2ème Dimanche de l’Avent A 4 décembre 2016
Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain : ça fait quand même beaucoup de
monde ! La personnalité haute en couleur de Jean-Baptiste faisait donc recette. Certes, il y
avait de tout dans ces foules qui se pressaient pour venir le voir au désert, mais lui ne se
lassait pas de leur répercuter le message des prophètes : convertissez-vous ! avec une urgence
particulière : Le Royaume des cieux est tout proche ! Aux pharisiens et aux sadducéens, il tient
un discours adapté qui est non moins percutant, même si le contenu est identique : la
conversion, ils connaissaient, pour la prêcher aux autres, mais il leur manquait de payer eux
aussi de leur personne. Ils ne risquent pas d’être châtiés par Dieu, puisqu’ils sont sur la liste. Il
nous arrive à nous aussi d’être assez forts pour la théorie et un peu plus timides pour la mise
en œuvre. De fait, il ne suffit pas d’avoir son nom sur un registre de baptême, ni même d’être
prêtre ou religieuse, pour être à l’abri de tout reproche, pour plaire à Dieu et Lui rendre gloire.
On est pas croyant et chrétien par procuration et ce que Dieu désire, c’est notre cœur et
l’engagement personnel de tout notre être, pour pécheur qu’il soit et qu’il reste. Si certains
méritent d’être traités d’engeance de vipères qui fuit la colère qui vient, ce n’est pas à cause de
leur péché ; c’est parce qu’ils croient que malgré leur péché, ils sont plus justes que les autres
et que Dieu devrait s’en contenter, parce qu’ils ont le badge d’entrée. Il leur manque l’humilité
de ceux qui savent qu’ils n’ont rien à faire valoir et que l’eau qu’ils demandent au Baptiste
n’est pas un geste magique qui les dispense du reste. Le discours de Jean-Baptiste, qui
prêchait lui-même par son style de vie austère, nous concerne donc tous à des degrés variés.
Tous, nous avons à nous retourner sans cesse vers Dieu, car sans cesse, nous L’oublions, et
tant de choses prennent dans notre vie trop de place à côté de Lui. Mais de la pierre de notre
cœur, dit-il, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham : combien cette parole est
prophétique, non seulement dans l’histoire de l’Eglise, où tant de païens sont touchés par le
Jésus de l’évangile, et ce n’est jamais fini. Devant Celui qui est capable de nous recréer ainsi,
Jean se prosterne dans l’humilité du dernier des serviteurs : à la place de l’eau de la pénitence,
Lui, Il donnera l’Esprit-Saint et le feu de l’amour. Pour tous ceux qui accueillent ce don, il ne
restera rien des scories du péché, Il chassera tout égoïsme comme la bale du blé jetée au feu.
Et de fait, l’amour est bien plus que la morale des pharisiens : c’est peut-être cela que les
foules comprenaient confusément et qui leur donnait une formidable espérance. C’est bien
plus, ce qui veut dire qu’on ne peut se contenter d’un minimum au-delà duquel on estimerait
être quitte. Si l’évangile est plus que la Loi et le décalogue, cela signifie qu’il faut commencer
par se laisser instruire, puis persévérer avec la force de Dieu pour Lui rendre gloire, comme dit
St Paul aux Romains. Dans le langage de la Bible, connaître Dieu signifie non pas une
connaissance théorique, un savoir informatif qui n’engage à rien et ne change rien au
comportement : cela veut dire que tout l’être est imprégné de la vie même de Dieu, qui se
répand ainsi au-dehors. Il faut donc que nous nous demandions sincèrement : si je dis que je
suis chrétien, que je connais Dieu et que je sais qu’Il m’aime, qu’est-ce que ça change à mon
comportement de tous les jours ? Il faudrait que, de manière souriante et silencieuse, ceux qui
nous rencontrent se demandent : « Qu’est-ce qui fait que celui-là, celle-là, n’est pas comme les
autres et que j’ai envie de lui ressembler ? » C’est ce qui fait que petit-à-petit, une société
devient ou redevient vitalement chrétienne, selon l’expression du cardinal Journet : ça finit par
former sans bruit une force –une force divine !- qui soulève le monde, parce que ces gens se
reconnaissent entre eux ; c’est le levain de l’évangile dont il a tant besoin et qui apporte la paix
qu’il cherche sans la trouver, en étant si impuissant à la bâtir et à la conserver. Il ne peut y
avoir de paix sans la conversion du cœur de chacun, et nous pouvons commencer par le nôtre.
C’est l’invitation pressante de Jean-Baptiste, c’est ce qu’annonce le prophète et ce qu’il
souhaite ardemment pour les nations en douleur d’enfantement. Laissons-nous purifier par le
feu de l’Esprit que le Christ nous apporte à nouveau, et sa gloire sera notre demeure.