Chapitre 22 - Mesurage des polluants par voie optique : turbidité et

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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22. MESURAGE DES POLLUANTS PAR VOIE OPTIQUE :
TURBIDITE ET ABSORPTION DANS L’ULTRAVIOLET
22.1 INTRODUCTION
Le mesurage des polluants par analyses en laboratoire sur échantillons obtenus au
moyen de préleveurs (voir chapitre 21) nécessite un certain délai entre le prélèvement
de l’échantillon sur le terrain et l’obtention du résultat d’analyse en laboratoire. Le suivi
et la gestion en temps réel et l’automatisation des systèmes d’assainissement urbain
nécessitent le développement de méthodes de mesure en continu de la qualité des eaux
résiduaires. Par continu, il faut entendre d’une part avec une haute fréquence de mesure,
correspondant généralement à un pas de temps compris entre 1 minute et un quart
d’heure, voire une demi-heure, et d’autre part une disponibilité quasiment immédiate du
résultat de mesure.
Dans ce contexte, la possibilité de déterminer, par voie optique et sans ajout de réactifs,
les concentrations de quelques polluants significatifs apparaît intéressante. Les
paramètres polluants mesurés sont des paramètres globaux caractérisant les matières
organiques et les matières en suspension, ainsi que des paramètres spécifiques tels que
nitrates, phénols, détergents anioniques, chrome hexavalent et huiles minérales à l’état
de traces. Les recherches se poursuivent pour parvenir à détecter d’autres paramètres,
grâce à une analyse fine des spectres lumineux des eaux résiduaires.
Ce besoin métrologique coïncide avec la possibilité offerte, dans le cadre réglementaire
de l’autosurveillance des rejets des agglomérations (JO, 1995, voir annexe 1), de
remplacer le mesurage de certains polluants (MES, DCO) par le suivi en continu de
paramètres ou grandeurs optiques représentatifs de ces polluants.
Bien que limitée, en 1999, au mesurage de quelques paramètres polluants seulement, la
métrologie par voie optique offre, par son caractère continu et immédiat, la possibilité
de suivre à courts pas de temps le fonctionnement des systèmes d’assainissement, et en
conséquence de mieux comprendre l’origine des anomalies éventuelles, ce qui est plus
difficile avec des prélèvements d’échantillons ponctuels et/ou moyens.
De nombreuses expérimentations sont menées actuellement pour employer la
métrologie par voie optique. Les résultats obtenus sont satisfaisants dans la plupart des
cas. Mais les relations numériques établies entre paramètres polluants et paramètres
optiques restent le plus souvent spécifiques au site et au matériel considérés, ce qui rend
difficile toute généralisation. En outre, ces relations varient lorsque les caractéristiques
du milieu changent notablement, par exemple en passant du temps sec au temps de
pluie. Si les méthodes traditionnelles d’analyse sur échantillons sont définies dans des
normes, le manque de standardisation pour l’établissement des relations entre
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
paramètres polluants et paramètres optiques pourrait expliquer certaines des disparités
observées. Nous essayerons d’en analyser les différents facteurs.
Ce chapitre traite de l’utilisation de matériels de terrain pour le mesurage par voie
optique, sans ajout de réactifs, des polluants présents dans les systèmes
d’assainissement. Nous nous limiterons aux effluents urbains à dominante domestique,
les effluents industriels nécessitant des spécificités métrologiques qui sortent du cadre
de cet ouvrage.
22.2 PARAMETRES POLLUANTS MESURABLES PAR VOIE OPTIQUE
Par convention et simplification, nous employons dans tout ce chapitre :
- le terme « paramètre polluant » pour désigner une grandeur relative à un polluant,
généralement sa concentration dans l’eau étudiée ;
- le terme « paramètre optique » pour désigner la grandeur mesurée par un capteur
optique.
Les paramètres polluants mesurables par voie optique sans ajout de réactif sont ceux
pour lesquels il est possible d’établir une relation entre la valeur de leur concentration et
la valeur d’un paramètre optique. Dans ce chapitre, nous présentons les deux
paramètres optiques les plus souvent utilisés :
- l’intensité lumineuse diffusée par un échantillon éclairé par un rayon lumineux de
caractéristiques connues ;
- la diminution d’intensité d’un rayon lumineux lors de la traversée d’un échantillon à
analyser.
Les deux principes de mesure utilisés pour déterminer ces paramètres optiques sont
l’absorption moléculaire et la turbidimétrie.
La turbidité est la réduction de transparence d’un liquide due aux matières non
dissoutes, c’est à dire colloïdales et en suspension. Il paraît donc a priori possible
d’établir une relation entre la turbidité et le paramètre MES (matières en suspension)
pour les eaux résiduaires ou le paramètre MS (matières sèches) pour les boues issues du
traitement de l’eau. La turbidité dépend non seulement de la concentration en matières
en suspension de l’échantillon, mais aussi des caractéristiques optiques et géométriques
des particules, notamment leur granulométrie. L’établissement d’une relation fiable
entre paramètre polluant et paramètre optique dépend soit de la constance des
caractéristiques des particules sur un site de mesure donné, aussi bien en réseau
d’assainissement qu’en station d’épuration, soit de la prise en compte de leur variabilité
en intégrant dans l’expression de cette relation des grandeurs corrélées
complémentaires, par exemple la vitesse d’écoulement pour les mesurages en réseau
d’assainissement pluvial.
Les composés polluants dissous présentent des caractéristiques spécifiques d’absorption
de la lumière en fonction de leur structure moléculaire. Cette propriété permet de
déterminer leur concentration dans les eaux résiduaires. L’absorption varie notamment
en fonction de la longueur d’onde du rayon lumineux, ce qui permet de définir le
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
spectre d’absorption du composé considéré. Par exemple, les nitrates présentent un
maximum d’absorption pour les longueurs d’onde voisines de 200 nm.
Outre les nitrates, de nombreuses molécules organiques comportant des groupements
fonctionnels possédant des liaisons chimiques insaturées présentent une absorption
marquée pour certaines longueurs d’onde du spectre ultraviolet (UV). Il est donc
possible d’établir des relations entre l’absorbance mesurée et la concentration des
paramètres carbonés globaux tels que la Demande Chimique en Oxygène (DCO), la
Demande Biochimique en Oxygène en cinq jours (DBO5) et le Carbone Organique
Total (COT) notamment. Toujours dans le domaine UV, Thomas (1995) mentionne la
possibilité de doser le chrome hexavalent, les phénols et les détergents anioniques. On
peut également mesurer des traces d’huiles minérales par fluorescence.
Notons qu’un certain nombre d’analyses spectrométriques d’absorption moléculaire
effectuées en laboratoire permettent de déterminer la concentration de diverses
substances à partir du dosage d’un complexe coloré formé par cette substance avec un
réactif spécifique. Ces analyses n’entrent pas dans le champ d’investigation du présent
chapitre.
Les eaux résiduaires contiennent de très nombreux composés présentant une absorption
à diverses longueurs d’ondes. Pour éviter les interférences, le mesurage d’un composé
donné doit donc tenir compte de la présence des autres composés, surtout s’ils sont
présents en concentrations non négligeables dans le milieu analysé. Cette difficulté peut
être résolue de deux manières :
- par le choix d’une longueur d’onde spécifique au composé mesuré ;
- par un traitement ultérieur du signal obtenu à différentes longueurs d’onde. Diverses
méthodes de traitement sont utilisées, allant des plus simples (régression linéaire) aux
plus élaborées (déconvolution déterministe). Des traitements du signal performants
permettront vraisemblablement d’augmenter encore à l’avenir le nombre de
paramètres polluants mesurables par voie optique.
22.3 PRINCIPES DE MESURE
Le principe de mesure par voie optique des polluants contenus dans les eaux repose sur
l’analyse des caractéristiques d’un rayon lumineux avant et après qu’il ait traversé
l’échantillon d’eau à étudier. Cependant, la variété des technologies proposées par les
fabricants et la diversité des eaux analysées rendent difficile la comparaison des
résultats issus de différentes expérimentations. D’autant plus que, selon que l’on
considère la fraction dissoute ou la fraction particulaire ou colloïdale des polluants, le
principe de mesure fait appel respectivement à l’absorption moléculaire ou à la
turbidimétrie.
La Figure 22.1 présente les ordres de grandeur des différents facteurs intervenant dans
les processus de mesure par voie optique : la forme du polluant (dissoute, colloïdale et
particulaire), les longueurs d’onde utilisées dans le spectre électromagnétique
(ultraviolet, visible ou infrarouge). Le rapport du diamètre dP des particules sur la
longueur d’onde λ joue un rôle important dans la manière dont la lumière est absorbée
ou diffusée lors de son passage à travers l’échantillon analysé.
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Rayleigh
formulation
en lumière
diffusée
dissoute
Grosses particules
Mie
colloïdale
suspension
forme des
polluants
longueur
d'onde de la
lumière
ultraviolet
infrarouge
visible
argiles
éléments
minéraux
éléments
organiques
0,0001 0,001 0,01
(1 nanomètre)
bactéries
limons
sables
plancton
virus
pollen
0,1
1
10
microns
100 1000
(1 millimètre)
Figure 22.1 : ordres de grandeur des différents facteurs intervenant dans
le mesurage des polluants par voie optique (limites approximatives)
22.3.1 Absorption moléculaire
L’absorption moléculaire est une technique utilisée pour le mesurage des composés
polluants présents sous forme dissoute dans les eaux.
22.3.1.1 Eléments théoriques
Quand un faisceau de lumière monochromatique de longueur d’onde λ traverse un
échantillon d’eau, il est partiellement absorbé par les composés dissous présents dans
l’eau. Ce phénomène résulte de la mise en vibration, sous l’effet de l’énergie lumineuse
reçue, soit des électrons (dans les domaines ultraviolet et visible), soit des atomes et des
groupes d’atomes (dans le domaine infrarouge) présents dans les composés. Chaque
composé possède ainsi un spectre d’absorption spécifique lié à la configuration de ses
différentes liaisons chimiques et à sa configuration électronique (Malingrey, 1987).
Pour quantifier ce phénomène, on procède au mesurage, pour une longueur d’onde
spécifique du composé étudié, de l’absorbance Ab définie par :
⎛I ⎞
Ab = log ⎜⎜ L0 ⎟⎟
⎝ IL ⎠
avec
IL0
IL
Eq. 22.1
intensité lumineuse avant traversée de l’échantillon (W.cm-2) ;
intensité lumineuse après traversée de l’échantillon (W.cm-2).
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
La concentration C du composé est reliée à l’absorbance par la loi de Beer-Lambert :
⎛I ⎞
Ab = log ⎜⎜ L0 ⎟⎟ = ε λ LC
⎝ IL ⎠
avec
Eq. 22.2
ελ coefficient d’absorbance à la longueur d’onde λ (L.mg-1.cm-1) ;
L longueur du trajet optique (m) ;
C concentration du composé étudié, en absence d’interférences (mg/L)
Les conditions de validité de la loi de Beer-Lambert sont les suivantes :
- la solution doit être diluée et homogène, ce qui est généralement le cas pour les eaux
résiduaires ;
- la substance absorbante ne doit pas être fluorescente ni provoquer de réaction
chimique.
Le coefficient d’absorbance dépend de la température. Une élévation de celle-ci déplace
généralement le spectre d’absorption vers des longueurs d’onde plus élevées : c’est
l’effet bathochromatique.
Les phénomènes d’interférences entre composés sont liés à la propriété d’additivité des
absorbances, propriété illustrée Figure 22.2. Considérons d’une part deux cuves
séparées, de même épaisseur L, contenant en solution deux composés différents aux
concentrations C1 et C2 et dont les coefficients d’absorbance respectifs sont ελ1 et ελ2.
Considérons d’autre part une cuve de même épaisseur L contenant, aux mêmes
concentrations, le mélange de ces deux composés ne réagissant pas entre eux.
L’absorbance Ab dans la cuve unique est égale à la somme des absorbances Ab1 et Ab2
dans les deux cuves séparées :
Ab = Ab1 + Ab 2 = L(ε λ1C1 + ε λ 2C 2 )
Eq. 22.3
ελ1
IL1
IL0
IL2
IL0
ελ2
ελ1
ελ2
C1
C1
C2
C2
L
L
L
IL2
Figure 22.2 : additivité des absorbances
Cette propriété d’additivité, très importante, est exploitée dans la plupart des appareils
de mesure et permet en particulier le dosage de composés présents en mélange non
réactionnel dans l’échantillon.
527
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22.3.1.1 Application aux eaux résiduaires
Les applications les plus courantes de la spectrophotométrie d’absorption sont d’une
part les analyses quantitatives de substances connues, pures et en mélange, et d’autre
part la caractérisation de structures moléculaires.
Nous ne traiterons ici que des analyses quantitatives, effectuées le plus souvent dans les
domaines ultraviolet et visible où les spectres des effluents urbains sont en général à
large bande, peu nombreux et relativement peu caractéristiques. La Figure 22.3
représente les spectres d’absorption types d’une eau résiduaire urbaine brute puis
filtrée, afin de faire apparaître la fraction particulaire des polluants, fraction mesurable
séparément par turbidimétrie (voir paragraphe 22.3.2). Nous avons ajouté 20 mg/L de
nitrates (N-NO3) dans l’échantillon : le spectre correspondant à ce polluant spécifique
apparaît de manière nettement plus caractéristique que les spectres globaux.
5
absorbance
4
spectre des nitrates
3
spectre des matières
organiques dissoutes
2
palier d'absorption
des matières
en suspension
1
0
200
250
300
350
400
450
500
550
longueur d'onde (nm)
Figure 22.3 : spectre d’absorption type d’une eau résiduaire urbaine brute
(spectre total MES + matières organiques dissoutes) puis filtrée à 0,45 µm
Nous remarquons sur cette figure :
- que le spectre des nitrates est bien identifié entre 200 et 250 nm ;
- que le spectre des matières organiques dissoutes est décroissant sur toute l’étendue
des longueurs d’ondes et s’annule vers 550 nm ;
- que l’absorbance des matières en suspension (partie située entre le spectre total et le
spectre des matières organiques dissoutes) varie peu en fonction de la longueur
d’onde.
L’allure très étalée du spectre global des matières organiques dissoutes résulte de la
superposition des spectres des multiples composés organiques présents dans une eau
résiduaire. Tout comme le spectre global de l’eau brute, il peut varier en fonction de la
nature et des caractéristiques des composés présents. Cependant, si celles-ci sont peu
variables, il est envisageable d’établir des relations numériques stables entre
l’absorbance et les concentrations des paramètres polluants. De telles relations ont été
établies par différents auteurs, notamment dans le domaine ultraviolet pour une
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
longueur d’onde λ = 254 nm, afin de déterminer la concentration en DCO dans les eaux
résiduaires (voir paragraphe 22.9).
22.3.2 Turbidimétrie
La turbidimétrie est une technique utilisée pour le mesurage des composés polluants
présents sous formes particulaire et colloïdale dans les eaux. Elle est décrite notamment
dans la norme NF EN 27027 (1994).
La turbidité est la réduction de la transparence d’un liquide, dans notre cas les eaux
résiduaires, due à la présence de matières colloïdales et/ou en suspension. L’altération
du faisceau lumineux traversant l’échantillon est due aux interactions entre ce faisceau
et les particules. D’un point de vue théorique, il peut être décrit par les lois de
l’électromagnétisme ou de l’optique.
Le faisceau lumineux est modifié de deux manières lors de la traversée de
l’échantillon :
- une partie du faisceau est diffusée par les particules dans toutes les directions ;
- une partie du faisceau émis passe entre et éventuellement à travers les particules si
elles ne sont pas opaques.
Ces deux phénomènes physiques correspondent aux deux principes de mesure de la
turbidité :
- le mesurage de la lumière diffusée : l’intensité lumineuse mesurée augmente avec la
concentration en particules, jusqu’au seuil de saturation qui définit ainsi la limite de
ce que l’on peut qualifier de milieu dilué ;
- le mesurage de la lumière transmise : dans ce cas, l’intensité lumineuse mesurée
diminue quand la concentration en particules augmente.
Ces deux principes de mesure sont détaillés dans les paragraphes suivants.
22.3.2.1 Mesurage de la lumière diffusée
La diffusion de la lumière par une particule dépend de nombreux paramètres,
notamment la longueur d’onde λ, la taille et la forme de la particule, et son indice de
réfraction (Belin et Grosman, 1974 ; Russel, 1994). La taille d’une particule est
caractérisée par son diamètre dP, même lorsqu’elle n’est pas sphérique, pour des raisons
liées aux techniques de mesure granulométriques. En effet, on parle de diamètre passant
pour des mesurages par tamisage, ou de diamètre équivalent pour des mesurages par
granulométrie laser. A partir de ce diamètre caractéristique, on peut établir le rapport
dP/λ qui joue un rôle clé dans le phénomène de diffusion de la lumière. En effet, selon
la valeur du rapport dP/λ, les phénomènes physiques prépondérants et les équations
utilisées pour les décrire sont différents. On distingue trois cas selon que le rapport dP/λ
est inférieur à 1/20, compris entre 1/20 et 20, et supérieur à 20.
529
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22.3.2.1.1 Rapport dP/λ inférieur ou égal à 1/20ème
Lorsque le diamètre dP des particules est inférieur ou égal à 1/20ème de la longueur
d’onde λ, on est en présence de particules très fines et de colloïdes. La répartition
spatiale de la lumière diffusée est alors relativement uniforme. L’intensité de la lumière
diffusée est donnée par la formule de Rayleigh :
2
16π 4 rP 6 ⎛⎜ n P 2 − 1 ⎞⎟ 1 + cos 2 α
I L = I L0
⎜ n 2 +2⎟
rD 2
λ4
⎝ P
⎠
avec
rP
nP
α
rD
Eq. 22.4
rayon de la particule (rP = dP/2) ;
indice de réfraction de la particule par rapport au milieu ;
angle de mesure de la lumière diffusée par rapport au faisceau émis (degré) ;
distance de la particule au récepteur de l’appareil de mesure (m).
Suivant l’angle α sous lequel est effectué le mesurage, des dénominations différentes
sont utilisées :
- diffusion vers l’avant (α = 0°) ;
- néphélométrie (α = 90°)
- rétrodiffusion (α = 180°).
Ces valeurs de α ne sont pas limitatives : le mesurage peut évidemment être effectué
sous d’autres angles. La norme NF EN 27027 (1994) correspond à la néphélométrie, à
une longueur d’onde conseillée de 860 nm pour limiter l’influence de la couleur de
l’eau sur le mesurage. Seule une coloration bleue (très rare dans le cas des eaux
résiduaires…) modifie sensiblement les résultats de mesure à cette longueur d’onde.
Dans le cas d’échantillons incolores, on peut utiliser une longueur d’onde de 550 nm.
22.3.2.1.2 Rapport dP/λ supérieur ou égal à 20
Lorsque le diamètre dP des particules est supérieur ou égal à 20 fois la longueur d’onde
λ, la lumière est diffusée principalement vers l’avant, selon une distribution analogue
mais beaucoup plus resserrée que celle indiquée Figure 22.4 pour un rapport dP/λ = 10.
Plus le diamètre des particules augmente, plus le pic de diffusion est étroit et se resserre
autour de l’axe du faisceau émis (angle de 0°). Ce type de diffusion est le plus
fréquemment observé pour les eaux résiduaires.
22.3.2.1.3 Rapport dP/λ compris entre 1/20ème et 20
Lorsque le diamètre dP des particules est compris entre 1/20ème et 20 fois la longueur
d’onde λ, la théorie de Mie est nécessaire pour décrire la diffusion de la lumière par des
particules assimilables à des sphères. Elle permet de calculer la distribution de la
lumière diffusée en fonction de la taille, de la forme et de l’indice de réfraction des
particules. En général, la distribution est relativement complexe et comporte parfois
plusieurs pics plus accentués. La Figure 22.4 montre une représentation simplifiée de
l’évolution de la diffusion en fonction du rapport dP/λ.
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
rapport dP/λ
90°
source
lumineuse
0,1
1,0
10
0°
180°
Figure 22.4 : répartition angulaire de la lumière diffusée pour différents rapports dP/λ
Outre la distribution de la lumière diffusée, un autre élément important pour le
mesurage des matières en suspension par voie optique est la variation de l’intensité
diffusée en fonction de la taille des particules.
En néphélométrie (α = 90°), pour les particules fines ou colloïdales, la formule de
Rayleigh indique que cette intensité est proportionnelle au carré de leur volume. Pour
une concentration en MES donnée, l’intensité diffusée augmente avec leur diamètre.
Pour les plus grosses particules, au contraire, Cathelain et Robbe (1980) observent
expérimentalement une diminution de l’intensité diffusée avec le diamètre des
particules. En fait, les eaux résiduaires urbaines contiennent des particules dont la
granulométrie est très étendue (voir Figure 22.5) : d’après Chebbo (1992), plus de 90 %
des particules en suspension ont une taille supérieure à 5 µm, que ce soit en eaux de
ruissellement, unitaires ou usées.
100
90
solides en suspension en temps de pluie
80
masse (%)
70
60
50
40
30
solides en suspension en temps sec
20
10
0
1
10
100
1000
diamètre (µm)
Figure 22.5 : exemples types de courbes granulométriques des matières en suspension
dans les effluents de temps sec et de temps de pluie (d’après Laplace, 1991)
531
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
D’après la Figure 22.1 et la valeur du rapport dP/λ, l’intensité de la lumière diffusée par
les matières en suspension des eaux résiduaires correspond aux cas de grosses
particules. Cependant, l’expérience montre que l’influence des petites particules, des
colloïdes et des matières dissoutes, peut ne pas être négligeable.
Les particules contenues dans les eaux résiduaires ont des caractéristiques, notamment
leur forme, très variables, de sorte que le calcul de la lumière diffusée en les assimilant
à des sphères est forcément d’une exactitude très limitée. Par contre, il serait
envisageable d’introduire un coefficient de forme correctif, pour tenir compte du fait
que des particules non sphériques orientées aléatoirement peuvent, dans certaines
conditions, se comporter comme des particules sphériques. Les lecteurs intéressés par
les théories de la diffusion de la lumière par les particules pourront se reporter aux
ouvrages spécialisés, notamment Bohren et Huffman (1983), Van de Hulst (1981) ou
Kerker (1969).
22.3.2.1.4 Relation entre lumière diffusée et concentration en MES
Pour des caractéristiques de lumière et de particules données, l’intensité de la lumière
diffusée, par exemple avec un angle α = 90°, varie comme indiqué sur la Figure 22.6.
Elle augmente tout d’abord linéairement avec la concentration en matières en
suspension, puis, à partir d’un certain seuil, elle décroît sous l’effet de l’obscuration du
faisceau par les particules placées devant la cellule optique réceptrice. Seule la partie
linéaire de la courbe est exploitée pour le mesurage : il faut alors s’assurer que le seuil
de concentration ne peut être dépassé dans les échantillons analysés, car à une intensité
lumineuse donnée correspondraient alors deux valeurs de la concentration.
intensité de la
lumière diffusée
IL
concentration C
Figure 22.6 : relation entre l’intensité IL de la lumière diffusée
et la concentration C en matières en suspension
22.3.2.2 Mesurage de la lumière transmise
Dans le cas d’un mesurage en transmission, équivalent à une diffusion mesurée sous un
angle α = 0°, chaque particule de diamètre dP est caractérisée par un coefficient
d’extinction Qext qui correspond à l’énergie Ew (W) perdue dans la direction de
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
propagation initiale rapportée à l’énergie géométriquement incidente reçue par la
particule. Pour des particules sphériques, la théorie de Mie permet de calculer le
coefficient d’extinction Qext, qui tend vers la valeur 1 pour les grosses particules :
Qext =
EW
⎛d 2 ⎞
I L0 π⎜ P ⎟
⎜ 4 ⎟
⎝
⎠
Eq. 22.5
Pour une suspension monodispersée de particules de diamètre dP, la turbidité Tb à la
longueur d’onde λ s’exprime en fonction du nombre de particules Nv par unité de
volume et du coefficient d’extinction Qext :
Tb (λ) = N v
πd P 2
Qext (α P , n P )
4
Eq. 22.6
avec αP le paramètre de taille des particules (αP = πdP/λ).
Pour une suspension polydispersée de particules de n tailles différentes, la turbidité est
calculée par la relation :
π
Tb (λ) =
4
n
∑N
vi Qext (α Pi , n Pi ) d Pi
2
Eq. 22.7
i =1
Nvi étant le nombre de particules de diamètre dPi par unité de volume.
Si on introduit la concentration globale en particules C, la masse volumique ρPi et le
pourcentage massique pmi des particules sphériques de diamètre dPi, l’expression de la
turbidité devient :
Tb (λ) =
⎛ n
Qext (α Pi , n Pi ) pmi
3⎜
ρ Pi d Pi
2 ⎜⎜
⎝ i =1
∑
⎞
⎟
⎟C
⎟
⎠
Eq. 22.8
On peut également exprimer l’absorbance Ab mesurée en fonction de la turbidité Tb :
⎛ n
I L0
Qext (α Pi , n Pi ) p mi
3⎜
A b = log
= LTb (λ) = ⎜
IL
ρ Pi d Pi
2⎜
⎝ i =1
∑
⎞
⎟
⎟ LC
⎟
⎠
Eq. 22.9
On constate que cette expression est analogue à celle de la loi de Beer-Lambert pour
l’absorption moléculaire. Mais elle met en évidence l’influence des caractéristiques des
particules sur l’atténuation de la lumière : taille, coefficient d’extinction à la longueur
d’onde λ, répartition granulométrique exprimée par le pourcentage massique et la masse
volumique.
533
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Pour des concentrations en matières en suspension égales, deux échantillons présentent
des turbidités différentes si les caractéristiques des particules sont différentes. Ce
phénomène entraîne une instabilité des courbes d’étalonnage dans le cas des eaux
résiduaires de caractéristiques très variables, comme les eaux de ruissellement par
exemple (voir paragraphe 22.9).
La norme NF EN 27027 (1994) recommande le mesurage de la lumière transmise à des
longueurs d’onde identiques à celles préconisées pour la lumière diffusée, c’est à dire
860 nm pour des échantillons susceptibles d’être colorés ou 550 nm pour des
échantillons incolores.
22.3.2.3 Standardisation de la turbidimétrie
Nous constatons, d’après les éléments précédents et en raison des caractéristiques très
variables des instruments de mesure utilisés (angles de mesure α, longueurs d’onde λ
utilisées, caractéristiques optiques, etc.), que la comparaison des résultats de mesure
obtenus avec différents instruments est très délicate, voire impossible. C’est pourquoi
une standardisation des techniques de mesure est souhaitable. Un premier pas dans cette
direction a été franchi avec la rédaction de la norme ISO 7027, reprise ensuite dans la
norme française et européenne NF EN 27027 (1994).
Outre des indications précises sur les caractéristiques techniques des instruments de
mesure, la norme NF EN 27027 (1994) indique que l’étalonnage des appareils doit être
effectué avec un étalon de formazine. La formazine est une suspension formée par une
réaction de condensation entre le sulfate d’hydrazine et l’hexaneméthylènetetramine.
C’est un polymère insoluble se présentant sous l’aspect d’une suspension laiteuse, dont
les particules ont des tailles comprises entre 0,1 et 5 µm. La norme décrit en détail la
préparation d’une solution mère de formazine, qui correspond à une concentration de
400 unités formazine. Cette solution est stable pendant environ 4 semaines si elle est
conservée à l’obscurité à une température de 25 ± 3°C. Les instruments sont étalonnés à
l’aide de solutions étalons de diverses concentrations obtenues par dilutions de la
solution mère.
Notons pour terminer que l’ouvrage américain Standard Methods (Greenberg et al.,
1999) mentionne une source en lumière blanche au lieu de la source infrarouge
recommandée par les normes internationales. Cela explique pourquoi certains matériels
importés des Etats-Unis ne sont pas conformes à la norme internationale.
22.3.3 Globalité du mesurage optique et spécificité du site de mesure
Les polluants des eaux résiduaires étant présents à la fois sous forme dissoute et sous
forme particulaire et colloïdale, les capteurs optiques effectuent un mesurage global. Le
spectre type d’une eau résiduaire (voir Figure 22.3) montre qu’au delà de 550 nm
environ, les composés dissous n’absorbent quasiment plus la lumière reçue. C’est
pourquoi la norme NF EN 27027 (1994) recommande de mesurer la turbidité, c’est à
dire la fraction particulaire, à des longueurs d’onde de 860 nm (domaine infrarouge) ou,
à défaut, de 550 nm (domaine visible), valeurs auxquelles l’absorption moléculaire est
négligeable.
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534
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
La constance des relations liant paramètre optique (diffusion ou absorbance) et
concentration en MES dépend de la constance des caractéristiques des eaux résiduaires
en termes de caractéristiques des particules (taille, forme, etc.). Cela est encore plus
critique pour les paramètres polluants carbonés globaux (DCO, DBO5, COT) dont la
relation avec le paramètre optique mesuré dépend notamment de la fraction organique
particulaire, variable elle aussi.
Le mesurage des polluants présents sous forme dissoute doit être effectué à des
longueurs d’onde inférieures à 550 nm, en éliminant l’influence de la fraction
particulaire qui contribue à augmenter l’absorbance (voir Figure 22.3). Cette
élimination est réalisée de deux manières :
- par prétraitement de l’échantillon, de façon à retirer la fraction particulaire, par
microfiltration par exemple ;
- en procédant à plusieurs mesurages à différentes longueurs d’onde, dont une de
préférence supérieure ou égale à 550 nm permettant de quantifier l’influence de la
fraction particulaire. Par exemple, certains appareils procèdent au mesurage de la
turbidité (MES) à λ = 546 nm dans le domaine visible et au mesurage de l’absorbance
(matières organiques) à λ = 254 nm dans le domaine ultraviolet.
La constance des relations entre paramètre optique et paramètre polluant en phase
dissoute, déduction faite de l’influence de la fraction particulaire, dépend également de
la constance des caractéristiques des eaux résiduaires. Cette constance est relativement
bien vérifiée pour un polluant spécifique tel que les nitrates en l’absence d’interférence
avec d’autres composés dissous. Mais elle est beaucoup plus aléatoire pour des
paramètres polluants caractérisant globalement la matière organique tels que la DCO, la
DBO5 ou le COT, car les composés mesurés peuvent varier de manière importante d’un
échantillon d’eau résiduaire à l’autre.
Les méthodes de mesure classiques sont fondées sur l’établissement de relations
linéaires entre paramètre optique et paramètre polluant, pour une ou deux longueurs
d’onde spécifiques. Des méthodes nouvelles sont actuellement développées qui ont
pour objectif, à partir de mesurages effectués à de nombreuses longueurs d’onde, de
reconstituer le spectre de l’eau résiduaire analysée à partir de spectres élémentaires
caractéristiques de composés particuliers. Ces méthodes, utilisant une information plus
riche, devraient théoriquement permettre de mieux tenir compte de la variabilité des
composés en fonction des sites et des milieux de mesure.
En conclusion, si les caractéristiques des eaux résiduaires mesurées (granulométrie,
fraction minérale et nature de la matière organique, indice de réfraction, etc.) restent à
peu près constantes, les relations d’étalonnage liant paramètre optique et paramètre
polluant restent stables. Néanmoins, en l’état des recherches en 1999, et sauf cas
particulier (les nitrates par exemple), ces relations d’étalonnage doivent être établies au
cas par cas, site par site, voire en tenant compte de différents contextes (temps sec et
temps de pluie par exemple).
Il faut cependant poursuivre les recherches sur l’évolution de ces relations d’étalonnage
sur de longues durées, notamment pour les eaux aux caractéristiques très variables
535
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
comme les eaux de ruissellement, ainsi que sur les méthodes de mesure permettant la
prise en compte de la spécificité des sites.
22.4 ELEMENTS TECHNOLOGIQUES
Le but de ce paragraphe est de présenter diverses caractéristiques technologiques des
appareils et leurs possibilités. Cet inventaire n’a pas la prétention d’être exhaustif,
notamment en raison du nombre élevé des appareils commercialisés (plusieurs dizaines
d’appareils sont commercialisés en 1999 - voir par exemple Mizier (1998) ou l’annexe
6) et de leurs évolutions très fréquentes.
Les appareils décrits sont ceux qui permettent, sur le terrain, le mesurage automatique et
en continu par voie optique de différents paramètres polluants, avec une haute
fréquence de mesure correspondant généralement à un pas de temps compris entre
1 minute et un quart d’heure, voire une demi-heure. Ne sont donc pas concernés les
appareils portatifs qui nécessitent l’intervention d’un opérateur pour la réalisation du
mesurage.
22.4.1 Optique : principe de mesure, longueurs d’onde
Nous avons présenté au paragraphe 22.3 les différents principes de mesure :
- l’absorption moléculaire pour les polluants dissous ;
- la turbidimétrie pour les polluants particulaires (colloïdes et particules en suspension).
Les deux caractéristiques technologiques principales correspondantes sont les
suivantes :
- le type de lumière mesurée : lumière diffusée mesurée suivant différents angles,
lumière transmise à travers l’échantillon, ou encore une combinaison soit en
conservant ces deux signaux indépendants soit en déterminant leur rapport ;
- la ou les longueurs d’onde, ou plage(s) de longueurs d’onde utilisées.
La plupart des turbidimètres font appel à la transmission (Photo 22.1 et Figure 22.7)
et/ou à la diffusion de lumière en néphélométrie (Photo 22.2 et Figure 22.8), en lumière
blanche ou en infrarouge. La stabilité des caractéristiques optiques (prise en compte de
la dérive éventuelle de la source lumineuse et des composants électroniques) peut être
obtenue automatiquement par asservissement de l’émission de lumière ou par mesurage
comparatif de récepteurs de contrôle placés avant, et pour certains après, la cellule de
mesure. La compensation de la dérive peut également être effectuée manuellement au
niveau du réglage de l’appareil.
La réduction de l’influence de la coloration des eaux peut être obtenue :
- par la prise en compte du rapport lumière transmise/lumière diffusée, car la coloration
affecte de la même manière les deux phénomènes ;
- en procédant au mesurage à des longueurs d’onde supérieures à 800 nm (domaine
infrarouge). Notons ici que les eaux résiduaires urbaines à dominante domestique
sont généralement peu colorées (tout au moins du point de vue de l’analyse
optique…).
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536
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Photo 22.1 : exemple de turbidimètre en transmission infrarouge (λ = 880 nm)
Ponselle TU-NA avec son transmetteur et le boîtier de commande du nettoyage
automatique par piston racleur (photo Service Audiovisuel INSA de Lyon)
émission en infrarouge (λ = 880 nm),
en mode pulsé avec une fréquence de 10 Hz,
régulée par photodiode de rétroaction,
et compensée en température
piston
râcleur
cellule
émettrice
cellule
réceptrice
20 mm
Figure 22.7 : schéma de principe du capteur présenté sur la Photo 22.1
(d’après document Ponselle)
Plongés dans une eau résiduaire urbaine, les appareils sont soumis à l’encrassement,
notamment les parois des cellules optiques d’émission et de réception. Cet
encrassement peut être pris en compte au niveau optique d’une manière analogue à la
compensation de la dérive, c’est à dire par mesurage comparatif de récepteurs de
contrôle placés avant et après la cellule de mesure. Cependant, il ne s’agit là que d’une
compensation de l’encrassement, et non de sa suppression. Pour cela, des nettoyages
automatiques ou manuels réguliers des cellules optiques sont indispensables (voir
paragraphe suivant).
537
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Photo 22.2 : exemple de turbidimètre néphélométrique infrarouge (λ = 880 nm)
Endress+Hauser CUS1, avec nettoyage automatique des cellules optiques
par essuie-glace (photo Service Audiovisuel INSA de Lyon)
émission en infrarouge (λ = 880 nm),
avec compensation en température
et autocorrection de l’émission
par la cellule de référence
cellule
émettrice
cellule
réceptrice
de référence
cellule
réceptrice
de mesure
particules
optiques
Figure 22.8 : schéma de principe du capteur présenté sur la Photo 22.2
(d’après document Endress+Hauser)
22.4.2 Systèmes de nettoyage et de dégazage
Les capteurs optiques sont soumis à deux types d’encrassement aux conséquences
différentes :
- le macro-encrassement, qui est l’obstruction du capteur par des déchets en suspension
(papier, plastique, filasses, etc.) : il y a généralement saturation du signal ;
CH22 - 09/01/2002 2:27
538
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
- le micro-encrassement, qui est une augmentation du signal par salissure des éléments
optiques. C’est plutôt ce deuxième type d’encrassement que pallient les systèmes de
nettoyage qui équipent les capteurs.
En plus de la compensation optique vue au paragraphe précédent, les capteurs peuvent
comporter en standard ou en option un nettoyage de la cellule de mesure :
- par insufflation d’air ou d’eau sous pression ;
- par raclage (brosse, essuie-glace, balai, piston, ...) ;
- par ultrasons.
Une autre solution technique est l’absence de tout contact entre l’échantillon analysé et
les cellules optiques (mesurage d’un échantillon en chute libre ou par réflexion de
surface).
Certaines eaux peuvent être suffisamment peu encrassantes, notamment en cas de
turbulence hydraulique constante, pour qu’un nettoyage manuel régulier, hebdomadaire
par exemple, permette de conserver un mesurage fiable. La situation doit être appréciée
au cas par cas, après essais préalables.
La présence de bulles d’air peut perturber le mesurage, soit parce qu’elles sont
assimilées à des particules, soit parce que leur accumulation se traduit par la formation
d’une poche d’air au niveau de la cellule de mesure. Le premier problème peut être
résolu par un filtrage adéquat du signal qui permet d’éliminer à la fois l’influence des
bulles d’air et des grosses particules, ou par l’adjonction d’une cuve de dégazage en
amont de la cellule de mesure. Le second problème peut être résolu, dans le cas d’un
capteur immergé, en l’inclinant de telle manière que les bulles d’air s’échappent sans
s’accumuler au niveau de la cellule de mesure. La forme du capteur doit également être
telle qu’elle évite la rétention des bulles.
En réseau assainissement, les problèmes liés aux bulles d’air ou de tout autre gaz ne
semblent cependant pas très fréquents, du fait que les mesurages sont généralement
réalisés dans des écoulements à surface libre relativement peu turbulents. Par contre,
lorsque les capteurs sont placés dans des bacs de mesure en dérivation, le pompage des
échantillons peut introduire des bulles d’air : une cloison siphoïde à l’entrée du bac de
mesure peut faciliter le dégazage de l’effluent avant mesurage.
22.5 CARACTERISTIQUES TECHNIQUES DES APPAREILS COMMERCIAUX
22.5.1 Etendue de mesure et unités
Les étendues de mesure des turbidimètres sont généralement exprimées en unités de
turbidité formazine, ou FTU (Formazine Turbidity Unit) ou directement en
concentration en MES en mg/L ou g/L. Comme la turbidité des matières en suspension
dans les eaux résiduaires varie en fonction de leur granulométrie, il n’est pas possible
de donner une équivalence générale entre ces deux unités. Il est par conséquent prudent,
surtout pour choisir un capteur de mesure en eaux résiduaires, de connaître l’ordre de
grandeur des concentrations maximum observables. Ces ordres de grandeur peuvent
être très différents selon les sites de mesure, par exemple en réseau séparatif pluvial ou
539
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
en réseau unitaire (en réseau unitaire, les concentrations en MES peuvent atteindre
2 g/L lors d’orages violents). Aussi est-il recommandé de procéder à des mesurages
tests préalables avec le capteur envisagé et de contacter le fabricant pour obtenir toutes
les informations nécessaires.
Notons que les capteurs néphélométriques utilisent également l’unité NTU
(Nephelometric Turbidity Unit). Si le capteur est étalonné avec des solutions de
formazine, alors il y a équivalence avec l’unité FTU : 1 NTU = 1 FTU.
Pour les capteurs optiques autres que les turbidimètres, les étendues de mesure sont
exprimées soit dans l’unité du paramètre polluant mesuré, le plus souvent en mg/L, soit
en unités d’absorbance pour la matière organique ou plus rarement en équivalent DCO.
22.5.2 Autres caractéristiques
Le faible niveau de standardisation et de normalisation des appareils de mesure par voie
optique, ainsi que leur très grande diversité technologique, conduisent à des difficultés
importantes pour évaluer et comparer des caractéristiques telles que la résolution, la
linéarité, l’incertitude de mesure, etc. Le problème est rendu encore plus ardu par le fait
que les fabricants, lorsqu’ils annoncent des valeurs pour leurs capteurs, n’utilisent pas
les mêmes définitions ni les mêmes méthodes d’évaluation, ou semblent faire des
confusions entre différentes notions (répétabilité et reproductibilité, incertitude et
linéarité, etc.).
Des normes existent pourtant pour l’expression de ces caractéristiques (voir chapitre 4
et lexique), mais elles ne sont manifestement pas suffisamment appliquées dans le
domaine des capteurs optiques.
Si on ne peut pas obtenir les informations détaillées nécessaires auprès du fournisseur,
notamment en ce qui concerne l’incertitude de mesure, l’utilisateur doit procéder à
quelques essais et étalonnages en laboratoire, avec des solutions étalons certifiées de
formazine, en se référant par exemple à la norme NF T 90-550 (1987) sur l’évaluation
des caractéristiques des analyseurs d’eau ou à la méthodologie présentée aux chapitres 4
et 5.
A titre d’information, notre expérience nous conduit à évaluer les incertitudes de
mesure des capteurs, en conditions de laboratoire, dans une fourchette allant, selon les
appareils, d’environ 1 % à 3 %, parfois plus, de l’étendue de mesure.
La linéarité est généralement de l’ordre de 1 %.
La rapidité (temps de réponse) est généralement comprise entre 0,5 et 2 s, parfois plus
si l’appareil intègre le signal sur une période de mesure plus longue (15 s par exemple).
22.6 INSTALLATION
22.6.1 Conditions relatives à la localisation du capteur
Dans le cadre d’une installation permanente, le capteur optique peut être soit
directement immergé dans l’eau analysée, soit installé sur un circuit de prélèvement en
CH22 - 09/01/2002 2:27
540
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
dérivation alimenté par une pompe. Le point de mesure ou le point de prélèvement des
eaux échantillonnées doivent alors être conçus de telle sorte que l’échantillon mesuré
soit représentatif du milieu de mesure au droit du point de prélèvement. Il s’agit d’un
élément particulièrement important en vue de l’étalonnage spécifique (pseudoétalonnage) du capteur (voir paragraphe 22.8). Les critères à respecter sont les
suivants :
- la limitation des perturbations apportées à l’écoulement par la présence du capteur,
notamment en réseau d’assainissement ;
- la représentativité du point de mesure ou de prélèvement par rapport à la section de
mesure ;
- les risques de colmatage et d’encrassement du système de mesure ;
- l’accès aisé pour l’entretien et la maintenance.
Il peut exister dans la section de mesure d’importants gradients de concentration, dus le
plus souvent à la grande hétérogénéité des tailles des particules (de 1 µm ou moins à
plus de 1 cm), de leurs densités (de moins de 1,5 pour les particules organiques jusqu’à
2,5 pour les particules minérales) et de leurs vitesses de chute (de moins de 0,1 m/h à
plusieurs dizaines ou centaines de m/h).
Les problèmes de représentativité, compte tenu de ces éventuels gradients de
concentration, sont les mêmes pour un capteur optique que pour un préleveur
d’échantillons (voir chapitre 21). Pour limiter l’ampleur de ces problèmes, il faut :
- éviter les sections de mesure à très faibles vitesses d’écoulement qui favorisent
l’apparition d’une stratification ;
- éviter les sections situées à l’aval d’un coude ou à l’aval du raccordement de deux
conduites (risques de mauvais mélange des effluents) ;
- placer le capteur ou la prise d’eau à une profondeur comprise entre 40 et 60 % de la
hauteur d’eau et à une distance suffisante des parois pour éviter une contamination
des échantillons par les dépôts ou les biofilms qui s’y développent.
Il est préférable d’implanter le point de mesure dans une zone où la turbulence favorise
l’homogénéisation des concentrations, sans que cette turbulence ne crée de problèmes
supplémentaires liés aux bulles d’air - voir par exemple la norme NF EN ISO 5667/10
(1992). On peut aussi concevoir des systèmes spécifiques qui explorent la section de
mesure (du type support mobile actionné mécaniquement) ou effectuer le mesurage en
plusieurs points. Mais il faut alors considérer les risques d’obstruction de ces dispositifs
et s’assurer de leur fiabilité, notamment mécanique.
En réseau d’assainissement pluvial ou unitaire, le risque d’obstruction de l’écoulement
est primordial : on peut donc être conduit à fixer le capteur ou la prise d’eau soit par
suspension sous la voûte, soit à proximité des parois. Dans ce dernier cas, il faut éviter
la contamination par les dépôts de fond et les biofilms, en utilisant systématiquement
des capteurs autonettoyants.
Pour faciliter l’entretien et la maintenance, la fixation du capteur sur un support mobile
extractible, ou dans un fourreau dont l’extrémité supérieure est accessible à partir d’un
regard, permet l’entretien même quand l’accès au réseau est rendu impossible en cas de
montée de la hauteur d’eau ou de mise en charge. L’installation du capteur ou de la
541
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
prise d’eau doit être compatible avec les contraintes de maintenance du réseau luimême : les fixations doivent être amovibles ou effaçables pour permettre le passage du
matériel d’entretien, notamment les outils de curage.
Le macro-encrassement (par déchets en suspension, filasses, ...) peut être réduit par la
forme adéquate du capteur (lisse et arrondie) et par l’orientation du capteur
parallèlement aux lignes de courant pour éviter l’accrochage des déchets. Eviter le
macro-encrassement en réseau est particulièrement difficile, car ni le capteur, ni son
câble (celui-ci doit être masqué dans la paroi ou placé sous un déflecteur) ni son
système de fixation ne doivent offrir de prise aux déchets. La présence du capteur et de
sa fixation ne doit pas non plus perturber le profil de concentration à travers la section
de mesure. Un encastrement en paroi bien conçu ou une fixation suspendue sous la
voûte dont l’oscillation au gré du courant facilite le décrochage des déchets sont
particulièrement intéressants.
Le positionnement face au courant de la prise d’eau d’un circuit en dérivation, bien
qu’étant le plus satisfaisant d’un point de vue théorique (représentativité assurée si le
prélèvement est isocinétique - voir chapitre 21) est aussi le plus sensible à l’accrochage
des déchets et au colmatage. Il vaut mieux par conséquent orienter la prise d’eau vers
l’aval.
Concernant le micro-encrassement (dépôts de matières, biofilm, ...), la solution dépend
moins de l’installation du capteur que de sa conception : surfaces lisses, géométrie,
dispositif d’auto-nettoyage.
Le pouvoir encrassant des eaux analysées doit être évalué au cas par cas, en tenant
compte notamment des variations hebdomadaires et saisonnières (influence de la
température sur les huiles et les graisses, sur la croissance des micro-organismes, débris
végétaux à l’automne, activités industrielles ou touristiques, ...).
22.6.2 Capteur immergé ou en bac de dérivation
En station d’épuration, l’implantation directe du capteur dans les canaux d’arrivée et/ou
de sortie ne pose généralement pas de difficulté majeure, les installations étant souvent
d’accès facile et sans danger particulier pour le personnel.
En réseau d’assainissement, l’immersion du capteur en égout pose des problèmes
pratiques plus difficiles, notamment en raison des conditions d’accès, de montée des
niveaux d’eau et des mises en charges possibles, des risques d’arrachement par des
embâcles, de saillie dans le collecteur favorisant l’accrochage de divers solides
transportés par l’écoulement et incompatible avec le passage des outils de curage, etc.
L’entretien et la maintenance courante sont également plus difficiles car il faut
descendre dans les collecteurs, ce qui n’est pas toujours réalisable en permanence.
On préfère donc souvent installer le capteur optique dans un bac situé sur un circuit en
dérivation alimenté par pompage et placé dans un local ou une armoire de mesure
d’accès facile et sécurisé (voir Figure 22.9). Cette installation en dérivation est
intéressante à plusieurs titres :
- pour faciliter le nettoyage et la maintenance du capteur ;
CH22 - 09/01/2002 2:27
542
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
- pour utiliser un capteur non submersible ou partiellement immergeable ;
- pour garantir l’immersion permanente du capteur, même en cas d’écoulements
discontinus (événements pluvieux en réseau séparatif pluvial par exemple) : cette
immersion permanente peut être nécessaire pour l’auto-nettoyage mécanique qui ne
doit généralement pas être effectué à sec sous peine de rayer la surface des cellules
optiques.
La permanence du mesurage en dérivation dépend alors de la fiabilité de la pompe. Les
pompes aspirantes situées hors du collecteur sont souvent préférables pour limiter
l’obstruction dans le collecteur et pour des raisons pratiques de fonctionnement et de
maintenance. Dans le cas d’une installation en armoire extérieure ou dans un local qui
n’est pas construit en dur (type abri de chantier ou bungalow mobile), il faut prévoir
une mise hors-gel en hiver et faire attention à l’exposition pour éviter des températures
trop élevées (préférer les emplacements à l’ombre), voire, le plus souvent, installer une
climatisation.
centrale d’acquisition
de données et de
pilotage du préleveur
capteur optique
préleveur
automatique
réfrigéré
bac de mesure
local de
mesure
climatisé
pompe primaire
regard
d’accès
prise d’eau
retour à l’égout
Figure 22.9 : schéma d’une installation de mesure en dérivation sur un collecteur
Certains capteurs peuvent être équipés d’accessoires optionnels permettant leur
insertion sur une canalisation en charge. Cette possibilité est surtout utilisée sur les
réseaux d’eau potable ou industrielle où les risques d’obstruction et d’encrassement
sont relativement limités. Pour les conduites en charge en réseau d’assainissement ou en
station d’épuration, cette disposition nous semble devoir être évitée. Cependant, dans
tous les cas, qu’il soit implanté dans l’écoulement ou en dérivation, il est préférable que
le capteur puisse être entièrement immergeable (protection IP 67 ou 68) pour des
raisons pratiques : profondeur d’eau importante permanente ou temporaire, inondations,
543
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
orages violents, erreur de manipulation, problème de bouchage du bac en dérivation,
etc.
22.6.3 Conception et maintenance du circuit de prélèvement
Le circuit de dérivation doit assurer un prélèvement représentatif de la qualité de l’eau
au point de mesure, notamment du point de vue des matières en suspension, et présenter
une bonne immunité à l’encrassement, ou du moins permettre une maintenance aisée et
pas trop fréquente.
La norme NF EN ISO 5667/10 (1992) préconise une conduite d’échantillonnage d’un
diamètre interne d’au moins 9 mm entre les points de prélèvement et de distribution,
afin de limiter les risques de colmatage, et une vitesse d’écoulement du liquide égale ou
supérieure à 0,5 m/s afin d’éviter les risques de séparation de phase dans la conduite et
la chambre de mesure.
Pour limiter la ségrégation des particules les plus lourdes quand la prise d’eau est
orientée vers l’aval, ce qui, compte tenu des risques d’obstruction, est préférable, il est
conseillé d’adopter une vitesse d’aspiration supérieure à la vitesse d’écoulement dans le
réseau et de ne pas utiliser de crépine (voir chapitre 21).
Ajoutons en ce qui concerne l’encrassement des conduites du circuit d’échantillonnage :
- pour le macro-encrassement (déchets en suspension, filasses, ...), la prévention des
problèmes dépend, outre de l’emplacement du point de prélèvement, de la conception
et de l’orientation de l’embout d’aspiration qui doit être parallèle aux lignes de
courant pour éviter l’accrochage des déchets, et de la facilité de passage des solides
pompés soit en réduisant leur taille (pompe amont équipée d’un dilacérateur ou d’un
triturateur, ce qui risque de fausser les valeurs de la turbidité) soit de préférence en
dimensionnant largement le diamètre des conduites. Il faut éviter les singularités dans
les conduites (coudes, points bas, réductions brutales de diamètre, etc.) qui facilitent
l’accumulation de dépôts divers et l’obstruction. Dans le cas où les macro-déchets
sont admis dans le circuit, il peut être nécessaire d’alimenter les capteurs à partir d’un
bac de régulation destiné à éliminer les grosses particules et les flottants entraînés à
l’aspiration. On ne dirige alors vers ce bac alimenté gravitairement par piquage sur le
circuit primaire que la fraction de débit permettant d’obtenir une vitesse suffisante
pour homogénéiser l’effluent dirigé vers les capteurs ;
- pour le micro-encrassement (dépôts de matières, biofilm de micro-organismes, ...), la
prévention des problèmes est facilitée en évitant les matériaux rugueux propices à
l’accrochage des dépôts, les tuyaux transparents favorisant la photosynthèse, ainsi
que la stagnation de l’échantillon dans les conduites (l’aspiration discontinue sans
purge est à proscrire). Il est souvent judicieux de procéder à l’ajout, à intervalles
réguliers, d’un biocide qui empêche le développement des biofilms et des microorganismes, ou d’employer des matériaux intrinsèquement "biocides" tels que le
cuivre ou le bronze. Mais, dans ce cas, ils ne doivent évidemment pas avoir d’effet
dommageable sur l’environnement, le fonctionnement du capteur et les ouvrages de
traitement. Le nettoyage peut être effectué par injection d’air ou d’eau, ou mieux par
un mélange des deux, les bulles d’air entraînées par l’écoulement provocant une
CH22 - 09/01/2002 2:27
544
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
agitation qui améliore l’efficacité du nettoyage. De bons résultats ont également été
obtenus avec un nettoyage par passage dans les conduites de sphères d’éponge d’un
diamètre égal à 120 % du diamètre des conduites (cité par Augarde, 1994).
Les risques d’encrassement varient évidemment beaucoup suivant les différents milieux
de mesure et leur positionnement dans la chaîne de collecte ou de traitement des eaux
résiduaires (eaux usées, eaux de ruissellement, eaux unitaires, effluent brut, dégrillé,
prétraité, etc.). Dans les meilleurs cas, les problèmes d’encrassement sont très réduits,
voire inexistants ; dans d’autres cas, ils sont très perturbants et nécessitent un niveau de
prévention et de maintenance élevé et coûteux.
22.6.4 Conception du bac de mesure en dérivation
Le bac de mesure doit être conçu de telle sorte qu’il permette :
-
d’assurer une bonne homogénéisation de l’effluent pompé ;
de présenter une bonne immunité à l’encrassement ;
de dégazer si nécessaire l’effluent pompé ;
de constituer une réserve d’eau si le capteur doit être immergé en permanence, en cas
d’écoulements intermittents ou d’interruption de l’alimentation en eau (entretien ou
maintenance de la pompe, panne, fuite, etc.).
Nous nous limitons dans ce chapitre au cas simple d’un bac destiné à un seul capteur,
un bac plus important nécessitant le plus souvent une homogénéisation mécanique. La
Figure 22.10 présente un exemple de bac simple.
CA
PT
EU
R
15°
évacuation
injection
Figure 22.10 : schéma d’un bac de mesure en dérivation
L’alimentation par une conduite de 15 mm de diamètre intérieur correspond, pour une
vitesse d’écoulement de 1 m/s, à une pompe d’une capacité de 650 L/h environ. Ce
débit, injecté dans la partie inférieure du bac, effectue un nettoyage hydraulique du
capteur. La turbulence induite homogénéise le contenu du bac. L’évacuation, placée au
fond du bac afin d’éviter la rétention de dépôts, est effectuée dans une conduite de
545
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
diamètre légèrement supérieur (par exemple, une conduite de 20 mm assurant une
vitesse d’écoulement de 0,6 m/s). En présence de bulles d’air, l’introduction de
l’effluent par le haut du bac permet un dégazage préalable mais la fonction de nettoyage
n’est plus assurée. La disposition en siphon de la conduite d’évacuation, ainsi que de la
conduite d’alimentation en cas d’injection par le fond, permet une immersion
permanente du capteur. La hauteur de charge h entre le niveau dans le bac et le
débouché du siphon correspondant au débit Q à évacuer peut être estimée par la
formule hydraulique suivante :
Q
= U = µ 2 gh
S
avec
Eq. 22.10
S section de la conduite d’évacuation (m2) ;
g accélération de la pesanteur (9,81 m/s2) ;
µ coefficient de débit qui intègre la perte de charge dans le siphon.
Il est préférable de limiter la longueur du siphon de façon à ne pas introduire de pertes
de charge supplémentaires qui augmenteraient la hauteur de charge dans la cuve. Un
débouché à surface libre constitue la meilleure solution. Des calculs approchés tenant
compte des pertes de charge dues aux caractéristiques de la surface interne du siphon et
de sa géométrie indiquent, dans notre exemple, une hauteur de charge h de quelques
centimètres. Compte tenu des incertitudes sur cette hauteur de charge et des variations
de débit dues par exemple à la variation de la hauteur d’aspiration suivant les sites de
mesure, il est préférable d’adopter une conduite souple pour le siphon dont on règle
empiriquement la hauteur du débouché au cas par cas. On peut légèrement augmenter
cette hauteur pour que le niveau d’eau dépasse le bord de la cuve de mesure, permettant
ainsi l’évacuation des matières surnageantes par trop-plein.
Comme pour le circuit de prélèvement, le circuit de vidange ne doit pas présenter de
rétrécissements brusques du diamètre qui provoquent l’accumulation de dépôts divers et
augmentent les risques d’obstruction.
22.7 ENTRETIEN - MAINTENANCE
Un entretien régulier est nécessaire pour le nettoyage et le réglage du capteur. Si ces
deux opérations sont automatisées, ce qui est fortement préconisé pour choisir un
appareil, la fréquence des opérations d’entretien peut être réduite. La visite sur site
permet de contrôler le bon fonctionnement du capteur, de procéder au changement
éventuel de pièces (balai ou piston de nettoyage par exemple), ainsi qu’aux opérations
éventuelles d’étalonnage et recueil des données si elles ne sont pas télétransmises.
L’ensemble des opérations, comme pour tout capteur, est consigné dans une fiche de
vie (voir chapitre 3).
Les appareils de métrologie optique sont très sensibles à l’encrassement, ce qui requiert
des opérations de maintenance fréquentes pour obtenir des résultats de mesure fiables.
Ces appareils sont actuellement en pleine évolution : il faut donc s’attendre à ce que le
niveau de maintenance nécessaire aille en diminuant grâce aux améliorations techniques
apportées (par exemple les turbidimètres sans contact).
CH22 - 09/01/2002 2:27
546
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22.8 ETALONNAGE ET VERIFICATION DES APPAREILS
22.8.1 Introduction et terminologie
Les capteurs doivent être livrés par le fabricant ou le fournisseur munis d’un certificat
d’étalonnage indiquant les résultats obtenus et les conditions détaillées de son
établissement. Malheureusement, c’est très exceptionnellement le cas en 1999, et un
effort important reste à faire pour parvenir à une approche métrologique rigoureuse.
Il incombe donc à l’utilisateur, après réception et contrôle du matériel reçu, de procéder
lui-même à l’étalonnage et à la vérification du capteur. Compte tenu des problèmes de
normalisation et de vocabulaire déjà évoqués au paragraphe 22.5.2, et de la spécificité
des capteurs optiques, il y a souvent confusion entre les notions de réglage,
d’étalonnage et de pseudo-étalonnage.
Afin de clarifier les choses, nous décrirons dans ce paragraphe trois opérations
distinctes, mais (malheureusement) souvent toutes appelées étalonnage (ou calibration)
dans les documents techniques fournis avec les capteurs :
- le réglage (voir lexique en fin d’ouvrage) : opération consistant en général à régler le
Zéro (offset) et la sensibilité (pente) du capteur en le plongeant dans deux solutions
étalons dont la turbidité ou l’absorbance sont connues ;
- l’étalonnage : il s’agit de l’étalonnage au sens strict (voir chapitre 4), c’est à dire
l’établissement d’une courbe liant la valeur mesurée par le capteur à une valeur étalon
de turbidité ou d’absorbance (solutions certifiées). Notons que tous les capteurs
commercialisés ne peuvent pas être étalonnés selon cette procédure ;
- le pseudo-étalonnage : il s’agit de l’opération permettant de relier la valeur fournie
par l’appareil (le paramètre optique ou une grandeur qui en dépend) à la valeur du
paramètre polluant étudié, par exemple la concentration en MES, pour un site de
mesure donné. La constance de la relation établie dépend de la constance des
caractéristiques des eaux analysées.
22.8.2 Réglage
Les capteurs optiques utilisés en hydrologie urbaine fonctionnent souvent dans un
environnement agressif (variations de température, poussières, polluants divers,
encrassement, hygrométrie élevée). Il arrive fréquemment de constater une dérive des
caractéristiques de la source lumineuse (puissance), de l’optique (rayures, alignement)
ou de l’électronique (vieillissement des composants). Pour éviter toute dérive et tout
biais dans la relation entre paramètre optique et paramètre polluant, il est nécessaire de
procéder à des réglages réguliers.
On ne peut pas donner d’indication générale sur la périodicité du réglage : elle dépend
du contexte d’emploi et des qualités intrinsèques des capteurs. En se basant sur les
indications du constructeur et sur l’expérience progressivement accumulée, l’utilisateur
est généralement à même d’estimer la périodicité nécessaire pour conserver une
incertitude de mesure acceptable. Un réglage tous les 6 mois constitue néanmoins un
547
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
minimum. Une périodicité plus courte, par exemple mensuelle, est toutefois préconisée,
surtout en phase de démarrage du dispositif de mesure.
Le réglage est généralement réalisé manuellement sur deux points : le Zéro et une
valeur de référence. Ces deux points permettent de régler la sensibilité (pente) du
capteur. Le réglage du Zéro est effectué en plongeant le capteur dans de l’eau distillée.
La valeur de référence est réglée avec une solution ou une référence étalon spécifique
vendue par le fabricant du capteur ou une solution standard commerciale ou élaborée
par l’utilisateur (suspension de formazine ou d’un autre produit, filtre ou verre fumé,
etc.). Certains appareils offrent un réglage automatique du Zéro, et parfois d’une autre
valeur de référence. Cet autoréglage est obtenu par compensation optique ou par
mesurage d’une référence interne ou externe au capteur. Certains appareils comportent
plusieurs points de référence et même un linéarisateur programmable. On se rapproche
alors de l’étalonnage classique.
Il existe des appareils réglés en usine, sans possibilité de réglage manuel par
l’utilisateur. Ce dernier peut néanmoins contrôler la dérive éventuelle par une opération
de vérification (voir chapitre 4). Si le capteur est déclaré non conforme, il doit subir un
nouvel ajustage* en usine.
Le réglage, pour des raisons pratiques, est souvent utilisé à des fins de vérification.
Comme il ne porte en général que sur deux points, il permet de corriger les erreurs
d’offset et de sensibilité, mais pas les erreurs éventuelles de linéarité.
Le réglage permet de suivre le vieillissement du capteur et de prévoir les opérations de
maintenance préventive (changement de pièces). Il doit être effectué préalablement à
toute opération d’étalonnage ou de pseudo-étalonnage.
Le réglage doit faire l’objet d’une procédure écrite spécifique détaillant l’ensemble des
opérations à effectuer, et reprenant les indications du constructeur lorsqu’elles sont
explicitées. Une telle procédure de réglage se présente comme une procédure
d’étalonnage dont un exemple est donné au chapitre 4.
Les appareils optiques présentent certaines spécificités dont il faut impérativement tenir
compte, notamment les deux suivantes :
- pour atteindre ses caractéristiques nominales de fonctionnement, le capteur, et
notamment sa partie électronique, doit avoir été mis en route suffisamment à
l’avance, en général plus d’une heure avant l’opération de réglage ou d’étalonnage ;
- l’équilibre thermique doit avoir été atteint entre le capteur et le milieu de mesure, ce
qui peut parfois prendre plusieurs minutes à dizaines de minutes à partir du moment
où ils ont été mis en contact, car la température influence le mesurage. Il faut donc
attendre la stabilisation des valeurs fournies par le capteur. La mise à température
ambiante des solutions de référence, dans la mesure où cela ne nuit pas à leur qualité,
facilite l’obtention rapide de cet équilibre thermique.
On vérifiera toujours que les valeurs lues sur le transmetteur et les valeurs du signal de
sortie (généralement le signal courant 4-20 mA) coïncident. Si ce n’est pas le cas, on
procède aux réglages nécessaires du transmetteur. La concordance des valeurs peut
évidemment être étendue à la centrale d’acquisition de données (voir chapitre 23).
CH22 - 09/01/2002 2:27
548
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Dans le cas où l’appareil comporte plusieurs calibres, il faut vérifier qu’il fournit le
même résultat de mesure quel que soit le calibre utilisé, ou alors préciser dans la
procédure le calibre utilisé pour le réglage.
22.8.3 Etalonnage et pseudo-étalonnage
La grandeur représentant le résultat de mesure des capteurs optiques ne correspond pas
toujours au paramètre polluant auquel on s’intéresse.
Les capteurs dédiés à un polluant spécifique, les nitrates par exemple, fournissent
généralement un résultat de mesure en mg/L de nitrate. Par contre, les capteurs de
polluants organiques carbonés globaux donnent le plus souvent un résultat exprimé en
unités d’absorbance, et non pas en DCO, DBO5 ou COT. De même, les turbidimètres
donnent couramment un résultat exprimé en NTU ou FTU.
Pour les capteurs spécifiques, l’étalonnage est réalisé de manière classique, comme
indiqué au chapitre 4, au moyen d’étalons du paramètre polluant spécifique mesuré
(solutions certifiées de nitrates par exemple). Ces étalons doivent couvrir toute
l’étendue de mesure du capteur.
Pour les autres capteurs, les grandeurs qui intéressent l’utilisateur ne sont pas les
paramètres optiques, turbidité ou absorbance, mais les paramètres polluants globaux tels
que MES, DCO, DBO5, COT, etc. Or, nous avons vu au paragraphe 22.3 que les
relations entre paramètres optiques et paramètres polluants dépendent des
caractéristiques des eaux résiduaires. Nous ne pouvons donc pas définir, au sens
métrologique du terme, d’étalons de travail universels rattachés à des étalons primaires
nationaux pour les MES ou les matières organiques, indépendamment des différents
milieux de mesure. C’est pourquoi nous parlerons dans ce chapitre de pseudoétalonnage pour un milieu ou un site de mesure donnés.
Notons cependant qu’il est possible, pour certains turbidimètres par exemple, de réaliser
un étalonnage au sens métrologique du terme avec des solutions certifiées de formazine.
Cela permet de contrôler le bon fonctionnement du capteur et d’évaluer son incertitude
de mesure dans ce contexte précis. Si cette opération permet de qualifier le capteur, elle
ne fournit par contre aucune information utile pour la connaissance des valeurs du
paramètre polluant global auquel s’intéresse l’utilisateur final en hydrologie urbaine.
C’est pourquoi cet étalonnage classique, même s’il est possible, n’est que rarement
effectué par l’utilisateur. Par contre, il peut être réalisé par les fabricants pour vérifier et
garantir leurs capteurs car il présente les caractéristiques requises de reproductibilité et
de répétabilité.
Dans la suite du texte, nous ne traiterons donc que des questions relatives au pseudoétalonnage, opération que tout utilisateur doit réaliser.
549
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22.8.4 Méthodologie de pseudo-étalonnage
22.8.4.1 Couverture de la gamme de variation des paramètres polluants
Pour effectuer un pseudo-étalonnage satisfaisant, il est nécessaire de couvrir toute la
gamme prévisible ou attendue de variation des paramètres polluants sur un site de
mesure donné. L’emploi de préleveurs automatiques d’échantillons de plus en plus
performants (représentativité du prélèvement, notamment pour les MES, conservation
de l’échantillon par réfrigération, possibilité de programmation de l’échantillonnage,
etc.) facilite l’opération, surtout si le préleveur peut être asservi à des variations de
concentration (voir chapitre 21).
En réseau d’assainissement, la couverture de la gamme de variation des paramètres
polluants dépend des conditions de fonctionnement du réseau et peut être obtenue de la
manière indiquée dans les deux paragraphes suivants.
22.8.4.1.1 Eaux résiduaires brutes de temps sec
L’évolution des concentrations en polluants sur une journée présente un profil
caractéristique, généralement avec un minimum en fin de nuit et deux maxima diurnes,
l’un en milieu et l’autre en fin de journée. Cette évolution type n’est cependant pas
identique pour tous les jours de la semaine, en raison des variations des activités
domestiques et industrielles. Un enregistrement préalable des paramètres optiques
permet d’identifier les jours où la gamme de variation est la plus importante. Des
prélèvements sur 24 heures, régulièrement espacés dans le temps, par exemple avec un
pas d’une heure, fournissent alors les échantillons nécessaires au pseudo-étalonnage.
22.8.4.1.2 Eaux de ruissellement ou résiduaires brutes par temps de pluie en réseaux
séparatifs ou unitaires
Le caractère relativement inopiné et bref des événements pluvieux impose le recours à
des préleveurs automatiques asservis.
Le prélèvement d’échantillons, que ce soit pour le pseudo-étalonnage des capteurs
optiques ou l’analyse en laboratoire de paramètres non mesurables en continu, est
généralement asservi soit au temps, soit au volume écoulé à travers la section de
mesure. Cette dernière stratégie d’échantillonnage est théoriquement la plus
satisfaisante (voir chapitre 21) car la fréquence des prélèvements augmente avec le
débit, ce qui permet :
- de mieux échantillonner les pointes de débit ;
- de constituer directement un échantillon moyen représentatif à partir de fractions
aliquotes des prélèvements ponctuels.
Cependant, en pratique, compte tenu de la très grande variabilité des débits par temps
de pluie, cette stratégie n’est pas toujours facile à appliquer. Il est en effet difficile de
fixer le volume écoulé entre deux prélèvements. Si ce volume est surestimé, le nombre
d’échantillons prélevés par événement sera trop faible, s’il est sous-estimé, le rythme
des impulsions envoyées au préleveur peut dépasser ses possibilités techniques (voir
l’exemple de la Figure 22.11 où les prélèvements se succèdent à une cadence accélérée.
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550
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Il est alors difficile, ensuite, de faire correspondre les prélèvements et les données
optiques enregistrées (impulsions "perdues"). Par ailleurs, il peut aussi arriver que seule
la pointe de débit soit échantillonnée, car la capacité volumique du préleveur est atteinte
trop rapidement (c’est le cas de l’exemple de la Figure 22.11). Pour toutes ces raisons,
il est souvent préférable d’effectuer les prélèvements proportionnellement au temps
(Grange, 1994).
3
débit (m /h) - turbidité (FTU)
500
400
débit
300
turbidité
200
prélèvements
100
0
15 h
16 h
17 h
18 h
temps (heures)
Figure 22.11 : prélèvements asservis au volume écoulé : le choix d’un pas de volume
trop faible conduit à une cadence extrêmement élevée de prélèvements pendant la
pointe de débit et à un remplissage prématuré du préleveur
22.8.4.2 Représentativité du paramètre polluant par rapport au paramètre
optique
La mise en relation des paramètres optiques et des paramètres polluants pour le pseudoétalonnage suppose que les deux résultats de mesure sont obtenus sur le même
échantillon ou sur des échantillons identiques. Or des différences peuvent exister, tant
au niveau de l’espace (positions respectives des points de mesure et de prélèvement)
qu’au niveau du temps (modification des caractéristiques de l’échantillon entre l’instant
du prélèvement et son analyse). Ces deux types de difficultés sont abordés ci-dessous.
22.8.4.2.1 Représentativité de l’échantillon prélevé
Dans les écoulements d’eaux résiduaires brutes notamment, il peut exister d’importants
gradients de concentration dans la section de mesure (voir chapitre 21). Le prélèvement
d’échantillons doit donc être effectué à proximité immédiate du capteur optique.
Dans le cas d’un capteur implanté sur un circuit en dérivation, il est recommandé (et
pratique) d’effectuer le prélèvement dans le bac de mesure en dérivation plutôt qu’au
niveau de la prise d’aspiration du circuit.
551
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Le prélèvement devrait de préférence être effectué face au courant, sans crépine, et de
manière isocinétique par rapport à l’écoulement pour limiter autant que possible la
ségrégation des particules à l’aspiration en fonction de leur granulométrie. En pratique,
ces conditions peuvent difficilement être satisfaites pour des raisons technologiques et
pratiques (voir chapitre 21). Il en résulte une sous-estimation de la fraction particulaire,
sous-estimation qui peut atteindre 15 à 20 % en terme de concentration en MES dans
les cas les plus défavorables (Debarbat, 1990). Cette sous-estimation peut néanmoins
être atténuée et limitée à environ 10 % avec des vitesses d’aspiration élevées (environ
1 m/s) et en respectant au mieux les indications données au chapitre 21.
S’il est important que l’échantillon soit prélevé au point même où le mesurage optique
est effectué, il faut également que les instants du prélèvement et du mesurage optique
coïncident.
Dans le cas où la qualité du milieu varie lentement (eaux résiduaires de temps sec par
exemple), cette mise en correspondance ne présente pas de problème particulier. Il faut
cependant que la fréquence d’enregistrement du paramètre optique soit suffisamment
élevée (une valeur par minute par exemple) pour pouvoir disposer d’une valeur optique
coïncidant autant que possible avec l’instant du prélèvement qui peut être au pas de
temps horaire, ou, mieux, que le paramètre optique soit enregistré au moment même du
prélèvement.
Il faut néanmoins veiller, si le signal issu du capteur optique varie très rapidement, à
l’échelle de la seconde par exemple, autour d’une valeur moyenne représentative du
milieu, à enregistrer cette valeur représentative en calculant la moyenne du signal sur
une période d’intégration suffisante, par exemple 30 secondes.
Dans le cas où la qualité du milieu varie rapidement (eaux de ruissellement ou unitaires
par temps de pluie par exemple, surtout à l’aval de petits bassins versants de taille
inférieure à quelques dizaines d’hectares), la valeur du paramètre optique peut avoir
changé entre le déclenchement de la séquence de prélèvement et la réalisation effective
de ce dernier, en raison par exemple du délai nécessaire à la purge et à l’aspiration de
l’échantillon si la hauteur d’aspiration est importante. Il peut alors être nécessaire de
faire correspondre aux résultats d’analyse de l’échantillon, non pas les valeurs optiques
coïncidant avec l’impulsion de démarrage du prélèvement, mais les valeurs optiques
enregistrées avec un certain décalage après cette impulsion, le décalage étant de l’ordre
de une à quelques minutes. La Figure 22.12 illustre l’intérêt d’un tel décalage dans le
cas d’eaux de ruissellement sur un petit bassin versant urbain d’une surface de 5,1 ha :
les valeurs de la turbidité enregistrées une minute après le déclenchement du
prélèvement permettent un meilleur ajustement des points expérimentaux (c’est
notamment le cas pour le premier prélèvement repéré par une flèche) : le coefficient de
corrélation r2 passe de 0,66 à 0,91.
CH22 - 09/01/2002 2:27
552
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
r2 = 0,66
CMES = 1,71 Tb - 71,4
700
700
600
600
500
500
MES (mg/L)
MES (mg/L)
CMES = 1,51 Tb - 24,2
400
300
r2 = 0,91
400
300
200
200
100
100
0
0
0
100
200
300
400
500
0
100
200
300
400
500
turbidité (FTU)
turbidité (FTU)
Figure 22.12 : ajustement des points d’étalonnage avec les valeurs de turbidité
au moment du déclenchement des prélèvements (à gauche)
ou à la minute suivante (à droite).
La détermination de la valeur du décalage peut aisément être réalisée à l’aide d’un
tableur par exemple, en optimisant la coïncidence entre les résultats d’analyse et les
valeurs du paramètre optique, soit visuellement avec une représentation chronologique
des données, soit par ajustement numérique comme dans la Figure 22.12. Ou mieux, en
associant les deux possibilités. Il faut pour cela disposer d’enregistrements du paramètre
optique à courts pas de temps pour pouvoir tester plusieurs décalages, du moins dans
une phase préliminaire. On peut aussi déterminer ce décalage par chronométrage du
fonctionnement du préleveur, mais il faut que ce fonctionnement soit bien reproductible
et effectuer impérativement le chronométrage sur site pour qu’il soit représentatif. Il
faut en outre que la centrale d’acquisition permette l’enregistrement du paramètre
optique avec le décalage ainsi déterminé par rapport à l’impulsion déclenchant le
prélèvement.
Signalons également que pour être représentatif, le mesurage du paramètre optique
devrait être intégré sur toute la durée effective du prélèvement (les prélèvements ne sont
pas véritablement instantanés, voir chapitre 21).
22.8.4.2.2 Représentativité de l’échantillon analysé
Entre le prélèvement et la réalisation de l’analyse, l’échantillon évolue, et ce d’autant
plus que les conditions et les durées de conservation ne sont pas respectées (voir
chapitre 21).
Ranchet et al. (1980) ont étudié l’influence du type et de la durée de la conservation
d’échantillons sur la détermination des paramètres MES, DCO et DBO5, sur des eaux
553
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
brutes et traitées provenant de 21 stations d’épuration différentes. Cette étude indique
que la réfrigération à 4°C pendant une durée n’excédant pas 48 heures ne modifie pas
significativement les résultats d’analyse des matières organiques (paramètres DCO et
DBO5). Par contre, elle indique que le mesurage des matières en suspension doit être
effectué le plus tôt possible et de préférence sur le lieu du prélèvement, comme le
préconise d’ailleurs la norme NF EN 872 (1996).
A titre indicatif, dans le cas d’une conservation pendant 24 heures à 4°C, les erreurs
aléatoires sur les concentrations en DCO et en MES, avec un niveau de confiance de
90 %, sont les suivantes :
ΔCDCO (90%) = 7% ;
ΔCMES (90%) = 21 %.
Les valeurs de la DCO présentent par ailleurs une erreur systématique de –3 %.
Le fractionnement de l’échantillon initial en plusieurs sous-échantillons pour l’analyse
de plusieurs paramètres polluants différents peut également introduire une hétérogénéité
d’un sous-échantillon à l’autre si l’échantillon initial n’est pas constamment
homogénéisé pendant l’opération. Une sous-estimation moyenne de 10 % pour les MES
est indiquée par Paitry (1986) lors du fractionnement d’un échantillon de 1 litre en 2
sous-échantillons de 500 mL. Encore faut-il que l’homogénéisation soit effectuée de
telle façon qu’elle n’altère pas les caractéristiques des particules : l’agitation mécanique
ne doit pas être trop énergique pour ne pas provoquer une floculation ultérieure. De
même, dans le cas d’une dispersion par ultrasons, la puissance émise ne doit pas casser
les particules. Un mesurage simultané de turbidité constitue un moyen de vérifier cette
non-altération.
Enfin, un phénomène analogue peut également se produire pour la prise d’essai destinée
à l’analyse elle-même. Les normes NF EN 872 (1996) et NF T 90-105-2 (1997)
relatives à l’analyse des MES donnent des indications utiles sur la manière de manipuler
les échantillons pour limiter ces phénomènes d’hétérogénéité. Les problèmes et les
solutions sont également très bien décrits par Gy (1996). Ces hétérogénéités peuvent
être pénalisantes pour l’opération de pseudo-étalonnage : nous avons observé que des
prises d’essai de 50 à 100 mL pouvaient entraîner une sous-estimation moyenne
d’environ 10 % des concentrations en MES.
22.8.4.3 Conclusions pratiques pour la réalisation du pseudo-étalonnage
Nous avons indiqué dans les paragraphes précédents que les problèmes de
représentativité affectent surtout la fraction particulaire des polluants (MES et matières
organiques). C’est donc principalement sur cette fraction que doit porter l’effort
métrologique et méthodologique.
Le pseudo-étalonnage peut être effectué selon deux méthodes :
- sur le terrain, avec le capteur optique immergé dans le milieu de mesure, par mise en
relation des valeurs optiques enregistrées avec les résultats d’analyses en laboratoire
des échantillons prélevés sur le terrain ;
CH22 - 09/01/2002 2:27
554
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
- au laboratoire, avant installation du capteur sur site ou après l’avoir démonté, en
effectuant le mesurage optique par immersion directe dans les échantillons juste avant
leur analyse.
Des variantes peuvent être envisagées, comme par exemple le pseudo-étalonnage sur
site en ayant démonté le capteur et en réalisant immédiatement les analyses dans un
laboratoire de terrain. Cette variante constitue d’ailleurs la solution idéale du point de
vue de l’analyse des échantillons.
Le pseudo-étalonnage au laboratoire semble cependant le meilleur compromis car il
permet d’éliminer toutes les sources de non représentativité de l’échantillon analysé par
rapport au mesurage optique :
- l’échantillon peut être le même que celui soumis à l’analyse si on immerge le capteur
directement dans la prise d’essai, après fractionnement éventuel de l’échantillon
initial pour l’analyse d’autres paramètres ;
- il n’y a pas d’évolution sensible de l’échantillon si l’analyse est effectuée tout de suite
après le mesurage optique.
Par contre, les caractéristiques optiques de l’échantillon peuvent évoluer entre son
prélèvement sur site et les mesurages au laboratoire. Quelques expérimentations ont
cependant montré qu’il n’y avait pas de modification notable de la turbidité si
l’échantillon était conservé dans les conditions requises pour l’analyse des MES - voir
les normes NF EN 872 (1996) NF T 90-105-2 (1997).
En pratique, cette manière de procéder suppose :
- soit que l’on dispose au laboratoire d’un capteur identique et réglé de la même
manière que celui ou ceux installé(s) sur le terrain ;
- soit que l’étalonnage au laboratoire peut être réalisé suffisamment rapidement pour ne
pas trop amputer la période d’acquisition de données optiques sur le terrain. Ceci est
difficilement réalisable pour le suivi des eaux de ruissellement, car la couverture de la
gamme de variation des paramètres polluants dépend de l’occurrence des événements
pluvieux.
Dans le cas où le pseudo-étalonnage au laboratoire est possible et où le service
gestionnaire des capteurs est différent du service effectuant les analyses sur
échantillons, il est préférable que le premier confie le capteur à étalonner au service
d’analyse, de manière à ce que celui-ci ait la maîtrise de la quasi-totalité du processus
(ou de la totalité dans le cas où le service d’analyse effectue également les
prélèvements).
Une comparaison des deux méthodes de pseudo-étalonnage, pour des eaux de
ruissellement sur deux petits bassins versants urbains (5,1 et 15,3 ha), montre une sousestimation des MES de l’ordre de 15 à 20 % pour le pseudo-étalonnage effectué d’après
les valeurs de turbidité enregistrées directement sur le terrain par rapport au pseudoétalonnage effectué d’après les valeurs de turbidité lues au laboratoire sur les
échantillons prélevés (Ruban, 1995). Ce résultat obtenu sur un événement pluvieux
important peut être dû soit à une sous-estimation des MES par le préleveur (voir
chapitre 21), soit à une modification de l’échantillon entre le site et le laboratoire.
555
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Si le pseudo-étalonnage des capteurs au laboratoire n’est pas envisageable, le pseudoétalonnage sur des échantillons prélevés sur le terrain peut néanmoins donner des
résultats satisfaisants si on tient compte des indications des paragraphes précédents,
résumées par les recommandations suivantes (voir aussi chapitre 21, et Jung, 1996) :
- un prélèvement à proximité immédiate du capteur optique, avec un préleveur
présentant des caractéristiques conformes aux prescriptions minimales de la norme
NF EN ISO 5667/10 (1992) - (voir chapitre 21) ;
- une conservation des échantillons dans des conditions et pendant une durée
conformes aux prescriptions de la norme NF EN ISO 5667/3 (1996) ;
- un soin particulier apporté à la réalisation des sous-échantillons et à la prise d’essai
pour analyse, afin de limiter autant que possible les problèmes d’hétérogénéité ;
- une bonne mise en correspondance temporelle des valeurs optiques enregistrées et des
résultats d’analyse des échantillons prélevés.
22.9 QUALITE ET VARIABILITE DES RELATIONS DE PSEUDO-ETALONNAGE
22.9.1 Rappels de statistiques
Nous présentons ici quelques rappels de statistiques, en complément du chapitre 4, afin
de définir les grandeurs et les critères permettant de qualifier et de comparer les
résultats de pseudo-étalonnage des capteurs optiques.
Les relations entre paramètres polluants et paramètres optiques sont généralement
linéaires tant que les concentrations ne sont pas trop élevées (voir Figure 22.6). Sous
cette hypothèse, le pseudo-étalonnage consiste à déterminer les coefficients de la droite
donnant les valeurs du paramètre polluant en fonction des valeurs du paramètre optique,
droite ajustée sur les points expérimentaux selon les principes présentés au chapitre 4
auquel nous renvoyons le lecteur.
La régression linéaire est :
- simple si on cherche à déterminer la valeur du paramètre polluant en fonction de
l’absorbance ou de l’atténuation de la lumière en fonction d’une seule longueur
d’onde ;
- multiple dans le cas d’une détermination en fonction de plusieurs longueurs d’onde.
Cette méthode permet, moyennant certaines hypothèses, d’évaluer l’incertitude sur les
valeurs calculées des paramètres polluants et sur les coefficients de la droite de
régression. Elle est donc particulièrement intéressante pour comparer la métrologie
optique à d’autres méthodes de mesure, par exemple la méthode classique par
prélèvements et analyses physico-chimiques d’échantillons.
Nous n’entrerons pas ici dans le détail des outils et techniques statistiques nécessaires à
l’exploitation des résultats de mesure. Nous nous limitons à quelques considérations
indispensables relatives à l’expression de l’incertitude sur la valeur du paramètre
polluant estimée à partir de la valeur du paramètre optique et d’une droite de régression
simple. Le lecteur souhaitant approfondir les aspects théoriques peut se reporter aux
chapitres 4 et 5 et à leurs références bibliographiques, ainsi qu’aux ouvrages consacrés
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556
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
spécifiquement à la régression linéaire, par exemple Tomassone (1992) ou Anonyme
(1978) – CEA.
Les appareils de mesure optiques, s’ils sont bien réglés, présentent une bonne
reproductibilité et une bonne fidélité, avec une incertitude de l’ordre de 1 à 3 %. Nous
ferons donc l’hypothèse, indispensable pour le pseudo-étalonnage, que les valeurs des
paramètres optiques mesurées sur les échantillons sont connues avec une incertitude
faible, considérée comme négligeable, devant les incertitudes de mesure sur les valeurs
des paramètres polluants, lesquelles sont de quatre ordres :
- l’incertitude de prélèvement sur site : elle peut couramment atteindre 20 %, voire
plus ;
- l’incertitude de constitution des sous-échantillons et de la prise d’essai : elle est de
l’ordre de 10 % ;
- l’incertitude d’analyse au laboratoire : ΔC/C = 10 % environ pour les MES ;
- la variabilité des composés dissous et/ou particulaires des eaux résiduaires, qui fait
qu’à une valeur donnée du paramètre optique, considérée comme la variable
indépendante, peuvent correspondre différentes valeurs du paramètre polluant.
L’incertitude de mesure par voie optique, du fait de l’hétérogénéité intrinsèque des
eaux résiduaires et en l’absence de facteurs correctifs, doit intégrer cette variabilité.
Le pseudo-étalonnage conduit à établir une relation linéaire liant les valeurs yi du
paramètre polluant étudié aux valeurs correspondantes xi du paramètre optique, relation
que l’on peut écrire sous la forme :
yi = a + bxi + ε i
Eq. 22.11
avec εi l’écart entre la valeur mesurée yi et la valeur calculée ŷi , appelé résidu.
Le résidu est une variable aléatoire de moyenne nulle, dont la distribution est
généralement admise comme étant gaussienne. Sa variance, notée σ(εi)2 et estimée par :
N
∑ε
i
2
Eq. 22.12
s (ε i ) 2 = i =1
N −1
avec N le nombre d’échantillons analysés, est logiquement appelée variance résiduelle,
ou encore variance conditionnelle de y liée à x. La racine de la variance, σ(εi), est
l’écart type.
Si on dispose de plusieurs valeurs mesurées yik pour une valeur de xi, on peut calculer
le coefficient de variation résiduel CVR comme le rapport de l’écart type pour la valeur
xi sur la moyenne des valeurs yi correspondantes :
CVR =
s (ε i )
Eq. 22.13
yi
557
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
L’écart type et le coefficient de variation résiduel peuvent varier en fonction de x. On
distingue notamment deux cas particuliers :
- l’écart type est constant en fonction de x : cela signifie que l’incertitude de mesure, en
valeur absolue, est constante sur toute l’étendue de mesure. Si la concentration C du
paramètre polluant est déterminée avec une incertitude I2(C) = 10 mg/L, l’incertitude
relative est égale à 1 % de la valeur mesurée pour C = 1 g/L, mais à 100 % de la
valeur mesurée pour C = 10 mg/L. L’incertitude relative diminue avec la valeur x :
elle est plus faible pour les valeurs élevées de concentration que pour les valeurs
faibles ;
- le coefficient de variation résiduel est constant en fonction de x : cela signifie que
l’incertitude relative est constante sur toute l’étendue de mesure.
Pour vérifier la constance de la variance ou du coefficient de variation sur toute
l’étendue de mesure, on peut soit procéder graphiquement, soit utiliser des tests
statistiques spécifiques - voir par exemple les normes ISO 8466-1 (1990) et NF X 06045 (1985).
Un indicateur couramment employé pour évaluer la qualité d’une régression linéaire est
le coefficient de corrélation ρ, estimé par la valeur r au moyen de la relation :
∑ ( y − y)(x − x)
∑ ( y − y) ∑ ( x − x )
i
r=
i
i
i
i
2
i
Eq. 22.14
2
i
Si les variables étudiées sont indépendantes, r2 = 0. Si elles sont totalement corrélées,
r2 = 1. Lorsque les variables sont partiellement corrélées entre elles, la valeur de r2
augmente de 0 à 1 avec le degré de corrélation.
La valeur de r2 est utilisée pour qualifier l’ajustement d’une droite sur des points
expérimentaux. Nous avons indiqué au chapitre 4 que le coefficient de corrélation était
insuffisant pour qualifier de manière adéquate l’ajustement d’une courbe d’étalonnage.
Cependant, dans le cas du pseudo-étalonnage, compte tenu des incertitudes élevées
(plus de 10 % en général) sur les valeurs des paramètres polluants, il est souvent
considéré comme un critère suffisant.
Néanmoins, le coefficient de corrélation doit être utilisé et surtout interprété avec
discernement, notamment dans le cas d’une répartition irrégulière des points
expérimentaux sur l’étendue de mesure. Un cas relativement fréquent et typique
consiste à avoir un nuage de points relativement regroupés d’une part et un point isolé
d’autre part (voir Figure 22.13). Ce cas correspond par exemple à un événement
pluvieux pour lequel une valeur d’un pic de concentration est largement supérieure à
toutes les autres. Le coefficient r2 est alors très proche de 1, alors que la linéarité de
l’ajustement ne repose pratiquement que sur le seul point isolé, ce qui n’est pas
satisfaisant.
CH22 - 09/01/2002 2:27
558
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
grandeur y
130
125
droite déterminée
avec le nuage de points :
120
y = 0,0711x + 98,278
r 2 = 0,9227
droite déterminée
avec le nuage de points
et le point isolé :
115
y = 0,0551x + 101,76
r 2 = 0,9228
110
105
0
100
200
300
400
500
600
grandeur x
Figure 22.13 : distribution irrégulière des points expérimentaux sur l’étendue de mesure
La relation entre l’incertitude évaluée à partir de l’écart type des résidus s(εi) et le
coefficient de corrélation r2 permet de mieux saisir l’intérêt et la portée de ces deux
notions. Pour établir cette relation, il faut définir au préalable l’écart type du paramètre
polluant y :
N
∑ ( y − y)
i
σ( y ) ≈ s ( y ) =
i =1
2
Eq. 22.15
N −1
La relation entre σ(εi) et ρ s’écrit sous la forme :
σ(ε i ) = σ( y ) 1 − ρ 2
Eq. 22.16
ρ2 représente la fraction de la variance σ(y)2 expliquée par la relation linéaire,
σ(y)2×(1-ρ2) étant la variance résiduelle.
En considérant que l’écart type σ(εi) caractérise l’incertitude de mesure, on observe
que, pour une incertitude donnée, ρ dépend de la variance de y, c’est-à-dire notamment
de l’étendue des valeurs utilisées pour le pseudo-étalonnage. Si cette étendue est faible,
ce qui équivaut à des points expérimentaux relativement groupés, σ(y) sera faible ainsi
que ρ. Au contraire, si l’étendue des valeurs expérimentales est importante et couvre
l’étendue de mesure de l’appareil, σ(y) et ρ auront des valeurs plus élevées.
L’écart type est le critère le plus adéquat pour évaluer une incertitude de mesure (voir
chapitres 4 et 5). Cependant, dans le cas des relations de pseudo-étalonnage liant
paramètre polluant et paramètre optique, on observe généralement que l’écart type
559
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
augmente avec la valeur mesurée. Cette augmentation semble due à une variation des
caractéristiques des MES aux fortes concentrations (granulométrie et masse volumique
différentes). Il est alors nécessaire de préciser l’étendue de mesure pour pouvoir
comparer les écarts types provenant de différents appareils et expérimentateurs. On peut
aussi utiliser le coefficient de variation résiduel, qui tient compte de l’étendue des
valeurs du fait que l’écart type est divisé par la moyenne, et dont nous avons observé la
relative constance pour le mesurage des MES par turbidimétrie (Ruban et al., 1993).
Ces trois grandeurs, coefficient de corrélation, écart type et coefficient de variation
résiduel, seront utilisées conjointement dans les paragraphes suivants pour qualifier les
relations établies par pseudo-étalonnage.
22.9.2 Variabilité des relations de pseudo-étalonnage
Ce paragraphe présente les résultats de pseudo-étalonnage obtenus avec différents
capteurs dans différents contextes de mesure, ainsi que les incertitudes et les variabilités
observées. Le Tableau 22.1 regroupe l’ensemble des informations.
Les différents milieux de mesure représentés dans ce tableau de synthèse sont les eaux
pluviales et les eaux unitaires de temps sec et de temps de pluie, qualifiées de brutes
c’est-à-dire en réseau ou en entrée de station d’épuration. De nombreuses études et
expérimentations ont été conduites sur les eaux traitées en sortie de station d’épuration,
mais ne sont pas l’objet de ce chapitre.
Les méthodologies de pseudo-étalonnage, en laboratoire ou sur le terrain, correspondent
aux définitions données au paragraphe 22.8.4.3.
Pour les pseudo-étalonnages en laboratoire, réalisés le plus souvent en phase
préliminaire d’essai des capteurs, les mesurages sont effectués au laboratoire sur des
échantillons prélevés sur le terrain. Les mesurages optiques étant réalisés peu de temps
avant les analyses du paramètre polluant, la représentativité de ces dernières est
généralement satisfaisante et les relations établies sont relativement fiables.
Pour les pseudo-étalonnages de terrain, les relations sont le plus souvent établies par
mise en correspondance des valeurs optiques enregistrées sur le terrain avec les résultats
d’analyse ultérieure en laboratoire des échantillons prélevés. Il peut donc y avoir des
incertitudes supplémentaires liées aux problèmes de représentativité discutés au
paragraphe 22.8.4.2.
Les capteurs mesurant la transmission dans l’ultraviolet (UV), le visible (VIS) ou
l’infrarouge (IR) sont les plus représentés dans le Tableau 22.1, ce qui s’explique
principalement par le fait que, jusqu’à la fin des années 1990, cette technologie était la
mieux adaptée, en terme de sensibilité, aux effluents urbains bruts. Cependant, les
développements technologiques des capteurs mesurant la lumière diffusée ont permis
d’adapter la sensibilité à ces effluents, principalement par diminution du chemin
optique.
CH22 - 09/01/2002 2:27
560
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22.9.3 Incertitude et variabilité entre sites
Les relations de pseudo-étalonnage indiquées dans le Tableau 22.1 peuvent être
considérées comme acceptables à satisfaisantes, quels que soient le principe de mesure,
le milieu mesuré et la méthodologie mise en œuvre.
Cependant, quelques relations présentent une variance expliquée inférieure à 80 %,
correspondant à un coefficient de corrélation inférieur à 0,90. La grandeur 2×CVR, qui
correspond à l’incertitude relative avec un niveau de confiance de 95 %, varie de 23 à
32 % pour la valeur de la DCO estimée à partir de la valeur du paramètre optique. Cette
incertitude est supérieure à l’incertitude relative de 10 % que l’on peut généralement
obtenir en procédant à une analyse normalisée de DCO sur échantillon (Jung, 1996).
Cela signifie qu’on ne peut pas attendre d’une méthode optique qu’elle ait une
incertitude équivalente à celle obtenue avec une analyse normalisée sur échantillons.
Pour les MES, la grandeur 2×CVR varie de 21 à 32 %, avec une valeur exceptionnelle
de 85 %. Cette incertitude relative est supérieure à l’incertitude relative de 10 % que
l’on peut généralement obtenir en procédant à une analyse normalisée des MES sur
échantillon (Jung, 1996).
Rappelons que le coefficient de variation résiduel dépend de l’étendue de mesure. Pour
les MES, le rapport du Groupe de travail AGHTM "Méthodes d’analyses alternatives"
(Chaumontet, 1998) mentionne une valeur maximum pour 2×CVR de 45 % pour des
concentrations inférieures à 100 mg/L, et de 15 % pour des concentrations supérieures,
valeurs obtenues avec la méthode normalisée - normes NF EN 872 (1996) et NF T 90105-2 (1997).
Les résultats obtenus par mesurage optique peuvent donc être considérés comme
acceptables pour une méthode alternative à la méthode normalisée. Pour un
expérimentateur et un capteur donnés, les relations obtenues dépendent du site de
mesure. Cette spécificité du pseudo-étalonnage par rapport au site peut notamment
s’expliquer par la diversité de composition des eaux résiduaires. Du fait également de la
diversité des principes et des technologies de mesure employés, une comparaison entre
les différents expérimentateurs est rarement possible, sinon impossible.
22.9.4 Variabilité intrasite
Les pseudo-étalonnages pour un site de mesure donné sont le plus souvent effectués sur
des périodes de 24 ou 48 heures, pour des raisons pratiques. Sur des périodes aussi
courtes, les relations obtenues sont généralement stables, sauf dans le cas des eaux de
ruissellement. Nous n’avons pas connaissance de comparaisons statistiques de relations
de pseudo-étalonnage sur des longues périodes, qui seules permettraient de mettre en
évidence une éventuelle évolution sur le long terme (variation temporelle de la
composition du milieu de mesure, par exemple saisonnière, nouveaux apports,
notamment industriels, etc.).
561
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Principe
de mesure
transmission VIS
(506 nm),
chemin optique
20 mm
Milieu de mesure
Méthodologie
Eaux pluviales et unitaires
brutes de temps de pluie
(en réseau)
labo (site 1)
idem
labo (site 2)
idem
labo (site 3)
idem
labo (site 1)
labo (site 2)
Nbre de points
(durée)
57 (5 séries)
56 (5 séries)
102 (8 séries)
89 (6 séries)
72 (3 séries)
72 (3 séries)
6 séries 24h
2 séries 24h
* transmission IR
appareil 1
Eaux pluviales
Eaux unitaires temps sec
(en réseau)
* transmission IR
appareil 2
Eaux pluviales
Eaux unitaires temps sec
(en réseau)
Eaux unitaires
temps de pluie
(en réseau,
après dégrillage grossier)
labo (site 1)
labo (site 2)
6 séries 24h
2 séries 24h
terrain
73
Entrée station
d’épuration
terrain (site 1)
idem
terrain (site 2)
idem
labo (site 1)
idem
labo (site 2)
idem
labo (site 3)
idem
terrain (site 1)
idem
DCO : transmission
UV (254 nm)
MES : transmission
VIS (546 nm)
capteur en dérivation
rétrodiffusion en
lumière blanche,
capteur en dérivation
transmission en
lumière blanche
(400 – 700 nm)
Entrée station
d’épuration,
temps sec
DCO : transmission
UV (254 nm) *
MES : transmission
VIS (546 nm)
capteur en dérivation
transmission
Eaux usées
domestiques
après dégrillage
71
Eaux brutes mixtes
laboratoire
(domestiques
+ industrielles)
* correction de la non-linéarité du capteur
41
43
39
idem
18
idem
34
idem
24
24
49
30
Tableau 22.1 : relations de pseudo-étalonnage obtenues par différents expérimentateurs
dans différents contextes (début)
CH22 - 09/01/2002 2:27
562
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Relations établies
Etendue
Ecart type
(2CVR)
r2
Source
Bouzanne (1985)
Paitry (1987)
MES = 1429 Ab506 – 83
DCO = 1818 Ab506 – 124
MES = 1075 Ab506 – 124
DCO = 1064 Ab506 – 14
MES = 990 Ab506 – 125
DCO = 1818 Ab506 – 233
MES = 1,069 Tb - 0,88
MES = 1,095 Tb + 4,67
0-250
40-250
19 (0,30)
20 (0,32)
0,91
0,82
0,93
0,77
0,91
0,82
0,93
0,96
MES = 0,73 Tb - 2,93
MES = 0,57 Tb + 9,77
0-250
40-250
15 (0,24)
17 (0,27)
0,93
0,97
DCO = 1809 Ab254 –127
70-1600
135 (0,32)
0,94
MES = 3510 Ab546 - 3,2
50-800
180 (0,85)
0,82
DCO = 21,23 Tb - 310
MES = 7,94 Tb - 88
DCO = 9,09 Tb - 99
MES = 4 Tb - 53
MES = 0,30 Tb - 84,3
DCO = 0,88 Tb - 176,3
MES = 0,24 Tb - 32,4
DCO = 0,65 Tb - 28,6
MES = 0,87 Tb - 80,2
DCO = 1,18 Tb + 346,9
DCO = 595 Ab254 + 178
MES = 1465 Ab546 + 18
200-1400
100-700
100-600
50-250
81-832
274-2093
37-147
131-456
140-960
447-1512
205-1284
72-456
Doyen (1992)
Grange (1994)
0,94
0,95
0,93
0,90
0,94
0,93
0,92
0,93
0,94
0,91
0,97
0,95
Marchandise
et al. (1978)
MES = f(Ab850)
0,98
DCO = f(Ab850, Ab550,
0,98
conductivité)
Abλ : absorbance ou atténuation à la longueur d'onde λ
Baudu et al.
(1995)
48,7 (0,21)
144,1 (0,25)
14,6 (0,32)
35,8 (0,24)
63,2 (0,23)
110,8 (0,23)
Ruban et al.
(1993)
Grange et
Pescheux
(1986)
Tb : turbidité
Tableau 22.1 : relations de pseudo-étalonnage obtenues par différents expérimentateurs
dans différents contextes (fin)
563
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
Notons qu’une des sources de variabilité intrasite peut être la non-linéarité de la relation
liant le paramètre polluant au paramètre optique, surtout aux concentrations élevées.
Cette non-linéarité entraîne une modification des paramètres de la droite de pseudoétalonnage lorsqu’ils sont calculés pour des étendues de mesure différentes. Il est donc
important de vérifier la linéarité de la relation pour toute l’étendue de mesure du
capteur. Si ce n’est pas le cas, il est nécessaire d’apporter une correction :
- soit en utilisant différentes relations linéaires pour différents sous-intervalles de
l’étendue de mesure, en fonction de la valeur du paramètre optique (pseudoétalonnage par morceau) ;
- soit en établissant une relation non linéaire, par exemple polynomiale de degré 2 ou 3
(voir chapitre 4).
Dans le cas des mesurages sur des eaux de ruissellement, les caractéristiques du milieu
varient largement et rapidement, notamment les polluants particulaires. En effet, la taille
des particules transportées par l’écoulement dépend, en première approximation, de la
vitesse d’écoulement et donc du débit. On observe que la taille moyenne ou médiane
des particules transportées augmente avec le débit (Ruban, 1995). Ce phénomène est
illustré Figure 22.14 : il se traduit par une augmentation de la pente de la droite de
pseudo-étalonnage avec la valeur du débit moyen mesuré pendant les événements
pluvieux. Cette augmentation de pente est corrélée avec celle de la taille des particules,
la turbidité étant, à concentration en MES égale, plus faible pour les grosses particules.
Bouzanne (1985) et Paitry (1987) avaient déjà fait la même constatation.
700
330
600
MES (mg/L)
500
400
53
252
87
300
70
68
200
13
21
100
0
0
100
200
300
400
turbidité (FTU)
Figure 22.14 : évolution de l’étalonnage en fonction du débit moyen en m3/h
Reprenons l’exemple donné Figure 22.14. La droite de pseudo-étalonnage, tous
événements confondus, est la suivante :
CH22 - 09/01/2002 2:27
564
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
r2 = 0,83
CMES = 1,79 Tb - 12,31
Eq. 22.17
avec CMES la concentration en MES en mg/L.
En introduisant un facteur correctif de la forme (1 + aQb) pour tenir compte de
l’influence de l’hydraulique dans la détermination de la pente de la relation de pseudoétalonnage, avec Q le débit instantané (m3/h) au moment du prélèvement de
l’échantillon, nous obtenons la relation suivante :
CMES =0,47 Tb (1 + 0,31 Q0,41) + 12,52
r2 = 0,94
Eq. 22.18
La prise en compte de l’influence de l’hydraulique permet d’aboutir à un ajustement
significativement meilleur : la valeur de r2 passe de 0,83 à 0,94 et celle de l’écart type
de 60 à 35 mg/L. Le débit Q a été utilisé dans cette expression pour une raison pratique,
car il est souvent mesuré en continu pour pouvoir évaluer les flux polluants. La vitesse
moyenne d’écoulement U dans la section de mesure conduit évidemment à une
amélioration similaire de la relation de pseudo-étalonnage. Elle semble même plus
pertinente car elle caractérise tout autant l’hydraulique que le débit, tout en étant moins
dépendante des caractéristiques géométriques de la section de mesure.
Cette indépendance de la vitesse vis-à-vis du site de mesure pour caractériser
l’influence de l’hydraulique sur la pente de la droite de pseudo-étalonnage est illustrée
Figure 22.15, dans le cas de deux sites de mesure différents. Ces deux sites ont les
caractéristiques respectives suivantes :
- bassins versants urbains, de surface 5,1 et 15,3 ha ;
- points de mesure situés en collecteurs circulaires de 400 et 800 mm de diamètre ;
- mesurage du débit sur seuil.
1,20
vitesse moyenne U (m/s)
1,00
Site 1
0,80
Site 2
0,60
0,40
0,20
0,00
0,00
0,50
1,00
1,50
2,00
2,50
pente de la droite de pseudo-étalonnage
Figure 22.15 : relation entre la pente de la droite de pseudo-étalonnage et la vitesse
moyenne d’écoulement U sur deux sites de mesure différents
565
CH22 - 09/01/2002 2:27
Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
On constate qu’il existe une bonne corrélation entre les pentes des droites de pseudoétalonnage et les vitesses moyennes d’écoulement.
La droite de pseudo-étalonnage, tous événements et tous sites confondus, est la
suivante :
r2 = 0,83
CMES =1,45 Tb –13,77
Eq. 22.19
En introduisant un facteur correctif de la forme (1 + aUb) pour tenir compte de
l’influence de l’hydraulique dans la détermination de la pente de la relation de pseudoétalonnage, avec U la vitesse instantanée (m/s) au moment du prélèvement de
l’échantillon, nous obtenons la relation suivante :
CMES = 0,38 Tb (1 + 3,68 U1,23) + 6,80
r2 = 0,93
A partir de cet exemple, la vitesse d’écoulement semble donc une grandeur appropriée
pour caractériser l’influence de l’hydraulique sur la pente des droites de pseudoétalonnage, et ceci indépendamment du site de mesure. La validité de cette hypothèse
mériterait naturellement d’être étudiée sur d’autres sites plus diversifiés en termes de
surfaces, de bassin versants, de géométrie des collecteurs, etc.
En l’absence de détermination fiable de la vitesse d’écoulement, on peut également
envisager d’établir une relation moyenne représentative entre paramètre polluant et
paramètre optique. C’est ce que Grange (1994) a effectué en réseau unitaire. On peut
estimer un ordre de grandeur de l’incertitude par événement pluvieux en calculant
l’écart type, mais l’incertitude globale dépend de la représentativité de l’échantillon
d’événements utilisé pour le pseudo-étalonnage par rapport à l’échantillon
d’événements de la période de mesure. Un moyen d’estimer cette représentativité
pourrait être de comparer la pluviométrie moyenne sur la période de pseudo-étalonnage
et sur la période de mesure. La pluviométrie moyenne par événement semblerait
d’ailleurs pouvoir être corrélée avec la pente de la relation de pseudo-étalonnage, de
manière analogue à ce qui a été indiqué ci-dessus pour la vitesse d’écoulement.
22.9.5 Cas particulier des matières organiques
Pour tenir compte de la variabilité des caractéristiques des matières organiques, soit
entre périodes diurnes et nocturnes de temps sec, soit entre périodes de temps sec et
périodes de temps de pluie, Baudu et al. (1995) proposent la méthode suivante :
- deux mesurages de l’absorbance, à 550 et 850 nm, pour déterminer les matières
volatiles en suspension (MVS), assimilées à la matière organique ;
- deux mesurages identiques aux précédents complétés par un mesurage de la
conductivité pour estimer la DCO, la conductivité étant interprétée ici comme un
indicateur de la fraction dissoute de la DCO.
La prise en compte des fractions dissoute et particulaire de la DCO peut également être
obtenue par des mesurages simultanés d’absorbance dans l’ultraviolet et le visible. En
effet (voir Figure 22.3), l’absorbance dans l’ultraviolet vers 250 nm est caractéristique
des matières organiques dissoutes et des MES, alors que l’absorbance dans le visible
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
vers 550 nm est surtout caractéristique des MES. La différence des absorbances,
souvent déterminée par la grandeur (Ab254 - Ab546), représente donc approximativement
l’absorbance due aux seules matières organiques dissoutes. Cependant, dans les eaux
résiduaires brutes, et notamment par temps de pluie, les matières organiques sont en
majorité sous forme particulaire. C’est pourquoi la méthode par différence des
absorbances ne conduit pas toujours à une amélioration significative des relations de
pseudo-étalonnage.
Dans le cas où les proportions relatives des fractions dissoute et particulaire de la DCO
sont très variables, seule la résolution d’un système d’équations multilinéaires
exprimant les diverses absorbances en fonction des concentrations en DCO et MES
permettrait d’obtenir une amélioration des courbes de pseudo-étalonnage.
En conclusion, les relations de pseudo-étalonnage satisfaisantes obtenues jusqu’à
présent pourront vraisemblablement être encore améliorées à l’avenir, d’une part en
prenant en compte les variations de la composition des polluants (fractions dissoute et
particulaire variables), et d’autre part en utilisant plusieurs variables explicatives de
nature optique ou hydraulique par exemple.
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22. MESURAGE DES POLLUANTS PAR VOIE OPTIQUE : TURBIDITE ET ABSORPTION DANS
L’ULTRAVIOLET ............................................................................................................ 523
22.1 Introduction ...................................................................................................... 523
22.2 Paramètres polluants mesurables par voie optique........................................... 524
22.3 Principes de mesure.......................................................................................... 525
22.3.1 Absorption moléculaire ............................................................................. 526
22.3.1.1 Eléments théoriques ........................................................................... 526
22.3.1.1 Application aux eaux résiduaires ....................................................... 528
22.3.2 Turbidimétrie............................................................................................. 529
22.3.2.1 Mesurage de la lumière diffusée......................................................... 529
22.3.2.1.1 Rapport dP/λ inférieur ou égal à 1/20ème ..................................... 530
22.3.2.1.2 Rapport dP/λ supérieur ou égal à 20 ........................................... 530
22.3.2.1.3 Rapport dP/λ compris entre 1/20ème et 20 ................................... 530
22.3.2.1.4 Relation entre lumière diffusée et concentration en MES ........... 532
22.3.2.2 Mesurage de la lumière transmise ...................................................... 532
22.3.2.3 Standardisation de la turbidimétrie..................................................... 534
22.3.3 Globalité du mesurage optique et spécificité du site de mesure................ 534
22.4 Eléments technologiques .................................................................................. 536
22.4.1 Optique : principe de mesure, longueurs d’onde....................................... 536
22.4.2 Systèmes de nettoyage et de dégazage ...................................................... 538
22.5 Caractéristiques techniques des appareils commerciaux .................................. 539
22.5.1 Etendue de mesure et unités ...................................................................... 539
22.5.2 Autres caractéristiques .............................................................................. 540
22.6 Installation........................................................................................................ 540
22.6.1 Conditions relatives à la localisation du capteur ....................................... 540
22.6.2 Capteur immergé ou en bac de dérivation................................................. 542
22.6.3 Conception et maintenance du circuit de prélèvement.............................. 544
22.6.4 Conception du bac de mesure en dérivation.............................................. 545
22.7 Entretien - maintenance.................................................................................... 546
22.8 Etalonnage et vérification des appareils ........................................................... 547
22.8.1 Introduction et terminologie...................................................................... 547
22.8.2 Réglage...................................................................................................... 547
22.8.3 Etalonnage et pseudo-étalonnage .............................................................. 549
22.8.4 Méthodologie de pseudo-étalonnage......................................................... 550
22.8.4.1 Couverture de la gamme de variation des paramètres polluants ........ 550
22.8.4.1.1 Eaux résiduaires brutes de temps sec .......................................... 550
22.8.4.1.2 Eaux de ruissellement ou résiduaires brutes par temps de pluie en
réseaux séparatifs ou unitaires...................................................................... 550
22.8.4.2 Représentativité du paramètre polluant par rapport au paramètre
optique.............................................................................................................. 551
22.8.4.2.1 Représentativité de l’échantillon prélevé .................................... 551
22.8.4.2.2 Représentativité de l’échantillon analysé .................................... 553
22.8.4.3 Conclusions pratiques pour la réalisation du pseudo-étalonnage....... 554
22.9 Qualité et variabilité des relations de pseudo-étalonnage ................................ 556
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Chapitre 22 : Mesurage des polluants par voie optique
22.9.1 Rappels de statistiques .............................................................................. 556
22.9.2 Variabilité des relations de pseudo-étalonnage ......................................... 560
22.9.3 Incertitude et variabilité entre sites............................................................ 561
22.9.4 Variabilité intrasite .................................................................................... 561
22.9.5 Cas particulier des matières organiques .................................................... 566
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