Un mécanisme génétique universel découvert chez les plantes

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Fiche n°288 - Février 2008
Un mécanisme génétique universel
découvert chez les plantes fixatrices
d’azote
très pauvres en éléments
minéraux. Cette faculté,
résultant d’une symbiose au niveau de leurs
racines avec des bactéries fixatrices d’azote
(Rhizobium ou Frankia)
et des champignons
mycorhiziens, améliore
fortement leur nutrition
azotée et phosphatée.
Une équipe de l’IRD, en
collaboration avec un laboratoire de l’Université
de Munich, s’attache depuis plusieurs années à
décrypter les mécanismes de reconnaissance à
l’origine des associations
entre végétaux, bactéries
et champignons. Ils ont
ainsi découvert qu’un des
éléments génétiques des
plantes appelé SymRK
(pour Symbiosis Receptor Kinase), nécessaire
aux légumineuses (pois,
trèfles luzerne…) s’associant avec la bactérie
Rhizobium et les champignons mycorhiziens, est
également indispensable
à l’établissement de la
symbiose entre l’arbre
tropical Casuarina, plus
connu sous le nom de filao, et la bactérie fixatrice
d’azote Frankia. La compréhension de ces mécanismes est essentielle
pour la mise au point de
stratégies qui permettront un jour de transférer
ces capacités symbiotiques à des plantes qui
en sont dépourvues (blé,
maïs, riz, etc.) et de fournir ainsi une alternative à
l’apport massif d’engrais
chimiques aux cultures.
© IRD / Bonvallot Jacques
ertains végétaux ont
la capacité de se déC
velopper sur des sols
Plantés sur les plages des tropiques, les filaos constituent un brise-vents efficace.
Certains microorganismes du sol
sont capables de s’associer aux racines des végétaux sous forme de
symbioses dont certaines jouent un
rôle écologique et agronomique très
important.
Ainsi la symbiose mycorhizienne arbusculaire (qui lie une plante à un champignon) permet aux premières d’améliorer leur nutrition hydrique et minérale.
Cette association, vieille de 400 millions
d’années, semble avoir accompagné
la colonisation du milieu terrestre par
les végétaux et concerne aujourd’hui
plus de 80% des espèces de plantes.
Plus récemment, il y a environ 60 millions d’années, la symbiose qui s’est
établie entre des bactéries du sol, les
rhizobiums, et des plantes de la famille
des légumineuses, leur a accordé la
capacité unique, parmi les végétaux
de grande culture, de se nourrir à partir
de l’azote contenu dans l’air. Les rhizobiums forment en effet sur les racines
des légumineuses avec lesquelles ils
s’associent, des organes spécialisés,
les nodules, capables de transformer
l’azote atmosphérique en ammonium
directement assimilable par la plante.
En retour, la plante fournit aux microorganismes des nutriments sous forme de
glucides complexes.
Depuis plusieurs années, les scientifiques tentent de percer les mécanismes génétiques qui sont à l’origine de
ces relations de bénéfices réciproques
entre végétaux et bactéries d’une part
et végétaux et champignons d’autre
part. En 2000, une étude menée par
une équipe française avait déjà permis
de montrer que certains mécanismes
de signalisation génétique intervenant
dans la symbiose entre les légumineuses et les bactéries du type Rhizobium
et les légumineuses et les champignons
mycorhiziens, faisaient intervenir un élément génétique commun ultérieurement
baptisé SymRK. On sait par ailleurs
que ce type de gène intervient dans
la reconnaissance des facteurs Nod,
>>
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CONTACTS :
DIDIER BOGUSZ
Unité Mixte de
recherche « Diversité et
adaptation des plantes
cultivées »
IRD
BP 64501
34394 Montpellier
cedex 5
Tel : + 33 (0)4 67 41 62 81
[email protected]
RÉFÉRENCE :
GHERBI H., MARKMANN
K., SVISTOONOFF S.,
ESTEVAN J., AUTRAN D.,
GICZEY G., AUGUY F.,
PÉRET B., LAPLAZE L.,
FRANCHE C., PARNISKE
M., BOGUSZ D.,
SymRK defines a
common genetic
basis for plant root
endosymbioses with
AM fungi rhizobia
and Frankia bacteria,
PNAS published 2008
doi : 10.1073/
pnas.0710618105
MOTS CLÉS :
Symbiose, plante,
bactérie, filao
RELATIONS AVEC LES
MÉDIAS :
GAËLLE COURCOUX
+33 (0)1 48 03 75 19
[email protected]
INDIGO,
PHOTOTHÈQUE DE
L’IRD :
des molécules signales émises par les
bactéries de type Rhizobium qui sont
essentielles à la formation des nodules
racinaires.
Les plantes actinorhiziennes constituent
un autre groupe de végétaux ayant
acquis la capacité de vivre en symbiose
avec une autre bactérie fixatrice d’azote
dénommée Frankia. Ces espèces végétales pionnières, dont les mécanismes
génétiques impliqués dans la relation
hôte symbionte sont encore peu étudiés,
sont présentes généralement dans des
environnements perturbés tels que les
sols volcaniques ou les sols miniers, et
sur les terrains pauvres en azote comme
les moraines ou les sols sableux. Il
existe environ 260 espèces de plantes
actinorhiziennes réparties en 24 genres
et huit familles d’angiospermes, les plantes à fleurs.
Une équipe de l’IRD, en collaboration
avec un laboratoire de l’Université de
Munich, s’est plus particulièrement intéressée à l’arbre tropical Casuarina, plus
connu sous le nom de filao. A l’aide
de méthodes de biologie moléculaire,
les scientifiques ont, dans un premier
temps, recherché la séquence codant
le gène SymRK, au sein du génome de
Casuarina. Une fois le gène isolé, l’équipe a voulu savoir si celui-ci était indispensable au filao dans l’établissement
de sa symbiose avec la bactérie Frankia.
Pour cela, ils ont mis au point des plantes
transgéniques chez lesquelles l’expression du gène SymRK a été fortement
diminuée. Ils ont ensuite comparé leur
capacité à former des nodules symbiotiques sur leurs racines avec celle des
plantes témoins. D’après ces analyses,
les plantes dont l’expression du gène
SymRK est altérée, produisent deux
fois moins de nodules racinaires que les
plantes témoins. Chez ces mêmes individus, le phénomène de mycorhization
est lui aussi fortement diminué par rapport aux filaos sauvages. Ces résultats
indiquent que la réduction de l’expres-
sion du gène SymRK provoque, chez
Casuarina, une diminution importante
de sa capacité à fixer l’azote atmosphérique ainsi qu’une réduction de son
aptitude à former des mycorhizes. Plus
généralement, ces conclusions mettent
en évidence le fait que, chez les plantes
fixatrices d’azote, un élément génétique
commun semble indispensable à la mise
en place des trois types d’associations
symbiotiques faisant intervenir des bactéries (Rhizobium et Frankia) ou un
champignon mycorhizien.
Une meilleure compréhension de ces
mécanismes génétiques pourrait contribuer, dans les années à venir, à mettre
au point des processus permettant
de transférer le matériel génétique
nécessaire à la fixation de l’azote de
l’air à des plantes qui, comme les
céréales, en sont incapables. Alors
que le riz établit une relation symbiotique
avec un champignon mycorhizien, il est
en effet inapte à développer des nodules
fixateurs d’azote. Or, en modifiant son
génome de manière à lui conférer cette
aptitude, il serait alors possible de limiter
significativement l’apport d’engrais azotés sur cette culture agricole et diminuer
ainsi d’autant la pollution des sols qui en
découle.
Rédaction DIC - Grégory Fléchet
©IRD / Franche Bogusz Claudine
Fiche n°288 - Février 2008
Pour en savoir plus
Nodules racinaires de Casuarina (Filao)
DAINA RECHNER
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Grégory Fléchet, coordinateur
Délégation à l’information et à la communication
Tél. : +33(0)1 48 03 76 07 - fax : +33(0)1 40 36 24 55 - [email protected]
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