Article : « Apports du peptide natriurétique de type B dans la prise

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DCEM3 – Lecture Critique et Analyse d’Articles – 2006/2007
Article : « Apports du peptide natriurétique de type B dans la prise en
charge aux urgences des patients suspects d’insuffisance cardiaque. À
propos de 125 patients »
Corrections
Qs 1. Rédiger le résumé de cet article (250 mots maximum).
Devant une dyspnée, il est primordial de réaliser dès les urgences, le diagnostic,
parfois difficile, d’insuffisance cardiaque.
Objectif
L’objectif de cette étude était de déterminer l’intérêt du dosage du peptide
natriurétique de type B (BNP) pour aider à établir ce diagnostic aux urgences.
Méthodes
Nous avons prospectivement dosé le BNP par méthode ultrarapide (BIOSITE/BMD)
chez 125 sujets se présentant consécutivement aux urgences de notre centre hospitalier
pour une dyspnée de repos ou au moindre effort. Nous avons ensuite comparé ces taux
aux diagnostics émis aux urgences et à la sortie du patient du centre.
Résultats
Soixante-dix-sept patients (72 %) sont sortis du centre avec un diagnostic
d’insuffisance cardiaque. Aux urgences, ce diagnostic a été fait par excès dans 6,5 %
des cas, alors que le taux de BNP moyen était faible (147 pg/mL). A contrario, le
diagnostic a été omis dans 12 % des cas, alors que le taux de BNP moyen était très
élevé (934 pg/mL). Dans ce dernier groupe, la mortalité était supérieure (30 %) à celle
des patients dont l’insuffisance cardiaque était diagnostiquée aux urgences (18 %). Le
seuil de BNP le plus utile pour évoquer une poussée d’insuffisance cardiaque
secondaire à une atteinte ventriculaire gauche était de 300 pg/mL, avec une sensibilité
et une spécificité de respectivement 93,8 % et 86 %.
Conclusion
Le dosage du BNP par méthode ultrarapide permet d’aider à faire le diagnostic
d’insuffisance cardiaque aux urgences. Le seuil diagnostique le plus approprié est dans
notre étude de 300 pg/mL. [247 mots]
Qs 2. Critiquer le titre.
Le titre est clair mais ne reflète pas exactement le contenu de l’article. L’étude réalisée
ici se contente d’évaluer a posteriori la capacité théorique du dosage du BNP à
diagnostiquer une insuffisance cardiaque lors d’une dyspnée aiguë aux urgences. Il est
donc exagéré de parler d’apport dans la prise en charge alors que celle-ci n’était
strictement pas modifiée par le dosage réalisé.
Dr Patrick GERBEAUX – Dr Julien MANCINI
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Qs 3. Quels sont les arguments rapportés en faveur de la potentielle utilité du dosage du
BNP devant une dyspnée aiguë aux urgences ?
Fréquence : la dyspnée est un motif fréquent de recours aux urgences, et l’insuffisance
cardiaque en est une cause fréquente.
Difficulté diagnostique : le diagnostic de certitude fait appel à des examens
complémentaires (échocardiographie) difficiles à réaliser en urgences, notamment la
nuit.
Prise en charge : elle va être différente en fonction du diagnostic étiologique posé et la
prise en charge précoce d’une insuffisance cardiaque semble pouvoir en améliorer le
pronostic.
Possibilité pratique : le dosage de BNP peut être réalisé dans le cadre d’une prise en
charge aux urgences car il nécessite une simple prise de sang et son résultat est
rapidement disponible (15 min).
Qs 4. Discuter de la période choisie pour réaliser l’étude et de son influence potentielle sur
les différents indicateurs utilisables pour évaluer les qualités diagnostiques du BNP.
L’étude a été réalisée pendant les mois d’été. Ceci peut conduire à maximiser la place
de l’insuffisance cardiaque parmi les causes de dyspnée, par rapport à des causes
respiratoires comme les infections broncho-pulmonaires, plus fréquentes lors des mois
d’hiver. De plus, la chaleur impliquant une majoration du débit cardiaque pour réguler
la température corporelle, la décompensation d’une insuffisance cardiaque peut être
plus fréquente en période chaude. Au final, le choix de cette période d’étude majore la
prévalence de l’insuffisance cardiaque.
La sensibilité, la spécificité et les rapports de vraisemblance d’un test diagnostique ne
dépendent pas de la prévalence de la pathologie dans la population étudiée. Seules les
valeurs prédictives ont pu être influencées par la période d’étude.
Qs 5. Quel est le « gold-standard » utilisé ?
Le « gold-standard » est le diagnostic définitif posé à la sortie du patient, après
notamment la réalisation d’examen complémentaire (angiographie ou
échocardiographie) et le suivi de l’évolution clinique (sensibilité aux diurétiques).
Qs 6. Analyser les biais potentiellement induits par le fait que les diagnostics définitifs sont
établis à la sortie des patients du centre hospitalier.
La poussée d’insuffisance cardiaque diagnostiquée au SAU (service d’accueil des
urgences) entraîne le début d’un traitement. Si les examens complémentaires
(angiographie ou échocardiographie) sont réalisées tardivement, ils peuvent s’être
normalisés, et créer ainsi des diagnostics faussement en excès au SAU.
La sensibilité aux diurétiques peut aussi être difficile à apprécier si plusieurs
traitements ont été débutés face au doute diagnostique (anticoagulants pour l'embolie,
aérosols pour le BPCO, diurétiques pour l'insuffisance cardiaque, voire antibiotiques
pour l'infection).
Il y a donc un risque important de biais de classement.
Dr Patrick GERBEAUX – Dr Julien MANCINI
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Qs 7. Quel est l’examen diagnostique de référence ? Peut-on comparer dans l’article sa
valeur diagnostique à celle du BNP ?
L’examen diagnostique de référence était ici le reflet de la situation habituelle, donc le
diagnostic posé aux urgences par le médecin senior en charge du patient (en fonction
d’un faisceau d’arguments cliniques et paracliniques).
Sa valeur diagnostique n’était pas fournie dans l’article sous le format standard
attendu (Sensibilité, Spécificité, VPP, VPN), ce qui rend difficile la comparaison avec
la valeur diagnostique du dosage de BNP.
Néanmoins au vu des données fournies, il est possible de les recalculer en
reconstruisant le classique tableau à 4 cases.
Qs 8. Quelle implication pratique entraîne l’inclusion dans l’étude de patients n’ayant pas
d’insuffisance rénale (créatininémie > 240µmol/l) ?
Les résultats obtenus ne sont donc pas généralisables aux insuffisants rénaux. Ainsi,
pour que le dosage bu BNP puisse être utilisé en pratique courante, il faut pouvoir
disposer du résultat de la créatininémie dans le même délai que celui du BNP (15 min)
pour que ce dernier soit interprétable.
Qs 9. Critiquer le paragraphe « Données statistiques ».
La première phrase indique la description des variables quantitatives (rien n’est
précisé pour les variables qualitatives), Ensuite, le reste du paragraphe n’a pas de sens
car aucun résultat de test statistique n’est ensuite donné dans la partie « Résultats » (ni
uni- ni multi-variés). De plus, des erreurs concernent les tests proposés : par exemple,
le test du Khi² sert à comparer des proportions, donc des données qualitatives et non
pas quantitatives (sauf après regroupement en classes).
Ce manque important de rigueur tend à décrédibiliser le reste de l’article.
Qs 10. Juger de la cohérence des effectifs étudiés dans la totalité de l’article.
Par rapport aux 125 patients annoncés, seulement 115 sont présents dans le tableau 1.
Ensuite, les effectifs du tableau 2 sont cohérents (62 + 15 = 77 cas d’insuffisance
cardiaque).
Qs 11. Critiquer l’analyse du résultat proposée par les auteurs dans l’avant-dernier paragraphe
de la section Résultats : « Il faut également noter que la précocité du diagnostic
d’insuffisance cardiaque influe directement sur le taux de mortalité ».
Même si la mortalité (cf. dernière ligne du tableau 2) semble plus fréquente dans le
groupe dont l’IC n’a pas été diagnostiquée dès les urgences (30%) par rapport à ceux
avec un diagnostic précoce (18%), il est impossible de l’interpréter car le résultat du
test statistique de comparaison correspondant n’est pas fourni. De plus, au vu du faible
effectif dans le groupe non diagnostiqué précocement (n=15), il est fort probable que
cette différence ne soit pas statistiquement significative.
Dr Patrick GERBEAUX – Dr Julien MANCINI
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Qs 12. Que pensez-vous de l’originalité de cette étude ?
Au vu de la discussion, il semble que cette étude ne soit pas particulièrement originale
puisque de nombreuses équipes se sont déjà intéressées au même sujet avec au moins
trois études publiées. La qualité et la visibilité de ces études étaient à priori
satisfaisantes puisqu’elles ont entraîné la modification des recommandations de la
Société Européenne de Cardiologie.
Néanmoins, même si ce n’était pas le but annoncé du travail, cette étude permet de
rediscuter du choix du seuil de BNP à utiliser en fonction de la pathologie qu’on
souhaite précisément isoler : IC avec ou sans inclusion des IC droite exclusive.
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