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Cependant, ces données ne montrent qu’un côté de la
médaille puisqu’elles ne comprennent pas le nombre
de personnes qui entrent au Canada et qui viennent
d’un peu partout dans le monde. Selon l’étude déjà
citée de Statistique Canada, pour chaque diplômé
d’université qui part pour les États-Unis, quatre
personnes ayant une formation semblable immigrent
au Canada. Par exemple, la profession de la gestion a
accueilli près de 27 000 nouveaux membres entre
1996 à 1997, ce qui est beaucoup plus que les
2 263 qu’elle a perdus au profit des États-Unis. Pour
les médecins, les chiffres ne sont pas aussi
convaincants, mais cela est peut-être dû à la baisse de
la demande de médecins consécutive à la compression
des budgets de la santé. Il n’empêche que le Canada a
gagné 611 médecins entre 1996 et 1997
comparativement aux 450 qu’il a perdus. En résumé,
le Canada a été un bénéficiaire net de « cerveaux »
tout au long des années 90 – à condition de ne pas
considérer que les États-Unis dans l’équation.
Quelles sont les causes probables?
La plupart de ceux qui participent au débat attribuent
carrément l’exode des cerveaux vers les États-Unis
aux taux marginaux d’imposition plus élevés au
Canada. Cependant, il y a tout lieu de croire que ce
n’est pas la seule raison – ni même la plus importante
– de l’augmentation de l’émigration vers les États-
Unis. Par exemple, l’exode des cerveaux a coïncidé
avec l’entrée en vigueur de l’Accord nord-américain
de libre-échange (ALENA), ce qui facilite l’obtention
de permis de travail d’un an. De même, à cause de
l’ALENA – et de la force globale de l’économie
américaine –, un nombre croissant d’entreprises
canadiennes ont dû étendre leurs opérations aux États-
Unis, emmenant avec elles beaucoup de travailleurs
canadiens.
Il faut également rappeler que le taux de chômage a
été beaucoup plus élevé au Canada qu’aux États-Unis
pendant les années 90. La recherche indique que,
historiquement, c’est là la principale cause de
l’émigration vers les États-Unis. En outre, un grand
nombre des meilleurs cerveaux du monde sont déjà
attirés vers les États-Unis à cause non seulement des
salaires plus élevés, ce qui est normal dans le pays le
plus riche du monde, mais aussi des avantages qu’il y
a à travailler avec les gens les plus doués et avec
l’équipement le plus moderne. Cela est aussi vrai
aujourd’hui que dans les années 50 et 60, période
pendant laquelle plusieurs pays dont le Canada se
préoccupaient d’une émigration vers les États-Unis
qui dépassait de beaucoup celle des années 90, malgré
des taux d’imposition beaucoup plus semblables.
Enfin, il ne faut pas oublier que le dollar canadien
valait 90 cents par rapport au dollar américain et qu’il
est passé à environ 67 cents au cours des années 90. Il
devient alors d’autant plus intéressant de travailler aux
États-Unis pour les nouveaux diplômés dont
l’endettement en dollars canadiens est parfois lourd,
ce qui est souvent vrai des diplômés des écoles de
médecine. Ces faits historiques suggèrent que l’exode
des cerveaux résulte d’un ensemble complexe de
facteurs et non seulement de différences de régime
fiscal.
Jusqu’à quel point le problème est-il sérieux?
Cela dépend. Bien que le nombre de ceux qui quittent
le pays reste assez petit et soit amplement compensé
par le nombre des nouveaux arrivants, l’exode des
cerveaux pourrait devenir un problème si la tendance
s’accélère ou si le Canada cesse de recevoir de
nouveaux immigrants hautement qualifiés. Il en est
ainsi parce que l’aptitude d’un pays à produire des
biens et des services dépend, en partie au moins, du
savoir-faire de ses travailleurs, de ce qu’on appelle le
capital humain.
Que risque-t-il de se produire à long terme?
Cependant, une perspective à long terme donne à
penser que l’exode des cerveaux pourrait être un
avantage net pourvu qu’une bonne partie de ceux qui
émigrent aux États-Unis reviennent un jour au Canada
pour lancer des entreprises, enseigner ou autrement
contribuer au bien-être de la société et à l’aptitude du
pays à croître. Selon les données de Statistique
Canada, environ 30 p. 100 en moyenne de ceux qui
émigrent aux États-Unis tous les ans ont l’intention de
rentrer au pays. Il faut également rappeler que l’exode
des cerveaux vers les États-Unis s’est produit pendant
une période où un grand nombre de fonctionnaires ont
été licenciés, où les budgets de la santé ont été
sévèrement comprimés (d’où une réduction de la