RÉPONSE DES ÉCOSYSTÈMES DE MANGROVE AUX IMPACTS DES AMÉNAGEMENTS HYDROELECTRIQUES : Une vision systémique pour l’analyse de la chaîne d’impacts dans l’estuaire du Konkouré en Guinée SAMOURA Karim, Candidat au Ph D (GEIGER, UGÀM), Chercheur au CERESCOR, Guinée WAAUB Jean Philippe, Ph D., GEIGER/UQAM, Canada FERRY Luc, Ph D. , IRD- France 11ème Colloque International en ÉÉ (SIFÉE/IEPF), Bamako, juin 2006 Plan de l ’exposé INTRODUCTION – – Zone côtière tropicale et Écosystème de mangrove Objectif de l’étude CONTEXTE : 1. Estuaire du delta du Konkouré : Présentation et enjeux majeurs 2. Barrage de Garafiri et effets sur l’hydrologie de l’Estuaire du Konkouré MÉTHODOLOGIE RÉSULTATS ET DISCUSSION 1. Modification du milieu physique 2. Impacts sur des éléments biologiques : végétation herbacée, huîtres, poissons 3. Impacts sur l’exploitation des ressources : riz, sel, poisson, bois de feu 4. Répercussions sur les revenus des populations 5. Exposition aux risques de maladies hydriques 6. Empiètement sur la foret de mangrove CONCLUSION INTRODUCTION Zone côtière et écosystème de mangrove Les régions côtières : en tant qu’ interface Mer-Terre, • enrichissement des eaux côtières et des estuaires en éléments nutritifs (productivité biologique des eaux côtières, diversité des niches, habitat d ’oiseaux migrateur et d ’espèces rares) • forte capacité de régénération des sols • Mais trois contraintes majeures liées aux effets de la marrée : – sols halomorphes : accumulation de sel dans le sol, qui finit par présenter une certaine toxicité – risque d’asphyxie : du fait des inondations périodiques, réduisant la disponibilité d’oxygène – Instabilité du substrat : problème de fixation La mangrove est une végétation particulière aux milieux côtiers en régions tropicales composée principalement de palétuviers ou « manglier », avec les principales espèces suivantes : le Rhizophora sp, l’Avicennia sp et le Laguncularia sp. Exemples d’organes qui permettent aux espèces de mangrove de s’adapter aux contraintes dans régions côtières tropicales Les racines échasses des Rhizophora ou rhizophores Les pneumatophores d’Avicennia émergeant de la boue • LA MANGROVE (suite): – une formation végétale, mais aussi un écosystème forestier ou aquatique (Cormier-Salem, M, -C. 1999). – Un ensemble écologiquement dynamique qui, sous l’influence de la mer, de ses courants, de ses marées et sous l’influence des fleuves, de leurs crues et de leurs alluvions, se transforme en restant égale à ellemême (DESMDRIYL D, 1999) CONTEXTE L’estuaire du Konkouré • Situé entre Dubréka, Conakry et Boffa, • 23 000 habitants / plus d’exploitants • Pluviométrie : 2500 à 4000 mm/an • Température : 21,5 à 32°C • Végétation : – Massif forestier important – 6 espèces de palétuviers Conakry BAZO, D. et al. 2000 Zone humide : site Ramsar depuis 1992 Photo : Samoura K, septembre 2005 Utilisation du territoire et principales ressources dans un écosystème de mangrove de la baie de Sangaréya (PIG-IRD, 2003) Utilisation du territoire dans l’écosystème de mangrove de la baie de Sangaréya (Bertrand, 1999) PROBLÉMATIQUE Aménagement hydroélectrique de Garafiri Caractéristiques : – – – – Puissance : 75 MW Retenue d’eau: 79 Km2 Influence sur 14 % du bassin versant du Konkouré (soit 2460 Km2 ) Estuaire du Konkouré: compris dans la zone d ’influence du barrage – Quelles sont les principales modifications du milieu biophysique ? – Quelles répercussions sur l’utilisation du territoire en estuaire – Quelles interactions entre les effets de l’exploitation des ressources et ceux du fonctionnement du barrage de Garafiri ? - Modifications hydrologiques et impacts observés en estuaire En situation naturel, les débits fluviaux instantanés qui entraient dans l ’estuaire étaient de l’ordre de 35 m3/s en étiage. Depuis fin 1999, ils sont de l’ordre de 100m3/s lors que le barrage fonctionne en période d’étiage. Retenue de Garafiri K04-O K04-A Ko un ko un Kakr ima K04-E KOUN10 % 15 11° K05 -13°20' 0 30 km ulo ko Ko K06 K07 SANG10 K08 K02-B K09-A Konko K09-B uré KKR50 K11 KKR30 K01 di Ba Ko nk ou ré K10 . Wassou 5 km 0 . Gomezia 9°40 1998 Zoom sur le 1er semestre iné Kholaya 2000 . . Bokhinéné Déce Mai Nove Octo Sept Août Juil Mai Avri Mars Févr Juin Mois Mois Avril . 1999 . Janvier Février Mars . San k Bra sP rin cip al Kakounsou 2000 140 1800 120 1600 1400 100 1200 80 1000 60 800 600 40 400 20 200 0 0 Janv Débits moyens mensuels (m3 Débits moyens mensuels (m3/s) Yekèmato -13°20' Conakry Kanka Arabanty maya Boura Kansè . Indicateurs de suivi utilisés et principaux résultats • Du milieu Physique : – Vitesse du courant et temps du jusant – Salinité (eau estuarienne, sol et nappe phréatique) : baisse générale et recul du front salin en estuaire supérieur – Morphologie du trait de côte: pas de modification majeure 0 km-5 km 10 km 20 Débit à K11 Yékémato (m3/s) km 30 Hauteur de Marée 26/10/99 30 390 2 1,5 26/10/99 753 21/03/00 365 1 Vitesse (m / 753 84 Etiage 04/99 jusant 0,5 Etiage 04/99 flot 393 0 Crue 09/98 jusant 395 Crue 09/98 flot 384 -0,5 -1 02/08/00 686 30/08/00 1218 13/12/00 214 13/12/00 34 -1,5 214 09/02/01 402 K12 K14 K19 K15 K16 Salinité (g/l) 99 09/02/01 21 99 Stations observées Augmentation de la vitesse du courant et du temps de retrait M5 K15 K16 K19 K14 K12 Schéma synoptique de la remonté saline dans l'estuaire • Du milieu Biologique : – Végétation herbacée : variable suivant les zones de l’estuaire – Distribution des colonies d’huîtres : recul sur 8 Km, entre Wassou et Kanka – Distribution des poissons : prédominance d’une espèce d’eau douce, tolérante aux faibles salinités et refoulement de certaine espèces marine vers la zone maritime Paspalum Densité forte Densité moyenne Absence d'huître Suzevium 2002 Distribution des colonies d’huître Pelouse herbacée propre à la mangrove Espèce de poisson prédominante en entre Kakounsou et Wassou depuis la mise en fonction de l’estuaire Site d’observation Estuaire supérieur Ancienne pelouse Nouvelle pelouse Pelouse à Paspalum Apparition d ’espèces et Philoxerus d’herbes d ’eau douce Prolifération de Paspalum Disparition de Philoxerus Suppression des remontées salines de mars - avril, Possibilité de culture de contre saison (importance des repousses) Augmentation du coût de la mise en valeur des terres Estuaire médian Pelouse de paspalum et philoxerus (rizières) Philoxerus et Sporobolus sur les tannes Importante prolifération de Paspalum dans les rizières Disparition de Sporobolus Amélioration du rendement des culture de riz Augmentation du coût de la mise en valeur des terres Estuaire inférieur Pelouse à Sesuvium et Paspalum Sesuvium rabougris sur les tannes Pas de changement significatif Pelouse à Sesuvium et Paspalum Sesuvium rabougris sur les tannes Activités d’exploitation des ressources influencées suite aux modifications de salinité Riziculture Pêche & Fumage Coupe de Bois Saliculture • Répercussion sur les activités d’exploitation des ressources – Rendement de la production du riz : nette amélioration en estuaire supérieur – Rendement de la production de sel: en abandon à Kakounsou et à Kanka au profit de la riz culture – Revenu tiré de la pêche et du fumage de poisson : en baisse dans tout l’estuaire, notamment en estuaire supérieur et médian – Nombre et taille de ports à bois en estuaire : de plus en plus important en estuaire supérieur et médian Impacts sur la production du riz et du sel Sankiné Bras principal 85 du Konkouré 75 Augmentation de la production du riz, en estuaire supérieur notamment Estuaire médian Estuaire inférieur : zone d'influene marine 65 55 45 Estuaire Supérieur : zone d'influence fluviale 25 15 5 Kansè Km 2 Arabanty Km 2,6 Bokhinènè Kanka Kakhonsou Km 3,5 Km 6,5 Km16-18 Gomezia Km 26 W assou Km 34 S i t e s r i z i c o l e s ( d i st a n c e à l a 0 - 10 Kansè A rabant y ( Km ( Km 3) - 20 - 30 B okhinènè ( Km 4) Kanka ( Km 8) Est u a i r e i n f ér i e u r Kholaya Kakounsou ( Km 14) Est u a i r e - 40 m éd i a n - 50 - 60 - 70 S a nk i né -5 Sites rizicoles (Distance de la mer) Taux d’augmentation du rendement (%) Baisse de la production du sel en estuaire supérieur et médian 35 B r a s pr i nc i pa l du K onk our é - 80 - 90 - 100 Intérêt grandissant des paysans pour la riziculture : modification de l’utilisation du territoire Quelques facteurs d’exposition et de risque potentiels pour la santé Nouvelle utilisation du territoire et impacts sur la mangrove Estuaire supérieur Estuaires médian et inférieur 100% 80% 60% 40% 20% 0% Arabanty Bokhinènè Kanka Kholaya Kakounsou Sites rizicoles S en culture S. abandonnées S. défrichées Nvx. Champs Utilisation des terres sur les principaux sites en estuaire inférieur et médian en 2001 (% de la superficie totale) • Changements favorables à la réduction des pressions sur la mangrove: • Changements incitant à l’aggravation des pressions sur la mangrove : – L’abandon de l’exploitation du sel à Kholaya et à Kanka nord : coupe réduite de 600 m3 de bois par an (21 ha) – Conjonction de facteurs favorables à l’augmentation du nombre de riziculteurs – La re-colonisation en cours des aires de grattage abandonnés (10 à 15% ) – l’intensification de la coupe de bois, réalisée dans le but de compenser les pertes de revenus enregistrées en saliculture et en pêcherie – L’augmentation du coût de la mise en valeur des plaines rizicoles et la récupération des terres abandonnées – La réduction de la quantité de poissons à fumer Répercussion sur l’occupation du sol et le couvert végétal • Les impacts des activités d’exploitation des ressources sur la mangrove de l’estuaire du Konkouré sont significatifs, mais faible par rapport aux effets de autres activités humaines. Complexité : • effets cumulatifs: – l’extraction de sel consommerait 7860 m3 de bois, soit 274 ha/an; – la riziculture détruirait un volume de 630 m3 bois, soit 22,1 ha / an; – Le fonctionnement du barrage amplifie la riziculture et contrarie la saliculture impacts indirects du barrage – Les extensions et abandons de surfaces rizicoles et salicoles, constituent de nouveaux facteurs entraînant la modification de la dynamique du couvert végétal dans l’estuaire. CONCLUSION • L’état de référence insuffisamment couvert pour permettre une évaluation quantitative précise : enquêtes et l’association de guides locaux pour palier au manque de données historique (pour 5 ans). • L’impact du fonctionnement du barrage de Garafiri concerne essentiellement les parties supérieure et médiane de l’estuaire, mais peut devenir important avec les barrages en projet • Complexité des impacts sur le revenu des population et sur la mangrove: synergie avec les effets des activités d’exploitation des ressources • Importance de l’exposition des populations aux maladies hydriques en mangrove Conclusion (suite et fin) • L’impact du barrage sur la dynamique de la mangrove : faible par rapport aux pressions des activités rizicoles et salicoles. • La mangrove du Konkouré : vulnérable aux impacts les grands aménagements hydroélectriques. • Le futur complexe hydroélectrique (SouapitiKaléta): une inquiétude sérieuse pour les population de la baie du delta du Konkouré