LES ENJEUX LIES A LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT
215
du CO2 dans les eaux marines9. Or, la biodiversité polaire est, en raison de la
sévérité des conditions climatiques, moins facilement adaptable, moins
diversifiée également. La disparition de quelques espèces est donc à même de
déstabiliser durablement l’équilibre écologique de cette région et ce d’autant plus
que les écosystèmes polaires ont tendance à concentrer les pollutions portées par
les courants marins et les vents dominants10. Il est donc possible que les espèces
arctiques soient aussi nombreuses demain qu’elles le sont aujourd’hui mais avec
une composition très différente. Or, la qualité d’un écosystème ne s’apprécie pas
uniquement en fonction du nombre d’espèces présentes mais également à partir
d’autres critères, et, notamment, la manière dont la distribution et l’abondance
des espèces sont adaptées aux conditions physiographiques, géographiques et
climatiques existantes11. Les espèces qui seront les premières touchées seront
donc celles qui sont endémiques et qui n’auront plus nulle part ou aller. Le
risque est alors d’assister à une « banalisation de la biodiversité » de
l’Arctique12.
Mais, la fonte des glaces, parce qu’elle ouvre de nouvelles voies d’accès à des
régions jusqu’alors très reculées, rend également possible le développement
d’activités humaines, elles-mêmes susceptibles de menacer l’environnement
marin. C’est notamment le cas de la navigation internationale, qu’elle soit
commerciale ou à finalité touristique. En effet, le passage du Nord-Ouest (route
canadienne) ou la route du Nord (route sibérienne) offrent, à terme, une
alternative aux liaisons maritimes traditionnelles entre l’Europe, l’Extrême
Orient et l’Amérique du Nord, tout au moins pour les navires brise-glaces, la
zone restant encore assez largement inhospitalière du fait de la présence de
glaces dérivantes, de courants, de brouillard et de houles changeantes13.
Néanmoins, l’intérêt porté à cette région tient également - et peut-être pour le
moment, principalement - à ses potentialités en termes d’exploitation des
ressources minérales. Selon une étude de l'Institut d'étude géologique américain
(USGS), l'Arctique recèlerait approximativement 20% des réserves mondiales
9 J-T. MATHIS, J.N. CROSS, W. EVANS, and S.C. DONEY, « Ocean Acidification in the Surface
Waters of the Pacific-Arctic Boundary Regions », Oceanography 28(2), 2015, pp.122–135.
10 L’océan arctique est également menacé par des substances radioactives, héritées des pratiques
russes consistant à immerger d’anciens navires ou des sous-marins, y compris à propulsion
nucléaire, afin de s’en défaire à moindre coût, voir le Rapport du Conseil arctique, Persistent
Organic Pollutants ; Radioactivity in the Arctic ; Human Health in the Arctic, Arctic Pollution
Issues, AMAP, 2015, Arctic Council.
11 Voir, notamment pour une énumération de descripteurs qualitatifs servant à définir le bon état
écologique la directive 2008/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008
établissant un cadre d’action communautaire dans le domaine de la politique pour le milieu marin.
L164/19, JO du 25.6.2008, Annexe I.
12 Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, Rapporteur N. Mamère, Rapport
d’information sur les enjeux écologiques, économiques et géopolitiques du changement climatique
en Arctique et en Antarctique, 8 avril 2015.
13 R. LACOSTE, « Les routes maritimes de l’Arctique », Institut national sur les transports et leur
sécurité, Dossier « Géographie et Mer », La Revue Maritime, n°490, janvier 2011, p. 11.
Extrait de l'ouvrage :
Nouvelles routes maritimes
Origines, évolutions et prospectives
Sous la direction de Odile Delfour-Samama, Cédric Leboeuf et Gwenaele Proutière-Maulion
EAN : 978-2-233-00792-6
éditions A.Pedone 2016
Cet ouvrage est en vente chez votre libraire
et auprès des éditions A.Pedone
13 rue Soufflot 75005 Paris France