aura particulièrement soigné sa distribution: Daniel Russo, Marilou Berry (Monologues du Vagin, Comme une Image), Bernard Dhéran (de la Comédie française), Sophie Mounicot (de la série H sur Canal+), Claire Maurier (la mère de Jean-Pierre Léaud dans Les 400 Coups), Yvon Martin, et Marie Cuvelier composent la fine équipe. De son passage derrière la caméra pour Les clés de Bagnole qui n'aura rencontré qu'un public averti, Baffie récidive dans son rôle de provocateur. «N'y allez pas, c'est une merde», scandait l'affiche de son Nanard cinématographique; et bien cette fois, dès la première réplique de la première scène de Toc Toc, on est fixé: «Allez tous vous faire enc…!», lâche Bernard Dhéran à l'adresse du public. Nouvelle provocation! Du moins le pense-t-on avant d'apprendre que ce dernier est atteint de coprolalie, une maladie plus connue sous le nom de syndrome Gilles de la Tourette, un trouble obsessionnel compulsif (toc) qui le pousse à proférer des insanités sans qu'il puisse en contrôler le débit. Le décor est planté et les patients se bousculent bientôt dans la salle d'attente du Dr Stern, éminent spécialiste des tocs dont on dit que la méthode révolutionnaire guérit d'un mal moderne de Le rire comme palliatif La palette des «Toqués» triés sur le volet est jubilatoire: de la nosophobique (obsédée par la propreté) à la dingue de la vérification, en passant par la jeune palilalique timide (qui répète tout deux fois) et le taximan arithmomaniaque (qui ne peut s'empêcher de tout calculer), sans oublier le jeune homme incapable de marcher sur les lignes droites, tout y passe pendant près de deux heures. C'est donc une comédie «en attendant», non pas Godot, mais le fameux Dr Stern, le sauveur en quelque sorte, coincé entre deux avions. Et c'est bien là que réside la force de l'intrigue. Ce n'est pas nouveau, mais ça fonctionne admirablement, car de cette attente forcée entre toqués pourrait bien germer un début de guérison. Laurent Baffie est donc parvenu à concilier rire et réflexion sans jamais tomber dans le déplacé: «Ce n'est pas parce qu'il y a une réflexion que ça met à l'abri du rire», souligne Baffie l'auteur réservant un finale qui, s'il n'est pas imprévisible pour les spectateurs les plus avertis, ne manquera pas de faire mouche et de convaincre les plus sceptiques. Du rire pour deux bonnes heures, et de la réflexion pour tout un temps avec une pièce généreuse et très divertissante. ■ Christophe Trentini Laurent Baffie a écrit et mis en scène «Toc Toc», une comédie sur les troubles obsessionnels compulsifs Deux pianistes nous ont quittés Yuri Boukoff, d'origine bulgare Le pianiste français d'origine bulgare Yuri Boukoff est mort à l'âge de 82 ans samedi à son domicile de Neuilly-sur-Seine, dans la banlieue parisienne, a-t-on appris hier par ses proches. Né à Sofia le 1er mai 1923, d'une mère cantatrice d'origine russe et d'un père officier de marine, Yuri Boukoff est très tôt initié au piano et formé par Brzoniowski et surtout Andrei Stoyanov. Après un premier récital à l'âge de 15 ans à Sofia, après la Seconde Guerre mondiale, un premier prix au Concours national de Bulgarie lui valut une bourse pour la France où il est devenu élève du virtuose Yves Nat au Conservatoire national supérieur de musique (CNSM) de Paris. Un premier prix de piano obtenu en 1946, il perfectionna ses connaissances musicales auprès du compositeur et chef d'orchestre Georges Enesco, les pianistes Edwin Fischer et Marguerite Long. Yuri Boukoff, riche de ses expériences, remporta divers lauriers comme lauréat des Concours de Genève en 1947, Marguerite Long en 1949, Diemer en 1951 et Reine Elisabeth en 1952, ce qui lui ouvrit une carrière internationale. En 1964, il avait obtenu la nationalité française. Il fut le premier pianiste européen en 1956 à faire une tournée en Chine. Son répertoire le portait vers la période romantique mais il ne négligeait pas le répertoire du XXe siècle, signant notamment une intégrale des sonates de Prokofiev et jouant aussi ses contemporains comme Pierre Wissmer dont il créa le 3e concerto de piano en 1974. Les obsèques de Yuri Boukoff se dérouleront jeudi en l'église Saint-Roch, la paroisse parisienne des artistes du spectacle. Helena Sa e Costa, d'origine portugaise L'une des plus grandes pianistes portugaises du XXe siècle, Helena Sa e Costa, est décédée dimanche soir à l'âge de 92 ans dans la ville de Porto, a annoncé hier la famille de l'artiste. Professeur au conservatoire national de Lisbonne et au conservatoire de musique de Porto, elle a compté parmi ses élèves les pianistes portugais Adriano Jordao et Pedro Burmester. Issue d'une famille de pianistes, elle s'est produite au cours de sa carrière dans de nombreux pays européens notamment en Allemagne, où elle a étudié, et aux Etats-Unis. Les obsèques sont prévues mardi matin à Porto. (AFP) «Toc Toc», écrit et mis en scène par Laurent Baffie, jusqu'au mois de juin au Palais Royal à Paris. Renseignements par téléphone au 00 33 1 42 97 40 00. Photomaton Sur le podium: Jean-Louis Aubert Origine: France Style: pop/rock Discographie: Plâtre et ciment (1987), Bleu, blanc, vert (1989), H (1992), Stockholm (1997), Comme un accord (2001) et Idéal standard (2005) Jean-Louis Aubert, c'est toujours une valeur sûre de la chanson française. Au point qu'il est fort probable que ses fans achètent ses albums les yeux fermés, sans même entendre la moindre note d'un quelconque single. L'artiste, qu'il est inutile de présenter tant son parcours fait office de référence dans l'histoire musicale francophone, semble, depuis quelque temps maintenant, privilégier l'émotion aux dépens des murs de sons qui composaient, parfois, ses premiers albums. Comme un accord, album qui sortait il y a quatre ans, marquait déjà une certaine coupure. Idéal standard (EMI), nouvel album de l'ex-Téléphone, ne fait que confirmer cette sensation. Et s'il semble toujours qu'Aubert se réveille guitare, mange guitare et pense guitare, aujourd'hui, ses pensées se sont assouplies. Sa révolte aussi. Du coup, ses nouveaux morceaux touchent le cœur, affinant leurs précisions, développant de La réputation de Max Cavalera en matière de riffs dévastateurs n'est plus à faire. Mais à la différence de ces anciens frères d'armes de Sepultura, confinés dans un métal sous-original, Soulfly innove, tente et expérimente. A petites doses bien sûr (un passage planant par-ci, une fin flamenco par-là...), histoire sans doute de ne pas trop dérouter la cohorte de fans. Du coup, Dark Ages (Roadrunner) devient le meilleur album du groupe à ce jour. En concert à la Rockhal le 11 février. Korn: attention à la répétition Avec Korn, c'est un brin différent. Le groupe de Bakersfield a, lui, carrément révolutionné le métal, sorti de grands albums et se retrouve aujourd'hui dans une position de leader incontesté, à la limite du culte. Oui, mais voilà: See you on the other side, nouvel album du groupe, et premier chez le géant EMI, est quand même loin d'être de la trempe de ses deux premiers ouvrages. A force de se répéter, on finit souvent par irriter... Stream of Passion: lyrisme et gros riffs nouveaux sentiments. Parle-moi, premier single de ce nouvel album en est un bon exemple: simplicité de rigueur mais efficacité frappante. Appréciation Et grâce au tube Sur la route – duo interprété avec Raphael, son fils spirituel –, Aubert a aujourd'hui réussi à quelque peu rajeunir son auditoire. Chose que doit probablement lui envier un certain Johnny... ■ Romuald Collard www.jeanlouisaubert.emiartistes.biz/ Stream of Passion est le projet parallèle d'Arjen Lucassen, guitariste hollandais leader du groupe Ayeron. A ses côtés, Marcella Bovio, chanteuse lyrique déjà présente sur le dernier Ayeron. La formule fonctionne parfaitement au rebours des inaudibles Within Temptation ou autre Nightwish. Embrace the storm (InsideOutMusic / Sony-BMG), premier album du groupe, s'avère être une bien belle surprise. ■ RC