a) 1. 2. b) Emile Durkheim : un contre tous Dans la continuité de Comte, Durkheim place la nécessité d’une science pour analyser le social, dont celle-ci a un objet spécifique qui ne peut être prétendu par aucune autre science ; Le fait social (FS) entre en jeu, son objectif est double : Il se propose de donner un objet purement sociologique par une définition objective, que les autres sciences ne sont pas en mesure d’analyser (philosophie/psychologie) ; Il est structuré de telle manière qu’il écarte la plupart des adversaires de Durkheim Le fait social : objet de la sociologie Le fait social est un ordre de faits qui présentent des caractères très spéciaux : ils constituent en des manières d'agir, de penser et de sentir, extérieures à l'individu, et qui sont doués d'un pouvoir de coercition en vertu duquel ils s'imposent à lui (Durkheim). Le fait social est sui generis, c’est-à-dire qu’il est uniquement social, et il n’est pas réductible à la somme de ses parties, qu’on ne peut donc considérer les faits de chacun puis en faire la somme pour le définir (contrairement à Tarde). Or, pour limiter tout effet tautologique, il s’agit d’expliquer un FS par un principe de causalité : les facteurs qui déterminent son apparition, son dvpt, ses enjeux. Le deuxième objectif : la rupture épistémologique Au-delà de la nécessité d’un objet propre à la sociologie, pour Durkheim, il s’agit de rompre avec ses propres connaissances. Le sociologue doit saisir l’objet de son étude au-delà de ses préjugés ; Il doit « faire fi de ses prénotions » comme il le disait lui-même ; Ainsi, de la même manière que le touriste peut être choqué par les habitudes locales (par ex : manger du chien ou de la viande de baleine, ou même des cuisses de grenouilles…), le sociologue doit l’être dans la société qu’il analyse, car il met à jour des structures qui ne sont pas immédiatement visibles par le néophyte (Berger); C’est ce pourquoi on parle de « rupture » (Durkheim), de « neutralité axiologique » (Weber), ou de « choc culturel » (Berger), qui ne peuvent être possibles qu’en se dessaisissant de nos connaissances néophytes ; De là, le sociologue doit s’attendre à être choqué par les résultats qu’il obtient, de la même façon qu’un touriste qui part à l’autre bout du monde (ou même dans une autre ville voisine) ; Au-delà de la démarche intellectuelle, la rupture est fondamentale dans la méthode de l’analyse sociologique : elle lui évite les jugements de valeur, et donne à voir ce qui n’est pas perceptible de façon immédiate ; Gaston Bachelard : « l'empirisme commence par l'enregistrement des faits évidents, la science dénonce ces évidences pour découvrir les lois cachées. Il n'y a de science que de ce qui est caché » (1970) c) 2.2 Démarche épistémologique Pour aller plus loin… La démarche épistémologique en sociologie : 1. 2. 3. Ecarter les prénotions et les préjugés, définition de l’objet à étudier, sa faisabilité (≠ conceptualiser) ; S’assurer de la bonne construction de son objet : analyse de données préliminaires, construction des hypothèses, signalements provisoires (Weber), ou « prédéfinition » de la notion… ; Administration par la preuve : on confronte nos hypothèses par rapport aux données obtenues sur le terrain : entretiens, observations directes, données statistiques et bibliographiques… Illustration : quel rapport entretiennent entre elles les variables (de nature sociale : type, âge, genre, CSP, religion…) qui sont susceptibles d’expliquer un fait social qui préoccupe le sociologue, en terme de liens de causalité ? Par exemple, par quelle(s) relation(s) identitaire(s) la structure d’un groupe se défini par rapport à une institution qui lui est liée ? Pour être encore plus démonstratif : comment peut-on expliquer la hausse du taux de suicides alors que la société est dans une période prospère ? Les hypothèses de travail sont-elles validées par les données ? 1. Les débuts de Max Weber M. Weber (1864-1920), est juriste de formation, et sa carrière fut parallèle à celle d’E. Durkheim, bien que sa sociologie fut davantage reconnue post mortem. Elle a été médiatisée par R. Aron en France en 1936, dans La sociologie allemande contemporaine ; Les œuvres de M. Weber ont une pluralité de lecture, d’un point de vue interdisciplinaire (sociologie, droit, sciences politiques…), mais aussi intradisciplinaire à la sociologie ; Le holisme, puis le structuralisme dominant en France furent critiques envers la vision wébérienne individualiste (holos = le tout) ; Pourtant, il inspira des chercheurs aussi opposés que connus, tels que R. Boudon (individualiste) et P. Bourdieu (structuraliste) ; Aujourd’hui la sociologie tente de dépasser ce postulat dualiste entre le holisme et l’individualisme, davantage complémentaires qu’en opposition ; Sociologie holiste = quantitatif/statistique/institution Sociologie individualiste = qualitatif/discours/individuel 2. 3. Le postulat d'incomplétude Max weber refuse les explication moniste, c’est-à-dire qu’un ensemble de phénomènes trouveraient une source d’explication unique. D’où que le réel est complexe (complexe ≠ compliqué), car il a plusieurs sources d’explication possibles, qui sont liées tant qu’aux méthodes (outils), aux savoirs (avancées des connaissances), qu’aux technologies (capacité d’analyses liées aux machines, et software/hardware) ; Weber définit le postulat d’incomplétude comme l'infinie complexité du réel, que nulle théorie ne saurait épuiser. Ainsi, pour Weber, « cette complexité infinie du réel est ce qui invalide toute tentative d'explication du nomologique exprimé par le postulat d'incomplétude » L’idéal type Mais alors, comment prendre en compte l'infinité de possibilités d'actions probables pour expliquer un fait social, d'une part ? Aussi, comme le rappelle C. Colliot Thélène, quant au risque des historiens à justifier leurs conceptualisations tout en prévenant la tentation déductiviste (partir de l’hypothèse pour l’appliquer à un cas d’observation) ? Et bien, c'est grâce à l'idéal type. « On obtient un idéal-type en accentuant unilatéralement un ou plusieurs points de vue et en enchaînant une multitude de phénomènes isolés, diffus et discrets, que l'on trouve tantôt en grand nombre, tantôt en petit nombre, par endroits pas du tout, qu'on ordonne selon les précédents points de vue choisis unilatéralement pour former un tableau de pensée homogène » (Essai sur la théorie de la science, 1904-1917, traduction partielle par Julien Freund, Plon, 1965, p. 181) 5.2 Procédure de recherche de M. Weber a. 1. 2. 3. Caractéristique de la méthode compréhensive Elle s’établi en trois temps : La phase compréhensive : elle vise à comprendre le sens donnée à une action sociale, par le biais des entretiens ; La phase interprétative : elle mobilise l’attention du chercheur pour objectiver le sens donné à une action sociale lors de la première phase ; La phase explicative : détecter les causalités entre les phénomènes. Beitone A. & al, Sciences sociales, 3e édition, Ed Dalloz, 2002, 412p. Beitone A. & al, Sciences sociales, Ed Sirey, 1997, 349p. Berthelot J.-M., La construction de la sociologie, PUF, 2005, 128p. Colliot-Thélène C., La sociologie de Max Weber, Ed La Découverte, 2014, 124p. Delon B. & al, Psychologie, Sociologie, Anthropologie, unité d’enseignement 1.1, Ed Vuibert, 2013, 191p. De Singly F., Libres ensemble, collection Essais&Recherches, éditions Nathan, 2009 Durkheim E., Les règles de la méthode sociologique, Ed. Flammarion, 2010, 333p. Sites à consulter : http://www3.unil.ch/wpmu/bases/2013/08/max-weber-et-la-sociologiecomprehensive/