Le « Da Vinci code » et l’Église catholique 5
Ces textes coïncident de façon frappante avec les manuscrits plus tardifs des 4e, 5e, 8e
siècles ; ces derniers ne sauraient donc être une création de l’époque de Constantin. Les évangiles
dans leur état actuel peuvent être considérés comme des écrits historiques remarquablement
fiables, et comme présentant ce qu’ont cru les chrétiens dès les premières générations.
À noter : la remarquable proximité des papyrus cités avec l’époque de Jésus et celle de la
rédaction des textes : le papyrus Rylands date de moins de 30 ans après la rédaction originale. A
titre indicatif, le manuscrit le plus ancien que nous possédons de Jules César est postérieur à
l’original de 1100 ans, celui de Platon, de quelque 1400 ans.
Qui plus est, le canon du Nouveau Testament – l’ensemble des livres qui ont été retenus
par l’Église comme inspirés par Dieu (dont les quatre évangiles que nous connaissons) –, loin
d’avoir été fixé par Constantin, se trouve déjà formulé comme tel dans le Fragment de Muratori,
document rédigé à Rome vers 200 après J.C., donc plus d’un siècle avant le règne de Constantin4.
Il existe quantité d’écrits apocryphes, c’est-à-dire extérieurs à la Révélation biblique. Pour
la plupart, il s’agit de romans religieux tardifs et peu fiables en tant que sources historiques. Quoi
qu’il en soit, la divinité de Jésus-Christ y apparaît clairement, et même exagérément : on y trouve
de nombreux récits de miracles que Jésus aurait réalisés dès son plus jeune âge. Par exemple,
Jésus aurait « joué » à tuer et ressusciter à volonté des animaux. À côté de certains éléments
valables, les écrits apocryphes sont en grande partie de naïves inventions, émaillées de théories
d’origine non chrétienne. Pour cette raison, ils ont été très tôt rejetés par l’Église comme non
bibliques5.
c) Dan Brown prétend que rien dans le christianisme n’est original, que le personnage de
Jésus est composé sur le modèle de divinités pré-chrétiennes comme Mithra, Krishna, Osiris,
Adonis et Dionysos.
Il est cependant avéré que le christianisme s’est répandu précisément en se présentant
comme un « enseignement nouveau » (Mc 1, 27), allant radicalement à l’encontre des idées
dominantes de l’époque : un Dieu qui devient un homme véritable, qui n’affronte pas ses ennemis
sur le champ de bataille mais qui oppose la puissance de l’amour à celle des armes, qui meurt
crucifié en pardonnant à ses bourreaux, qui ressuscite au bout de trois jours. Jésus peut bien
présenter certaines similitudes avec les dieux cités (comme d’ailleurs il peut en avoir avec
Socrate), mais les témoignages historiques, quant aux traits décisifs, en donnent une image à
l’opposé des figures mythologiques.
2) Au sujet d’un prétendu mariage de Jésus avec Marie-Madeleine et leur
descendance
Dan Brown prétend que Jésus était marié. Comme le célibat n’existait pas chez les Juifs,
si Jésus n’avait pas été marié, les évangiles l’auraient dit explicitement. Sa femme n’était autre que
Marie de Magdala (Marie-Madeleine), femme de sang royal de la tribu de Benjamin, selon des
preuves historiques. Dans « l’évangile selon Philippe », il est écrit, par exemple, que Marie-
Madeleine était la compagne (the companion) de Jésus. Il l’a aimée plus que toute autre et
l’embrassait sur la bouche. Jésus voulait que son Église, après sa mort, lui soit confiée. Mais,
comme le dit « l’évangile selon Thomas », lorsque Jésus voulut introduire Marie-Madeleine dans le
collège des apôtres, Pierre protesta en disant : « Marie doit nous quitter, car les femmes ne sont
pas dignes de vivre ». Et de fait, après la mort de Jésus, les apôtres chassèrent Marie-Madeleine
et s’emparèrent de l’Église.
Pire encore : du mariage de Jésus avec Marie-Madeleine surgit une descendance royale.
C’est à elle que fait allusion, en réalité, la légende du Saint Graal, car le véritable Graal (calice)
4 Cf., p. ex., H.R. DROBNER, Les Pères de l’Église, éd. Desclée, Paris 1999, p. 24.
5 Cf. Ch. PERROT, « Évangiles », dans Dictionnaire critique de théologie, sous la direction de J.-Y.
LACOSTE, P.U.F., Paris, 1998 – Voir aussi : P. GRELOT, Jésus de Nazareth, Christ et Seigneur,
Cerf, Paris 1997, vol. I, pp. 17-69. On trouve des exposés similaires dans des ouvrages d’initiation
à la Bible. Adde : Vatican II, Constitution dogmatique Dei Verbum sur la Révélation divine.