L’AFRIQUE DES GRANDS LACS. ANNUAIRE 2003-2004
investisseurs étrangers. Alors que l’or alluvial était déjà exploité
occasionnellement depuis 1924, au début des années 30 un certain nombre de
groupes privés belges (l’un d’entre eux étant dirigé par le Baron Empain, à
qui il fut accordé par l’administration coloniale le droit d’exploiter les
ressources minérales du Maniema en 1902) commencèrent à explorer la
rivière Mobale et à construire l’infrastructure nécessaire à l’exploitation
industrielle de l’or et à l’hébergement de sa main-d’œuvre. Peu après ces
découvertes, également près de Lugushwa, Twangiza et Namoya,
d’importants sites d’or furent identifiés et explorés. A Namoya, des sites
alluviaux d’or furent découverts en 1930 et exploités jusqu’en 1947, lorsque
de l’or primaire fut découvert et exploité. A Twangiza, l’exploitation de l’or
commença en 1957, tandis qu’à Lugushwa des sites alluviaux sont exploités
depuis 1958.
Peu après l’indépendance, en 1960, les profits générés par cette
production de ressources naturelles locales diminuèrent progressivement.
Cette diminution fut causée en partie par l’instabilité du marché minéral
global3, mais fut également déterminée par l’instabilité politique et
l’inefficacité du système administratif. Durant les premières années qui ont
suivi l’indépendance, le pays traversa une crise politique profonde. La
combinaison d’un système démocratique en faillite et d’une inefficacité
administrative provoqua des conflits réguliers entre différents partis politiques
et, finalement, également entre les communautés ethniques qu’ils
représentaient. Entre 1964 et 1967, cette crise fut accompagnée par la
propagation de la rébellion muleliste à l’est du pays. Aux Kivu, la rébellion
engendra la formation d’autres milices locales, qui eurent des conséquences
sérieuses au niveau des relations interethniques locales. A Kamituga, les
rebelles de Mulele (appelés localement Simba) dérangèrent sérieusement la
cohésion sociale existante. La plupart de ces Simba étaient d’origine bemba
(Fizi-Baraka) et étaient connus pour leur comportement brutal contre la
population locale rega. Des observateurs locaux notent que des actes de
cannibalisme contre des guerriers sima étaient souvent utilisés comme moyen
de vengeance par les leaders rega.
Même si le coup d’Etat de Mobutu, en 1967, réussit à stabiliser une
grande partie de l’est du pays, la politique économique de ce dernier eut des
conséquences désastreuses. Le système de pouvoir patrimonial mis en place
par Mobutu ne fit que transformer l’économie nationale en des réseaux de
patronage pour des élites politiques, qui endommagèrent gravement l’aspect
productif de l’économie et n’apportèrent aucun mieux-être à la population
3 DEFAILLY, D., “Coltan: pour comprendre…”, in REYNTJENS, F. et S. MARYSSE (Eds.),
L’Afrique des grands lacs. Annuaire 2000-2001, Paris, L’Harmattan, 2000; KENNES, E., “Le
secteur minier au Zaire. ‘Deconnexion’ et descente aux enfers”, in REYNTJENS, F. et S.
MARYSSE (Eds.), L’Afrique de grands lacs. Annuaire 1999-2000, Paris, L’Harmattan, 2000.