Etude des mécanismes de transport électrique dans des

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N° d’ordre 2005-ISAL-00119
Année 2005
Thèse
Etude des mécanismes de transport
électrique dans des structures à base
de nanocristaux de silicium ordonnés
Présentée devant
L’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon
Pour obtenir
Le grade de docteur
Formation doctorale
Dispositifs de l'Electronique Intégrée
Ecole doctorale
École doctorale Electronique, Electrotechnique, Automatique de Lyon
Par
Arnaud Beaumont
Soutenue publiquement le 12/12/2005 devant la commission d’examen :
Rapporteur
J. Gautier
Directeur de recherche (CEA-LETI)
Rapporteur
P. Dollfus
Chargé de recherche habilité (CNRS)
Examinateur
T. Baron
Chargé de recherche habilité (CNRS)
Examinateur
P. Normand
Directeur de recherche (NCSR, Grèce)
Examinateur
C. Plossu
Professeur (INSA de Lyon)
Examinateur
A. Souifi
Professeur (INSA de Lyon)
Invité
V. Aimez
Professeur agrégé
(Université de Sherbrooke, Canada)
Thèse préparée au Laboratoire de Physique de la Matière (LPM, CNRS-INSA Lyon)
Titre
Etude des mécanismes de transport électrique dans des nanostructures à base de nanocristaux
de silicium ordonnés.
Résumé en français
Les nanocristaux de silicium sont des amas sphériques d’atomes de silicium, dont le diamètre
est typiquement de l'ordre de la dizaine de nanomètres. Si on les utilise comme zone active
dans un composant électronique, leurs très faibles dimensions font apparaître des phénomènes
qui pourraient les amener à jouer un rôle important dans la microélectronique, à court et à
long terme.
A court terme, ils pourront être utilisés comme nano-grilles flottantes dans les mémoires
FLASH, dont la miniaturisation pourra ainsi être poursuivie. A partir de mesures de courants
transitoires effectuées sur ce type de composant, nous avons montré qu’il était possible de
mettre en évidence le rôle prépondérant que jouent les îlots de silicium dans l’effet mémoire
observé. Cette méthode a été validée sur des dispositifs comportant des nanocristaux élaborés
par implantation ionique et par dépôt chimique en phase vapeur (CVD).
A plus long terme, les nanocristaux pourraient représenter la brique de base d'une
électronique mono-charge, en utilisant le phénomène de blocage de Coulomb. Nous avons
montré que ce dernier régissait en particulier le transport dans une chaîne de trois îlots de
silicium à température ambiante. Ce travail propose également une projection sur les
caractéristiques morphologiques que devront respecter ces composants pour jouer un rôle
dans la microélectronique.
Mots-clés
MOS, Mémoire FLASH, Nanocristaux, Courant transitoire, SET, Blocage de Coulomb,
Modélisation, Eléments finis.
i
ii
Title
Transport through ordered nanocrystals based nanostructures.
Abstract
Silicon nanocrystals are spherical clusters made of silicon atoms whose diameter is in the order
of ten nanometers. If they are used as active area in electronic components, their low
dimensions give rise to phenomenona which could bring them to play an important role in the
future of microelectronics, in the short and in the long run.
In the short run, they could be used as nano-floating gates in FLASH memories, what would
then enable their downscaling to go on. With transient current measurements made on this
kind of components show evidences of the prominent role of the nanocrystals in the charging
observed in our samples. This method was corroborated on components where nanocrystals
have been fabricated by ionic implantation and by chemical vapor deposition (CVD).
In the long term, nanocrystals could be the base brick for mono-electronics, thanks to the
Coulomb blockade phenomenon. We showed that it governs the transport through a threeislands chain at room temperature. Furthermore, the structural characteristics required by
these devices to play a significant role in microelectronics are evaluated.
Keywords
MOS, Flash memory, Nanocrystals, Transient current, SET, Coulomb blockade, Modelling,
Finite elements.
iii
iv
Liste des écoles doctorales de l'Institut National
des Sciences Appliquées de Lyon
Mars 2005
SIGLE
E2MC
E.E.A.
E2M2
ECOLE DOCTORALE
NOM ET COORDONNEES DU RESPONSABLE
CHIMIE DE LYON
M. Denis SINOU
Université Claude Bernard Lyon 1
Lab Synthèse Asymétrique UMR UCB/CNRS
5622
Bât 308
2ème étage
43 bd du 11 novembre 1918
69622 VILLEURBANNE Cedex
Tél : 04.72.44.81.83
[email protected]
ECONOMIE,
ESPACE
MODELISATION
COMPORTEMENTS
ELECTRONIQUE,
ELECTROTECHNIQUE,
AUTOMATIQUE
M. Alain BONNAFOUS
Université Lyon 2
14 avenue Berthelot
ET
MRASH M. Alain BONNAFOUS
DES
Laboratoire d’Economie des Transports
69363 LYON Cedex 07
Tél : 04.78.69.72.76
[email protected]
M. Daniel BARBIER
INSA DE LYON
Laboratoire Physique de la Matière
Bâtiment Blaise Pascal
69621 VILLEURBANNE Cedex
Tél : 04.72.43.64.43
[email protected]
M. Jean-Pierre FLANDROIS
UMR 5558 Biométrie et Biologie Evolutive
EVOLUTION,
ECOSYSTEME,
Equipe
Dynamique
des
Populations
MICROBIOLOGIE, MODELISATION
Bactériennes
Faculté de Médecine Lyon-Sud Laboratoire de
http://biomserv.univBactériologie
lyon1.fr/E2M2
BP 1269600 OULLINS
Tél : 04.78.86.31.50
[email protected]
v
EDIIS
EDISS
M. Lionel BRUNIE
INSA DE LYON
INFORMATIQUE ET INFORMATION
EDIIS
POUR LA SOCIETE
Bâtiment Blaise Pascal
69621 VILLEURBANNE Cedex
http://www.insa-lyon.fr/ediis
Tél : 04.72.43.60.55
[email protected]
M. Alain Jean COZZONE
INTERDISCIPLINAIRE SCIENCES- IBCP
(UCBL1)
7 passage du Vercors
SANTE
69367 LYON Cedex 07
http://www.ibcp.fr/ediss
Tél : 04.72.72.26.75
[email protected]
MATERIAUX DE LYON
http://www.ec-lyon.fr/sites/edml
M. Jacques JOSEPH
Ecole Centrale de Lyon
Bât F7 Lab. Sciences et Techniques des
Matériaux et des Surfaces
36 Avenue Guy de Collongue BP 163
69131 ECULLY Cedex
Tél : 04.72.18.62.51
[email protected]
M. Franck WAGNER
Université Claude Bernard Lyon1
Institut Girard Desargues
MATHEMATIQUES
ET
UMR 5028 MATHEMATIQUES
INFORMATIQUE FONDAMENTALE
Math IF
Bâtiment Doyen Jean Braconnier
Bureau 101 Bis, 1er étage
http://www.ens-lyon.fr/MathIS
69622 VILLEURBANNE Cedex
Tél : 04.72.43.27.86
[email protected]
MEGA
M. François SIDOROFF
MECANIQUE,
ENERGETIQUE, Ecole Centrale de Lyon
GENIE CIVIL, ACOUSTIQUE
Lab. Tribologie et Dynamique des Systèmes
Bât G8
36 avenue Guy de Collongue
http://www.lmfa.eclyon.fr/autres/MEGA/index.html
BP 163
69131 ECULLY Cedex
Tél : 04.72.18.62.14
[email protected]
vi
Liste des professeurs de l'Institut National des
Sciences Appliquées de Lyon
Novembre 2005
Directeur : STORCK A.
Professeurs :
AMGHAR Y.
LIRIS
AUDISIO S.
PHYSICOCHIMIE INDUSTRIELLE
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CONT. NON DESTR. PAR RAYONNEMENTS IONISANTS
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GEMPPM***
BALLAND B.
PHYSIQUE DE LA MATIERE
BAPTISTE P.
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PHYSIQUE DE LA MATIERE
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LIRIS
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LAEPSI****
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PRODUCTIQUE ET INFORMATIQUE DES SYSTEMES MANUFACTURIERS
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LAMCOS
BOISSON C.
VIBRATIONS-ACOUSTIQUE
BOIVIN M. (Prof. émérite)
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UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Développement Urbain
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UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Développement Urbain
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INFORMATIQUE
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MECANIQUE DES SOLIDES
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PHYSIQUE DE LA MATIERE
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GENIE ELECTRIQUE ET FERROELECTRICITE
BRUNET M.
MECANIQUE DES SOLIDES
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GEMPPM***
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PRISMA
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CHAMPAGNE J-Y.
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CEGELY*- Composants de puissance et applications
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DAUMAS F. (Mme)
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UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL
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CHIMIE ORGANIQUE
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ESCHIL
vii
DUFOUR R.
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MECANIQUE DES CONTACTS
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CITI
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GEMPPM***
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GEMPPM***
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INGENIERIE DES MATERIAUX POLYMERES
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AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE
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LALLEMAND M. (Mme)
CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Energétique et thermique
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UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Géotechnique
LAUGIER A. (Prof. émérite)
PHYSIQUE DE LA MATIERE
LAUGIER C.
BIOCHIMIE ET PHARMACOLOGIE
LAURINI R.
INFORMATIQUE EN IMAGE ET SYSTEMES D’INFORMATION
viii
LEJEUNE P.
UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE
LUBRECHT A.
MECANIQUE DES CONTACTS
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INTERACTION COLLABORATIVE TELEFORMATION TELEACTIVITE
MAZILLE H. (Prof. émérite)
PHYSICOCHIMIE INDUSTRIELLE
MERLE P.
GEMPPM***
MERLIN J.
GEMPPM***
MIGNOTTE A. (Mle)
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MILLET J.P.
PHYSICOCHIMIE INDUSTRIELLE
MIRAMOND M.
UNITE DE RECHERCHE EN GENIE CIVIL - Hydrologie urbaine
MOREL R. (Prof. émérite)
MECANIQUE DES FLUIDES ET D’ACOUSTIQUES
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LAEPSI****
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BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS
NAVARRO Alain (Prof. émérite)
LAEPSI****
NELIAS D.
LAMCOS
NIEL E.
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NORTIER P.
DREP
ODET C.
CREATIS**
OTTERBEIN M. (Prof. émérite)
LAEPSI****
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VIBRATIONS-ACOUSTIQUE
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INTERACTION COLLABORATIVE TELEFORMATION TELEACTIVITE
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PHYSIQUE DE LA MATIERE
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PHYSIQUE DE LA MATIERE
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MODELISATION MATHEMATIQUE ET CALCUL SCIENTIFIQUE
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INTERACTION COLLABORATIVE TELEFORMATION TELEACTIVITE
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CREATIS**
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AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE
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LGEF
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GEMPPM***
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INGENIERIE DES SYSTEMES D’INFORMATION
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CENTRE DE THERMIQUE DE LYON - Transferts Interfaces et Matériaux
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SCAVARDA S. (Prof. émérite)
AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE
SOUIFI A.
PHYSIQUE DE LA MATIERE
SOUROUILLE J.L.
INGENIERIE INFORMATIQUE INDUSTRIELLE
ix
THOMASSET D.
AUTOMATIQUE INDUSTRIELLE
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ESCHIL – Equipe Sciences Humaines de l’Insa de Lyon
UBEDA S.
CENTRE D’INNOV. EN TELECOM ET INTEGRATION DE SERVICES
VELEX P.
MECANIQUE DES CONTACTS
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LAEPSI
VIGIER G.
GEMPPM***
VINCENT A.
GEMPPM***
VRAY D.
CREATIS**
VUILLERMOZ P.L. (Prof. émérite)
PHYSIQUE DE LA MATIERE
Directeurs de recherche C.N.R.S. :
BERTHIER Y.
MECANIQUE DES CONTACTS
CONDEMINE G.
UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE
COTTE-PATAT N. (Mme)
UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE
ESCUDIE D. (Mme)
CENTRE DE THERMIQUE DE LYON
FRANCIOSI P.
GEMPPM***
MANDRAND M.A. (Mme)
UNITE MICROBIOLOGIE ET GENETIQUE
POUSIN G.
BIOLOGIE ET PHARMACOLOGIE
ROCHE A.
INGENIERIE DES MATERIAUX POLYMERES
SEGUELA A.
GEMPPM***
VERGNE P.
LaMcos
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FEBVAY G.
BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS
GRENIER S.
BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS
RAHBE Y.
BIOLOGIE FONCTIONNELLE, INSECTES ET INTERACTIONS
Directeurs de recherche I.N.S.E.R.M. :
KOBAYASHI T.
PLM
PRIGENT A.F. (Mme)
BIOLOGIE ET PHARMACOLOGIE
MAGNIN I. (Mme)
CREATIS**
* CEGELY
CENTRE DE GENIE ELECTRIQUE DE LYON
** CREATIS CENTRE DE RECHERCHE ET D’APPLICATIONS EN TRAITEMENT DE L’IMAGE ET DU SIGNAL
*** GEMPPM GROUPE D'ETUDE METALLURGIE PHYSIQUE ET PHYSIQUE DES MATERIAUX
**** LAEPSI LABORATOIRE D’ANALYSE ENVIRONNEMENTALE DES PROCEDES ET SYSTEMES INDUSTRIELS
x
Table des Matières
Table des Matières_________________________________________ 1
Introduction _____________________________________________ 3
Chapitre I. Le nanocristal de silicium, une brique de base proposée
à la micro-électronique pour miniaturiser ses composants__________ 7
I. Les mémoires Flash à nanocristaux _________________________ 7
II. Les composants mono-électroniques ______________________ 22
Chapitre II. Caractérisation en courant de capacités MOS
contenant des monoplans de nanocristaux de silicium ____________ 41
I. Description des échantillons caractérisés ___________________ 42
II. Etude expérimentale des courants de chargement ___________ 56
III. Modélisation par un circuit électrique équivalent et
extraction de paramètres _________________________________ 64
IV. Influence du chargement observé sur les caractéristiques
électriques des composants________________________________ 88
V. Confrontation à un modèle cinétique de chargement __________ 92
VI. Conclusion __________________________________________ 99
Chapitre III. Etude de composants comportant quelques
nanocristaux de silicium : vers l’étude de l’îlot unique. __________ 105
I. Présentation d’un procédé d’isolation de capacités ___________ 107
II. Elaboration de composants à quelques îlots par AFM ________ 117
III. Modélisation simple des composants à quelques îlots _______ 129
IV. Conclusion _________________________________________ 160
Conclusion générale _____________________________________ 165
Bibliographie ___________________________________________ 169
1
2
Introduction
L
a technologie MOS parvient à miniaturiser ses composants électroniques, mémoires et
transistors, à un rythme quasi-constant depuis plusieurs dizaines d'années. Elle suit en
cela une ''roadmap'', rédigée par des acteurs industriels, selon des critères technologiques et
économiques. Ces derniers sont conditionnés par deux tendances : d'un côté, la
miniaturisation, qui conduit à élaborer de plus en plus de composants par unité de surface, et
diminue par conséquent leur prix de revient. D'un autre côté, ces gains sont en partie
contrebalancés par les investissements massifs qu'ils nécessitent, en termes d'équipements et
de recherche/développement.
Cette dualité confère à l’évolution de la technologie MOS un rythme certes rapide mais aussi
relativement constant et très bien contrôlé, comme le montre la Figure 1, où l'on peut
constater que le nombre de transistors dans les processeurs INTEL a augmenté de façon
continue entre 1970 et 1990 et également, bien qu’un peu plus lentement, entre 1990 et
aujourd’hui.
Figure 1 : Nombre de transistors
intégrés
dans
les
microprocesseurs de marque INTEL
produits entre 1970 et 2002
[Intel].
Du point de vue de la recherche, ce développement permet de travailler sur des composants
élaborés par des techniques très pointues, et donc d'étudier des dispositifs de très faibles
dimensions qui donnent alors lieu à des phénomènes physiques nouveaux, que l’on peut
décrire par la physique classique ou dans le cadre de la mécanique quantique. Dans de tels
composants, il est par exemple possible d'exploiter la granularité de la charge, c'est à dire le
fait que toute charge électrique résulte de la présence d'un nombre entier d'électrons. Pour ce
faire, les nanocristaux de silicium ont suscité un vif intérêt ces dernières années. Il s'agit d'îlots
sphériques dont le diamètre est compris entre 1 et quelques dizaines de nanomètres. On les
présente souvent comme l'une des solutions les plus réalistes pour accompagner la
technologie MOS dans sa miniaturisation, que ce soit à court ou à long terme.
3
A court terme tout d'abord, il est apparu que le fait de remplacer la grille flottante polycristalline des mémoires Flash conventionnelles par un plan très dense de ces nanocristaux
permettait d'envisager la miniaturisation de ce type de cellules mémoires. Dans ce cas en
effet, l'information stockée est discrétisée, ce qui augmente beaucoup la fiabilité des
composants mémoires, même soumis à une miniaturisation importante.
On trouve dans la littérature des démonstrateurs qui illustrent le concept de la mémoire FLASH
à nanocristaux. Certains fonctionnent de manière tout à fait correcte mais il est rarement
démontré que les charges stockées par ces composants le sont bien dans les nanocristaux
eux-mêmes. Le chapitre II montre que plusieurs techniques d’élaboration de nanocristaux
peuvent aboutir à des composants montrant un effet mémoire. Mais là encore, il s’avère a
priori impossible de connaître précisément où a lieu ce chargement. C'est dans ce sens que
nous proposons une technique de mesure des courants transitoires qui permet d’estimer la
valeur de la capacité existant entre les lieux de stockage des charges et la grille de contrôle
des composants.
Dans cette optique, plusieurs modèles ont été développés pour estimer cette capacité de
manière théorique, en partant des caractéristiques structurales des populations d'îlots. En
comparant les valeurs théoriques et expérimentales, il est possible de conclure si le
chargement caractérisé électriquement est en adéquation avec les paramètres
microstructuraux des îlots. Cette approche nous donne donc la possibilité de différencier les
mémoires pour lesquelles le chargement a lieu dans les nanocristaux des mémoires suspectées
de stocker leurs porteurs dans les défauts présents dans les éléments isolants.
Selon ce critère, il est alors possible d'évaluer les différentes techniques d'élaboration d'îlots de
silicium. L'estimation du couplage îlots/grille de contrôle par nos modèles peut elle s'avérer
intéressante pour évaluer le potentiel de miniaturisation qu'ont ces différentes techniques
d'élaboration. La partie expérimentale et les modèles proposés par ce chapitre sont donc
particulièrement indiqués pour guider les choix technologiques en matière de procédés
d'élaboration, mais aussi en ce qui concerne le diamètre des îlots, leur densité et la taille des
barrières d'isolants, en fonction des nœuds technologiques visés.
Selon la littérature, le règne des mémoires à nanocristaux pourrait commencer au nœud 65
nm et se prolonger jusqu’au nœud 40 nm et peut-être même 20 nm, constituant ainsi le trait
d’union entre la technologie MOS et les composants à un électron (Figure 2). Ces derniers sont
donc présentés comme les alternatives aux technologies d’aujourd’hui, et la littérature montre
que les efforts de recherche sont intenses pour trouver les techniques de fabrication et les
architectures qui permettront de réaliser ces composants.
C’est dans cette problématique que s’inscrit le chapitre III, en évoquant deux pistes
permettant d’envisager la caractérisation électrique de composants dont la zone active ne
comporte que quelques îlots. Ces deux pistes concernent donc des applications à long terme,
et reposent sur l'utilisation des propriétés particulières des nanocristaux de silicium, autour
desquelles s'articule donc véritablement ce travail de thèse.
4
Figure 2 : ''Faisabilité''
des mémoires FLASH en
fonction de l’échelle,
c’est à dire du nœud
technologique
atteint
par
la
production
[Baik03].
La première piste évoquée par le chapitre III propose la création de composants ''verticaux'',
c'est à dire qu’en leur sein, le transport se fait perpendiculairement à la surface du substrat.
Nous présentons dans la première partie du chapitre III un procédé d'élaboration compatible
avec la technologie MOS et qui permettra à terme de mesurer le courant passant par un plan
de quelques nanocristaux de silicium, et pourra déboucher sur des architectures innovantes
tirant partie des propriétés des îlots de ce plan.
La seconde piste est très différente du point de vue de la conception ; il s'agit en effet de créer
des composants ''horizontaux'', où les îlots, le drain, la source et la grille sont disposés sur le
même plan, typiquement la surface d'une couche d'oxyde. Les caractéristiques expérimentales
de tels composants seront présentées, ainsi que des simulations en courant réalisées grâce à
un modèle analytique (pour les composants comportant un îlot unique), et grâce à un
simulateur Monte Carlo faisant référence dans le domaine, MOSES 1.1, pour les dispositifs à
plusieurs îlots.
Les simulations montrent que les capacités existant entre les îlots et les éléments conducteurs
qui les entourent sont cruciales pour l’observation de blocage de Coulomb, un phénomène
physique qui est à la base du fonctionnement des transistors à un électron (SET, pour Single
Electron Transistor) et des mémoires à un électron (SEM, pour Single Electron Memory). C’est
pourquoi, là encore, le couplage entre les îlots et les électrodes a été modélisé par des
expressions analytiques simples et par la méthode des éléments finis. Cette modélisation
capacitive est donc un autre axe important de ce travail de thèse. Dans le cas des dispositifs à
quelques charges, elle nous permet de déterminer la température à laquelle un composant
peut fonctionner en fonction de ses dimensions.
Ces différents aspects sous-tendent la faisabilité de composants innovants à court et à long
terme qui s'intègrent parfaitement dans l'évolution historique des mémoires FLASH et des
composants monoélectroniques, évoquée au cours du chapitre I.
5
6
Chapitre I. Le nanocristal de silicium, une
brique de base proposée à la microélectronique pour miniaturiser ses
composants
L’objet de ce chapitre est de décrire l’état de l’art dans les domaines abordés par les chapitres
II et III, ainsi que les problématiques auxquelles cette thèse s’attache à apporter des
réponses.
La première partie de ce chapitre décrit le fonctionnement des mémoires FLASH, ainsi que les
limitations que subit actuellement leur miniaturisation. A partir de ce constat, on décrit ensuite
en quoi les mémoires contenant des nanocristaux de silicium constituent un apport
intéressant, et quelques réalisations relevées dans la littérature sont également évoquées.
Enfin, nous verrons que d’importantes questions se posent encore, notamment en ce qui
concerne le rôle des îlots dans les caractéristiques électriques des composants montrés dans la
littérature. Comme nous l’expliquerons, c’est dans ces questions que le chapitre II trouve toute
sa pertinence en proposant une technique de mesure permettant de discerner le lieu de
stockage des porteurs.
La deuxième partie de ce chapitre traite de composants qui ne contiennent que quelques îlots
de silicium. Par un bref aperçu historique, nous montrerons dans un premier temps que l’on
peut remonter jusqu’au début du 20ème siècle pour trouver les origines de la caractérisation
expérimentale de l’aspect granulaire de la charge. C’est bien de cela qu’il s’agit lorsque l’on
cherche à faire fonctionner des composants à un électron ; dans un deuxième temps, nous
évoquerons un certain nombre de réalisations technologiques allant dans ce sens. Enfin, une
troisième partie conclura sur les objectifs qui ont motivé l’élaboration des composants décrits
dans le chapitre III.
I. Les mémoires Flash à nanocristaux
Les mémoires sont des dispositifs électroniques pouvant stocker des informations sous forme
binaire afin de les rendre ultérieurement disponibles. Le fonctionnement de ces dispositifs
s'appuie généralement sur leur bi-stabilité, c'est à dire qu'il est possible de les faire fonctionner
de manière stable dans deux états électriquement discernables. Lire l'information revient donc
dans de tels composants à déterminer leur état à un instant précis. On divise couramment les
mémoires en deux catégories : les mémoires volatiles et les mémoires non-volatiles. Elles se
distinguent par le temps pendant lequel elles peuvent garder l'information qui leur est confiée.
Les mémoires volatiles les plus courantes sont les DRAM (Dynamic Random Access Memory),
qui résultent de l'association en série d'un transistor et d'une capacité MOS (Figure 3a). Cette
dernière stocke sous forme de charge l'information qui lui est amenée et qui dépend de l'état
du transistor qui lui est associé. Ce type de dispositif, très rapide, nécessite des opérations de
rafraîchissement périodiques très fréquentes. Sans elles, l'information serait perdue, ce qui est
7
par exemple le cas lorsqu'on cesse des les alimenter, d'où son classement parmi les mémoires
volatiles. La DRAM est souvent utilisée en informatique, en tant qu'intermédiaire entre les
microprocesseurs et les périphériques d'un ordinateur, ou pour stocker temporairement les
données importantes de calculs complexes.
Grille flottante
Transistor
Capacité
(a)
(b)
Figure 3 : Schémas électriques d'une cellule-mémoire de type DRAM (a) et de type Flash (b).
Dans ce dernier cas, l'information est stockée dans la grille flottante et la cellule élémentaire
correspond à un unique composant, ce qui est favorable à une forte intégration.
Les mémoires non-volatiles compensent quant à elles leur relative lenteur de fonctionnement
par leur faculté à conserver l'intégrité des informations qui y sont stockées pendant plusieurs
années (au moins 10), en ne nécessitant aucune opération de rafraîchissement. Ce sont elles,
et plus particulièrement les mémoires FLASH, qui font l'objet de cette première partie, dans
laquelle les différentes évolutions qu'elles ont connu depuis leur conception sont décrites. Par
la suite, l'étude de leur fonctionnement montrera pourquoi, dans le cadre de la réduction des
dimensions des dispositifs MOS, la structure de ces composants nous amène à constater leurs
limitations et à chercher à les faire évoluer (ou à leur apporter des alternatives).
I.1. Evolution des mémoires Flash
I.1.1. Des mémoires ROM aux mémoires Flash
Plusieurs grandes familles de mémoires non-volatiles existent, elles sont le fruit de l'évolution
du composant initial, la ROM (Read Only Memory), ainsi baptisée car elle n'était pas conçue
pour que le circuit dans lequel elle était implantée puisse modifier l'information qu'elle
contenait, mais pour qu'il y accède seulement en lecture. Ces composants répondaient au
besoin des ordinateurs de conserver en permanence le microprogramme nécessaire à son
démarrage (le BIOS dans le cas du PC). La PROM (Programmable ROM) fut inventée pour que
les ROM puissent être vendues vierges (en général par des fabricants de cartes électroniques)
et que le stockage de l'information puisse y être effectué indépendamment à partir des
données informatiques propres aux assembleurs d'ordinateurs.
Suite à cette nouvelle façon d'utiliser les ROM, apparurent les EPROM (Erasable PROM), qui
sont des PROM réinscriptibles. Une exposition de ces mémoires à la lumière ultraviolette suffit
à effacer leur contenu par effet photoélectrique, ce qui était très intéressant pour les
assembleurs d'ordinateurs, car la possibilité leur était offerte de modifier le contenu des
mémoires mortes des ordinateurs qu'ils produisaient, pour corriger les éventuelles erreurs de
programmation de leur microprogramme ou tout simplement pour l'améliorer, et ce jusqu'à un
stade avancé de la production.
8
L’utilisation de la lumière U.V. pour l'effacement représente une contrainte, qui fut levée par
l'arrivée des mémoires EEPROM (Electrically EPROM), pour lesquelles l'effacement et l’écriture
se font par un signal électrique. Le circuit contenant les EEPROM peut donc lui-même modifier
leur contenu, ce qui permet non seulement au fabricant d'ordinateurs mais aussi à l'utilisateur
final de mettre à jour le microprogramme de la machine. Cette mémoire est donc d'un usage
plus souple que l'EPROM, mais elle souffre en contrepartie de la plus grande complexité de sa
cellule de base, constituée d'un assemblage de plusieurs transistors, ce qui limite son
intégration et augmente ainsi son coût de production.
La dernière évolution en date est la mémoire Flash, apparue dans les années 80, et qui se
présente sous la forme d'un seul transistor, ce qui lui donne un avantage certain par rapport
aux EEPROM. C'est ce potentiel d'intégration qui explique en partie son essor rapide pour la
mémorisation de données ou de programmes, notamment pour les systèmes portables
nécessitant le stockage d’informations sans approvisionnement en énergie (téléphones
portables, clés USB, etc.). Les mémoires Flash ont par exemple beaucoup participé à la
démocratisation des appareils photographiques numériques en rendant possible le stockage de
volumes de données importantes à bas prix et pour une consommation électrique faible. A plus
long terme, elles sont candidates au remplacement des disques durs (magnétiques)
actuellement largement utilisés en micro-informatique.
Leur plus grand avantage tient dans leurs faibles dimensions. Dans le domaine de la fiabilité,
l'absence de parties mécaniques de précision devrait leur assurer une robustesse supérieure
aux disques durs, une consommation dix fois inférieure, un temps de recherche de
l'information bien moindre, ainsi qu'un fonctionnement silencieux. Un démonstrateur de disque
dur à base de mémoires Flash a été réalisé dès 1993, mais le coût engendré par les
technologies utilisées était alors bien loin de justifier la mise en production de ces systèmes
[Wells93] . De plus, les disques durs magnétiques ont l'avantage de ne pas nécessiter
d'effacement avant réécriture, contrairement aux mémoires FLASH dont la supériorité en
vitesse d'écriture est donc à nuancer lors d'une utilisation intensive et continue. Pour résumer,
les mémoires Flash pourront remplacer avantageusement les disques durs magnétiques si leur
coût est suffisamment bas et si leur vitesse d'écriture est encore abaissée. La compréhension
de leur fonctionnement permet de déterminer les moyens d'y parvenir et les obstacles qui s'y
opposent ; c'est l'objet des deux parties suivantes.
I.1.2. Fonctionnement des mémoires Flash
Les mémoires Flash sont des mémoires à grille flottante. Leur structure est simple, elle est
identique à celle d'un transistor MOS, à ceci près qu'une couche de polysilicium est enterrée
dans l'oxyde de grille, entre la grille et le canal (Figure 3b et Figure 4). Comme on l'a déjà
mentionné, un seul transistor compose donc cette cellule mémoire, et c'est bien ce qui a
motivé sa création en 1980 par les ingénieurs de Samsung [Masuoka84] , qui voulaient
réduire le prix de revient des EEPROM. On appelle ''grille flottante'' la couche de polysilicium
enterrée, car elle est totalement isolée du reste du composant. L’information y est contenue
sous la forme de charges électriques. La présence ou l’absence de cette information pourra
être discernée de par l’influence électrostatique que les charges la composant exercent sur le
canal du transistor.
9
Pour comprendre cette influence, rappelons que les états ''bloqué'' ou ''passant'' d'un transistor
MOS se différencient par l'absence ou la présence d'une couche d'inversion à l'interface
canal/oxyde de grille. C'est cette couche d'inversion qui sert de canal conducteur entre la
source et le drain lorsque le transistor est passant.
Figure 4 : Schéma en
coupe d’une cellule
mémoire
FLASH.
[Bez03].
Dans le cas d'un transistor MOS classique, pour une tension de grille nulle VG=0, le transistor
est bloqué. Pour une polarisation de grille supérieure à une tension appelée tension de seuil et
notée VT, la couche d'inversion est créée et le transistor est passant. C'est également ce qui
arrive lorsqu’aucune charge n'est stockée dans la grille flottante d'une mémoire Flash. Par
contre, lorsqu'elle est chargée, c'est à dire lorsqu'on a injecté une quantité suffisamment
importante de charges dans la grille flottante, l'influence électrostatique de ces charges va
modifier la courbure des bandes d'énergie du semi-conducteur.
Ainsi, la tension de seuil va être modifiée, c'est à dire que pour une tension de grille qui aurait
correspondu à l'état passant dans le cas d'une grille flottante déchargée, le transistor va être
dans l'état bloqué. Il va donc falloir polariser la grille avec une tension plus élevée pour aboutir
à l'état passant : les charges stockées agissent comme un écran électrostatique entre la grille
et le canal (Figure 5).
Figure 5 : Courant de drain en
fonction de la tension appliquée à la
grille
d'une
mémoire
Flash.
La
tension de seuil est différente, selon
que la grille flottante est chargée ou
non.
10
Etant donné que la grille flottante est totalement isolée, elle forme un puits de potentiel pour
les porteurs qui y sont piégés, et ce même en l'absence de champ électrique dans la structure,
ce qui confère à ce type de mémoire le qualificatif ''non-volatile''. L'opération qui consiste à
tester la présence ou l'absence de charges dans le composant s'appelle la lecture. Pour la
réaliser, il suffit d'appliquer entre le drain et la source une tension telle que le transistor est
bloquant si la grille flottante est chargée et passant si tel n'est pas le cas.
Dans ce cas, on n'aura un courant de drain (état ''1'') que si la mémoire est chargée.
L'écriture, c'est à dire l'injection de charges dans la grille flottante, se fait quant à elle par effet
tunnel depuis le substrat en polarisant fortement et positivement la grille. A l'inverse,
l'effacement est obtenu en polarisant fortement et négativement la grille.
I.1.3. Limitations des mémoires Flash actuelles
Pour réaliser une mémoire qui puisse être qualifiée de non-volatile selon les critères industriels,
il est nécessaire d'assurer la rétention de l’information stockée pendant un temps très long, et
il apparaît nécessaire d'entourer la grille flottante de couches très épaisses d’isolant. Il faut par
ailleurs que les dispositifs puissent transférer efficacement des charges à travers l’isolant, et ce
de manière rapide, afin de limiter le temps d’écriture/effacement. Cette opération doit pouvoir
être réalisée en utilisant des champs électriques peu élevés, afin de rendre la consommation
électrique la plus faible possible. Ces contraintes sur les paramètres d’écriture/effacement
aboutissent donc plutôt à l’amincissement du diélectrique entourant la grille flottante.
Ces spécifications contradictoires demandent des compromis, mais ces derniers sont
déséquilibrés par la pression de réduction des dimensions qui régit l’ensemble de la filière
MOS, et la tendance est par conséquent de s'orienter vers des isolants toujours plus fins de
part et d'autre de la grille flottante.
Pourtant, un consensus existe dans la littérature à propos de la relation étroite qui existe entre
l'épaisseur d'oxyde entourant la grille flottante et le nombre des défauts créés par une
succession d'écritures/effacements. Ces défauts, générés par des mécanismes qui sont
aujourd'hui encore discutés [Burignat04] , engendrent un courant de fuite appelé SILC
(Stress Induced Leakage Current).
Des études expérimentales prouvent que le nombre de ces défauts augmente lorsqu'on
diminue l'épaisseur de l'oxyde tunnel, c'est à dire entre la grille flottante et le canal, de 10 nm
à 5 nm, comme le montre la Figure 6, où l’on peut voir les sur-courants dus au SILC, en
pointillés [Olivo88] . D'ailleurs, la Figure 7 montre que c’est pour une épaisseur d'oxyde
tunnel d'environ 5 nm que le SILC est le plus important. En effet, en dessous de 5 nm, le SILC
diminue quand on réduit l'épaisseur d'oxyde [Kafai95] .
Il apparaît donc clairement que la réduction de ce paramètre aboutira à l'augmentation des
fuites dues au SILC et réduira par conséquent le temps de rétention de la mémoire, à moins
qu'il ne soit décidé de passer sous la valeur de 5 nm. Cette solution paraît difficilement
envisageable. En effet, si on observe la Figure 7, il faudrait une épaisseur de moins de 4.5 nm
pour arriver à un SILC aussi faible que dans les mémoires produites actuellement (pour
lesquelles l’oxyde tunnel a typiquement une épaisseur de 9 nm).
11
Figure 6 : Courants de grille en fonction de la tension de grille pour des capacités MOS ayant
différentes épaisseurs d'oxyde. Les courbes pleines correspondent aux mesures faites sur les
capacités vierges. Les courbes en pointillé correspondent à des échantillons stressés. Les
épaisseurs d'oxyde sont respectivement : 5.1 nm (courbe a), 6.0 nm (b), 7.5 nm (c) et 9.7
nm (d) [Olivo88].
Figure 7 : Courants de fuite dûs
au stress en fonction de
l'épaisseur de SiO2 pour deux
doses de stress électrique, 10
et
100 mA/cm², à champ
constant [Kafai95].
Cette valeur pourrait s'avérer trop faible pour assurer les temps de rétention visés par les
industriels, qui spécifient qu'une mémoire non-volatile doit conserver 80% de sa charge sans
rafraîchissement pendant plus de 10 ans (Figure 8). En effet, la probabilité qu'un nombre nonnégligeable de charges passent de la grille flottante au substrat par effet tunnel devient alors
trop grande, ce qui est synonyme de perte de l'information. Selon cette même figure, il
apparaît que le SILC reste quoiqu'il arrive élevé pour des oxydes de 4 nm d'épaisseur lorsqu'un
stress important (100 mA/cm2) est appliqué à la structure.
Enfin, on sait que pour des couches d'isolant aussi fines, la transparence tunnel varie très vite
(environ comme l'exponentielle inverse de l'épaisseur de l'oxyde). Par conséquent, une
rugosité même faible de l'interface canal/isolant ou grille flottante/isolant peut faire varier
sensiblement la probabilité que des charges s'échappent de leur lieu de stockage.
12
Année
2004
2005
2006
2007
2010
2013
2016
Noeud technologique (nm)
90
80
70
65
45
32
22
8
8
8
8
8
8
8
Epaisseur de l'oxyde tunnel (nm)
9
9
8,5
8,5
8,5
8
8
Epaisseur de l'oxyde de grille (nm)
12
12
12
11
9
7
5
105
105
105
105
106
106
107
10/20
10/20
10/20
10/20
10/20
20
20
Tension maximale
d'écriture/effacement (V)
Nombre de cycles
d'écritures/effacements
Temps de rétention (années)
Figure 8: Quelques paramètres relatifs aux mémoires non-volatiles spécifiés par la
''roadmap'' pour les années 2004 à 2016. Les cases de couleur jaune représentent les
paramètres pour lesquels des solutions technologiques sont actuellement en développement.
Les cases de couleur rouge représentent les points de blocage pour lesquels les solutions
étaient, en 2004, au stade de la recherche [ITRS04].
L'exemple des épaisseurs d'isolant entre le canal et la grille flottante ou entre la grille flottante
et la grille de contrôle montre que l'optimisation des paramètres est difficile. Ces épaisseurs
sont cruciales pour la miniaturisation des mémoires FLASH au delà du nœud 65 nm prévu en
2007, un nœud pour lequel ce sont les deux barrières d'isolant qui posent problème, comme le
montre la Figure 8. Pourtant, jusqu'ici, la réduction des dimensions des mémoires non-volatiles
ont suivi celle de la DRAM (Figure 9), qui est toujours considérée comme la référence en la
matière [Bez03] .
Figure 9: Comparaison
entre
les
dimensions
des cellules mémoires
DRAM et FLASH entre
les
années
1990
et
2003 [Bez03].
Comme le montre la Figure 9, la cellule de base des mémoires FLASH a vu ses côtes diminuées
d'un facteur 30 depuis qu'elle est apparue sous sa forme industrielle, au début des années 90.
Mais ces résultats ont été obtenus grâce à la miniaturisation de composants passifs
périphériques qui ont parfaitement suivi la technologie standard CMOS, et grâce à des
évolutions de procédés comme par exemple le STI (Shallow Trench Isolation), permettant
d'isoler les composants les uns des autres en les séparant par des distances réduites, ou
encore en travaillant sur les interconnexions [DeBlauwe02] . Il en résulte que certains
paramètres n'évoluent pas suffisamment vite au cours des générations.
13
La difficulté que l’on rencontre pour diminuer les épaisseurs d’oxyde implique que les tensions
utilisées pour écrire et effacer les mémoires ne peuvent être diminuées, comme le montre la
Figure 8. Ainsi, la puissance dissipée par le fonctionnement des cellules mémoires reste
constante. Dans le même temps, la surface occupée par les composants mémoires diminue et
l’énergie émise par unité de surface augmente donc sensiblement au cours de la
miniaturisation.
Il faut ajouter à cela le fait que les tensions d’écriture et d’effacement sont obtenues à partir
des tensions standard fournies par les circuits intégrés. Ces tensions sont elles aussi revues à
la baisse dans le cadre plus large de l'évolution des technologies CMOS, et elles devront être
limitées à 1.2 V dans les années qui viennent [ITRS04] . Il en résulte donc des circuits
complexes et encombrants pour obtenir les tensions de 8 V et plus nécessaires aux opérations
d'écriture et d'effacement, ce qui limite à nouveau la miniaturisation des cellules mémoires
élémentaires.
Enfin, on peut citer un autre paramètre critique, le budget thermique des procédés de
formation de la grille flottante poly-silicium et de l'oxyde de grille, qui s'avérera trop important
dans les années à venir [DeBlauwe02, ITRS04] .
Ces quelques exemples montrent donc que le simple fait de respecter les objectifs en termes
de taille de cellule ne permet pas à la mémoire Flash de se conformer aux performances
attendues. Comme cette tendance sera probablement confirmée dans les prochaines années,
des alternatives sont d'ores et déjà envisagées à long et à moyen terme.
I.2. Une solution possible : les mémoires à nanocristaux
Si les problèmes rencontrés par les mémoires Flash ne sont pas résolus, il est prévu qu'aux
alentours de 2010 des composants complètement alternatifs soient développés. Il s'agit
notamment des MRAM, des mémoires ferroélectriques, et des dispositifs à changements de
phase. Mais ces solutions ont l’inconvénient d’utiliser de nouveaux mécanismes de stockage,
dont la physique est moins bien décrite que dans le cas des mémoires FLASH. De nouveaux
matériaux sont également utilisés, et leur développement au stade industriel est encore peu
avancé. De plus, il apparaît difficile dans certains cas de diminuer leurs dimensions, comme le
demandent les acteurs industriels. Il semble donc nécessaire de continuer à utiliser la
technologie FLASH jusqu’à ce que les dispositifs alternatifs soient techniquement matures et
économiquement viables [DeSalvo04] .
Si la rétention est importante pour les mémoires Flash, on peut dire que l'endurance est quant
à elle cruciale. De fait, le milieu industriel est prêt à abandonner l'objectif d'une rétention de 20
ans si c'est au profit d'une endurance supérieure à 105 cycles d'écritures/effacements
[ITRS04] . Ils sont prêts à ce compromis parce que le SILC, s’il est engendré par la
succession de stress électriques, pourrait en apparaître à partir de défauts intrinsèques déjà
présents dans l’isolant vierge, des espèces chimiques étrangères par exemple. Ceci pourrait
donc signifier que le SILC ne peut être évité au stade actuel des connaissances technologiques.
On peut donc penser que ces fuites seront toujours présentes tant il semble impossible de
maîtriser la pureté de l'oxyde jusqu'à éliminer toute inclusion d'atomes étrangers. Dans un
circuit mémoire, les cellules dont les oxydes tunnel sont les plus défectueux vont donc
14
rapidement présenter des fuites importantes, et l'information qu'ils contiennent ne sera plus
contrôlée.
C'est ainsi, en admettant le SILC comme incontournable, que l'idée de remplacer la grille
flottante en polysilicium massif par un plan d'îlots conducteurs ou semi-conducteurs est
apparue il y a une dizaine d'années [Tiwari96] . L'idée est la suivante : si on stocke
l'information dans une grille flottante massive, elle est entièrement perdue quand un cluster
d'impuretés se met à servir de relais pour le SILC (Figure 10a). Dans le cas d'un plan d'îlots,
seule l'information contenue dans quelques îlots est perdue, ce qui est négligeable par rapport
à la totalité de la charge stockée dans la mémoire (Figure 10b).
(a)
(b)
Grille
e e
e
Figure 10 : Représentations
schématiques des mémoires
FLASH conventionnelles (a)
et à nanocristaux (b).
L’étoile située dans l’oxyde
tunnel
représente
un
défaut, dû par exemple à un
grand nombre d’opérations
d’écriture et d’effacement
[DeSalvoO4].
Substrat
Il est donc possible qu'une telle cellule mémoire fonctionne tout à fait correctement avec
plusieurs clusters engendrant du SILC au sein de son isolant tunnel.
I.2.1. Principe des mémoires à nanocristaux
Le concept de mémoire à nanocristaux a été inventé au milieu des années 90 [Tiwari96] . A
l'époque, il s'agissait de créer une cellule mémoire volatile de type DRAM sans utiliser de
capacité. En effet, ce composant posait de plus en plus de problèmes de couplage entre
cellules à mesure qu'on diminuait les dimensions des circuits. Dès 2000, ce concept a été
appliqué au cas des mémoires non-volatiles [DeBlauwe00, Ishii00] et, depuis, les
progrès ont été rapides, notamment dans le sens de démonstrateurs ayant des règles de
dessin similaires aux composants déjà entrés en production. On peut citer l'exemple de
Motorola [Muralidhar03] , qui a présenté des cellules mémoires où ce sont des
nanocristaux de silicium qui servent de grilles flottantes et permettent des tensions d'écriture
de 6V. Les performances se sont montrées analogues aux dispositifs standard et les règles de
dessin des cellules étaient conformes au nœud 90 nm alors en vigueur.
Les premiers effets positifs du plan d'îlots sont déjà sensibles : tout d’abord, les tensions
d'écriture sont inférieures à celles utilisées par les mémoires flash conventionnelles, ce qui est
à mettre au crédit de la diminution de l'épaisseur de l'oxyde d’injection, ramenée à des valeurs
situées entre 5,5 et 7 nm. Ensuite, les auteurs ont noté que le procédé utilisé semblait moins
coûteux que celui des mémoires Flash conventionnelles. En effet, il est nécessaire de faire
moins de modifications sur le procédé de fabrication des transistors MOS classiques pour
fabriquer des mémoires FLASH à nanogrilles flottantes que pour les mémoires FLASH
15
conventionnelles. Cet avis est d’ailleurs partagé par d'autres auteurs [DeBlauwe02,
DeSalvo04]. Si on ajoute à cela le fait que la diminution des tensions d’écritures/effacement
à 6 V permet de réduire la taille des composants annexes d’alimentation, les mémoires à
nanocristaux semblent être en mesure d’afficher un prix de revient relativement bas. Ceci est
très favorable à leur entrée en production à court terme.
Mais les avantages attendus de cette innovation ne s'arrêtent pas là :
• Les mémoires contenant des îlots où la charge stockée est discrétisée, ne souffrent pas du
couplage entre leur drain et leur grille flottante. Ceci leur permet d’être moins sujettes à
l’abaissement de la barrière formée par l'oxyde tunnel, un effet appelé DIBL (Drain Induced
Barrier Lowering). Ainsi, lors de la lecture de l’information contenue dans la mémoire, il est
possible d’utiliser des tensions de drain plus élevées que dans le cas des mémoires FLASH
classiques. Les temps d’accès en lecture sont par conséquent diminués, ce qui pourrait
permettre aux mémoires Flash de rattraper leur retard dans ce domaine par rapport aux
mémoires volatiles de type DRAM. Ceci rend également possible l’utilisation de canaux plus
courts que ceux des mémoires FLASH classiques, avec pour perspective la réduction de la
surface des cellules et donc une plus grande intégration [DeBlauwe02] .
• Le couplage entre les grilles flottantes de cellules mémoires voisines fortement intégrées
dans des circuits est également moins important dans le cas des mémoires à nanocristaux que
pour les mémoires FLASH conventionnelles. Ceci devrait permettre là encore de pousser la
diminution des dimensions des cellules [DeSalvo04] .
• La discrétisation de l'information est tout à fait compatible avec le stockage de plusieurs
bits par cellule mémoire, comme c'est envisagé pour les mémoires Flash conventionnelles.
Ceci permettra l'utilisation de logiques multi-bits et, par conséquent, de démultiplier les
informations pouvant être contenues dans les mémoires. Une plus grande intégration est donc
encore à la clé, cette fois en termes de bits par unité de surface ; ceci pourra être mis à profit
pour diminuer encore le prix de revient des mémoires à nanocristaux.
I.2.2. Désavantages des mémoires Flash à nanocristaux
Si les avantages de la solution présentée ici sont nombreux, elle présente également des
points faibles.
Tout d’abord on peut citer un inconvénient qui est lié à l'un des avantages que l'on a cités
précédemment : le faible couplage entre les grilles flottantes des cellules mémoires voisines a
comme corollaire un moindre couplage entre la grille extérieure et la grille flottante d'un même
composant. Ceci pourrait nuancer les attentes en matière de tensions d’écriture/effacement,
car il faudrait alors polariser plus fortement la grille extérieure pour obtenir un champ suffisant
à l'injection rapide de porteurs dans les îlots [DeBlauwe02] .
Un autre problème se pose : comment contrôler la taille des îlots afin de s'assurer de
l'homogénéité des caractéristiques des cellules mémoires ? Il s'agit en effet de s'assurer que
différentes cellules stockent des quantités de charges comparables, et il faut par conséquent
maîtriser le nombre et la taille des îlots. C'est l'une des raisons qui ont poussé de nombreuses
équipes de recherche à expérimenter plusieurs techniques d'élaboration de ces îlots.
16
I.2.3. Différentes techniques d'élaboration des nanocristaux
Si l’on s'en tient aux nanocristaux de silicium, qui sont les objets étudiés au cours des
chapitres qui suivent, il existe plusieurs façons de les élaborer, et on peut citer par exemple les
techniques suivantes :
• Dépôt de silicium par dépôt chimique en phase vapeur (CVD, pour Chemical Vapor
Deposition) sur une couche d'oxyde thermique :
Il s'agit d'un dépôt chimique en phase vapeur sur une fine couche d'isolant, le plus souvent de
l'oxyde thermique, par CVD [Tiwari96] , PECVD (Plasma Enhanced CVD) [Ifuku97,
Hinds00, Nishiguchi00]] ou LPCVD (Low Pressure CVD) [Baron00,Baron02]. Le
gaz utilisé, du silane (SiH4), est décomposé à haute température, donnant du silicium et de
l'hydrogène gazeux selon les équations [Baron00] :
SiH4 (g) → Si (s) + 2H2 (g)
Une couche d'oxyde est déposée sur les nanocristaux, et il est nécessaire que cette couche soit
de bonne qualité, dans sa stœchiométrie et au niveau de l'interface avec les nanocristaux.
L'avantage de cette technique est la haute densité (~1012 cm-2) et la relativement faible
dispersion en diamètres des nanocristaux (Figure 11) [Mazen03] .
(a)
(b)
Figure 11 : (a) Image MEB d'un plan de nanocristaux d'environ 10 nm de diamètre, de densité
3,2.1011 cm-2. (b) Dispersion en diamètres des îlots autour de leur taille moyenne [Mazen03].
•
Précipitation de silicium excédentaire dans une couche d'oxyde, suivie par un recuit.
Dans ce cas, le but est de faire précipiter les atomes de silicium présents dans une couche
d'oxyde non-stœchiométrique. Cette couche peut être obtenue de deux manières :
- En créant une couche de SiOX avec X<2 par réaction de silane SiH4 (g) et de N2O (g)
dans une enceinte CVD, sur un substrat préalablement oxydé [Hitchman81,
DiMaria83]. Ensuite, un recuit permet la démixtion du SiOX en oxyde stœchiométrique et
17
en atomes de silicium isolés qui ont dans ces conditions tendance à s'agglomérer en
nanocristaux par diffusion. En faisant varier les paramètres de cette réaction, il est possible de
faire varier la densité et la taille des îlots. Cette technique a le désavantage de ne pas
permettre de contrôler la position des îlots au sein de la couche d'oxyde. Il est également
courant d'observer d'importantes fuites de courant; elles sont généralement attribuées à la
non-stœchiométrie de l'oxyde, qui peut subsister même après des recuits oxydant importants.
C'est pourquoi un oxyde de grille déposé est généralement ajouté par-dessus la couche de
SiOX. Mais il n'en reste par moins que les temps de rétention de ces mémoires sont souvent
faibles, amenant les auteurs à parler de mémoires quasi-volatiles, ou à jouer sur de très
petites épaisseurs d'oxyde tunnel afin d'augmenter la vitesse d'écriture/effacement
[King99] . Le but affiché est alors de proposer des alternatives aux mémoires DRAM, car
dans ce cas les temps de rétention très courts sont acceptés, étant donné les fréquences
élevées à laquelle l'information qu'elle contient est rafraîchie. Enfin les tailles des îlots ainsi
formés sont souvent largement dispersées. Tous ces éléments font de la précipitation du SiOX
une technique où tous les paramètres doivent être contrôlés pour donner des résultats
électriques satisfaisants.
- En implantant des ions Si+ dans une couche de SiO2 thermique réalisée à la surface
d'un substrat de silicium [Hanafi96] . L'implantation a pour effet d'apporter des atomes de
silicium excédentaires [Bonafos01] , qu'on va chercher à faire précipiter en îlots comme
dans le cas du SiOX par un recuit. Celui-ci va favoriser la diffusion du silicium dans la matrice
d'isolant et, dans le cas de l'implantation, il est possible de contrôler plus ou moins finement la
position du plan d'îlot dans l'isolant (Figure 12), ce qui est un avantage certain par rapport à la
technique précédemment citée [Carrada03] .
Figure 12 : Images TEM de plans d'îlots créés dans des couches d'oxyde de 10, 7 et 5 nm. La
distance séparant le plan d'îlots du substrat est dans chaque cas différent, ce qui laisse
entrevoir son contrôle [Normand04].
Il est cependant à tempérer par un inconvénient inhérent à l'implantation ionique : les
dommages créés dans l'isolant lors du passage des ions, encore aggravés si les ions sont
accélérés avec une énergie élevée. Ce constat est à l'origine des recherches récentes menées
sur l'implantation de silicium à très basse énergie dans des couches minces d'oxyde
[Normand98, Normand04] . Des résultats structuralement satisfaisants ont été montrés
en ajoutant à cette technique des recuits oxydants afin de guérir les défauts de la matrice
18
d'oxyde [Carrada03] . Les îlots se trouvent en effet à une profondeur très homogène dans
la couche d'oxyde. Cette faible dispersion acquise, il reste à mieux maîtriser encore la relation
qui existe entre la profondeur de ce plan quasi-bidimensionnel d'îlots et les paramètres
d'implantation pour obtenir des structures mémoires idéales.
•
Oxydation de couches minces de silicium
Le principe est très simple : une couche de silicium est déposée par PECVD sur une couche
d'oxyde thermique. Un recuit rapide permet au silicium amorphe de former des coalescences
de clusters de silicium [Maeda99] . Un recuit long en four traditionnel est souvent réalisé
afin de poursuivre la formation des îlots [Nicollian93] , avec une rampe de température
assez longue. En effet la recristallisation du silicium amorphe provoque des contraintes, un
phénomène atténué par une montée en température lente au cours du recuit. Il n'en reste pas
moins que la réalisation de petits îlots est difficile, car dans ce cas le comportement électrique
est trop perturbé par la présence des contraintes, qui sont susceptible de piéger les porteurs
qui sont injectés dans le composant.
Enfin, d'autres techniques ont été mises au point pour résoudre de manière originale les
obstacles rencontrés par les moyens conventionnels : on peut citer par exemple l'aérosol de
silicium [Ostraat01] , ou encore le dépôt de silicium dans des matrices de polymères, qui
ouvre la perspective de l'auto-organisation [Guarini03] .
I.3. Positionnement de la thèse
La technologie des mémoires non-volatiles à nano-grilles flottantes est assez jeune (milieu des
années 90) et, finalement, peu d'études vraiment physiques ont été menées à propos de leur
caractérisation électrique. Comme on l'a dit, les mémoires à plans d'îlots n'ont vraiment été
considérées comme solutions possibles aux problèmes d'intégration des mémoires Flash que
depuis 2000 environ. L'engouement qu'elles ont alors suscité a abouti à la fabrication de
nombreux démonstrateurs, par des équipes de recherche aux motivations très applicatives.
Cette profusion de démonstrateurs met en oeuvre une variété de procédés importante et
intéressante du point de vue du matériau.
En ce qui concerne la caractérisation de ces composants, l’accent est rarement mis sur la
compréhension des mécanismes physiques qui régissent les grandeurs électriques. Le courant
de grille, par exemple, est peu étudié sur ce type de dispositif. On peut tout de même citer le
travail de B. De Salvo, qui propose la caractérisation et la modélisation du courant statique de
grille, c’est à dire le courant traversant le plan d’îlots et les barrières isolantes
[DeSalvo01a]. La Figure 13 montre le résultat de cette modélisation, pour une structure
asymétrique typique des mémoires, c’est à dire ayant une épaisseur d’oxyde tunnel
(d’épaisseur T1) inférieure à celle de l’oxyde de contrôle (d’épaisseur T2).
Cette approche est intéressante car elle peut permettre de remonter à des paramètres
structuraux tels que la densité d’îlots, ou leur diamètre, si on fait l’hypothèse que ce sont bien
les îlots qui servent de relais pour le transport des porteurs à travers la structure, et non des
pièges pouvant être présents dans les barrières isolantes.
19
Néanmoins, si l’épaisseur T2 est importante, les modes de conduction notés I et II dans la
Figure 13b ne sont plus discernables, en raison de la faible transparence qu’aura alors la
barrière d’épaisseur T2. C’est pourtant ce qu’on trouve dans les mémoires FLASH actuelles,
pour lesquelles l’approche statique est donc d’un intérêt limité. Actuellement, T2 vaut environ
12 nm dans les dispositifs produits industriellement (Figure 8). De plus, dans les mémoires
FLASH, les valeurs de T1 sont elles aussi relativement importantes (9 nm dans les dispositifs
actuels, cf. Figure 8), rendant très faibles les courants issus du mode de conduction noté III
dans la Figure 13b. Expérimentalement, pour des structures analogues à celles produites
industriellement, l’approche statique risque donc de se limiter à l’étude du mode de conduction
IV et ainsi de donner peu de renseignements sur les paramètres structuraux des composants
caractérisés.
Figure 13 : (a) Densité de courant de
grille simulée traversant une structure de
type mémoire en fonction du champ
électrique
structure
appliqué
étudiée
à
la
grille.
comprend
un
La
plan
d’îlots inséré entre un oxyde tunnel
(d’épaisseur T1) et un oxyde de grille
(d’épaisseur T2>T1). Deux cas ont été
(a)
étudiés, T1=2nm et T1=3nm et deux
modes de conduction sont représentés, le
tunnel
direct
à
travers
la
barrière
d’épaisseur T1 (en pointillés) et le tunnel
assisté par les îlots (en trait plein).
(b) Représentation
schématique
des
différents modes de conduction pris en
(b)
compte dans le graphe (a) [DeSalvo01a].
A partir de ce constat, le chapitre II propose une technique de mesure basée sur l’étude des
courants transitoires au moyen de balayages rapides de la tension de grille. Cette technique
offre l’avantage d’être exploitable quelles que soient les épaisseurs d’isolants rencontrées. De
plus, en modélisant ces courants transitoires, on verra qu’il est possible d’extraire des
paramètres structuraux, et donc de déterminer le lieu de stockage des charges. C’est
également un point important, car les méthodes proposant cette détermination sont peu
nombreuses dans la littérature, a fortiori parmi les techniques de caractérisation électrique.
Bien souvent, celles-ci montrent l’existence d’un chargement en porteurs au sein des
composants mémoires. Il s’agit la plupart du temps de l’observation d’hystérésis dans les
courbes C-VG (capacité de la structure en fonction de la tension de grille, voir Figure 14)
[Busseret02, Crupi03] ou ID-VG (courant de drain en fonction de la tension de grille, sur
des transistors, Figure 15) [DeSalvo01b, DeBlauwe02, DeSalvo04] .
Si ces observations attestent bien du piégeage de charges dans les structures étudiées, elles
ne suffisent pas à prouver que le chargement a lieu dans les îlots eux-mêmes, à leur surface
ou dans les défauts situés dans le volume d’isolant entourant les plans d’îlots.
20
Figure 14 : Capacité d'une structure de type mémoire contenant un plan de nanocristaux de
silicium, en fonction de la tension de grille appliquée. La ligne pleine représente une mesure
sur une capacité vierge et les courbes en pointillés ont été réalisées après un stress positif (à
droite) et négatif (à gauche). Le décalage de ces courbes par rapport à la mesure sur capacité
vierge atteste de l'apparition d'un chargement, qui est schématisé dans les deux cas de figures
par les inserts [Busseret02].
Les résultats du chapitre II constituent donc sur ce point également un progrès, en donnant
des précisions sur le lieu de stockage des porteurs au sein des composants mémoires.
Il existe dans la littérature un consensus selon lequel la maîtrise des dispersions statistiques
des paramètres relatifs aux nanocristaux (comme par exemple leur diamètre) est un enjeu
capital concernant les mémoires FLASH à nano-grilles flottantes. Sur des populations d’îlots
aussi larges que celles que l’on y rencontre, toute dispersion a pour effet de rendre
indiscernables les phénomènes qui sont étroitement liés aux paramètres sujets à la dispersion.
Les effets monoélectroniques comme le confinement quantique ou le blocage de Coulomb, par
exemple, dépendent fortement de la taille des îlots. Toute inhomogénéité en diamètre
compromet donc leur observation.
Pourtant, l’observation de ce type de phénomène permettrait de montrer que ce sont les îlots
qui assurent la conduction ou la rétention de charges. En effet, l’apparition de blocage de
Coulomb ou de confinement quantique ne peut être associée à des pièges. Premièrement, ces
derniers sont bien souvent distribués en énergie, ce qui est incompatible avec l’observation de
résonances tunnel. Deuxièmement, dans l'hypothèse de pièges situés à l'interface des îlots,
ces défauts sont distribués en localisation, autour des nanocristaux. Par conséquent, leurs
paramètres capacitifs (qui dépendent notamment de la distance séparant les lieux de stockage
de l’électrode injectante) seraient bien trop inhomogènes pour permettre l'observation d'un
blocage de Coulomb cohérent sur toute la zone active d'un composant.
21
Figure 15 : Courant de drain pour une mémoire FLASH dont la grille flottante est constituée
d'un plan de nanocristaux de silicium, en fonction de la tension de grille appliquée. La
courbe en trait plein représente une mesure réalisée après avoir effacé le composant, et les
points correspondent à des mesures effectuées après un pulse d'écriture, pour des durées
variables. Tous ces pulses aboutissent à un décalage identique de la courbe ID(VG), ce qui
prouve qu'un chargement de la structure a lieu, et de façon relativement rapide, même pour
les temps les plus courts. [DeSalvo04].
On peut ainsi considérer que l’observation d’effets mono-électroniques est la preuve que ce
sont les îlots et non les pièges qui contribuent de manière prépondérante dans les mécanismes
de transport ou de stockage de porteurs et il apparaît donc naturel de vouloir s’affranchir des
dispersions structurales concernant les îlots. Le moyen le plus évident pour y parvenir est de
limiter le nombre d’îlots compris dans les composants et, en prolongeant ce raisonnement, à
s’orienter vers des dispositifs qui ne comprennent que quelques îlots. Ce type de composant
est l’objet d’intenses recherches, que nous allons évoquer après un récit rapide de l’histoire des
composants mono-électroniques, c’est à dire des composants dont le fonctionnement est régi
par seulement quelques électrons, voire par un seul.
II. Les composants mono-électroniques
Dans un milieu soumis à la gravité, un fluide libre a tendance à se déplacer des points
d’altitude élevée vers les points d’altitude moindre. Le courant électrique, observable dans un
conducteur entre deux points de potentiels différents, peut être vu au niveau macroscopique
comme étant analogue à l'écoulement d'un fluide entre deux points d'altitudes différentes. Si
on poursuit l’analogie, de la même manière que le fluide est composé d'atomes, le courant est,
on le sait aujourd'hui, un flux de particules discrètes, les électrons.
22
Dès le début du 20ème siècle, des dispositifs expérimentaux ont été créés dans le but de
montrer macroscopiquement l'existence de ces quanta de charges. Si on voulait donner une
définition simple de ce qu’est un composant mono-électronique, on pourrait dire que c’est un
composant qui montre lui aussi l’existence des quanta de charge, en délivrant un signal
électrique qui peut être modifié de façon discernable à l’échelle macroscopique par la présence
d’un seul de ces quanta.
Un résumé historique rapide permet ainsi de se rendre compte de la progression qui a été faite
au cours du 20ème siècle, de la preuve de l'existence de l'électron au contrôle charge par charge
d'un composant électronique.
II.1. Brève histoire des composants mono-électroniques
C’est par paliers qu’a été réalisée cette progression, dont on pourrait dater le commencement
à 1909, lorsque Robert A. Millikan réalise à l'université de Chicago ce qu'il appelle lui-même
''l'expérience de la goutte d'huile'' [Millikan11] . Elle lui vaudra, accompagnée d'autres
travaux expérimentaux sur les photons, le prix Nobel de physique en 1923 [Millikan24] .
A l'époque, il s'agit de démontrer expérimentalement l'hypothèse qu'un électron est une
particule discrète, de charge constante. Cette hypothèse a été théoriquement formulée à la fin
du XIXème siècle (1871) mais une quarantaine d'années plus tard, peu d'expériences ont
encore été réussies pour la vérifier et elle est par conséquent largement contestée.
De plus, il est à cette époque essentiel de donner à la charge, sensée être constante, une
valeur précise et reproductible, ce que permettra l'expérience de Millikan. Elle a pour principe
d'envoyer de petites gouttes d'huile entre deux électrodes à l'aide d'un atomiseur, le tout à
l'intérieur d'une enceinte emplie d'air et isolée de tout champ électrostatique extérieur (Figure
16).
Figure 16 : Dispositif expérimental de Millikan. On y trouve un atomiseur (A), qui produit des
gouttelettes d'huile dans une enceinte (C) où l'air est ionisé. Une partie des gouttes peuvent
pénétrer dans un dispositif à deux électrodes (M et N) auxquelles on peut appliquer un
potentiel au moyen des piles (B) et de l'interrupteur (S) [Millikan11].
23
Quand un champ électrique est appliqué entre les électrodes, deux forces opposées s’exercent
sur la goutte d'huile : l’une est due au champ électrique et l’autre à la gravitation. L'expérience
revient alors à déterminer le champ à appliquer pour que la goutte ne tombe pas et traverse
entièrement l'espace inter-électrodes. Pour augmenter la charge contenue dans chaque
goutte, il ionisait de plus en plus l'air de l'enceinte à l'aide d'une source de rayons X.
Il observa que, dans ces conditions, le champ nécessaire pour que la goutte ne tombe pas
augmentait de manière continue. Ceci prouva que les gouttes accumulaient un nombre entier
de charges unitaires, valant environ 1,592.10-18 C.
On sait aujourd'hui que cette valeur est trop importante, l'erreur étant probablement due aux
valeurs erronées utilisées pour la viscosité de l'air, qui entre en compte dans les calculs. Ainsi,
cette expérience ne valide rigoureusement la nature discrète de la charge que de manière
qualitative ; il n'en reste pas moins qu'il s'agit là de sa première mise en évidence
macroscopique claire.
L'histoire des composants mono-électroniques continue avec Cornelis J. Gorter, un physicien
hollandais, qui découvrit au début des années 50 d'étonnantes caractéristiques électriques à
un film de métal granulaire [Gorter51] . Il menait alors des recherches sur la
supraconductivité de plusieurs matériaux et il observa que la résistance d'une couche de
petites particules métalliques entourées d'isolant augmentait lorsqu'on diminuait la
température, ce qui n'était pas du tout attendu.
C. J. Gorter était reconnu comme un excellent expérimentateur, mais les idées plus théoriques
qu'il a développées pour expliquer ce phénomène se sont montrées également très bonnes. En
1968, une expérience similaire à la sienne est réalisée par I. Giaever et R. H. Zeller, dans le
but d'étudier la supraconductivité de particules nanométriques d'étain enrobées dans un
isolant [Giaever68] . Là encore, en mesurant la résistance entre les deux couches
d'aluminium (insert de la Figure 17), ils montrèrent qu'elle augmentait avec la température
(Figure 17).
Figure 17 : Courbes donnant la résistance électrique dynamique dV/dI d'une couche
(représentée en insert) composée de particules d'étains séparées d'oxyde d'aluminium
(parties hachurées), en fonction de la polarisation V qu'on lui applique [Giaever68].
24
Plusieurs observations de ce phénomène inattendu avaient été reportées par d'autres équipes
au cours des deux années précédent cet article, mais Giaever et Zeller y apportèrent une
interprétation physique, qui s'avéra la bonne. Ils proposèrent en effet un modèle où les grains
métalliques sont considérés comme des électrodes de condensateurs.
Tout d'abord, ils firent l'hypothèse que le courant mesuré provient principalement de deux
contributions. Premièrement, un courant de fuite dû à l'effet tunnel au travers des couches
d'oxyde séparant les particules. Etant donnée l'épaisseur de ces couches, les auteurs
s'attendaient à ce que cette contribution soit faible.
L'autre partie du courant, considérée comme largement majoritaire, était attribuée à un
transport de porteurs via les particules elles-mêmes. Les faibles barrières de potentiel dues à
l'oxydation interfaciale de l'aluminium en contact avec le métal laissaient passer un courant
important par effet tunnel de part et d'autre des particules, qui servaient de relais.
Mais pour que ce courant puisse passer, il doit être possible d'ajouter un électron dans les
particules métalliques, ce qui n'est possible qu'en donnant aux porteurs une énergie suffisante
pour contrer la répulsion coulombienne due aux porteurs déjà présents dans les grains.
Afin de quantifier l'énergie nécessaire, on peut considérer les particules comme des électrodes
de condensateurs, et écrire que la tension nécessaire pour ajouter un électron dans l'une de
ces capacités est, d'après les lois élémentaires de l'électrostatique :
∆V =
q
C
Si la valeur de C est petite, le transfert d'électrons est bloqué, à moins qu'ils soient portés à un
potentiel suffisant, supérieur à ∆V. La capacité des grains est donc le paramètre crucial pour
l'observation du blocage, et on sait qu'elle ne dépend que de la géométrie des dispositifs
expérimentaux, et plus précisément des jonctions entre les grains.
A l'époque, les outils d'élaboration permettaient de réaliser des jonctions de capacité
relativement élevée. Ainsi, pour faire transiter des porteurs via ces jonctions, il suffisait
d'appliquer aux dispositifs des différences de potentiel du même ordre que l'énergie thermique
des électrons.
A température ambiante, l'énergie thermique était donc suffisante pour permettre aux
électrons de pénétrer dans les grains. Par contre, à très basse température, l'énergie
thermique devient très petite par rapport à l’énergie apportée par la différence de potentiel
entre les deux électrodes d'aluminium pour permettre aux électrons de transiter. Si la tension
appliquée est trop faible, la conduction via les particules métalliques devient négligeable
devant le courant de fuite par effet tunnel au travers des couches épaisses d'oxyde
d'aluminium présentes entre les particules métalliques. Comme ce courant est très faible, la
résistance du film est donc grande, ce qu'ont observé les auteurs. De nouvelles vérifications
expérimentales furent publiées [Lambe69, Cavicchi84] mais c'est entre le milieu et la fin
des années 80 qu'un nouveau tournant s'amorça.
A cette époque, il manquait un élément fondateur pour les dispositifs à quelques électrons :
l'idée que ces phénomènes physiques peuvent être exploités pour la logique numérique, c'est à
dire pour réaliser un transistor capable d'avoir plusieurs états stables, macroscopiquement
25
discernables et différenciés par la présence ou l'absence d'un unique quantum de charge. C'est
à Konstantin Likharev que l'on doit cette idée, à partir de résultats expérimentaux présentés
en 1985 [Likharev85] . Il souligne l'intérêt d'ajouter une électrode et de la polariser de
différentes manières pour observer les changements de conductivité d'un film granulaire.
Peu après, en puisant dans les articles historiques déjà évoqués, il a décrit de manière
théorique les critères que devraient respecter les composants électriques pour présenter des
états stables contrôlés par des charges uniques [Likharev87] . Ces critères étaient donnés
en fonction de la température de fonctionnement désirée, incluant notamment la température
ambiante, ce qui était bien entendu l'objectif visé pour en faire des dispositifs utilisables en
microélectronique.
La différence avec tous les travaux qui ont précédé réside dans le fait que, cette fois, l'objectif
est de contrôler les paramètres électriques du blocage, au lieu d'en observer l'effet sur le
fonctionnement d'un composant. Ceci nécessite une maîtrise de la géométrie de la couche
contenant les particules métalliques. Le contrôle doit se faire par la polarisation de la 3ème
électrode, séparée du système par un isolant, et qui va permettre aux particules conductrices
de changer d'état. Il s'agit d'un fonctionnement analogue à celui de la grille d'un transistor
MOS, à la différence près que seule une charge est nécessaire pour passer d'un état à l'autre.
On peut donc voir ce tournant décisif comme la rencontre entre le progrès qu'a connu
l'observation des phénomènes de charges uniques et les intérêts de la filière MOS. Cette
dernière tendant vers une miniaturisation extrême à long terme, il était très important pour
elle de pouvoir s'appuyer sur une avancée théorique permettant d'affirmer qu'elle pourrait un
jour fonctionner avec quelques quanta de charges seulement.
En effet, la stratégie d'évolution du transistor MOS passe avant tout par une réduction des
coûts de production, qui est majoritairement assurée par l'augmentation du nombre de
composants par unité de surface. C'est un domaine où les travaux de Likharev ouvrent des
perspectives qui vont intéresser les industriels, puisque les critères qu'il énonce comprennent
notamment la réduction des dimensions de la zone active des composants à moins de 10 nm.
C'est donc la naissance du concept de transistor à un électron, défini comme étant un unique
réservoir conducteur (appelé îlot, ou point quantique, en raison de ses faibles dimensions)
entre deux électrodes (appelées drain et source par analogie avec le transistor MOS) et dont
on peut moduler l'énergie par une grille.
Les progrès technologiques engendrés par la miniaturisation rapide des composants MOS ont
permis en 1987 à Fulton et Dolan de publier une étude expérimentale vérifiant les prédictions
de K. Likharev [Fulton87] . On y trouve notamment la preuve que les capacités de couplage
des jonctions (représentées sur la Figure 18a) déterminent la largeur de la plage de
polarisation donnant lieu à une augmentation de la résistance du système (Figure 18b), ce qui
est conforme à la théorie. De plus, si on polarise sinusoïdalement le substrat du composant, la
plage de tension varie de la même manière (Figure 19). Ceci prouve l'influence du substrat qui,
telle une grille de transistor MOS, influe par effet de champ sur la conduction du composant.
26
I
+
V
-
(a)
(b)
Figure 18 : (a) : Schéma du dispositif expérimental mis au point par Fulton et Dolan. Il s'agit de
quatre électrodes métalliques, 3 verticales et une horizontale. Une faible épaisseur d'isolant sépare
l'électrode horizontale des autres, et le recouvrement est faible (parties hachurées), ce qui donne
des capacités de couplage très faibles. On mesure le courant dans l'électrode horizontale, en
fonction de la tension appliquée entre 2 des éléments verticaux. (b) : Courant I dans l'électrode
principale en fonction de la polarisation V appliquée entre deux électrodes verticales, mesuré à très
basses températures (Tє[1.1K;4.2K]). Les courbes S et L correspondent à deux échantillons
présentant des capacités de couplage différentes. En insert, est représentée la variation de la
valeur de l'offset de tension mesuré en fonction de la surface de recouvrement A entre les
électrodes verticales et l'électrode horizontale, ce qui revient à évaluer les capacités de couplage
qui sont proportionnelles à A. [Fulton87]
Figure 19 : Courant I dans l'électrode
principale
en
fonction
de
la
polarisation V appliquée entre deux
électrodes verticales, mesuré à très
basses températures (Tє[1.1K;4.2K]).
Au cours de ces mesures, le substrat
des dispositifs a été polarisé avec une
tension
sinusoïdale.
Les
lettres
correspondent à différentes valeurs
de capacités de couplages [Fulton87].
27
II.2. Quelques composants et leurs caractéristiques électriques
Les avancées prometteuses du milieu des années 80 ont amené de nombreuses équipes à
travailler sur la thématique du composant mono-électronique, ce qui a abouti à la publication
de nombreux travaux expérimentaux. On trouve beaucoup de dispositifs fonctionnant à très
basses températures et seules quelques études font état de phénomènes de blocage de
Coulomb à température ambiante.
On peut classer ces réalisations en deux groupes : d'un côté, les composants dont la zone
active est amenée à respecter les critères favorables à l'observation de phénomènes monoélectroniques grâce à des techniques de structuration de couches minces (lithographie,
attaques chimiques, nano-oxydation AFM...). De l'autre, on trouve les dispositifs qui utilisent
comme zones actives des objets dont les dimensions sont intrinsèquement compatibles avec
leur propension à présenter du blocage de Coulomb.
Cette distinction trouve sa pertinence dans le fait que les deux approches se heurtent à des
obstacles différents. Le premier groupe s'appuie sur la structuration de couches minces et il
s'agit classiquement de la structuration d'un fil de silicium ou métallique reliant deux électrodes
(drain et source). On fait pour cela appel à des techniques apparentées à la lithographie, et
c'est un domaine où il est aujourd'hui encore difficile de définir des motifs de dimensions
inférieures à 10 nm. Des évolutions importantes ont contribué à faire évoluer cette approche,
comme par exemple l'apparition de l'e-beam (lithographie par faisceaux d'électrons) ou de la
nano-oxydation locale par AFM (Atomic Force Microscope).
Le deuxième groupe, légitimé par les limites de la lithographie que l'on vient d'évoquer, se
heurte quant à lui au problème de la dispersion spatiale des objets que l'on doit utiliser comme
zones actives. En effet, ils sont généralement créés par des techniques de croissance, et leur
position sur le substrat est par nature aléatoire, comme c'est le cas par exemple pour les îlots
de silicium. Pour jouer pleinement leur rôle dans les composants mono-électroniques, il faut
pourtant qu'ils soient placés entre deux ou même trois électrodes, si on ajoute la grille de
contrôle. Dans cette partie, quelques exemples de dispositifs illustrent les différentes
technologies répertoriées dans la littérature.
II.2.1. Composants utilisant des îlots désordonnés
Comme on l'a vu, les premiers effets de blocage de Coulomb ont été observés sur des films
métalliques granulaires, c'est à dire composés de particules conductrices désordonnées et
séparées par des couches isolantes. Ainsi, la solution la plus simple pour réaliser un composant
reproduisant ce comportement consiste à créer des îlots sur un substrat isolant et à les utiliser
dans un composant sans chercher à les ordonner. Les composants utilisent alors les îlots
disponibles entre les électrodes. Si le dépôt est suffisamment dense, le courant trouvera un
chemin entre les électrodes. Il est courant de constater la présence d'îlots proches du chemin
de conduction, qui agissent comme des nano-grilles flottantes et font alors fluctuer la
conductance du composant. Cet effet peut être intéressant pour réaliser une mémoire, comme
l'a montré K. Yano dans un travail qu'on peut considérer comme précurseur dans le domaine
des mémoires à un électron [Yano94] .
28
Dans son composant, un film de polysilicium est utilisé comme zone active. Les grains
cristallins qui le composent sont isolés les uns des autres par des barrières de potentiel. Le
potentiel de chaque grain est variable, notamment à cause de la faible épaisseur du
polysilicium (de 1 à 5 nm) et des autres dimensions des grains (inférieures à 10 nm), qui
doivent être à l'origine d'effets de confinement. Dans un grain, l'énergie d'un porteur ne peut
prendre dans ces conditions que des valeurs discrètes, qui dépendent grandement des
dimensions du grain. Si pour chaque grain on s'en tient au niveau d'énergie le plus bas, appelé
niveau fondamental, on peut s'attendre, en appliquant une tension entre le drain et la source,
à ce que le courant passe par les grains ayant les niveaux fondamentaux les plus bas. Il en
résulte la création d'un chemin de percolation, représenté en noir sur la Figure 20a.
(a)
(b)
Figure 20 : (a) Schéma du dispositif mémoire de K. Yano. La zone active, située entre le drain
et la source, est polycristalline. Quand elle est polarisée, des chemins de conduction se
forment entre les grains (b) et certains grains peuvent servir de grille flottante (storage
node). [Yano94].
Il est par ailleurs probable qu'en dehors de ce chemin de percolation se trouvent plusieurs
autres grains dont le niveau fondamental permet d’accueillir préférentiellement des porteurs.
Si ces grains peuvent être amenés à faire partie d'un autre chemin de percolation créé en
appliquant une tension de grille suffisante, des porteurs peuvent y être stockés, et le système
pourra alors se trouver dans un état différent et stable.
Les porteurs stockés dans les grains périphériques modifient la répartition du champ électrique
dans la zone active et on observe alors une conductance différente pour une même tension
drain-source. Il s'agit donc d'un effet mémoire, pour lequel les grains périphériques font office
de grille flottante.
La Figure 21 montre qu'un tel dispositif permet l'observation à température ambiante de la
modification du champ électrique induite par des charges uniques stockées dans un grain
périphérique. Par exemple, la tension de seuil du dispositif évolue par palier quand on
augmente la polarisation de la grille (Figure 21a), chaque palier correspondant à une charge
supplémentaire stockée dans la grille flottante.
Le déchargement de cette dernière ramène le courant de drain à sa valeur originale, là-encore
par paliers (Figure 21b), chacun d'eux correspondant à la perte d'un électron par un grain
périphérique.
29
(b)
(a)
Figure 21 : (a) Tension de seuil en fonction de la polarisation appliquée à la grille pour le
dispositif mémoire présenté Figure 20a. (b) Après écriture dans la mémoire, si on mesure le
courant de drain en fonction du temps, on peut voir la grille flottante se décharger des
porteurs qu'elle avait accumulé au cours de l'écriture, par paliers, montrant qu'il s'agit de
charges uniques [Yano94].
Ce type de mémoire fonctionne donc bel et bien, même si il est impossible de contrôler des
paramètres comme la taille du grain périphérique et sa position. La compréhension précise de
ce type de composant est rendue complexe par les dimensions aléatoires de chaque grain,
dont l'énergie du niveau fondamental est par conséquent également aléatoire.
Du point de vue fondamental comme du point de vue applicatif, ces réserves montrent la
nécessité de l'organisation des particules granulaires qui sont à la base des composants
monoélectroniques [Yano94].
De plus, la grille doit être isolée du chemin de conduction pour n'avoir qu'un effet de champ, ce
qui impose la présence d'une couche d'oxyde supplémentaire par dessus les îlots. De ce fait, la
simplicité du procédé apparaît moins évidente.
Les travaux de A. Dutta et al. [Dutta97] sont représentatifs d’une toute autre technique
d’élaboration. A partir d’une structure SOI, une ouverture a été réalisée par e-beam jusqu’à
atteindre l’oxyde enterré (Figure 22a). Des îlots ont ensuite été déposés sur le SOI ainsi
structuré. Un plan d’îlot est alors présent sur la totalité de la surface, y compris là où
l’ouverture a été pratiquée. Une partie des îlots est par conséquent localisée entre deux plots
de silicium (Figure 22b).
Ainsi, cette technique originale aboutit à un amas d’îlots placé entre deux électrodes (les plots
de silicium), formant le drain et la source d’une structure similaire à un SET si on se sert du
substrat comme d’une grille. Sur la Figure 23b, on peut voir le courant mesuré entre les deux
électrodes en fonction du potentiel appliqué entre elles. Si l’écart entre le drain et la source est
trop important (70 nm, Figure 23a), on observe un courant continûment croissant à
température ambiante.
30
(b)
(a)
Figure 22 : Des îlots sont déposés sur un substrat SOI où une zone est lithographiée jusqu'à
l'oxyde enterré. Schéma de la structure après dépôt des nanocristaux (a) et représentation du
phénomène de transport entre les nc-Si (b) [Dutta97].
(a)
(b)
Figure 23 : Courbes I(V) à température ambiante pour un écart entre les électrodes de 70 nm
(a) et 26 nm (b). Pour cette dernière valeur (b), la conductance est également représentée en
fonction de la tension appliquée [Dutta97].
Par contre, pour un écartement plus faible (26 nm, Figure 23b), des sauts, d’amplitude
modeste, apparaissent dans l’évolution croissante, que l’on peut mieux distinguer par les pics
de conductance représentés sur le même graphe.
Une technique moins originale a été adoptée par Choi et al. [Choi98] . Pour réaliser leur
composant, ils ont fait croître un plan d’îlots sur un isolant, et trois électrodes métalliques de
faibles dimensions ont été élaborées par e-beam Figure 24b.
L’une, plus grosse et placée assez loin des deux autres, est utilisée comme grille et appelée
''side gate''. Les deux autres, distantes d’à peu près 30 nm, font office de drain et de source.
La Figure 24b montre le courant mesuré entre le drain et la source en fonction de la polarisation
qui est appliquée entre elles.
31
(a)
(b)
Figure 24 : Image MEB du composant élaboré sur un plan d'îlots de silicium (a) et courant de
drain mesuré en fonction de la polarisation appliquée entre le drain et la source (b, axe de
gauche). On peut observer des paliers, confirmés par la conductance dynamique représentée
sur le même graphe (b, axe de droite) [Choi98].
On peut observer que ce courant augmente en marquant des paliers, ce qui est confirmé par
les oscillations de la conductance, montrée sur le même graphe. Il semble s’agir des
manifestations du blocage de Coulomb, ce qui est remarquable quand on sait que ces mesures
ont été effectuées à température ambiante. Si la tension drain-source est fixée et qu’une
rampe de tension est appliquée au substrat, on utilise ce dernier comme une grille et on
observe des oscillations qui confirment la présence du blocage de Coulomb à température
ambiante (Figure 24b).
De même, si on applique une rampe de tension à la troisième électrode (side gate), on obtient
des oscillations dans le courant mesuré entre le drain et la source, mais leur période est moins
régulière, et le rapport signal/bruit est moins avantageux. Ceci s’explique par l’absence
d’organisation des îlots qui entraîne la présence d’îlots entre le canal conducteur du composant
et la grille, comme on en évoquait la possibilité lors de la présentation de ce type de technique.
Il y a alors conduction entre la zone active et la grille, dont le rôle n’est alors plus purement
capacitif. Il en résulte que le courant de grille contribue de manière non-négligeable au courant
de drain, et perturbe les oscillations de Coulomb.
De plus, les caractérisations électriques et structurales de cette étude n’ont pu déterminer le
nombre d’îlots présents dans la zone active, et encore moins leur localisation. Ces deux
paramètres sont donc impossibles à contrôler par cette technique. Cet argument, ainsi que la
possibilité restreinte d’utiliser une grille coplanaire avec le drain et la source, font de
l’organisation des îlots une étape indispensable à la compréhension des SET.
II.2.2. Quelques exemples de SET élaborés par lithographie
Les premiers dispositifs mono-électroniques élaborés par lithographie sont apparus au milieu
des années 90, quand les techniques utilisant des faisceaux d’électrons ont pu atteindre des
résolutions de l’ordre de la dizaine de nanomètres.
32
Plusieurs architectures sont possibles ; par exemple, H. Ishikuro et T. Hiramoto ont créé un
SET fonctionnant à basse température en gravant le silicium d’un substrat SOI, de façon à
obtenir deux blocs de silicium reliés par une zone quasi-ponctuelle, en faisant varier finement
les paramètres de l’e-beam et de la gravure [Ishikuro97] .
Les deux blocs sont destinés à être le drain et la source du composant et une grille est formée
au dessus du système (Figure 25a). La taille du contact drain-source est déterminante, comme
prévu par la théorie. En la réduisant, les auteurs ont en effet observé que leur composant avait
d’abord les caractéristiques d’un MOSFET puis d’un SET (Figure 25b).
(a)
(b)
Figure 25 : Schéma d’une structure SET à constriction ponctuelle quantique (a) et sa
caractéristique IDS(VDS) à T=4.2 K (b) [Ishikuro97].
Il est par ailleurs évident que cette transition implique la formation de barrières de potentiel
dans le contact drain-source, car si tel n’était pas le cas, le phénomène de blocage de Coulomb
ne pourrait apparaître.
Dans ce cas précis, le processus de formation des barrières de potentiel n'est pas connu et il
s'agit là d'une des limitations majeures de cette technique. La nature aléatoire de l’apparition
des barrières est liée à plusieurs facteurs. Tout d’abord, la dose d’électrons utilisée pour la
lithographie n’est pas toujours reproductible. De plus, les attaques chimiques utilisées pour
retirer le silicium sont source d’incertitudes critiques à l’échelle nanométrique. Enfin, les
résultats de la lithographie e-beam dépendent de la propension des résines à être '' insolées ''
de manière très localisée sans que les zones les plus proches ne changent de propriétés
chimiques.
Un composant similaire à celui de H. Ishikuro et T. Hiramoto a été créé par L. Zhuang et al. Un
canal fin (30 nm) est réalisé par e-beam et gravure sèche entre un drain et une source
[Zhuang98] . Sa largeur n’est pas homogène et sa largeur varie, à cause des imprécisions
de la technique de lithographie e-beam elle-même.
De plus, un oxyde thermique est créé, avec une épaisseur de 10 nm, ce qui entraîne des
contraintes dans le silicium du canal. Ceci augmente encore les fluctuations de sa largeur, et
des constrictions apparaissent. Des porteurs amenés à transiter entre le drain et la source
rencontreront finalement plusieurs ''îlots'' de 10 nm de diamètre séparés par des constrictions
très fines, qui sont autant de barrières de potentiel (Figure 26a).
33
Cette configuration est favorable au blocage de Coulomb, et les dimensions plus faibles que
dans le SET de Ishikuro et al. permettent son observation à température ambiante (Figure
26b).
(a)
(b)
Figure 26 : (a) Représentation schématique d’un SET réalisé par constriction e-beam/RIE d'un
fil quantique sur SOI. (b) Courbes ID(VG) et G(VG) mesurées sur ce composant à température
ambiante (b) [Zhuang98].
Il n'en reste pas moins que les dimensions des îlots et des barrières de potentiel ne sont pas
contrôlables, et qu’elles ont même un aspect plutôt aléatoire. Cette technique est intéressante
si un grand nombre de dispositifs sont réalisés, pour discerner l'effet des différentes
configurations sur les caractéristiques électriques. La position des constrictions doit tout de
même pouvoir être contrôlée, ou tout au moins caractérisée avec précision, afin de pouvoir
déterminer l’effet des paramètres géométriques sur les caractéristiques électriques.
En ce qui concerne les mémoires à un électron (SEM pour Single electron memories), des
conclusions similaires peuvent être tirées. Pour ce type de dispositif, il est en effet nécessaire
de créer un îlot à la fois proche mais aussi isolé du canal d'un transistor, ce qui augmente
souvent la complexité des procédés. Par exemple, L. J. Guo et al. ont proposé en 1997 une
mémoire à un électron fonctionnant à température ambiante [Guo97] , élaborée sur SOI par
e-beam et gravure sèche (RIE, Reactive Ion Etching), dont on peut voir une représentation
schématique sur la Figure 27a. L'îlot, de forme carrée, a après lithographie des dimensions
trop élevées et elles sont réduites par la création d'un oxyde thermique. Là encore, il s'agit
d'un procédé difficile à contrôler, d'autant que les auteurs comptent sur cette étape pour créer
l'oxyde tunnel entre le canal et l'îlot, qui n'est pas présent jusque là.
Leur mémoire montre pourtant des effets monoélectroniques discernables à température
ambiante, comme le montre la Figure 27b, où la tension de seuil du transistor augmente par
palier à mesure qu'on augmente la tension des pulses d'écriture sur la grille. Chaque palier est
le signe que l'îlot contient un électron supplémentaire, dont la présence influe de façon
macroscopique sur le courant transitant dans le canal. Une technique un peu différente (dite
de grille auto-alignée) a été proposée par A. Nakajima et al. [Nakajima97] , avec une
technique également basée sur l'e-beam et la gravure sèche (Figure 28a).
34
(a)
(b)
Figure 27 : Schéma en vue de dessus et en coupe du composant mémoire (a). Le graphe
représentant la tension de seuil du composant en fonction de la polarisation du pulse d'écriture
appliqué à la grille (b) montre une quantification de la tension de seuil, directement liée au
piégeage d'un faible nombre de charges dans l'îlot de polysilicium [Guo97].
Là encore, la taille de l'îlot n'est pas suffisamment faible pour observer du blocage de Coulomb
à température ambiante, mais cette fois elle est réduite par une gravure humide. Des effets
mono-électroniques sont alors observés à température ambiante, comme en attestent les
brusques discontinuités sur le courant de drain que l’on peut voir sur la Figure 28b.
Toutefois, l'hystérésis observée sur le courant de drain est de faible amplitude, ce qui signifie
que le décalage de la tension de seuil est trop faible pour faire de ce composant une mémoire
utilisable. De plus, le procédé de réduction par gravure humide pose les mêmes problèmes de
contrôle et de reproductibilité que l'oxydation décrite par L. J. Guo et al.
(a)
(b)
Figure 28 : Image MEB du composant (a) et courbe représentant le courant de drain mesuré à
température ambiante en fonction du potentiel appliqué à la grille (b) pour une mémoire à
nanogrille flottante auto-alignée [Nakajima97].
35
Face aux limitations dont souffre la lithographie, même par faisceau d’électrons (e-beam), les
avancées en matière de structuration de la matière à l’échelle nanométrique sont d’un grand
intérêt pour la création de composants monoélectroniques.
On peut citer par exemple la nano-oxydation AFM, utilisée pour la première fois par Matsumoto
et al. pour créer des îlots conducteurs en oxydant un film de titane (Figure 29)
[Matsumoto96]. Le principe de cette technique est de placer un échantillon composé
d’une couche de titane déposé sur un isolant dans un milieu ayant un taux d’humidité assez
élevé (Figure 29b)). Un ménisque aqueux est créé en approchant la pointe AFM du matériau à
oxyder, et un apport d’énergie est effectué en polarisant la pointe, permettant ainsi à l’eau de
se séparer de ses atomes d’oxygène pour les céder au métal.
(a)
(b)
Figure 29 : (a) Image AFM de la zone active du SET métallique créé par une technique de
nano-oxydation par AFM, qui consiste à oxyder localement le métal pour créer des barrières de
potentiel et former un puits (b) [Matsumoto96].
Ceci à pour conséquence la formation locale d’un oxyde, dont le comportement est souvent
bien moins conducteur que le métal. Ainsi, des barrières de potentiel peuvent être créées, et
en entourant une zone de faibles dimensions de ces barrières, on obtient un îlot (Figure 29a).
On fait alors en sorte qu’il sépare deux électrodes conductrices, définies elles aussi en oxydant
les zones qui doivent être isolantes.
Des phénomènes monoélectroniques peuvent alors être observés en faisant passer du courant
entre les deux électrodes, si l’îlot à des dimensions adéquates, comme le montre la Figure 30,
où des paliers de courant apparaissent à température ambiante.
Ce travail utilise par ailleurs la particularité qu’ont les techniques de lithographie basse
résolution de pouvoir observer la topographie réalisée avec le même instrument, l’AFM en
l’occurrence, ce qui permet un contrôle in-situ des opérations réalisées. Par contre, l’oxydation
étant irréversible, il n’est pas possible de changer librement la morphologie des structures
après l’avoir observée.
Il faut également ajouter les importantes imprécisions liées aux images AFM, dont les
informations quantitatives quant aux dimensions exactes des objets observées se heurtent aux
problèmes de convolution pointe-objet.
36
Figure 30 : Courbes IDS(VDS) et
G(VDS) à température ambiante
pour le SET métallique décrit
Figure 28b [Matsumoto96].
Par exemple, si le diamètre de la pointe est du même ordre de grandeur que l’îlot montré par
la Figure 29a, sa taille apparente sur les images ne peut être considérée comme une mesure
fiable ; ceci pourrait par conséquent être une explication du fait qu’un îlot de taille si
importante (25 nm) permette l’observation du blocage de Coulomb à température ambiante.
Un exemple de mémoire à un électron a également été montré en utilisant cette technique
[Matsumoto00]. Ce travail montre des résultats électriques interprétés comme le
chargement d'un îlot à température ambiante, mais les caractéristiques, très bruitées restent
difficiles à interpréter.
II.2.3. Composants utilisant des îlots auto-organisés
L'auto-organisation consiste à favoriser la croissance d’îlots à des endroits bien déterminés,
c'est à dire là où l'on désire créer la zone active. Les principes physiques mis en œuvre
présentent des analogies avec ceux qui ont été découverts dans le domaine de l’épitaxie en ce
qui concerne les sites préférentiels de formation des couches. Par exemple, si des marches
sont présentes à la surface d’un substrat, on sait que c’est à leur proximité que les couches
épitaxiées commencent à se former. Ces phénomènes trouvent leur origine dans les
différences d’énergies de surface que rencontrent des molécules libres au contact du substrat.
De tels phénomènes ont récemment été montrés dans le cas de la croissance d’îlots de silicium
à partir de silane gazeux, suivant le processus décrit dans le paragraphe I.2.3 [Baron02] .
Cette étude porte sur un substrat de silicium, sur lequel un oxyde thermique a été créé. En
provoquant des dislocations dans le substrat de façon mécanique, l’énergie de surface de
l’oxyde est localement perturbée, ce qui a pour effet de favoriser la fixation d’atomes de
silicium, à la verticale des champs de contraintes. Ces atomes sont les précurseurs d’îlots de
silicium plus gros, et dont la disposition suit la topographie des contraintes créées dans le
substrat. Cette technique originale présente néanmoins le désavantage de reposer sur la
formation de dislocations, dont la maîtrise peut s’avérer difficile. En effet, la position de ces
dislocations dépend de nombreux facteurs dont tous ne sont pas contrôlables de manière
reproductible.
37
Il est également possible de modifier localement l’énergie de surface d’une couche d’isolant
avec des outils de nano-structuration comme le FIB (Focus Ion Beam) [Kammler03] ou de
caractérisation structurale comme l’e-beam (faisceau d’électrons) [Mazen04] . L'avantage
de ces techniques par rapport aux dislocations se trouve dans le contrôle de la position des
sites préférentiels de nucléation. Ces techniques sont certainement promises à un bel avenir
car les outils qu'elles utilisent ont maintenant des définitions suffisantes pour réaliser des
points espacés de quelques nanomètres, ce qui conférera aux jonctions dot à dot des
dimensions suffisamment petites pour permettre le transport de porteurs par effet tunnel. On
peut remarquer que les réalisations sont au stade du matériau, c'est à dire que peu de
composants ont encore été créés et caractérisés avec succès. Ceci peut s'expliquer par les
difficultés rencontrées pour, une fois les îlots élaborés, reprendre le procédé de création des
électrodes, qui doivent être parfaitement alignées avec les motifs d'auto-organisation.
II.3. Positionnement de la thèse : organisation post-process des
îlots
Parmi les composants monoélectroniques rencontrés dans la littérature, un certain sont
élaborés par des procédés peu compatibles avec ceux qui sont utilisés dans la filière MOS.
Dans le chapitre III, nous proposons une technique qui pourrait déboucher sur l’élaboration de
composants dont la zone active contient quelques îlots de silicium, et ce à partir d’îlots déposés
par LPCVD sur des substrats oxydés, c’est à dire selon une technique standard habituellement
dévolue à la création de mémoires FLASH de dimensions décananométriques.
Par ailleurs, les différentes techniques présentées dans cette partie ont souvent le défaut
d’avoir une architecture figée une fois leur élaboration terminée. Or il est probable qu'une
partie importante des recherches à mener sur les dispositifs monoélectroniques se situe au
niveau de leur architecture. Des études systématiques sur les configurations et les géométries
à donner aux composants s'avèrent longues, et ce d'autant plus que le contrôle des différents
paramètres n'est pas toujours assuré.
Par rapport à cette problématique, nous proposons dans le chapitre III un certain nombre de
caractérisations électriques réalisées sur des composants au sein desquels l'organisation des
îlots a été faite a posteriori à l’aide de la pointe d’un microscope AFM. Ce terme ''a posteriori'',
signifie qu’après avoir élaboré des électrodes métalliques et des îlots de manière désordonnée,
cette technique propose de déplacer les nanocristaux individuellement ou par groupes entre les
électrodes, où ils pourront jouer leur rôle dans le fonctionnement des composants.
Outre l’organisation des îlots, cette approche a l’avantage de produire des dispositifs qui
restent modifiables à volonté, c'est à dire que l'on peut changer leur configuration autant de
fois qu'on le désire. Ainsi, après avoir réuni quelques informations au cours de leur
caractérisation électrique, il est possible de modifier la position des îlots, par exemple, et de
mesurer à nouveau le comportement électrique qui en résulte.
38
La caractérisation de ces composants a permis d’observer le blocage de Coulomb à
température ambiante, ce qui est relativement rare dans la littérature. De plus, de nombreux
travaux proposent de déterminer les paramètres à respecter pour faire cette observation en se
basant sur des modèles trop simples pour tenir compte de la géométrie particulière de nos
composants. Nous avons plutôt cherché à déterminer ces paramètres au moyen de modèles
analytiques, que l’on a comparés avec les résultats obtenus par la méthode des éléments finis,
particulièrement en ce qui concerne les aspects capacitifs des composants.
39
40
Chapitre II. Caractérisation en courant de
capacités MOS contenant des monoplans de
nanocristaux de silicium
Ce chapitre présente une technique de mesure et de modélisation permettant de déterminer le
lieu du stockage des charges dans les mémoires FLASH à nanocristaux. Cette détermination
est d’une grande importance, car dans la littérature on trouve bon nombre de travaux
montrant un chargement plus ou moins important, mais ces travaux ne précisent pas si ce
chargement a lieu dans les îlots ou dans des défauts présents dans les isolants ou aux
interfaces Si/SiO2. Ce dernier point est pourtant extrêmement important, car il est
indispensable de s’assurer que les charges responsables des fenêtres mémoires observées sur
les composants étudiés sont bien stockées dans les nanocristaux, et que l’on profite donc
pleinement de leur apport, notamment en ce qui concerne la fiabilité.
Expérimentalement, en caractérisant un nombre important de lots d’échantillons issus de
plusieurs techniques d’élaboration de nanocristaux, nous avons pu mettre en évidence la
rétention de charges au sein de capacités MOS contenant des îlots de silicium.
Dans un premier temps, les travaux de caractérisation ont porté sur des composants élaborés
par démixtion de SiOX (N. Buffet, CEA-LETI) et par dépôt LPCVD de silicium sur une couche
d'oxyde (T. Baron, LTM-CNRS). Ces dispositifs ont clairement montré leur capacité à retenir
des charges et donc à permettre un effet mémoire ([Beaumont03a, Beaumont03b] ).
En revanche, les isolants entourant les îlots se sont montrés systématiquement trop fuyants
pour que les caractéristiques propres aux nanocristaux puissent être mises en évidence : les
courants de fuite ne permettaient pas de discerner les courants de chargement des îlots.
Ensuite, nous nous sommes intéressés à la technique consistant à implanter du silicium dans
une couche d'oxyde pour former après recuit une couche de nanocristaux. Comme nous le
verrons dans la première partie de ce chapitre, nous avons mis en évidence une rétention de
charges assez importante dans ces échantillons, avec une forte dépendance par rapport aux
paramètres d’implantation. Sous certaines conditions, cette technique a permis aux acteurs du
projet européen NEON pouvant être programmées à basse tension et présentant des
caractéristiques en termes de rétention des données et d’endurance aux cycles
d’écriture/effacement proches de celles des mémoires Flash [Dimitrakis 04] . Les courants
de fuite au sein de ces structures se sont en outre avérés suffisamment bas pour que le
chargement de nanocristaux puisse être caractérisé grâce à la technique des courants
transitoires [Beaumont04] .
Enfin, la technique de démixtion de SiOX a récemment pu être développée par N. Buffet et
P. Mur (CEA-LETI) pour que des capacités MOS fabriquées par ce procédé montrent à leur tour
un chargement marqué tout en ayant des courants de fuite relativement bas [Leroy05] , ce
qui a permis de mettre en évidence les courants de chargement des îlots.
41
Sur ces échantillons présentant de faibles courants de fuite, une technique de caractérisation
du chargement a été développée à partir des mesures de courants transitoires qui
apparaissent lorsqu’on polarise la grille de contrôle avec des rampes de tension rapides. Cette
technique propose de déterminer le lieu de stockage des charges dans ces dispositifs
mémoires en extrayant la capacité liant le lieu de stockage à la grille.
Pour ce faire, il est nécessaire de disposer d’un modèle permettant l’estimation de la capacité
existant entre un plan d’îlots et une grille de contrôle. Deux approches sont proposées, la
première s’appuyant sur la méthode des éléments finis. L’autre utilise des calculs analytiques
après avoir fait quelques hypothèses, et elle s’avère plus légère en temps de calcul. Les
résultats issus de ces calculs sont néanmoins confrontés à ceux obtenus par la méthode des
éléments finis afin de déterminer les conditions dans lesquelles ils sont comparables.
A partir des valeurs de capacité îlots/grille extraites des mesures dynamiques de courant
présentées dans la deuxième partie de ce chapitre, il est alors possible de déterminer quels
paramètres géométriques peuvent aboutir à de telles valeurs. Ceci permet en particulier de
vérifier que ces paramètres correspondent à ceux des îlots, et ainsi de relier le chargement aux
îlots eux-mêmes et non à des pièges situés dans leur voisinage, comme le montre la troisième
partie.
Dans la quatrième partie, nous verrons les conséquences du chargement des îlots sur les
caractéristiques C-V des capacités-MOS étudiées. Enfin, dans une cinquième partie, les
résultats expérimentaux seront confrontés aux simulations de courant issues d'un modèle
développé par C. Busseret (LPM-INSA/IMEP-ENSERG). Nous discuterons alors des avantages
et des inconvénients d'une telle approche par rapport aux calculs développés dans la troisième
partie.
I. Description des échantillons caractérisés
I.1. Ilots obtenus par le recuit d’une couche d’oxyde contenant
des atomes de silicium implantés
I.1.a. Contexte et généralités
Les échantillons élaborés par implantation et étudiés au cours de ce chapitre sont issus d’un
projet appelé NEON. Il s’agit d’un programme de recherche européen qui a regroupé entre
2001 et 2004 plusieurs laboratoires ainsi que deux industriels, issus de cinq pays (France,
Allemagne, Grèce, Italie, Danemark). Ce projet avait pour thème l’élaboration et la
caractérisation de mémoires non-volatiles de type FLASH dont la grille flottante est un plan de
nanocristaux de silicium.
Pour former ce plan, plusieurs solutions technologiques ont été envisagées, et celle qui a
finalement été retenue est l’implantation à très basse énergie d’atomes de silicium dans une
couche de SiO2. Ceci permet d'obtenir une couche d'atomes de silicium faiblement dispersés
dans la matrice de SiO2 et, après recuit, les atomes de silicium forment des nanocristaux dans
un plan parallèle à l'interface Si/SiO2 [Normand98] .
42
L'utilisation d'une énergie d’implantation très faible permet de contrôler la position de la
couche d’atomes de silicium dans la couche d’isolant. Comme l'ont montré les analyses TEM de
M. Carrada, ceci permet de placer les atomes de silicium à quelques nanomètres de l’interface
séparant le substrat de la couche de SiO2 dans laquelle l’implantation est réalisée
[Carrada03]. La distance entre la surface de l’isolant et la grille flottante est moins critique.
Si elle est trop élevée, une simple gravure permet d’en diminuer la valeur. Si, au contraire, elle
est trop faible, un dépôt de SiO2 (par LPCVD par exemple) peut même l’augmenter.
Outre l’énergie d’implantation, d'autres paramètres relatifs à l'implantation ont des
conséquences structurales sur les populations de nanocristaux obtenues [Carrada03] . On
peut aussi faire varier la dose implantée. C’est la densité d’atomes de silicium présents avant
le recuit qui est directement liée à ce paramètre, dont on peut s’attendre à ce qu’il modifie la
densité, la taille et/ou la forme des îlots.
Enfin, le recuit est une étape cruciale de l’élaboration des dispositifs mémoires, puisque c’est
lui qui assure la formation des structures nanocristallines constituant la grille flottante. Ces
trois paramètres sont donc susceptibles d’avoir un impact sur les caractéristiques des
mémoires élaborées par implantation. Dans le cadre du projet NEON, la caractérisation
électrique de capacités MOS élaborées avec des jeux de paramètres d’implantation différents
était un sujet d’étude intéressant, dans le but de déterminer l’influence de la dose implantée,
de l’énergie d’implantation et du type de recuit sur les propriétés intrinsèques des dispositifs
mémoires comme la rétention.
I.1.b. Description des échantillons
Les capacités MOS caractérisées par la suite ont été créées en faisant croître une couche
d’oxyde thermique sur un substrat de type P. L’oxydation a été effectuée à ST-Microelectronics
(Agrate Brianza, Italie). Dans cette couche d’oxyde, des atomes de silicium ont été incorporés
par implantation ionique à très basse énergie (1 keV), avec une dose de 2.1016 cm-2. Ces
implantations ont été assurées par Axcelis (un partenaire industriel du projet).
Les structures ainsi obtenues ont ensuite été recuites sous deux atmosphères différentes : la
première, appelée ''inerte'' et notée ''A1'', est composée de diazote ; la seconde appelée
''oxydante'' et notée ''A3'', est composée de dioxygène dilué à 1.5 % en volume dans du
diazote. Ces deux types de recuits ont été réalisés à 950°C, pendant 30 minutes dans un four
classique, avec une température d’entrée dans le four de 400°C et un temps de stabilisation
de 5 minutes avant la montée en température [Normand03] .
Un troisième type de recuit, noté ''A31'' a été réalisé dans une atmosphère identique à celle
utilisée pour le recuit A3, mais avec une température d’entrée dans le four de 600°C et un
temps de stabilisation de 30 minutes. Le Tableau 1 synthétise les caractéristiques de ces trois
recuits, qui ont été réalisés à l’IMEL (Athènes, Grèce).
Le Tableau 2 présente les différents échantillons, qui se différencient par leur taille, l'énergie et
la dose utilisées pour implanter le silicium, et enfin le type de recuit mis en œuvre pour former
les nanocristaux et éventuellement guérir la matrice isolante des défauts dus à l'implantation.
43
Recuit
Température
du recuit
(°C)
Durée du
recuit
(min.)
Ambiance
Température
d'entrée dans
le four (°C)
Temps de
stabilisation
(min.)
A1
950
30
N2
400
5
A3
950
30
O2/N2
400
5
A31
950
30
O2/N2
600
30
Tableau 1 : Récapitulatif des paramètres concernant les trois recuits différents appliqués aux
couches d’oxyde implantées. Il est à noter que le recuit A31 constitue un apport thermique
supérieur aux deux autres, de par son temps de stabilisation et sa température d'entrée dans
le four, tous deux supérieurs à ceux du recuit A3.
Sujet
Epaisseur
Energie
d’implantation
Dose
implantée
Type de
recuit
Identifiant
(Référence)
7 nm
X
X
A1
ST7R01
Energie
d’implantation
7 nm
7 nm
1 keV
2 keV
1×1016 cm-2
1×1016 cm-2
A1
A1
X721
X7813
Dose
implantée
7 nm
7 nm
7 nm
1 keV
1 keV
1 keV
5×1015 cm-2
1×1016 cm-2
2×1016 cm-2
A1
A1
A1
X711
X721
X731
Type de recuit
7 nm
7 nm
7 nm
1 keV
1 keV
1 keV
2×1016 cm-2
2×1016 cm-2
2×1016 cm-2
A1
A3
A31
X731
X732
AX73527
Dose
implantée
7+15 nm
7+15 nm
7+15 nm
1 keV
1 keV
1 keV
5×1015 cm-2
1×1016 cm-2
2×1016 cm-2
A1
A1
A1
X713
X723
X733
Tableau 2 : Descriptif des échantillons selon les paramètres d’implantation utilisés
pour la formation de la grille flottante nanocristalline. Les échantillons sont regroupés
de telle sorte qu’en comparant leurs caractéristiques électriques, il est possible de
déterminer respectivement l’influence de l’énergie d’implantation, de la dose
implantée et du type de recuit.
44
I.1.c. Résultats des caractérisations
i. Influence de l’énergie d’implantation
Pour les échantillons X721 et X7813, une dose de 1×1016 cm-2 d’atomes de silicium a été
implantée avec respectivement une énergie de 1 et 2 keV, dans un oxyde thermique épais de
7 nm. La Figure 31 et la Figure 32 montrent l’évolution de la capacité de ces deux échantillons
avec la tension appliquée à leur grille.
X721 : E=1keV, D=10
600
500
16
-2
cm
Figure 31 : Capacité de la
-3V / +3V
+3V / -3V
structure en fonction de la
tension
grille,
400
appliquée
pour
une
à
la
énergie
C (pF)
d’implantation de 1 keV.
300
Les
mesures
réalisées
200
de
l’accumulation
l’inversion
100
ont
été
alternativement
puis
vers
dans
le
sens inverse afin de mettre
0
en évidence l’hystérésis de
-3
-2
-1
0
1
2
la courbe.
3
VG (V)
X7813 : E=2keV, D=10
600
16
cm
-3V / +3V
+3V / -3V
500
Figure 32 : Capacité de la
400
C (pF)
-2
structure en fonction de la
300
tension
grille,
200
appliquée
pour
une
à
la
énergie
d’implantation de 2 keV.
100
0
-3
-2
-1
0
1
2
3
VG (V)
Les mesures ont été effectuées de façon dynamique, avec une fréquence de 10 kHz, dans
l’obscurité, avec des rampes de tension allant alternativement vers les tensions négatives et
positives, afin d’observer les hystérésis dus au chargement de la structure. On peut tout
d’abord observer que le chargement se fait par le substrat, quelle que soit l’énergie
d’implantation. En effet lorsqu’on applique une tension négative à la grille, la courbe est
décalée vers les VG négatifs. Ceci traduit la diminution de la tension de bandes plates, ce que
l’on interprète comme un chargement en trous, qui sont bien les porteurs majoritaires de la
zone d’accumulation alors formée à proximité de la surface du substrat. En inversion, la courbe
est décalée vers les VG positifs, ce qui est le signe d’un chargement en électrons, qui
proviennent de la zone d’inversion du substrat et non de la grille.
45
Si on observe le décalage entre les courbes, lorsque l’énergie d’implantation vaut 2 keV, la
tension de bandes plates subit un décalage plus grand que pour une énergie de 1 keV. Ce
comportement indique que le chargement est plus important dans le premier cas. Deux
interprétations peuvent être proposées. Premièrement, lorsqu’on utilise une énergie de 2 keV,
on génère un plus grand nombre de défauts dans le volume de l’isolant. En effet, les ions
implantés étant plus énergétiques, les dommages occasionnés au matériau sont plus
importants. Ceci aboutit à un nombre important de défauts électriquement actifs, qui peuvent
être responsables du chargement observé.
D’autre part, on peut attribuer l’augmentation de la charge stockée avec l’énergie
d’implantation à la position des îlots formés après recuit. On peut considérer que plus le
silicium est implanté avec une énergie élevée, plus RP (la distance parcourue par les atomes
dans le volume d’oxyde) est grand. Les nanocristaux de silicium sont alors plus proches du
substrat : d’après les analyses TEM, en passant d’une énergie de 1 keV à 2 keV, on peut
estimer que la distance entre les îlots et l’interface Si/SiO2 diminue de 1,6 nm [Carrada03]
et la probabilité pour que les îlots se chargent est alors plus élevée. De plus, la diminution de la
distance entre les îlots et l’interface Si/SiO2 fait en sorte que la distance entre les îlots et la
grille de contrôle augmente, ce qui contribue à diminuer les éventuelles fuites de porteurs vers
la grille et peut donc expliquer que les dispositifs retiennent plus de charges.
La comparaison de la Figure 31 et de la Figure 32 montre que les échantillons implantés à 2
keV ont une courbe C(VG) déformée en déplétion alors qu’à 1 keV la déformation est faible. La
dérivée de la capacité en fonction de la tension de grille montre plus clairement cet effet
(Figure 33).
0
dC/dVG (pF/V)
-250
X721
X7813
ST7R01(Réf)
-500
-750
Figure 33 : Dérivée de
la capacité par rapport
à la tension de grille
pour des échantillons
implantés à 1 et 2 keV
-1000
(avec
une
dose
de
1.1016 cm-2) et pour
-1250
une
référence
non
implantée.
-1500
-3
-2
-1
0
1
2
3
VG (V)
On peut voir que pour la référence l’évolution de cette dérivée avec la tension de grille est
monotone entre -3 V et -0.8 V et entre -0.8 V et +3 V. Par contre l’implantation d’atomes de
silicium fait apparaître une rupture dans la monotonie des variations de la capacité avec la
tension de grille : des plateaux apparaissent, d’autant plus marqués que l’énergie
d’implantation est importante. De surcroît, les valeurs absolues de la dérivée sont plus faibles à
mesure qu’on implante avec une énergie élevée, ce qui correspond à la diminution de la pente
de la C(VG) en régime de déplétion.
46
L’évolution de la capacité de la structure en déplétion est liée à l’épaisseur de la zone de
charge d’espace créée dans le substrat. Le résultat observé correspond donc à une
modification de la charge de déplétion, qui peut être due à l’influence de charges localisées non
loin de l’interface Si/SiO2. Le stockage de charge est donc à l’origine des déformations des
courbes C(V). Toutefois, ces résultats expérimentaux ne permettent pas de trancher quant à la
localisation précise du chargement : il peut s’agir des puits de potentiel formés par les
nanocristaux, de l’interface de ces derniers avec la matrice isolante, de l’interface entre le
substrat et le SiO2 ou de pièges se trouvant dans le volume de l’isolant. Cette dernière
hypothèse se trouve d’ailleurs renforcée par le mode d’élaboration choisi, l’implantation
ionique, qui est connue pour générer de nombreux défauts pouvant demeurer électriquement
actifs après traitement thermique. Des atomes de silicium excédentaires, c’est-à-dire n’ayant
pas été mis à profit pour former les nanocristaux, peuvent en outre se trouver dans l’oxyde
tunnel et servir de lieu de chargement pour les porteurs injectés depuis le substrat.
ii. Influence de la dose implantée
L’étude de ce paramètre est menée grâce aux échantillons notés X711, X721 et X731,
implantés respectivement avec des doses de 5.1015, 1.1016 et 2.1016 cm-2. Les échantillons
identifiés par les références X713, X723 et X733 ont été implantés avec les doses respectives
citées précédemment mais ont en plus un oxyde de grille déposé épais de 15 nm. Si on ajoute
la référence (ST7R01) non-implantée déjà évoquée dans la partie précédente, on dispose d’un
lot d’échantillons complet pour chaque épaisseur de grille (7 et 22 nm) et ce pour 3 doses,
tous les autres paramètres, qu’ils soient d’implantation ou de recuit, étant par ailleurs
comparables.
La Figure 34 montre l’évolution de la capacité des structures implantées avec les 3 doses
(5.1015, 1.1016 et 2.1016 cm-2, respectivement) et dont l’oxyde de grille n’a pas été rendu plus
épais par le dépôt de SiO2.
En comparant ces graphes, on constate tout d’abord qu’il n’y a aucun chargement pour la plus
petite des trois doses utilisées. Lorsque l’implantation a été effectuée avec une dose de
1.1016 cm-2, on observe un chargement (depuis le substrat, comme l’atteste le sens antihoraire
de l’hystérésis), qui est plus important que pour une dose de 2.1016 cm-2. Ce phénomène peut
être interprété à la lumière des analyses structurales. Tout d’abord, les analyses TEM
[Carrada03] montrent que pour une dose de 5.1015 cm-2, il n’y a pas formation de
nanocristaux, ce qui peut expliquer l’absence de chargement.
Pour les deux autres doses, des îlots de silicium sont présents. Lorsqu’on augmente la dose au
delà de 5.1015 cm-2, les analyses TEM donnent les résultats suivants [Carrada03] :
•
•
•
•
Le diamètre moyen des îlots ne varie pas de façon significative ;
On peut en revanche s’attendre à ce que la densité de nanocristaux augmente, même
si nous ne disposons pas de données expérimentales mettant ce phénomène en
évidence ;
L’épaisseur de l’oxyde de grille diminue. En particulier, lorsqu’on passe de 1.1016 à
2.1016 cm-2, elle passe de 2,2 à 1,9 nm ;
Parallèlement, l’épaisseur de l’oxyde tunnel augmente.
47
700
16
X711 : E=1keV, D=0,5.10
600
cm
-2
X721 : E=1keV, D=10
600
-3V / +3V
+3V / -3V
16
cm
-2
-3V / +3V
+3V / -3V
500
500
400
C (pF)
C (pF)
400
300
200
200
100
100
0
0
-3
-2
-1
0
1
2
3
-3
VG (V)
-2
-1
0
1
2
3
VG (V)
X731 : E=1keV, D=2.10
500
16
cm
-2
-3V / +3V
+3V / -3V
400
Figure 34 : Capacité de la structure en
300
C (pF)
300
fonction de la tension appliquée à la grille,
200
pour des échantillons implantés avec une
dose de 5.1015 cm-2, 1.1016 cm-2 et 2.1016 cm-2.
100
0
-3
-2
-1
0
1
2
3
VG (V)
Comme la taille des îlots n’augmente pas, on ne peut relier l’augmentation de la charge
stockée à l’augmentation du nombre de porteurs pouvant être stockés dans chaque îlot, à un
champ électrique donné. L’augmentation de la densité des nanocristaux que l’on peut prévoir
lorsqu’on augmente la dose implantée devrait aboutir à l’augmentation de la fenêtre mémoire,
contrairement à ce que l’on observe. En effet, un plus grand nombre de nanocristaux par unité
de surface offre un plus grand nombre de lieux de stockage pour les électrons injectés, ce qui
permet une charge totale retenue plus importante. Il faut donc chercher ailleurs l’origine de la
diminution du décalage des courbes C(VG) lorsqu’on accroît la dose implantée. L’augmentation
de l’épaisseur de l’oxyde tunnel et la diminution de celle de l’oxyde de grille peuvent fournir
une explication à ce phénomène. En étant plus proches de la grille, il est plus probable que les
îlots échangent avec elle des porteurs par effet tunnel, ce qui limite leur capacité à retenir des
porteurs.
Cette interprétation peut être confirmée par les mesures effectuées sur les échantillons où l’on
a déposé une couche d’oxyde après implantation et recuit (Figure 35). On observe cette fois un
chargement de plus en plus important quand on augmente la dose. Il existe donc bel et bien
une corrélation entre l’épaisseur de l’oxyde de grille et l’importance du chargement.
Pour une dose de 5.1015 cm-2, un faible chargement est mesuré alors que, comme on l’a déjà
vu, les nanocristaux ne sont pas formés. L’origine de ce chargement provient certainement de
l’interface entre l’oxyde de grille initial et la couche déposée. En effet, ce procédé est réalisé à
une température modérée (700°C), ce qui ne permet pas la formation d’une interface de
bonne qualité.
48
15
X713 : E=1keV, D=5.10
200
cm
-2
16
-8V / +8V
+8V / -8V
100
50
-2
-8V / +8V
+8V / -8V
100
50
0
0
-8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1
0
1
2
3
4
5
6
7
8
-8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1
VG (V)
0
1
2
3
4
5
6
7
8
VG (V)
16
X733 : E=1keV, D=2.10
200
cm
-2
Figure 35 : Capacité de la structure en
150
C (pF)
cm
150
C (pF)
C (pF)
150
fonction de la tension appliquée à la grille,
pour des échantillons implantés avec une
100
50
X723 : E=1keV, D=1.10
200
dose de 5.1015 cm-2, 1.1016 cm-2 et 2.1016 cm-2
et dont l’oxyde de grille a été rendu plus
-8V / +8V
+8V / -8V
épais par le dépôt de 15 nm de SiO2.
0
-8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1
0
1
2
3
4
5
6
7
8
VG (V)
Pour les deux autres doses étudiées, de larges fenêtres mémoires sont observées (5V pour
une dose de 1.1016 cm-2 et plus de 7V pour une dose de 2.1016 cm-2). Ceci montre que l’ajout
d’une épaisse couche d’oxyde déposée, en diminuant fortement la transparence de l’oxyde de
grille, permet une meilleure rétention des porteurs injectés depuis le substrat. En revanche,
l’oxyde déposé ne doit pas modifier la distance séparant les îlots du substrat. En conséquence,
cette distance est plus importante pour les échantillons X733 (dose de 2.1016 cm-2) que pour
les échantillons X723 (dose de 1.1016 cm-2). Les premiers montrent cependant des fenêtres
mémoires supérieures aux seconds, ce qui peut signifier deux choses :
1. Soit l’augmentation de cette épaisseur ne fait pas significativement diminuer la
transparence de la barrière tunnel. Pour expliquer ce cas de figure, on peut évoquer
l’augmentation du nombre d’atomes de silicium excédentaires (c’est-à-dire ne servant
pas à la formation des îlots) au sein de la barrière tunnel lorsqu’on augmente la dose
implantée. Ces atomes excédentaires sont susceptibles d’augmenter la transparence de
la couche d’isolant en offrant un nombre de relais de conduction plus important, dans le
cadre d’un transport tunnel assisté par pièges.
2. Soit la densité de nanocristaux plus importante compense la diminution de la
transparence de la barrière tunnel. Dans ce cas, il faut envisager qu’une majorité de
l’augmentation de la dose entre les échantillons X723 et X733 est utilisée pour la
formation de nanocristaux supplémentaires. Si la transparence de la barrière est alors
bel et bien rendue plus faible lorsqu’on augmente la dose, le plus grand nombre de
lieux de destination des porteurs issus du substrat peut permettre au courant injecté
de demeurer à peu près identique entre les deux types d’échantillons, à un champ
électrique donné.
49
La présence de défauts dans l’oxyde tunnel, à proximité de son interface avec le substrat, peut
être mise en évidence par la forme des courbes C(VG) en régime de déplétion. La Figure 36
montre la capacité des échantillons notés X711, X721 et X731, pour lesquels on n’a pas ajouté
d’oxyde de grille supplémentaire, et des échantillons X713, X723 et X733, ayant reçu une
couche de 15 nm d’oxyde déposé pour compléter leur oxyde de contrôle, en fonction de la
tension appliquée à la grille.
(a)
(b)
15
600
X711 (D=5.10
16
X721 (D=1.10
16
X731 (D=2.10
500
200
-2
cm )
-2
cm )
C (pF)
300
X713 (D=5.10
15
cm )
X723 (D=1.10
16
cm )
-2
X733 (D=2.10
16
cm )
-2
-2
D
150
D
400
C (pF)
-2
cm )
100
200
50
D
100
0
0
-3
-2
-1
0
VG (V)
1
2
3
-8
-6
-4
-2
0
2
4
6
8
VG (V)
Figure 36 : Capacité de la structure en fonction de la tension appliquée à la grille, pour une
énergie d’implantation de 1 keV et trois doses différentes, sans oxyde de grille
supplémentaire (a) ou avec un oxyde de grille rendu plus épais par le dépôt de 15 nm de SiO2
(b). Les mesures ont été effectuées du régime d’accumulation (VG<0) vers le régime
d’inversion (VG>0).
On peut constater lorsque la dose augmente, la capacité en régime d’accumulation diminue.
De plus, lorsqu’on augmente la dose implantée jusqu’à 2.1016 cm-2 (X731 et X733), le régime
de déplétion donne une courbe plus irrégulière que pour les doses inférieures, et dont la pente
est sensiblement plus faible.
L’abaissement de la capacité en régime d’accumulation avec l’augmentation de la dose peut
être relié au plus grand nombre d’atomes de silicium présents dans la matrice d’oxyde, qui font
augmenter la permittivité diélectrique globale de la structure. De surcroît, des études
structurales ont montré que plus la dose implantée est importante, plus l’épaisseur totale de la
structure est grande (phénomène de ''swelling'') [Carrada03, Normand04] , ce qui
aboutit là encore à la diminution de la valeur de la capacité en accumulation.
En ce qui concerne la forme de la partie correspondant au régime de déplétion, on peut
remarquer que plus la dose est importante, plus la déformation est importante. Pour mieux
apprécier ce phénomène, les dérivées des courbes C(VG) ont été tracées en fonction de la
tension de grille sur la Figure 37.
Pour les composants ne comportant pas d’oxyde de grille supplémentaire (Figure 37a), outre le
décalage de la tension de bandes plates, les courbes se différencient par le nombre de maxima
observés : on en compte un seul pour les échantillons implantés avec des doses de 5.1015 cm-2
(pour VG=-0,6 V) alors qu’on observe deux maxima (VG=-0,5 V et VG=0,2 V) pour les
échantillons implantés avec une dose de 2.1016 cm-2. La dose de 1.1016 cm-2 aboutit à un
comportement intermédiaire, puisque si on ne distingue qu’un seul maximum (pour
VG=-0,75 V), on note également une nette rupture dans la partie de la courbe correspondant à
la déplétion (pour des tensions de grille comprises entre -0,5 V et -0,3 V).
50
(b)
(a)
0
0
-100
-25
X711
(D=5.10
-300
15
dC/dVG (pF/V)
dC/dVG (pF/V)
-200
-2
cm )
X721
-400
(D=1.10
16
-2
cm )
X731
-500
(D=2.10
16
-50
X713
15
cm )
16
cm )
16
cm )
(D=5.10
-2
-75
X723
(D=1.10
-100
-2
X733
-2
cm )
-125
-600
(D=2.10
-2
-150
-700
-3
-2
-1
0
VG (V)
1
2
3
4
-8
-6
-4
-2
0
2
4
6
8
VG (V)
Figure 37 : Dérivée de la capacité par rapport à la tension de grille, en fonction de VG , pour
une énergie d’implantation de 1 keV et trois doses différentes, sans oxyde de grille
supplémentaire (a) ou avec un oxyde de grille rendu plus épais par le dépôt de 15 nm de SiO2
(b). Les mesures ont été effectuées du régime d’accumulation (VG<0) vers le régime
d’inversion (VG>0).
Pour les composants dont l’oxyde de grille a été rendu plus épais par le dépôt de 15 nm de
SiO2 (Figure 37b), on retrouve des courbes comportant un seul maximum pour les deux doses
les plus faibles (maximum observé respectivement avec des tensions de grille de -0,1 V et -2,2
V pour des doses de 5.1015 cm-2 et 1.1016 cm-2). Là encore, lorsqu’une dose de 2.1016 cm-2 a
été implantée, on observe deux maxima, l’un pour VG=-5 V et l’autre pour VG=-2,2 V. Les
courbes présentant un seul maximum sont typiques des structures MOS, et c’est d’ailleurs le
comportement qui est observé pour les références sans îlots (Figure 33). Elles attestent de
l’augmentation régulière de la charge d’espace créée dans le substrat lorsqu’on augmente la
polarisation de la grille.
L’apparition d’un deuxième maximum sur les dérivées de la capacité par rapport à la tension
de grille traduit la modulation de la charge d’espace créée dans le substrat par des charges
présentes dans l’isolant des structures MOS. Ces charges semblent être stockées dans les
pièges présents dans l’isolant. On peut penser que la faculté de ces pièges à stocker des
charges dépend de la polarisation appliquée à la grille et dans ce cas, lors d’un balayage en
tension, ils vont stocker préférentiellement des porteurs pour les points de polarisation
correspondant à leur plus grande probabilité d’accueillir des charges.
On constate que c’est avec les doses les plus importantes que l’on met en évidence ce
deuxième maximum dans les courbes dC/dVG=f(VG). L’augmentation de la dose implantée
correspond par conséquent à l’augmentation du nombre de ces pièges et/ou à leur plus grande
proximité par rapport au substrat. Dans ce dernier cas en effet, l’effet électrostatique des
charges qu’ils contiennent est plus important, ce qui renforce leur influence sur l’état de charge
du substrat.
Comme on l’a déjà évoqué précédemment, lorsqu’on augmente la dose de silicium implantée,
on peut s’attendre à ce que le nombre de défauts présents à proximité de l’interface
substrat/isolant augmente. Les études structurales montrent que lorsqu’on augmente la dose
de 5.1015 cm-2 à 1,5.1016 cm-2, la distance séparant la surface de l’isolant implanté et le centre
de la couche d’atomes de silicium implantés avant recuit varie peu [Carrada03] . Ceci
signifie que les atomes de silicium se trouvent à une distance identique de la surface, qu’ils
soient utilisés ou non pour former les nanocristaux. En revanche, le profil implanté s’élargit et
51
la densité d’atomes de silicium augmente à proximité du substrat. De plus, lorsque la dose
implantée augmente, le nombre d’atomes de silicium n’étant pas utilisés pour former les
nanocristaux lors du recuit augmente.
Ces deux phénomènes contribuent donc à augmenter le nombre d’atomes de silicium
excédentaires présents entre les îlots et le substrat. Ces atomes excédentaires ne sont pas
utilisés pour former les nanocristaux, et s’ils ne sont pas associés à des atomes d’oxygène, ils
ne sont pas incorporés à la matrice isolante. Ils sont par conséquent susceptibles d’agir comme
des centres électriquement actifs capables d’attirer des porteurs [Crupi03] , ce qui aboutit
aux effets décrits précédemment.
L’augmentation de la dose implantée, nécessaire pour augmenter la densité d’îlots, conduit
donc parallèlement à l’apparition d’atomes de silicium excédentaires pouvant piéger des
porteurs. Ils peuvent par ailleurs expliquer la conductivité élevée de la couche d’oxyde
séparant le substrat des îlots malgré son épaisseur relativement importante. On peut d’ailleurs
trouver dans la littérature des travaux où il est envisagé d’utiliser une barrière d’oxyde enrichie
en silicium pour augmenter la vitesse d’écriture et d’effacement des mémoires Flash
[Maiti92]. Le silicium excédentaire présent dans l’isolant tunnel des dispositifs étudiés ici
peut donc être à l’origine du fait que le chargement se fait par le substrat et non par la grille de
contrôle, alors que la couche séparant les îlots du substrat est plus épaisse que celle qui se
trouve entre les îlots et la grille de contrôle.
Le stockage de charges dans l’oxyde tunnel peut en revanche s’avérer gênant, puisqu’une
partie de la fenêtre mémoire risque d’être due à ces défauts. Pour y pallier, si l’élargissement
du profil d’implantation est intrinsèque à l’augmentation de la dose, l’influence du silicium
excédentaire peut quant à elle être limitée en faisant en sorte qu’une partie plus importante du
silicium excédentaire soit inclus dans la matrice isolante séparant les îlots du substrat. Pour ce
faire, il est possible de modifier l’ambiance gazeuse du recuit, et en particulier d’utiliser une
atmosphère oxydante, ce qui est étudié dans la partie suivante.
iii. Influence de l’atmosphère du recuit
Pour étudier l’influence de la nature oxydante du recuit par rapport aux atmosphères
réductrices utilisées pour les échantillons précédemment étudiés, deux séries de capacités
ayant subi les recuits A3 et A31 ont été caractérisées (Figure 38).
Tout d’abord, on remarque que par rapport au recuit réalisé sous atmosphère réductrice
(Figure 38a), les recuits oxydants (Figure 38b et c) augmentent le nombre de charges
stockées par les capacités MOS et font diminuer la capacité en accumulation.
L’amélioration de la rétention trouve son origine dans l’augmentation de l’épaisseur de l’oxyde
de grille : les observations par MET montrent en effet que de 4,2 nm pour les échantillons
X731, l’épaisseur de l’isolant de contrôle passe à 5 nm pour les échantillons X732
[Carrada03]. Parallèlement, les couches de nanocristaux semblent plus fines lorsque
l’ambiance du recuit est oxydante, ce qui laisse penser que l’augmentation de l’épaisseur de
l’oxyde de grille est due à l’oxydation du silicium excédentaire présents dans l’isolant de
contrôle, mais aussi d’une partie des atomes de silicium composant les nanocristaux.
52
35
(a)
30
X731 : E=1keV, D=2.10
30
16
X732 : E=1keV, D=2.10
cm
25
Recuit : A1
20
15
10
cm
-2
-5V / +5V
+5V / -5V
Recuit : A3
(N2)
C (pF)
C (pF)
(b)
-2
-5V / +5V
+5V / -5V
25
20
16
(N2+02)
15
10
5
5
0
0
-5
-5
-4
-3
-2
-1
0
1
2
3
4
-5
5
-4
-3
-2
-1
30
1
2
3
4
5
(c)
16
AX73527 : E=1keV, D=2.10
cm
-2
25
-5V / +5V
+5V / -5V
20
Recuit : A31
(N2+02)
C (pF)
0
VG (V)
VG (V)
Figure 38 : Capacité de la structure en
fonction de la tension appliquée à la grille,
pour des échantillons implantés avec une
15
dose de 2.1016 cm-2 et recuits sous trois
10
atmosphères différentes, réductrice (a) et
oxydantes (b et c).
5
0
-5
-4
-3
-2
-1
0
1
2
3
4
5
VG (V)
La Figure 39 confirme cette interprétation : d’après les images MET, on constate qu’il y a bien
moins de nanocristaux de diamètre supérieur à 4 nm ou inférieur à 1 nm dans les échantillons
recuits sous atmosphère oxydante que dans ceux qui le sont sous ambiance réductrice.
Figure 39 : Distribution en
diamètres des nanocristaux,
déduite des images MET en
vue
plane
d’échantillons
ayant subi les recuits A1 (à
gauche) et A3 (à droite)
[Normand03].
En revanche, le diamètre moyen reste de 2 nm environ. Tous les îlots subissent certainement
l’oxydation, mais les plus petits disparaissent, et les plus gros voient leur taille sensiblement
diminuer, ce qui aboutit à une moindre dispersion des diamètres des îlots dans le cas du recuit
oxydant que dans celui du recuit réducteur.
En ce qui concerne l’oxyde séparant les îlots du substrat, son épaisseur ne varie pas d’un recuit
à l’autre [Carrada03] . Le silicium excédentaire qui s’y trouve n’est donc que très peu
53
oxydé, et peut encore servir de relais de conduction ou de lieu de stockage pour la rétention
des porteurs injectés, même pour les échantillons recuits sous atmosphère oxydante. Ceci
peut être interprété en précisant que les atomes d’oxygène, lors du recuit, pénètrent et
diffusent dans la couche d’isolant depuis la surface libre, à savoir le ''côté grille''. Le silicium
excédentaire se trouvant dans l’oxyde de grille est donc oxydé préalablement, ainsi que les
nanocristaux les plus gros et les plus petits. Le silicium excédentaire situé dans l’oxyde tunnel
n’est quant à lui pas concerné par l’oxydation. Il n’en reste pas moins que le recuit oxydant
permet d’obtenir un oxyde de grille densifié et contenant peu de défauts. De plus, il permet à
la distribution en diamètre des îlots d’être plus étroite.
Ces propriétés particulières des échantillons recuits sous atmosphère oxydante nous ont
conduits à choisir ces échantillons pour les études de courants transitoires. En effet, la densité
importante des barrières isolantes, ainsi que la densité relativement faible de défauts qu’elles
présentent (par rapport aux échantillons recuits sous atmosphère N2) aboutissent à des
courants de fuite suffisamment bas pour distinguer les courants de chargement, comme nous
le verrons dans la deuxième partie de ce chapitre. De plus, en réduisant la dispersion du
diamètre des îlots, on s’attend à rendre la réponse des îlots plus homogène, et plus
particulièrement la tension de grille permettant leur chargement : on sait en effet que cette
tension est liée au diamètre des nanocristaux pour les plus petits d’entre eux, du fait du
confinement quantique.
I.2. Echantillons utilisés pour l'étude des courants de chargement
L'étude des courants de chargement a tout d'abord été menée sur les échantillons élaborés par
implantation et recuits sous atmosphère oxydante (A3 et A31). Des analyses TEM sur ces
échantillons ont fait l'objet d'une étude poussée à laquelle on fera référence tout au long de ce
chapitre [Carrada03] . La Figure 40 reprend les dimensions qui ont été extraites de
l'analyse des images TEM.
En plus de ces échantillons, un lot élaboré par N. Buffet et P. Mur (CEA-LET) par démixtion de
SiOX a montré un comportement transitoire comparable aux composants fabriqués par
implantation. On a ainsi pu utiliser les modèles de capacité îlots/substrat sur les résultats
expérimentaux relatifs à ces échantillons, même si nous ne disposions que de peu
d'informations structurales à leur sujet.
Rappelons qu'avec cette technique, le silicium en excès dans l'oxyde provient de l'élaboration
même de l'isolant par LPCVD. Comme cela a déjà été évoqué précédemment, il s'agit de faire
arriver du silane SiH4 (g) et de l'oxyde d'azote N2O (g) sur un substrat oxydé et porté à une
température de plusieurs centaines de degrés Celsius. Un oxyde de silicium est alors formé,
mais sa stœchiométrie dépend des débits respectifs des arrivées de gaz. Un recuit dit de
démixtion est ensuite réalisé, afin d'obtenir un oxyde stœchiométrique d'une part et des
précipités d'atomes de silicium excédentaires d'autre part. Ces derniers constituent des
nanocristaux dont la taille et la densité dépendent du nombre d'atomes de silicium
excédentaires.
54
Grille
5 nm
Oxyde de contrôle
2.3 nm
Plan d’îlots
6.1 nm
Oxyde tunnel
Substrat
Figure 40 : Représentation schématique des structures comprenant une couche de SiOX
élaborée par implantation. Les épaisseurs des couches d'oxyde et du plan d'îlots sont
également reportées.
Ce lot d’échantillons a été élaboré en faisant tout d'abord croître une couche d'oxyde
thermique de 3 nm sur un substrat de type P. Grâce à la technique précédemment évoquée,
une couche de SiO0.9 épaisse de 5nm est créée. Un recuit de démixtion est ensuite réalisé, à
1000°C pendant 3min 30s dans une atmosphère neutre de diazote. Une couche de SiO2
épaisse de 8 nm est ensuite déposée pour former l'oxyde de grille. L'élaboration se termine par
le dépôt d'une épaisse couche de polysilicium fortement dopée N (250 nm). La Figure 41
montre un schéma en coupe de ces composants, et synthétise les dimensions visées par le
processus d'élaboration.
Grille
8 nm
Oxyde de contrôle
5 nm
Plan d’îlots
3 nm
Oxyde tunnel
Substrat
Figure 41 : Représentation schématique des structures comprenant une couche de SiOX
élaborée par LPCVD.
55
II. Etude expérimentale des courants de chargement
Comme on l’a évoqué précédemment, les mesures statiques du courant de grille sur des
structures respectant les dimensions des mémoires FLASH s’avèrent souvent impossibles, à
cause de l’épaisseur des barrières isolantes. Rappelons qu’une mesure est considérée comme
statique lorsque la rampe de tension utilisée est telle que pour toute rampe plus lente, la
courbe IG(VG) demeure identique. Dans ce cas, les porteurs ont atteint leur état d’équilibre et
tous les processus transitoires ont pris fin.
Dans ce contexte, une bonne alternative consiste à étudier les courants transitoires observés
lorsque la grille des dispositifs est polarisée par une tension variant rapidement. Par la suite,
les courants mesurés sont considérés comme transitoires lorsque la vitesse de rampe a une
influence sur les courbes IG(VG). Dans ces conditions en effet, la mesure intervient alors que
les porteurs n’ont pas atteint leur état d’équilibre, et on a alors affaire à des processus qui ont
une dépendance temporelle.
II.1. Caractérisation électrique des courants transitoires pour des
îlots obtenus par le recuit d’une couche d’oxyde contenant
des atomes de silicium implantés
Les mesures présentées ont été réalisées à l’aide d’un coulomb-mètre Keithley 595, qui produit
des rampes de tension en marches dont on peut faire varier les paramètres. Ainsi, la vitesse
des balayages en tension peut être modifiée en faisant varier la différence de tension et le
temps écoulé entre chaque marche.
Les résultats présentés dans cette partie ont été confirmés par des mesures effectuées à l’aide
de femto-ampèremètres (Keithley 4200 SCS et HP 4156A). L’usage du Keithley 595 est justifié
par la possibilité qu’il offre de mesurer, conjointement au courant, la capacité quasi-statique de
la structure, avec pour perspective l’étude de l’influence des pics de courant sur les courbes
C(VG), présentée dans la quatrième partie de ce chapitre.
Les mesures exploitées dans ce chapitre sont réalisées en faisant varier linéairement la tension
de grille de façon relativement rapide. Cependant, la méthode de mesure adoptée par les
appareils de mesure consiste à effectuer plusieurs mesures à tension fixe et à les moyenner.
En conséquence, les rampes de tension ne sont pas strictement linéaires : il s’agit au contraire
de marches de tension, dont les paliers permettent aux mesures d’être effectuées à tension
constante et d’être converties en données numériques (Figure 42).
Les bas niveaux de courant mesurables par les picoampèremètres et les femtoampèremètres
utilisés dans ce chapitre ont pour contrepartie une relative lenteur de mesure, liée notamment
à la précision que doivent atteindre les convertisseurs analogique/numérique (au détriment de
leur rapidité) et au fait que les paramètres temporels sont souvent adaptés aux mesures
statiques, qui sont l’usage courant de ce type d’appareil.
56
tension
∆Vmarche
∆Vmarche
0
temps
stabilisation
(hold)
retard
(delay)
mesure
(*)
retard
(delay)
mesure
(*)
retard
(delay)
mesure
(*) : Latence après déclenchement et stabilisation
Figure 42 : Diagramme temporel représentant une variation linéaire de tension en marches. Il
détaille les différentes phases induites par les mesures effectuées au cours de la rampe.
Les limites des convertisseurs ne peuvent être contournées, car elles sont le résultat du
compromis nécessaire entre vitesse et justesse des mesures, a fortiori sur des courants de
l’ordre du pA ou plus faibles.
En revanche, les paramètres de mesure peuvent être ajustés de façon à optimiser la vitesse de
la mesure : on peut la plupart du temps éliminer la phase de stabilisation, limiter à une valeur
faible le retard et fixer le temps de mesure proprement dit à la valeur minimale permettant
l’obtention d’un rapport signal/bruit satisfaisant.
Ces ajustements sont typiquement réalisés de façon empirique par essai-erreur, en visant un
résultat reproductible et présentant un niveau de bruit acceptable. Si on veut obtenir des
rampes de tension rapides, on doit toutefois faire face aux limitations intrinsèques des
appareils utilisés, qui varient de l’un à l’autre.
Le Tableau 3 montre les paramètres qui ont permis d’atteindre les rampes les plus rapides
pour des charges capacitives d’une centaine de pF, pour trois appareils de mesure différents.
Les rampes indiquées correspondent à des marches de tension de ∆Vmarche=0,1 V. Il s’agit de la
hauteur de marche la plus élevée que peut atteindre le Keithley 595, alors que les deux autres
appareils de mesure testés peuvent mettre en œuvre des hauteurs bien plus importantes,
jusqu’à plusieurs volts.
Néanmoins, de telles marches posent le problème de ne plus pouvoir approximer le signal
excitateur résultant par une rampe linéaire, ce qui remet en cause l’application des modèles,
qui s’appuient justement sur la linéarité de la rampe de tension délivrée par la source. C’est
pour cette raison que la hauteur des marches de tension a été limitée à 0,1 V, quels que soient
les appareils utilisés.
57
Retard
Temps de
mesure
Total
0 ms
2 ms
(0,1 PLC)
22 ms
4,5 V/s
0 ms
2 ms
(0,1 PLC)
19 ms
5,2 V/s
27 ms
Compris
dans le
retard
minimum
70 ms
1,4 V/s
Temps de
stabilisation
Appareil de
Minimum
mesure
utilisateur
Agilent
HP
4156A
20 ms
0 ms
Keithley
4200
SCS
17 ms
0 ms
Modèle
Keithley
595
3 ms
40 ms
Rampe maximale
(∆Vmarche=0,1 V)
Tableau 3 : Paramètres temporels des mesures réalisées lors d’une rampe de tension en
marches pour les appareils de mesure suivants : HP4156 A [HP95], Keithley 4200-SCS
[Keithley02, Keithley04] et Keithley 595 [Keithley03].
Cette hauteur de marche permet en outre d’avoir un nombre de points significatif lors de nos
mesures, dont les plages de tension sont habituellement situées entre 0 et 5 V. On a alors
environ 50 points de mesure, ce qui représente un minimum pour obtenir des résultats
significatifs.
Les temps de mesure indiqués correspondent aux durées nécessaires pour intégrer un nombre
suffisant de mesures afin d’obtenir un rapport signal/bruit satisfaisant. Les valeurs choisies
sont adaptées à la mesure de courants de l’ordre de la centaine de pA comme ceux que l’on
obtient avec les dispositifs et les surfaces des composants que nous avons étudiés.
L’amplitude du courant de déplacement mesurée au cours de ces rampes de tension peut
s’avérer plus importante. C’est le cas par exemple si on caractérise des composants présentant
des surfaces plus importantes. C’est également le cas lorsque la capacité liant la grille de
contrôle et la grille flottante est plus grande, ce qui est le cas lorsque la couche d’isolant les
séparant est plus mince ou constituée d’un matériau doté d’une permittivité diélectrique
supérieure à celle du SiO2. Dans ces conditions, le temps alloué à la mesure peut être diminué,
mais dans de faibles proportions (jusqu’à 2 ms pour le Agilent-HP 4156A et le Keithley 4200).
Au cours des caractérisations présentées par la suite, la polarisation a été volontairement
limitée à 3 V. En effet, au delà de cette tension, on observe une forte croissance du courant,
qui correspond à la triangularisation des bandes d’énergie (conduction Fowler-Nordheim).
Dans ces conditions, on sait que des défauts de type SILC apparaissent, ce qui peut
rapidement aboutir au claquage des structures.
En se limitant à des polarisations modestes, il est possible d’effectuer toutes les mesures
plusieurs fois sur la même capacité. C’est ainsi qu’il a été possible de vérifier que les
caractéristiques montrées dans cette partie sont toutes hautement reproductibles.
58
Dans un souci similaire de reproductibilité, et pour pouvoir superposer les courbes
correspondant à différentes rampes de tension, une procédure d’effacement a été établie, pour
toutes les capacités. Préalable à chaque mesure, celle-ci vise à vider le composant des charges
qui y ont été stockées. Des tests préliminaires (mesures C-t après stress) ont abouti à montrer
qu’une tension de grille de –4,5 V appliquée pendant 500 ms permettait d’amener les
capacités à l’équilibre et à la neutralité électrique.
Sur les échantillons qui ont été recuits sous ambiance inerte (A1), si on fait varier la rampe de
tension de grille, on constate que la courbe IG(VG) demeure identique à la courbe statique
(Figure 43).
30
25
Figure 43 : Courant de grille en
fonction de la tension appliquée à la
grille pour des capacités ayant subi le
recuit A1, sous ambiance inerte. Cette
courbe reste identique si on fait varier
la rampe de tension sur la grille.
IG (pA)
20
15
10
5
0
0.0
0.5
1.0
1.5
2.0
2.5
3.0
VG (V)
Ceci montre que, dans ce cas, les effets des processus transitoires sur le courant mesuré sont
négligeables par rapport au courant statique de conduction. Si, de la même manière, on
applique des rampes de tension plus ou moins rapides sur la grille de capacités ayant été
recuites sous ambiance oxydante (A3), on observe que cela influe sur la courbe IG(VG) (Figure
44).
140
K=0.2
K=0.3
K=0.4
K=0.5
K=0.6
K=0.7
120
IG (pA)
100
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
K=0.9
K=1.0
K=1.1
K=1.3
K=1.4
(a)
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
Figure 44 : Courant de
grille en fonction de la
tension appliquée à la
grille, mesuré en faisant
varier la vitesse de la
rampe de tension, pour
des capacités ayant subi
le recuit A3, ayant une
surface de 4.10-8 m².
80
60
40
20
0
-20
-4
-3
-2
-1
0
1
VG (V)
59
2
3
On remarque qu’une bosse de courant apparaît, pour des tensions de grille comprises entre
-0,5 V et 2 V. Son amplitude augmente à mesure que la rampe est plus rapide. Enfin, à haut
champ (VG>2,5 V), le courant augmente rapidement quand on augmente la tension. Les
mêmes mesures ont été effectuées sur les capacités ayant subi un recuit oxydant A31 (Figure
45).
160
K=0.2
K=0.3
K=0.4
K=0.5
K=0.6
K=0.7
140
120
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
K=0.9
K=1.0
K=1.1
K=1.3
K=1.4
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
(b)
Figure 45 : Courant de
grille en fonction de la
tension appliquée à la
grille,
mesuré
en
faisant varier la vitesse
de la rampe de tension,
pour
des
capacités
ayant subi le recuit A31
ayant une surface de
4.10-8 m².
IG (pA)
100
80
60
40
20
0
-4
-3
-2
-1
0
1
2
3
VG (V)
On observe un comportement similaire, mais les bosses de courant ont des formes légèrement
différentes, et ce sont de véritables pics pour les rampes supérieures à 0,7 V/s. Les maxima de
courant sont légèrement supérieurs à ceux notés pour les échantillons issus du recuit A3. Les
polarisations donnant lieu à ces bosses de courant sont similaires pour les deux recuits.
II.2. Caractérisation électrique des îlots obtenus par le recuit
d’une couche d’oxyde sur-stœchiométrique en silicium
En se plaçant dans les mêmes conditions que pour les caractérisations présentées dans la
partie II.1, des mesures de courant ont été réalisées sur des échantillons élaborés par LPCVD.
Comme on l’a déjà évoqué dans la partie I.2., le silicium excédentaire n’est dans ce cas plus
issu d’une implantation ionique mais de la formation d’un isolant par LPCVD et avec des
paramètres tels qu’il contient intrinsèquement des atomes de silicium excédentaires par
rapport à la stœchiométrie du SiO2.
Les résultats sont présentés par la Figure 46. Cette fois, on note la présence de deux pics de
courant dépendant de la rapidité du balayage en tension sur la grille. Le premier, de faible
amplitude, apparaît pour des tensions comprises entre –1,5 et –0,5 V. Le deuxième, bien plus
important, et très étroit, est observé lorsque la tension de grille est comprise entre 1 et 2 V.
60
100
K=0.2
K=0.3
K=0.4
K=0.5
K=0.6
K=0.7
80
IG (pA)
60
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
K=0.9
K=1.0
K=1.1
K=1.3
K=1.4
V/s
V/s
V/s
V/s
V/s
Figure 46 : Courant
de grille en fonction
de
la
tension
appliquée à la grille,
mesuré en faisant
varier la vitesse de la
rampe de tension,
pour des capacités
élaborées par LPCVD
et ayant une surface
de 1,42.10-7 m².
40
20
0
-4
-3
-2
-1
0
1
2
VG (V)
II.3. Interprétation des caractéristiques électriques transitoires
Des pics de courant similaires à ceux qui sont décrits dans la partie II.2 ont déjà été reportés
dans la littérature. Ils ont donné lieu à plusieurs interprétations et trois d’entre elles ont été
examinées pour expliquer l’origine des courants observés dans notre cas :
• Une première interprétation fait l’hypothèse que la partie ascendante de la bosse de
courant est due à un mécanisme de transport Fowler-Nordheim [Maeda99] . Dans un
premier temps, selon cette hypothèse, le courant augmente donc rapidement. De nombreux
porteurs sont injectés, et une partie d’entre eux sont stockées dans la structure lors de la
mesure. Quand leur nombre est suffisamment important, le champ effectif dans le composant
diminue de telle manière que le mécanisme de transport est de nouveau un mécanisme tunnel
direct ou assisté par des pièges présents dans les barrières isolantes. Le courant mesuré
diminue alors rapidement, car ces modes de transport donnent lieu à des courants dont
l’intensité est bien inférieure à celle des courants Fowler-Nordheim. C’est cette diminution qui
explique la partie décroissante de la bosse de courant. Ensuite, lorsque tous les lieux de
chargement sont saturés en porteurs, le champ électrique augmente à nouveau avec la
tension de grille croissante, et le transport est à nouveau assuré par un mécanisme FowlerNordheim, donnant un courant dont l’intensité augmente rapidement avec la tension de grille,
que l’on peut observer à haut champ sur la Figure 44 et la Figure 45. Cette interprétation rend
donc bien compte des variations du courant que l’on observe, mais elle se heurte à deux
objections :
∗ Tout d’abord, elle repose sur l’apparition d’un courant Fowler-Nordheim pour une
tension de grille de 2 V, ce qui semble incompatible avec l’épaisseur des échantillons
étudiés. Celle-ci est au moins supérieure à 7 nm, l’épaisseur nominale de la couche d’oxyde
avant implantation. M. Carrada a en outre montré que la couche séparant le substrat du
plan d’îlots dans cet échantillon était épaisse d’environ 6 nm [Carrada03] . Cette valeur
importante est due au recuit oxydant (A3), qui permet à un certain nombre d’atomes de
61
silicium excédentaires et isolés de former des molécules de SiO2. Leur volume est plus
important que celui occupé par les atomes de silicium seuls, ce qui explique le gonflement
des couches entourant le plan d’îlots. Dans ces conditions, on peut s’attendre à ce que le
mécanisme Fowler-Nordheim devienne prépondérant pour des tensions de grille au moins
supérieures à 3 V. C’est d’ailleurs le cas pour la deuxième augmentation du courant
observée sur la Figure 44 et sur la Figure 45, que l’on peut donc certainement attribuer au
transport Fowler-Nordheim, contrairement à la partie croissante de la bosse de courant.
∗ Cette interprétation doit aussi expliquer pourquoi l’aspect du courant observé pour des
tensions de grilles légèrement supérieures à 2 V change quand on fait varier la rampe de
tension. S’il s’agit bien d’un courant Fowler-Nordheim, son évolution avec le champ
électrique est déterminée à la fois par la forme de la barrière de potentiel et par la tension
appliquée entre les deux électrodes. Si, comme on l’observe, l’évolution de ce courant avec
la tension de grille dépend de la vitesse avec laquelle on effectue la mesure, cela signifie
donc que la forme de la barrière de potentiel et/ou le champ électrique sont modifiés au
cours la mesure. L’importance de cette modification dépend de la vitesse de la mesure, ce
qui n’a jamais été reporté à notre connaissance dans la littérature. Le plus souvent, on
constate que le piégeage de porteurs a pour seule influence le décalage des courbes de
courant F.N. vers les tensions positives ou négatives selon le type de porteurs. Par ailleurs,
on peut remarquer que les courants Fowler-Nordheim observés pour des tensions de grille
supérieures à 3 V ont une dépendance bien plus faible à la vitesse de la mesure. Les
hypothèses relatives à la modification de la forme de la barrière et/ou du champ électrique
au cours de la mesure ne s’appliquent donc alors plus, ce qui peut poser la question de leur
validité.
Ces deux objections nous ont fait par la suite écarter cette interprétation.
• La résonance tunnel peut être une autre interprétation de tels pics de courant, ainsi que
l’ont formulée M. Fukuda et al. [Fukuda97] . Elle s’appuie sur le fait que lorsque les îlots
sont de petite taille, un confinement important apparaît dans les trois dimensions de l’espace.
La mécanique quantique montre que dans ces conditions, les porteurs qui y sont placés ne
peuvent plus adopter que des énergies discrètes. Un courant ne passe par de tels îlots que si le
niveau de Fermi de l’électrode injectante est aligné avec les niveaux d’énergie permis. Il est
difficile d’expliquer en quoi la conduction par ces niveaux d’énergie dépendrait de la rampe de
tension utilisée. Il s’agit en effet de phénomènes de conduction, que l’on peut a priori observer
aussi bien par des mesures statiques que dynamiques. Ni M. Fukuda, ni aucun autre auteur ne
semblent d’ailleurs avoir observé que de tels courants dépendent de la vitesse de la mesure.
Cette hypothèse n’a donc jamais permis de vérifier expérimentalement l’influence de la rampe
sur le courant, et d’un point de vue théorique, rien ne laisse penser qu’elle puisse expliquer les
faits expérimentaux décrits précédemment. En conséquence, elle n’a pas été retenue par la
suite.
• Enfin, la troisième interprétation, qui a été proposée par V. Ioannou-Sougleridis et A. G.
Nassiopoulou [Ioannou03] au moment où nous en émettions nous-mêmes l’hypothèse,
repose sur la présence d’un courant transitoire de déplacement au cours de la mesure. Il s’agit
d’un courant engendré par une modification rapide de la différence de potentiel entre les deux
électrodes d’un système capacitif. Si on note cette variation de potentiel dV/dt, on peut
mesurer dans les électrodes un courant I tel que :
62
I= C
dV
dt
(1)
Dans cette expression, C désigne la capacité relative aux électrodes. Ceci signifie dans le cas
d’une rampe de tension que plus celle-ci est rapide, plus le courant observé sera important.
Cette tendance est en accord avec les courbes présentées précédemment (Figure 44, Figure
45 et Figure 46). Le pic de courant a donc, selon cette hypothèse, une origine radicalement
différente des mécanismes évoqués par les interprétations citées précédemment. Les porteurs
concernés par ce phénomène ne transitent pas entre le substrat et la grille, et il est par
exemple tout à fait envisageable d’observer un tel pic de courant dans une structure aux
barrières de potentiel épaisses, qui rendent par ailleurs tout courant de conduction négligeable.
Le meilleur moyen de trancher définitivement en faveur de l’hypothèse d’un courant de
déplacement est de réaliser des mesures identiques à celle présentées par la Figure 47 sur une
structure très épaisse.
40 nm
(c)
Figure 47 : Coupe schématique des capacités étudiées (a), courant mesuré entre les deux
électrodes pour un composant de référence sans îlots (b) et avec îlots (c). Dans ce dernier
cas seulement, un courant non nul est observé, qui n'est pas dû à la conduction de porteurs
entre les deux électrodes mais à un courant de déplacement [Huang04].
Malheureusement, un tel composant n’a pas été réalisé dans les conditions de recuit oxydant
A3. S. Huang et al. ont proposé un exemple qui illustre tout le bénéfice qu’une telle structure
peut apporter à l’interprétation [Huang04] . Comme le montre la Figure 47a, ils ont placé
des îlots de silicium nitrurés entre une couche d’oxyde très fine (2 nm) et une autre très
épaisse (≈ 40 nm). La caractéristique IG(VG) montre pourtant un pic de courant tout à fait
similaire à celui que l’on mesure dans notre cas (Figure 47c). Il ne peut être ici question d’un
courant de conduction, et seule la présence d’un courant de déplacement peut expliquer les
observations.
L’analyse de nos données nous a amenés nous aussi à privilégier l’interprétation des pics de
courant par les courants de déplacement. La troisième partie de ce chapitre propose de
s’appuyer sur elle pour établir un modèle électrique équivalent permettant de l’étayer et
d’extraire les paramètres structuraux relatifs à nos dispositifs.
63
III. Modélisation par un circuit électrique équivalent et
extraction de paramètres
Dans la partie précédente, nous avons proposé d’interpréter les caractéristiques électriques
dynamiques particulières observées sur nos échantillons par des courants de déplacement.
Une analyse quantitative reposant sur un modèle électrique équivalent à nos structures est
maintenant développée au cours de cette partie.
Elle permet d’extraire la quantité de charge impliquée par ces pics de courant et de montrer
que le nombre de porteurs concernés est indépendant de la rampe, ce qui confirme notre
interprétation. Dans un second temps, on peut extraire du modèle la valeur de la capacité
reliant les lieux de stockage de la grille.
Pour déterminer si ces lieux de chargement correspondent aux îlots, il faut calculer la capacité
liant un plan d’îlots à une électrode plane. Si la comparaison de cette valeur avec les résultats
expérimentaux est satisfaisante, on peut conclure que le chargement est lié aux îlots.
Plusieurs modèles sont proposés pour calculer la capacité entre un plan d’îlots et une électrode
plane. Dans un premier temps, nous proposons pour cela des modèles analytiques. Ils
reposent sur des relations simples car un certain nombre d’approximations sont faites sur la
géométrie du système îlots-grille.
La méthode des éléments finis a également été utilisée, grâce au logiciel FEMLAB. Les
éléments finis sont connus pour être une approche précise mais assez lourde, et on a cherché
à déterminer dans quelle mesure les modèles analytiques étaient suffisants pour calculer la
capacité îlots/grille et ainsi conclure quant au lieu de chargement de nos composants.
III.1. Présentation du modèle
Les capacités contenant un plan d'îlots peuvent être modélisées par le circuit électrique
équivalent présenté par la Figure 48. L’oxyde de contrôle, séparant la grille du plan d’îlots, est
modélisé par une capacité notée CCF. L’oxyde tunnel, séparant les îlots du substrat, est
modélisé par une capacité notée CFS en parallèle avec une résistance RFS. Ces deux
composants en parallèle sont couramment utilisés pour modéliser une jonction tunnel, car bien
qu’une telle jonction adopte un comportement capacitif (en accumulant des charges à chacune
de ses extrémités lorsqu’elle est polarisée), elle laisse par ailleurs passer du courant par effet
tunnel, ce dont rend compte la résistance. Celui-ci étant faible, on donne généralement une
valeur élevée à RFS.
L’approximation faite par une telle représentation tient au fait que la valeur de la résistance
n’est en réalité pas constante, mais dépend de l’énergie des porteurs qui y sont injectés, c’està-dire de la polarisation de la jonction.
64
Grille
CCF
QCF
Grille flottante
CFS
VCF
-QCF
QFS
-QFS
Figure 48 : Schéma électrique
équivalent d’une capacité contenant
un plan d’îlots.
QFG
VFS
RFS
Substrat
Les potentiels sont reliés entre eux par la relation :
VG = VCF + VFS
(2)
Les charges QCF, QFG et QFS peuvent s’écrire en fonction des différences de potentiel :
⎧Q = C .V
FS FS
⎪⎪ FS
⎨QCF = CCF .VCF
⎪
⎪⎩QFG = QFS − QCF
(3)
Lorsque la grille est polarisée de façon dynamique, et que la grille flottante se charge, le
courant tunnel de chargement est compensé par un courant de déplacement pouvant être
mesuré sur la grille et dont l’intensité s’écrit :
dQCF
I=
dt
= CCF
dVCF
(4)
dt
On en déduit la valeur de la charge mise en jeu dans ce courant en intégrant cette relation par
rapport au temps :
dQCF = IG.dt ⇒
t
V
QCF = ∫t 2 IG.dt = ∫V 2
1
1
dt
I .dV
dVG G
(5)
Dans cette relation, V1 et V2 sont respectivement les potentiels appliqués à la grille aux
instants t1 et t2. On considère que dVG/dt est constant et on note K sa valeur ; on peut alors
écrire :
-1 V
(6)
Q = K . 2 I .dV
CF
∫V1
65
G
G
Il est intéressant de calculer QCF à partir des courants mesurés pour plusieurs valeurs de
rampes, dans le but de vérifier que le pic de courant correspond bien à un courant de
chargement dû au transfert d’un certain nombre de porteurs entre le substrat et le plan d’îlots.
Si cette interprétation est juste, quelle que soit la vitesse de la mesure, on devrait trouver une
charge identique, du moins tant qu’on applique des vitesses de rampes suffisamment lentes
pour que la couche d’inversion ait le temps de se former dans le substrat. De plus, un tel calcul
permet de connaître le nombre de charges stockées au cours de ce processus, afin de
déterminer si un tel chargement est quantitativement suffisant dans la perspective de la
réalisation de mémoires Flash, dont la fenêtre mémoire doit être suffisamment large pour
assurer la distinction entre les états ''écrit'' et ''effacé''.
III.2. Extraction de la charge stockée dans la capacité au cours de
la mesure
III.2.a) Description du mode opératoire et étude préliminaire
Pour calculer la charge QCF et vérifier qu’elle ne dépend pas de la rampe, il est nécessaire de
séparer le courant de déplacement du courant de conduction.
On peut écrire que IG=Idéplacement+Iconduction et comme pour les rampes les plus faibles (K≤0,1
V/s) on a Idéplacement≈0, il suffit de retrancher le courant correspondant à la rampe de tension la
plus lente à tous les autres courants.
En effet, si pour K≤0,1 V/s, on a IG≈Iconduction, et donc :
Idéplacement(K>0,1 V/s)= IG(K>0,1 V/s)- IG(K≤0,1 V/s)
C’est ce courant de déplacement que l’on va intégrer, par exemple entre les tensions de grille
qui correspondent au début et à la fin de la bosse de courant.
Pour chaque rampe de tension, il suffit alors d’intégrer le courant de déplacement par rapport
à la tension de grille, sur la plage de tension correspondant à la bosse de courant. Afin de
vérifier la conservation de la charge impliquée dans le courant de déplacement quelle que soit
la rampe, on a réalisé cette intégration pour de nombreuses valeurs de rampes, comprises
entre 0,1 et 4,5 V/s. Ce travail expérimental préliminaire a permis de déterminer les
paramètres qui permettaient de se placer dans des conditions optimales, par rapport à la
capacité des appareils de mesure à acquérir rapidement des valeurs de courants de l’ordre du
picoampère.
La Figure 49 montre le résultat de l’intégration du courant, noté P, reporté en fonction de la
rampe (notée K) pour des capacités de surface 10-8 m² ayant subi un recuit A31. Cette surface
est la plus petite disponible parmi les différents échantillons caractérisés, et de ce fait, c’est elle
qui donne les courants les plus faibles. Ainsi, toute conclusion par rapport à la résolution des
appareils de mesure peut être appliquée a fortiori pour les capacités de surfaces supérieures.
On peut remarquer que les points semblent alignés lorsque la rampe est comprise entre
0,1 V/s et 2 V/s. Pour des rampes plus élevées, le produit de l’intégration est sous-linéaire par
rapport à la droite de régression correspondant aux rampes les plus faibles. Ce comportement
66
peut trouver son origine dans la limite de résolution des appareils de mesure. Il est également
possible que la rapidité de la mesure ne permette plus de réaliser complètement le processus
de chargement .Pour des rampes plus faibles que 0,1 V/s, il devient trop difficile de discerner
le courant transitoire du courant de conduction ; en d’autres termes le rapport signal/bruit
n’est plus suffisamment grand pour pouvoir donner des valeurs justes pour le courant de
déplacement.
Figure 49 : Résultat de
l’intégration du courant
de déplacement (P) en
fonction de la rampe (K)
utilisée pour mesurer le
courant de grille. Ces
calculs ont été réalisés
pour des capacités ayant
subi le recuit oxydant
A31,
et
de
surface
10-8 m². Les mesures de
courant ont été réalisées
à
l’aide
d’un
picoampèremètre
Keithley
4200 SCS.
100
-11
P = 2.41785.10
xK
P (pV.A)
80
60
40
20
0
0.0
0.5
1.0
1.5
2.0
2.5
3.0
3.5
4.0
4.5
K (V/s)
Par la suite, seules des rampes comprises entre 0,1 V/s et 1,5 V/s seront utilisées. Ce n’est en
effet que pour de telles valeurs que des résultats absolument similaires et reproductibles ont
été obtenus pour les différents appareils de mesure utilisés. Il est intéressant de déterminer la
valeur de la pente de la droite passant par les points obtenus pour les rampes les plus faibles,
−11
comme cela a été fait sur la Figure 49. Dans ce cas, on trouve P ≈ 2,242.10 x K . Ce
coefficient directeur correspond à la valeur de la charge qui engendre les courants de
déplacement observés. Les droites obtenues passent par l’origine, ce qui était attendu d’après
le modèle électrique. En effet, pour une rampe nulle, il est tout à fait normal de trouver une
charge nulle elle aussi.
Il est intéressant de déterminer si la charge mise en jeu dans ce processus a un ordre de
grandeur comparable à celui de la densité d’îlots. Bien sûr, rien ne permet d’affirmer que le
chargement se fait dans les îlots, et il ne s’agit là que de vérifier que le chargement est
compatible avec l’hypothèse du chargement des îlots par quelques électrons. On peut
déterminer que les bosses de courant sont dues au déplacement d’une densité de charges
moyenne D telle que :
-1
D=
Q
K .P
=
q.S
q.S
12
≈ 1,5.10
−2
cm
(7)
Des études TEM menées sur ce type d’échantillon ont montré, malgré la difficulté de ce type de
décompte, que la densité d’îlots était dans des conditions de recuit oxydant de l'ordre de
1,5.1012 cm-2 [Carrada03] . On peut donc dire que la densité de charge impliquée dans les
courants de déplacement calculés pour le recuit A31 est proche de la densité d’îlots présents
67
dans ces échantillons. Si le chargement se produit dans les îlots, cela signifie qu’en moyenne,
un électron est stocké par îlot.
III.2.b) Résultats et interprétation
Ce travail préliminaire une fois terminé, la méthode de calcul de la charge présentée
précédemment a été appliquée aux caractéristiques dynamiques déjà présentées dans la
partie II de ce chapitre, correspondant aux échantillons issus de l’implantation de silicium et
ayant subi les recuits A3 (Figure 44) et A31 (Figure 45), ainsi qu’à ceux qui ont été élaborés à
partir d’un isolant contenant des atomes de silicium excédentaires élaboré par LPCVD (Figure
46).
La Figure 50 montre le résultat de l’intégration de la densité de courant, noté PS, reporté en
fonction de la rampe (notée K) pour les trois types d’échantillons étudiés dans ce chapitre.
4.0x10
-3
SiOX LPCVD
-4
P=2,339.10 x K
PS (V.A/m²)
Si implanté + recuit A31
-3
P=3,324.10 x K
3.0x10
-3
Figure 50 : Résultat de
l’intégration de la densité de
courant de déplacement (PS)
en fonction de la rampe (K)
utilisée pour mesurer le
courant de grille. Ces calculs
ont été réalisés pour les trois
types d’échantillons décrits
dans la première partie de ce
chapitre.
Si implanté + recuit A3
-3
xK
P=3,157.10
2.0x10
-3
1.0x10
-3
0.0
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
1.2
K (V/s)
C’est cette fois la densité de courant qui a été intégrée, dans le but de pouvoir comparer la
charge mise en jeu dans les trois échantillons étudiés. En effet, en passant par les densités de
courant, les surfaces respectives des capacités MOS n’interviennent pas dans les résultats
obtenus, et l’information que l’on peut extraire de ces courbes concerne une densité surfacique
de charge.
On constate que les bosses de courant observées dans les échantillons pour lesquels les îlots
sont obtenus par implantation (A3 et A31) concernent un nombre de porteurs bien plus
important que dans le cas des échantillons obtenus à partir de SiOX LPCVD contenant du
silicium excédentaire.
Il suffit de diviser la pente des droites de régressions tracées sur la Figure 50 par la charge
élémentaire d’un électron pour obtenir la densité de charge impliquée dans les pics de courant.
Les résultats des calculs pour chaque échantillon se trouvent dans le Tableau 4. Ils confirment
qu’une densité de charge bien plus importante est stockée dans les échantillons élaborés par
implantation que dans ceux qui le sont par LPCVD.
68
SiOX LPCVD
-2
PS (V.A.m )
-2
D (cm )
Implantation + A3
-4
-4
2,339.10
3,157.10
11
12
1,5.10
2,0.10
Implantation + A31
3,324.10-4
2,1.1012
Tableau 4 : Valeurs des intégrales du courant de déplacement (PS) effectuée sur
la Figure 50 et de la densité de charges correspondantes (D), pour les trois
types d’échantillons étudiés.
La partie III.2.a. montre le calcul effectué pour une capacité de petite taille (10-8 cm2),
élaborée par implantation et ayant subi un recuit A31 (Figure 49). La densité trouvée est
1,5.1012 cm-2, alors que pour les capacités étudiées ici, de surface 4.10-8 cm2, on obtient une
densité de 2,1.1012 cm-2. Pour expliquer cette différence, le premier argument que l’on peut
avancer est d’ordre métrologique. En effet, les appareils de mesure ne sont pas les mêmes
dans les deux cas : c’est un Keithley 4200 qui est à l’origine de l’intégration présentée par la
Figure 49 alors que pour la Figure 50, c’est un Keithley 595. Ce dernier a une moindre
résolution sur les bas courants, mais ceci ne devrait pas aboutir à une telle différence dans les
résultats.
En revanche, les différences trouvées entre les densités de charges injectées peuvent résulter
de la présence d’îlots de plus grosse taille. Si la probabilité de les trouver est faible, leur
présence est tout de même statistiquement plus probable dans les capacités ayant des
surfaces importantes. Leur taille importante pourrait permettre de stocker plusieurs charges
dans chacun d’eux. A densité égale, de tels îlots sont par conséquent susceptibles d’augmenter
la densité de charges stockées dans la structure.
Cette analyse a montré quantitativement les aptitudes des différentes capacités à retenir des
charges au cours des balayages en tension. Nous nous attachons par la suite à préciser
qualitativement le lieu physique où ces porteurs sont stockés. En effet, à ce stade, rien ne
permet de déterminer si les porteurs sont chargés dans les îlots ou si au contraire ils sont
capturés par des pièges présents dans le volume où à l’interface isolant/substrat, par exemple.
Pour tenter de remédier à cela à partir des mesures de courant de déplacement, il est possible
d’extraire un paramètre important, qui est la capacité liant le lieu de stockage au substrat. On
peut ainsi déterminer la profondeur à laquelle sont localisés les porteurs responsables du
chargement et c’est l’objet de la partie suivante.
III.3. Détermination du lieu de stockage
III.3.a) Extraction de la valeur de la capacité grille de contrôle/grille flottante à
partir les courants transitoires
Si on reprend le modèle électrique utilisé précédemment (Figure 48), on a QFG=QFS-QCF , ce qui
permet d’écrire :
QFG = CFS VFS − CCF VCF
69
(8)
⇒ VCF =
CFS
CCF
VFS −
QFG
CCF
⎛
C
⇒ VCF ⎜1 + FS
⎜
CCF
⎝
⇒ VCF =
⇒ VCF =
CFS
=
CCF
Q
( VG − VCF ) − CFG
⎞ CFS
Q
VG − FG
⎟=
⎟ C
CCF
CF
⎠
CCF
CCF + CFS
CFS
CCF + CFS
(10)
⎛ CFS
Q ⎞
VG − FG ⎟
⎜
⎜C
CCF ⎟⎠
⎝ CF
VG −
(9)
CF
(11)
QFG
(12)
CCF + CFS
Lorsque le courant de déplacement est établi, le chargement peut être considéré comme un
processus quasi-statique. La variation du nombre de charges stockées dans la structure (noté
dQFG) est alors égale à l’opposé de la variation de la charge dQCF. Ainsi,
dQFG + dQCF = 0 ⇒
⇒
⇒
dQFG
⇒
dt
dQFG
= −CCF
dt
dQFG
dt
dVCF
+ CCF
CFS
+
dt
dVG
CCF + CFS dt
+
dQCF
dt
(13)
=0
(14)
=0
CCF
dQFG
CCF + CFS
dt
⎞
dQFG ⎛
CCF
CFS
dVG
⎜1 −
⎟ = −CCF
dt ⎜⎝
CCF + CFS ⎟⎠
CCF + CFS {
dt
(15)
(16)
K
⎛
CCF
Or ⎜ 1 −
⎜
CCF + CFS
⎝
Donc
Ainsi,
⎞ C +C −C
CFS
FS
CF
=
⎟ = CF
⎟
CCF + CFS
CCF + CFS
⎠
dQFG ⎛
CFS
⎜
dt ⎜⎝ CCF + CFS
dQFG
dt
⎞
⎛
CFS
⎟ = −K.CCF ⎜
⎟
⎜C + C
FS
⎠
⎝ CF
= −K.CCF
⎞
⎟
⎟
⎠
(17)
(18)
(19)
Cette expression indique que lorsque l’équilibre quasi-statique dQFG=dQCF est atteint, le
courant tunnel (dont l’intensité est égale à dQFG/dt) donne lieu à un courant de déplacement
d’intensité –K.CCF, où K est la vitesse de la rampe de tension appliquée à la grille. Un
chargement en électrons (QFG<0) aboutit donc à un courant de déplacement positif.
70
Comme, dans notre cas, K.CCF est constant par rapport au temps, cet équilibre implique la
nullité de la dérivée du courant :
2
d QFG
dt
2
=
(
d K.CCF
dt
) =0
(20)
Dans le cas des courants que l’on observe expérimentalement, cela correspond aux maxima
locaux des bosses de courant. L’expression qui découle de l’équilibre électrostatique implique
donc que la valeur maximale du sur-courant soit proportionnelle à la rampe. La constante
reliant ces deux variables est CCF, la capacité de l’oxyde de contrôle.
Dans un premier temps, l’étude préliminaire de la partie III.2.a. a été utilisée pour vérifier que
les paramètres introduits dans le calcul de la charge injectée dans les échantillons peuvent être
utilisés pour mesurer les maxima de courant de déplacement. La Figure 51 montre la valeur
des maxima des pics de courant en fonction de la vitesse de balayage utilisée pour polariser la
grille de capacités contenant des îlots formés par implantation et ayant subi un recuit A31.
Pour les rampes inférieures à 2 V/s, on obtient une droite, comme prévu par le modèle
électrique. De nombreux points ont été considérés et leur alignement est remarquable.
Pour des vitesses de balayage plus élevées, les points sont de plus en plus éloignés de la droite
à mesure qu’on augmente K. Les rampes comprises entre 0,1 V/s et 1.5 V/s sont donc
adaptées à l’étude des maxima du courant de déplacement.
D’après le modèle, la pente de la droite permet d’obtenir la valeur de la capacité de la barrière
séparant la grille du lieu de stockage des charges mises en jeu par le courant de chargement.
Dans notre cas, on trouve CCF=34,38 pF.
200
175
IMAX (pA)
150
Figure 51 : Maxima des pics
de courant en fonction de la
rampe appliquée à la grille.
Ces calculs ont été réalisés
pour des capacités ayant subi
le recuit oxydant A31.
125
100
75
IMAX=34,38.K + 26.76
50
25
0
0
1
2
3
4
5
K (V/s)
On remarque en outre que la droite qui passe par les points correspondant aux rampes les
plus faibles ne passe pas par l’origine. Ceci est tout à fait compatible avec le mode opératoire
choisi, étant donné que l’on n’a pas enlevé le courant de conduction pour ne garder que le
courant de déplacement. Comme on l’a précédemment évoqué, la composante dynamique du
courant dépend de la rampe. C’est donc elle qui est en rapport avec le coefficient directeur de
la droite de régression. La composante statique est indépendante de la rampe et, comme les
71
maxima de courant apparaissent toujours pour des tensions de grille proches, on peut
considérer la valeur du courant de conduction comme étant quasi-constante. Cette
composante statique correspond par conséquent à l’ordonnée à l’origine de l’équation de la
droite de régression.
Ces considérations faites, comparons les extrema de courant pour les trois échantillons étudiés
dans ce chapitre. Là encore, pour pouvoir comparer les échantillons entre eux, c’est en fait la
densité de courant maximale (notée JMAX) qui doit être représentée en fonction de la rampe
(Figure 52). Pour chacun des échantillons étudiés, on peut tracer une droite passant par les
points ou tout au moins suffisamment près d’eux pour rendre la régression satisfaisante.
Le mode opératoire choisi ne comprend pas la soustraction du courant de conduction. Comme
on l’a déjà évoqué, ceci explique que les courbes ne passent pas par l’origine. Cela permet en
revanche une meilleure précision, car le fait de soustraire le courant de conduction introduit
des incertitudes dans les courants considérés et explique pourquoi le calcul de la charge
injectée présenté sur la Figure 50 aboutit à une dispersion des points légèrement supérieure
par rapport au cas présent (Figure 52).
4,0x10
SiOx LPCVD
-3
-4
JMAX=4,696.10 xK+8,271.10
-5
Figure 52 : Maxima des pics
Si implanté + recuit A31
-3
JMAX=3,403.10 xK-5,019.10
JMAX (A/m²)
3,0x10
-4
de densité de courant en
Si implanté + recuit A3
-3
-3
JMAX=2,406.10 xK-5,617.10
fonction
-4
de
la
rampe
appliquée à la grille, pour
les trois types d’échantillons
2,0x10
-3
décrits
dans
la
première
partie de ce chapitre. En
1,0x10
trait plein, on peut voir les
-3
droites
de
régression
passant au plus prés des
points représentés.
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
1,4
K (V/s)
Selon le modèle, les pentes trouvées sur la Figure 52 sont égales aux capacités surfaciques
(notées CCF,S) liant la grille aux lieux de stockage des porteurs mis en jeu dans le processus
transitoire observé. On remarque que la valeur de CCF,S est plus élevée pour les échantillons
issus de l’implantation que pour ceux qui sont élaborés par LPCVD. Deux interprétations
peuvent être avancées : la première tient au fait que l’isolant séparant les îlots de la grille est
plus épais dans le cas des échantillons élaborés par LPCVD (8 nm) que dans le cas des
échantillons fabriqué par implantation (5 nm). En effet, plus une couche d’isolant est épaisse,
plus sa capacité est faible. On peut également invoquer la plus faible densité de lieux de
chargement, que l’on peut déduire du calcul de la charge réalisé dans la partie III.2 de ce
chapitre.
On peut en effet supposer que les lieux de chargement sont discrets, qu’il s’agisse de pièges
situés dans le volume de l’isolant ou des îlots eux-mêmes. La capacité d’une couche d’isolant
ne dépend pas seulement de son épaisseur, mais elle est également proportionnelle à sa
surface. La capacité surfacique CCF,S dépend donc de la surface efficace couverte par les pièges
72
responsables du stockage des charges. Cette surface efficace dépend de la densité surfacique
des pièges considérés, mais aussi de leur section de capture. Ainsi, la faible capacité surfacique
notée dans le cas des dispositifs élaborés par LPCVD peut trouver son origine dans la densité
plus faibles des lieux de chargement qu’elles contiennent, ou par leur faible section efficace.
Les courbes présentées sur la Figure 52 montrent également qu’en ce qui concerne les
capacités contenant des îlots provenant de l’implantation de silicium, le recuit A3 aboutit à une
valeur de CCF,S plus faible que le recuit A31.
Or le recuit A3 représente un budget thermique inférieur au recuit A31. En effet, comme le
montre le Tableau 1, le recuit A31 diffère du recuit A3 par les conditions d’entrée des
échantillons dans le four. Cette phase, réalisée sous atmosphère inerte (N2), précède le recuit
oxydant proprement dit. La durée de cette phase préliminaire est plus longue et sa
température est plus élevée au cours du recuit A31 que pour le recuit A3.
On peut là encore considérer qu’une capacité surfacique plus faible entre la grille et les lieux de
stockage peut être due soit à une densité surfacique plus faible des îlots, soit à leur diamètre
inférieur.
Pourtant, sur des échantillons identiques, il a été démontré expérimentalement que la
température du recuit sous atmosphère inerte n’a qu’une influence limitée sur les
caractéristiques structurales de la population d’îlots [Carrada03] . Ceci est dû au fait que la
longueur de diffusion du silicium est très faible, a fortiori pour des températures aussi faibles
que celles utilisées ici pour l’entrée dans le four, 400°C pour le recuit A3 et 600°C pour le
recuit A31 (Tableau 1).
Ainsi, en ce qui concerne les implications structurales des valeurs de capacité entre la grille et
les lieux de chargement, on peut dire qu’il est difficile de conclure à une augmentation de la
surface couverte par les îlots ou de leur densité surfacique. Il est nécessaire d’évaluer
quantitativement les différences que l’on peut attendre au niveau des caractéristiques de la
population des îlots entre les recuits A3 et A31 pour aboutir aux différences des valeurs de CCF
observées sur les échantillons.
C’est cette évaluation qui fait l’objet de la partie suivante, qui propose de modéliser la capacité
CCF en fonction des paramètres structuraux de la couche de nanocristaux. Ainsi, il peut être
possible de déterminer si ce sont bien ces paramètres (taille des îlots et densité surfacique) qui
influent sur les caractéristiques du chargement. Dans le cas contraire, on aura mis en évidence
que ce ne sont pas les îlots qui sont le lieu de stockage des porteurs injectés au cours des
mesures de courants transitoires.
III.3.b) Détermination de la capacité CCF séparant un plan d’îlot d’une grille
métallique à partir du modèle simple du taux de recouvrement
Dans un premier temps, nous avons utilisé un modèle analytique simple pour déterminer la
capacité CCF liant un plan d’îlots et une grille métallique. Dans le cas d’une grille flottante
continue, c’est-à-dire d’une couche de polysilicium comme celles que l’on trouve entre le canal
et la grille d’une mémoire FLASH conventionnelle par exemple, on peut déterminer très
73
simplement la valeur de CCF. En effet, si on fait l’hypothèse que la couche d’isolant placée entre
la grille et la grille flottante est un oxyde parfait d’épaisseur dCF, on a :
CCF =
εr ε 0
dCF
S
(21)
où εr et ε0 sont respectivement la permittivité relative du SiO2 et la permittivité du vide et S est
la surface de la capacité mesurée.
Dans le cas des composants que l’on a étudiés, que les électrons soient stockés dans les îlots
ou dans des pièges situés dans le volume d’isolant qui les entoure, il n’est plus possible de
modéliser ce lieu de chargement comme une couche de matériau semi-conducteur ayant une
surface identique à celle de la capacité.
Dans le cas d’un chargement dans les îlots, on peut calculer la surface de la grille flottante en
déterminant la surface totale recouverte par les îlots. Il est alors possible de calculer la
capacité reliant la grille au plan d’îlot, en divisant la structure en deux capacités
[Busseret01] . L’une ne contient pas d’îlots et l’autre, dont la surface équivaut à celle qui
est couverte par les îlots, contient une couche de silicium continue, comme le montre le
schéma présenté par la Figure 53.
Figure 53 : Représentation schématique de la modélisation d’une capacité contenant des
nanocristaux par deux capacités en parallèle. Sîlot est obtenu en calculant la portion de surface
de la capacité pour laquelle les îlots sont en regards avec la grille. Soxyde représente le reste de
la surface de la capacité, pour laquelle la grille n’est en regard d’aucun îlot [Busseret01].
Pour décrire les structures, on peut introduire une variable α, appelée taux de recouvrement et
qui est égale à la surface couverte par les îlots divisée par la surface totale de la capacité
MOS :
α=
Silots
Stotale
(22)
La surface couverte par les îlots est calculée en estimant la surface se trouvant en regard de la
grille, c’est-à-dire l’aire de la demi-sphère ayant le même rayon que les îlots :
74
2
Silots
⎛∅⎞
= 2π ⎜ ⎟
⎝2⎠
(23)
où ∅ est le diamètre moyen des nanocristaux.
La capacité CCF peut alors s'écrire comme la capacité d'un plan de silicium continu mutlipliée
par le facteur α :
CCF = α
εr .ε0
Stotale
dCF
(24)
Notons que si α=1, il y a recouvrement total et on se trouve dans le cas d'une grille flottante
continue. Si α=0, il n'y a aucun îlot dans la structure et sa capacité se calcule comme celle
d'une capacité MOS classique.
Dans le cadre de ce modèle, on voit que la variation de la capacité CCF peut avoir pour origine
une ou plusieurs des causes suivantes :
1) La variation de la densité des îlots, qui fait varier α;
2) La variation de leur diamètre, qui fait également varier α;
3) La variation de l’épaisseur dCF de la couche qui les sépare de la grille, ou la variation
de la permittivité relative εCF de cette couche, qui peut être modifiée par la présence
de silicium excédentaire.
Le 3ème point évoqué dans cette énumération a une influence importante sur la capacité totale
de la structure. Par la suite, nous fixerons les paramètres dCF et de εCF de manière à ce que la
capacité totale de la structure soit proche des valeurs de COX mesurées sur les structures
étudiées. Ces valeurs de COX représentent la capacité totale des composants en condition
d’accumulation et elles sont mesurées dans la quatrième partie de ce chapitre. Lorsque des
images TEM sont présentes, il est possible de fixer de manière encore plus précise les
épaisseurs des couches. C’est certainement pour ce paramètre que la meilleure précision est
atteinte par la microscopie électronique en transmission, alors que la détermination de la
densité et du diamètre des îlots est généralement plus difficile [Carrada03] .
Dans ces conditions, seules les variables évoquées dans les deux premiers points de
l’énumération précédente seront considérées. La modélisation de CCF va donc être réalisée
dans deux cas. Premièrement, nous fixerons la densité d’îlots et nous ferons varier leur
diamètre. Dans un deuxième temps, ce sera le diamètre qui sera fixé et la densité qui sera
variable. Un ensemble de valeurs de CCF sera alors disponible avec différentes valeurs pour les
paramètres densité et diamètre. En comparant ces valeurs de CCF aux valeurs expérimentales
nous pourrons alors conclure sur la pertinence de l’hypothèse d’un chargement dans les îlots.
i. Evaluation du diamètre compatible avec une densité d’îlots fixée
Dans un premier temps, fixons la densité d’îlots (notée D) à partir des données structurales.
Pour les composants élaborés à partir d’une couche de SiOX LPCVD, en l’absence de résultats
structuraux, c’est la densité de charge calculée dans la partie III.2 qui sera prise en compte, ce
75
qui revient à faire l’hypothèse d’un électron stocké par îlot. En ce qui concerne les échantillons
implantés, c’est la densité d’îlots évaluée à partir de l’analyse TEM en vue plane
[Carrada03] qui sera utilisée.
Dans le Tableau 5, les paramètres expérimentaux sont comparés aux valeurs qu’il est
nécessaire d’introduire dans le modèle pour obtenir des valeurs de COX et de CCF identiques à
celles que l’on obtient par caractérisation électrique.
En ce qui concerne les structures dont l’élaboration consiste à créer une couche de SiOX par
LPCVD, on remarque tout d’abord qu’il existe une différence très importante entre l’épaisseur
d’oxyde de grille dCF visée lors de l’élaboration et celle que l’on peut déduire des mesures de
COX. Des images TEM, seraient nécessaires pour infirmer définitivement les valeurs de dCF
indiquées par l’élaborateur.
SiOX LPCVD
Valeurs
exp.
D (1011 cm-2)
dCF (nm)
dFS (nm)
dSi (nm)
∅ (nm)
COX (pF)
CCF (pF)
1,5(a)
(b)
8
3(b)
5(b)
5(b)
198(d)
66,69(e)
Modèle
1,5
17,7
3
5
10,1
198,01
66,74
Implantation + A3
Valeurs
exp.
15(c)
(c)
5
6,1(c)
2,3(c)
2,2(c)
108(d)
96,24(e)
Modèle
15
5
6,1
2,3
3,9
107,77
96,48
Implantation + A31
Valeurs
exp.
Modèle
15(c,f)
(c,f)
5
6,1(c,f)
2,3(c,f)
2,2(c,f)
107(d)
136,14(e)
15
5
6,4
2,3
4,6
107,14
136,17
(a)
Valeur issue du calcul de la charge injectée pendant le transitoire de courant, présenté dans la partie III.2 de ce chapitre.
(b)
Dimensions visées au cours de l’élaboration du lot 9546P (LETI).
(c)
Valeur issue d’une étude par microscopie en transmission des échantillons élaborés par implantation et soumis à un recuit A3
[Carrada03].
(d)
(e)
(f)
Valeur obtenue par caractérisation électrique quasi-statique, issue des courbes présentées dans la partie IV de ce chapitre.
Valeur obtenue par la modélisation en circuit électrique équivalent, présenté dans la partie III.3.
Cette valeur est identique à celle donnée pour le recuit A3, aucune analyse TEM n’ayant été réalisée sur les composants ayant subi le
recuit A31. Etant données les différences qui existent entre ces deux recuits, il n’est pas attendu de différences structurales importantes
entre les composants ayant subi l’un d’eux [Carrada03] .
Tableau 5 : Comparaison entre les paramètres expérimentaux et ceux qu’il est nécessaire
d’entrer comme variable dans le modèle pour aboutir à des valeurs de COX et de CCF
compatibles avec les mesures électriques. Cette comparaison est réalisée pour les trois types
d’échantillons étudiés dans ce chapitre et dans chaque cas, la densité des lieux de
chargement est considérée comme un paramètre fixe. Les divergences les plus notables sont
reportées en rouge et discutées dans le texte.
Il est tout de même peu probable d’imaginer que les épaisseurs réelles des couches équivalent
celles qui ont été visées, étant donnée la valeur de COX mesurée (cf partie III.2.). Un oxyde de
grille de 8 nm aboutirait à une capacité en accumulation comprise entre 306,5 pF (α=0,
absence de lieu de stockage) et 388 pF (α=1, grille flottante continue). La valeur
expérimentale COX=198 pF se trouve bien en dehors de cet intervalle, et l’épaisseur de l’oxyde
de grille donnée par le modèle est par conséquent plus crédible.
76
Une divergence très importante est aussi à noter en
ce qui concerne le diamètre des îlots ( ∅ ). Dans
Si
l’hypothèse de nanocristaux sphériques, leur
diamètre serait approximativement égal à l’épaisseur
de la couche d’ilots, soit 5 nm. Le modèle donne lui
un diamètre de 10,1 nm. Il est donc nécessaire que
les îlots aient une forme oblongue pour respecter
cette dimension car, dans ce cas, il est tout à fait
Figure 54 : Représentation
concevable que le diamètre moyen des îlots soit plus
schématique d’un îlot oblong,
avec ses dimensions.
important que leur hauteur, comme le montre le
schéma représenté sur la Figure 54. Notons que
cette forme est souvent observée pour les îlots
élaborés par LPCVD, ce qui ne remet donc pas en cause la densité utilisée pour déterminer les
dimensions des îlots.
d
∅
Dans le cas des échantillons obtenus par implantation et recuit de type A3, on remarque qu’un
seul paramètre diffère des valeurs expérimentales. Il s’agit du diamètre moyen des îlots,
évalué par le modèle à 3,9 nm contre 2,2 nm pour les images TEM. Cette divergence est trop
importante, car elle dépasse largement l’incertitude absolue sur la mesure du diamètre moyen
des nanocristaux, qui est de ±0,5 nm [Carrada03] . La densité fixée pour les calculs
apparaît donc trop faible.
On attend peu de différences structurales entre les résultats relatifs aux recuits A3 et A31.
Pour ce dernier, on remarque néanmoins que la caractérisation électrique donne des valeurs
expérimentales de CCF différente du recuit A3 ; des différences structurales doivent donc
justifier ces observations. Si on considère que les lieux de chargement ont une densité
identique quel que soit le recuit, alors leur diamètre doit passer de 3,9 nm à 4,6 nm entre le
recuit A3 et le recuit A31 pour corroborer l’augmentation de CCF.
On peut penser que le recuit A31, plus long, permet au processus de croissance des îlots
d’arriver à un stade plus proche de son terme, aboutissant ainsi à la formation d’îlots
légèrement plus gros en agglomérant plus de silicium excédentaire que lors du recuit A3. Cette
hypothèse est d’ailleurs à rapprocher de la valeur de l’épaisseur de l’oxyde tunnel, qui est de
6,4 nm selon le modèle et est donc plus importante que dans le cas du recuit A3 (6,1 nm).
Ceci peut signifier que plus d’atomes excédentaires de silicium sont consommés au cours du
recuit A31 que lors du recuit A3, ce qui peut être vu comme une diffusion accrue des atomes
de silicium dans la matrice. Néanmoins, un diamètre de 4,6 nm représente plus du double de
la valeur mesurée à partir des images TEM. Ces images correspondent certes à un recuit A3,
mais on ne s’attend pas à de telles différences entre les deux recuits oxydants, et la valeur de
densité peut encore une fois être désignée comme étant à l’origine de ce résultat inattendu.
Concernant les îlots élaborés par LPCVD, la densité fixée donne donc des dimensions plausibles
pour les îlots. En revanche, l’interprétation des divergences entre les valeurs expérimentales et
les paramètres entrés dans le modèle pour vérifier les caractéristiques électriques ne permet
donc pas d’avancer des conclusions satisfaisantes sur le plan structural pour les îlots élaborés
par implantation. Il est donc nécessaire d’étudier l’influence de l’autre paramètre important
dans la détermination de CCF, à savoir le diamètre des îlots.
77
ii. Evaluation de la densité d’îlots compatible avec un diamètre fixé
Cette fois, le diamètre des îlots a été fixé avec des valeurs issues des images TEM (structures
élaborées par implantation) ou avec les valeurs visées lors de la fabrication des échantillons
(SiOX LPCVD). Dans le Tableau 6, les paramètres expérimentaux sont comparés aux valeurs
qu’il est nécessaire d’introduire dans le modèle pour obtenir des valeurs de COX et de CCF
identiques à celles que l’on obtient par caractérisation électrique.
Les échantillons dont le processus d’élaboration est basé sur la réalisation d’une couche de
SiOX par LPCVD donnent lieu, là encore (cf i.), à une divergence importante entre l’épaisseur
d’oxyde de grille (dCF) visée par le procédé d’élaboration et la valeur donnée par le modèle.
Celle ci est identique à la valeur considérée lorsque c’est la densité d’îlots qui est fixée.
SiOX LPCVD
Valeurs
exp.
5(a)
∅ (nm)
dCF (nm)
dFS (nm)
dSi (nm)
D (1011 cm-2)
COX (pF)
CCF (pF)
(a)
8
3(a)
5(a)
1,5(b)
198(d)
66,69(e)
Modèle
5
17,7
3
5
6,12
198,5
66,69
Implantation + A3
Valeurs
exp.
2,2(c)
(c)
Modèle
2,2
5
6,1(c)
2,3(c)
15(c)
108(d)
96,24(e)
5
6,1
2,3
45,82
107,77
96,23
Implantation + A31
Valeurs
exp.
Modèle
2,2(c,f)
(c,f)
5
6,1(c,f)
2,3(c,f)
15(c,f)
107(d)
136,14(e)
2,2
5
6,4
2,3
64,82
107,14
136,13
(a)
Dimensions visées au cours de l’élaboration du lot 9546P (LETI).
(b)
Valeur issue du calcul de la charge injectée pendant le transitoire de courant, présenté dans la partie III.2 de ce chapitre.
(c)
Valeur issue d’une étude par microscopie en transmission des échantillons élaborés par implantation et soumis à un recuit
A3
(d)
[Carrada03] .
Valeur obtenue par caractérisation électrique quasi-statique, issue des courbes présentées dans la partie IV de ce chapitre.
(e)
Valeur obtenue par la modélisation en circuit électrique équivalent, présenté dans la partie III.3.
(f)
Cette valeur est identique à celle donnée pour le recuit A3, aucune analyse TEM n’ayant été réalisée sur les composants
ayant subi le recuit A31. Etant données les différences qui existent entre ces deux recuits, il n’est pas attendu de différences
structurales importantes entre les composants ayant subi l’un d’eux
[Carrada03] .
Tableau 6 : Comparaison entre les paramètres expérimentaux et ceux qu’il est nécessaire
d’entrer comme variable dans le modèle pour aboutir à des valeurs de COX et de CCF
compatibles avec les mesures électriques. Cette comparaison est réalisée pour les trois types
d’échantillons étudiés dans ce chapitre, et dans chaque cas, le diamètre moyen ∅ est
considéré comme un paramètre fixe. Les divergences les plus notables sont reportées en
rouge et discutées dans le texte.
Quels que soient les autres paramètres considérés, il semble que l’oxyde de grille ait bien une
épaisseur réelle de l’ordre de 17,7 nm. Pour prendre en compte les résultats de la
caractérisation électrique, le modèle nécessite une densité de pièges (D) de 6,12.1011 cm-2.
Cette valeur est bien plus élevée que la densité de charges injectées lors des mesures de
transitoires de courants sur ces structures (partie III.2). Par conséquent, le diamètre fixé pour
trouver cette valeur ne correspond pas aux résultats de la caractérisation électrique.
Dans le cas des échantillons obtenus par implantation et recuit de type A3, on remarque que la
densité d’îlots diffère de la valeur mesurée sur les images TEM. Le modèle donne une densité
de 4,58.1012 cm-2, qui correspond approximativement au double du nombre de charges
78
injectées lors des mesures de courant (présentées dans la partie III.2) et paraît donc trop
élevée.
Le modèle appliqué aux échantillons implantés et ayant subi le recuit A31 donne une densité
d’îlots de 6,48.1012 cm-2. C’est une valeur bien supérieure à celle mesurée grâce aux images
TEM, et également bien supérieure au nombre de charges injectées au cours des mesures de
courant. Là encore, le diamètre fixé pour trouver cette valeur ne correspond pas aux résultats
de la caractérisation électrique.
Plus généralement, les valeurs de diamètres fixées ne permettent pas de trouver un accord
satisfaisant avec les mesures expérimentales. Cette conclusion est donc identique à celle que
l’on peut tirer des calculs réalisés en fixant la densité de pièges, et ce mauvais accord nous
amène à quelques conclusions, présentées ci-dessous.
iii. Conclusions concernant les interprétations faites grâce au modèle du taux de
recouvrement
A la lumière des Tableaux 5 et 6, on a vu que le modèle du taux de recouvrement ne donne
pas des valeurs de capacité compatibles avec les résultats de la caractérisation électrique si on
utilise les paramètres structuraux. Le cas des îlots élaborés par LPCVD est le seul à aboutir à
des paramètres qui correspondent aux données fournies par les élaborateurs de manière
satisfaisante, avec une densité de 1,5.1011 cm-2, un diamètre de 10,1 nm et une hauteur de 5
nm.
Ce mauvais accord entre les valeurs modélisées et expérimentales, surtout pour les îlots
implantés, peut bien entendu mettre en doute la relation entre les nanocristaux et le
chargement. En d’autres termes, cela peut signifier que les porteurs, ou tout au moins une
partie d’entre eux, sont stockés dans des défauts présents dans le volume de l’isolant ou à
proximité des îlots. Mais il est également possible de remettre en question le modèle utilisé,
qui est somme toute simpliste. La géométrie des îlots, en particulier, n’est pas prise en
compte, ce qui peut représenter une approximation trop grossière dans l’estimation des
capacités, étant données les distances très faibles qui séparent les plans d’îlots et le substrat.
La partie suivante propose une autre méthode pour évaluer analytiquement la capacité CCF.
Nous aurons alors deux méthodes analytiques, que nous confronterons ensuite à la méthode
des éléments finis.
III.3.c) Détermination de la capacité CCF séparant un plan d’îlot d’une grille
métallique par la méthode des charges-images et comparaison avec la
méthode des éléments finis
i. Evaluation de la capacité reliant une sphère conductrice et un plan conducteur
Des expressions littérales, issues de la méthode des charges-images, peuvent être utilisées
pour estimer la capacité reliant une sphère conductrice et un plan [Durand66, Leroy01] .
79
⎛
⎛
⎛ d
⎞⎞ ∞ ⎡
⎛ d
⎞ ⎞⎤
Csphère −plan = 4πεr ε0r.sinh ⎜ acosh ⎜
+ 1 ⎟ ⎟ . ∑ ⎢sinh ⎜ n.acosh ⎜
+ 1⎟ ⎟⎥
⎝ 2r
⎠ ⎠ n=1 ⎢⎣
⎝ 2r
⎠ ⎠ ⎥⎦
⎝
⎝
(25)
Cette valeur établit le lien entre un îlot unique et un plan. Si cette valeur est multipliée par la
densité d’îlots par unité de surface D, puis par la surface de l’échantillon S que l’on veut
étudier, on a alors une valeur approximée de la capacité entre le plan de densité D et la grille.
Les principales approximations faites par cette méthode sont les suivantes :
• Elle assimile les îlots à des sphères conductrices, c’est-à-dire qu’elle est considère plutôt
des îlots métalliques et non semi-conducteurs.
• Elle considère qu’aucune interaction électrostatique n’existe entre les îlots, ce dont on peut
douter, en particulier pour les densités les plus élevées.
Ce deuxième point nous paraît le plus critique et c’est pourquoi il est extrêmement important
d’en estimer la validité grâce à la méthode des éléments finis, décrite ci-dessous.
ii. Détermination de CCF par la méthode des éléments finis
La méthode des éléments finis a l’avantage de permettre la prise en compte de la complexité
géométrique engendrée par la nature granulaire du plan d’îlots, et par leur haute densité. Elle
a par ailleurs l’inconvénient d’être relativement lourde à mettre en place. Pour obtenir des
résultats précis, il convient d’utiliser des maillages contenant plusieurs dizaines de milliers
d’éléments, ce qui requiert des ressources informatiques importants.
La Figure 55 montre la structure utilisée par le logiciel FEMLAB pour évaluer la capacité reliant
une grille métallique et un ensemble de quatre îlots de 2 nm de diamètre entourés d’isolant.
Afin de respecter la densité (notée D) d’îlots observée lors des mesures TEM, la surface S de la
structure modélisée sous FEMLAB est donnée pour n îlots par l’expression :
S =
n
D
Dans le cas de la Figure 55, n=4 et plus généralement, il est nécessaire que n soit supérieur à
2 pour prendre en compte les interactions électrostatiques entre îlots voisins. A partir de cette
structure de base, pour calculer la capacité CCF rendant compte du couplage entre la grille et
les îlots, un potentiel de 1 V est appliqué à la grille, alors que les îlots sont portés à un potentiel
nul.
80
Figure 55 : Structure utilisée sous
FEMLAB pour modéliser une grille
métallique (couche inférieure) et
d’un plan de quatre îlots eux aussi
métalliques, séparés ici par une
épaisseur de 6 nm. La couche
entourant les îlots est composée
d’oxyde. On peut voir le maillage
utilisé par FEMLAB pour effectuer
les calculs par la méthode des
éléments finis.
La Figure 56 montre quelques surfaces isopotentielles obtenus si on applique une telle
polarisation. On remarque que les plans correspondant aux potentiels proches de 0 V suivent
la géométrie sphérique des îlots et sont par conséquent fortement courbés. A l’inverse, les
potentiels proches de 1 V sont plutôt parallèles à la surface de la grille.
Figure
56
:
Surfaces
isopotentielles calculées à
partir
de
la
structure
présentée sur la Figure 55,
en appliquant un potentiel
de 1 V sur la grille et en
maintenant les îlots à une
tension de 0 V. Quinze
plans équipotentiels sont
représentés, chacun ayant
une couleur différente. Le
rouge sombre correspond à
un potentiel de 1 V et le
bleu foncé à un potentiel de
0 V.
81
Les surfaces correspondant aux potentiels compris entre 0 et 1 V ont des aspects
intermédiaires entre ces deux géométries. Ces remarques permettent de prévoir que le
résultat du calcul de la capacité séparant l’électrode de grille des îlots va différer du calcul
simple de la capacité séparant deux électrodes continues et parallèles, où toutes les surfaces
isopotentielles sont par définition des plans parallèles. La charge totale engendrée par la
différence de potentiel appliquée entre la grille et les îlots est évaluée en intégrant la charge
surfacique créée à la surface de la grille. Comme la différence de potentiel vaut 1 V, la capacité
est égale à la charge calculée, et en la divisant par la surface du dispositif, on obtient la
capacité du plan d’îlots par unité de surface. Il suffit alors de la multiplier par la surface de la
capacité MOS sur laquelle on a fait les mesures pour la comparer aux valeurs expérimentales
de CCF.
A ce stade, une remarque importante s’impose : Pour calculer CCF, une structure telle que celle
qui est représentée sur la Figure 55 considère les lignes de champ issues de la totalité de l’îlot.
Or dans un dispositif mémoire, on polarise les îlots entre la grille et le substrat. Dans ce cas,
une partie des lignes de champs relient les îlots à la grille, et l’autre partie au substrat. La
configuration est donc différente de la situation prise en compte par la structure dessinée sur la
Figure 55. En fait, on ne peut pas modéliser un îlot en présence d’un seul plan conducteur
(Figure 57a) comme un îlot inclus entre deux électrodes planes (Figure 57b). Dans le premier
cas de figure, toutes les lignes de champ partant du nanocristal sont reliées à l’électrode
unique. Dans le deuxième cas, les lignes de champ vont être partagées entre chacune des
électrodes.
(a)
(b)
(c)
(d)
Figure 57 : Schémas représentant un îlot associé à un ou plusieurs plans, ainsi que quelques
lignes de champ électrique (en pointillés noirs).
82
Pour rendre compte de cette situation au moment de calculer la capacité entre le plan d’îlots et
la grille de contrôle, on peut remarquer que chaque électrode reçoit les lignes de champ de la
partie hémisphérique de l’îlot qui est directement en regard avec elle (Figure 57c). Ainsi, la
capacité d’une jonction îlot/électrode peut se ramener au cas simple de l’évaluation de la
capacité liant l’électrode à un hémisphère de diamètre équivalent à celui de l’îlot (Figure 57d).
Par la suite, nous avons considéré que les îlots pouvaient être séparés en deux hémisphères,
séparés par un plan parallèle aux interfaces substrat/isolant et isolant/grille. Les lignes de
champ provenant de l’hémisphère le plus proche du substrat sont alors considérées comme
étant toutes reliées au substrat. De même, les lignes de champ provenant de l’hémisphère le
plus proche de la grille sont considérées comme étant toutes reliées à la grille.
Si l’on veut connaître la capacité existant entre les îlots et la grille, on est ainsi amené à
considérer uniquement les lignes de champ provenant de l’hémisphère le plus proche de la
grille, ce qui revient à simuler les structures comme le montre la Figure 58.
Figure 58 : Structure utilisée
sous FEMLAB pour modéliser
une grille métallique (couche
inférieure) et un plan de quatre
îlots eux aussi métalliques,
séparés ici par une couche
d’oxyde de 5 nm. Seule la
moitié des îlots sont inclus
dans l’isolant, ce qui permet de
ne prendre en compte que les
lignes de champ provenant de
l’hémisphère inférieur.
Pour reprendre la démarche déjà utilisée avec le modèle du taux de recouvrement (cf. la
partie III.3.b), les valeurs de la capacité CCF ont été calculées par la méthode des éléments
finis en fixant le diamètre des îlots et en faisant varier la densité (Figure 59), puis en fixant la
densité et en faisant varier le diamètre des îlots (Figure 60).
Dans le but de comparer directement les valeurs de capacité issues des modèles avec les
valeurs de CCF extraites des mesures de courant réalisées dans la partie III, les structures ont
été simulées avec des dimensions identiques à celles visées au cours de leur élaboration ou
observées par TEM. Ainsi, les îlots de 2,2 nm de diamètre ont été simulés avec un oxyde
tunnel épais de 6,1 nm, un oxyde de contrôle de 5 nm, pour une surface totale de 4.10-8 cm-2,
conformément aux dimensions des échantillons implantés (recuits A3 et A31). Les îlots de 5
nm de diamètre ont été simulés avec un oxyde tunnel épais de 3 nm, un oxyde de contrôle de
17,7 nm, pour une surface totale de 1,642.10-7 cm-2, ce qui correspond aux dimensions visées
lors de l’élaboration des îlots par LPCVD.
A chaque fois, les valeurs obtenues ont été comparées à celles issues du modèle du taux de
recouvrement, présenté dans la partie III.3.b, et au modèle de la capacité sphère/plan,
présenté au début de cette partie (cf. i.).
83
Sur la Figure 59, on peut constater qu’en faisant tendre la densité d’îlots vers 0, pour les îlots
de 2,2 nm de diamètre, les valeurs de capacité trouvées par les trois méthodes tendent vers 0.
La technique du taux de recouvrement diverge beaucoup des deux autres méthodes lorsqu’on
augmente la densité, et minore très fortement la capacité CCF pour les densités attendues dans
les échantillons implantés. Les valeurs issues du calcul de la capacité sphère/plan sont
identiques à celles obtenues par éléments finis lorsque la densité est inférieure à 5.1011 cm-2.
Au delà de cette valeur, la méthode des éléments finis donne des valeurs inférieures à
l’évaluation de la capacité sphère-plan.
350
300
CCF (pF)
250
200
Diamètre 2,2 nm
Eléments finis
Taux de recouvrement
Capacité sphères/plan
Diamètre 5 nm
Eléments finis
Taux de recouvrement
Capacité sphères/plan
150
100
50
0
11
12
10
13
10
10
Figure 59 : Capacité CCF entre la
grille de contrôle et la grille
flottante en fonction de la
densité d’îlots présente dans la
capacité.
Deux sortes de capacités ont
été simulées : Les premières
sont similaires aux échantillons
implantés (îlots de 2,2 nm de
diamètre) et les autres sont
identiques aux échantillons
élaborés par LPCVD (îlots de 5
nm de diamètre).
-2
D (cm )
Pour les îlots ayant un diamètre de 5 nm, la technique du taux de recouvrement diverge
également beaucoup des deux autres méthodes : pour toutes les densités considérées, elle
minore systématiquement CCF. Les éléments finis et le modèle de la capacité sphère/plan ont
une asymptote commune pour les densités faibles, mais divergent très nettement pour des
densités supérieures à 1011 cm-2. La méthode des éléments finis donne des valeurs très
inférieures à l’évaluation de la capacité sphère-plan.
Finalement pour les densités attendues (de l’ordre de 1011 cm-2 pour les capacités élaborés par
LPCVD et de 1012 cm-2 pour les échantillons implantés), les éléments finis donnent des valeurs
comprises entre les résultats obtenus par la méthode du taux de recouvrement et ceux issus
de l’évaluation de la capacité sphères/plan.
Ce graphe montre donc que la méthode du taux de recouvrement n’est pas adaptée à
l’estimation de CCF, à part pour les îlots de petit diamètre, peu denses et situés loin du
substrat. Ceci est dû au trop grand nombre d’approximations réalisées par cette technique, qui
ne prend pas la géométrie des îlots en compte, et n’étudie que des lignes de champ
perpendiculaires au substrat sur toute leur longueur (modèle du condensateur-plan).
En ce qui concerne la méthode du calcul de la capacité liant des sphères conductrices et un
plan, les résultats sont acceptables pour des densités plutôt faibles, d’autant plus faibles que
les îlots sont gros. Dans les autres cas, les résultats sont très différents de ceux donnés par la
méthode des éléments finis.
Pour étudier l’influence du diamètre des îlots, on a fait varier ce paramètre en fixant la densité
de nanocristaux aux valeurs attendues pour chaque type d’îlot (1,5.1011 cm-2 pour les
84
capacités élaborés par LPCVD et de 1,5.1012 cm-2 pour les échantillons implantés), comme le
montre la Figure 60.
400
350
300
-2
11
-2
Figure 60 : Capacité CCF entre la
grille de contrôle et la grille
flottante
en
fonction
du
diamètre des îlots.
Deux sortes de capacités ont
été simulées : Les premières
sont similaires aux échantillons
implantés (D=1,5.1012cm-2) et
les autres sont identiques aux
échantillons
élaborés
par
LPCVD (D=1,5.1011cm-2).
Densité : 1,5.10 cm
Eléments finis
Taux de recouvrement
Capacité sphères/plan
250
CCF (pF)
12
Densité : 1,5.10 cm
Eléments finis
Taux de recouvrement
Capacité sphères/plan
200
150
100
50
0
0
1
2
3
4
5
6
7
Diamètre (nm)
On peut voir que pour une densité d’îlots de 1,5.1012 cm-2, si on fait varier le diamètre de
ceux-ci, la technique du taux de recouvrement donne des valeurs très différentes des deux
autres méthodes. La technique de la capacité sphères/plan a un comportement asymptotique
identique à la méthode des éléments finis lorsqu'on fait tendre le diamètre vers de très petites
valeurs. Mais lorsque le diamètre dépasse 0,5 nm (pour une densité de 1,5.1012 cm-2) ou 1 nm
(pour D=1,5.1011 cm-2), les valeurs de capacité trouvées par le modèle sphères/plan divergent
de celles provenant de la méthode des éléments finis, et minore très fortement la capacité CCF
pour les densités attendues dans les échantillons implantés.
Globalement, les éléments finis aboutissent comme dans le cas de la densité variable à des
valeurs minorées par la technique du taux de recouvrement et majorées par l'évaluation de la
capacité sphères-plan. Les conclusions sont identiques quant aux origines de telles divergences
entre les modèles.
A la lumière de ces deux approches, on peut conclure qu'il s'est avéré impossible de trouver un
modèle utilisant des expressions littérales approchant de manière satisfaisante les évaluations
réalisées par la méthode des éléments finis.
Cette technique est donc celle que nous avons retenue, malgré le peu de souplesse qu’elle
offre. A partir des résultats présentés sur la Figure 59 et la Figure 60, on peut extraire les
paramètres structuraux du plan d'îlots correspondant aux valeurs issues des caractérisations
structurales et aux valeurs visées lors de l’élaboration, pour chaque type d'échantillon (Tableau
7).
On remarque que pour les îlots élaborés par LPCVD, on trouve soit un diamètre (3 nm) plus
petit que prévu (5 nm), soit une densité (0,84.1011 cm-2) moins importante que l'estimation
qui en a été faite (1,5.1011 cm-2) à partir des résultats de la partie III.2. Ce deuxième cas de
figure peut correspondre au fait que deux électrons soient piégés par îlot. Dans ces conditions
85
en effet, le nombre de charges injectées vaut très logiquement deux fois la densité de
nanocristaux. Cette interprétation est tout à fait cohérente avec le diamètre des îlots, 5 nm
dans ce cas de figure, qui est suffisamment important pour stocker plusieurs porteurs.
SiOX LPCVD
Valeurs
exp.
∅ (nm)
dCF (nm)
dFS (nm)
D (1011 cm-2)
CCF (pF)
5(a)
(a)
8
(a)
3
(b)
1,5
66,7(c)
D
Implantation + A3
∅
variable variable
5,0
17,7
3
3,0
17,7
3
0,84
1,5
66,7
66,7
Valeurs
exp.
2,2(d)
(d)
5
(d)
6,1
(d)
15
96,2(c)
D
∅
variable variable
2,2
5
6,1
1,6
5
6,1
10
15
96,2
96,2
Implantation + A31
Valeurs
exp.
2,2(d,e)
(d,e)
5
(d,e)
6,1
(d,e)
D
variable variable
2,2
2,4
5
5
6,1
6,1
15
16
15
136 (c)
136
136
(a)
Dimensions visées au cours de l’élaboration du lot 9546P (LETI).
(b)
Valeur issue du calcul de la charge injectée pendant le transitoire de courant, présenté dans la partie III.2 de ce chapitre.
(c)
Valeur obtenue par la modélisation en circuit électrique équivalent, présenté dans la partie III.3.
(d)
∅
Valeur issue d’une étude par microscopie en transmission des échantillons élaborés par implantation et soumis à un recuit A3
[Carrada03] .
(e)
Cette valeur est identique à celle donnée pour le recuit A3, aucune analyse TEM n’ayant été réalisée sur les composants ayant subi
le recuit A31. Etant données les différences qui existent entre ces deux recuits, il n’est pas attendu de différences structurales
importantes entre les composants ayant subi l’un d’eux [Carrada03] .
Tableau 7 : Comparaison entre les paramètres expérimentaux et ceux qu’il est nécessaire
d’entrer comme variable dans le modèle par éléments finis du logiciel FEMLAB pour aboutir
à des valeurs de CCF compatibles avec les mesures électriques. Cette comparaison est
réalisée pour les trois types d’échantillons étudiés dans ce chapitre, et dans chaque cas, le
diamètre moyen des îlots ∅ et leur densité surfacique sont utilisés tour à tour comme
paramètre fixe. Les divergences les plus notables sont reportées en rouge et discutées
dans le texte.
Les échantillons implantés et soumis au recuit A3 ont soit un diamètre moyen inférieur à ce qui
a été mesuré (1,6 nm), soit une densité plus faible que celle estimée par TEM. Cette dernière
étant la plus difficile du point de vue structural, on peut imaginer que c'est la densité de
1012 cm-2 qui est la plus proche de la réalité, avec des îlots qui font bel et bien 2,2 nm de
diamètre, même si la valeur de 1,6 nm reste dans les barres d'erreurs des mesures par
microscopie en transmission.
Les paramètres structuraux des échantillons implantés et soumis au recuit A31 sont quant à
eux parfaitement compatibles avec les valeurs données par le modèle, quel que soit le
paramètre fixé. Les mesures électriques sont donc tout à fait compatibles avec les valeurs
données par le modèle.
iii. Conclusion
On peut tout d’abord faire un premier bilan sur les modèles analytiques présentés dans cette
partie :
86
• La méthode du taux de recouvrement n’est pas adaptée à la modélisation de la capacité
CCF ;
• La méthode des charges-images peut représenter une bonne approximation de CCF dans le
cas de plan d’îlots peu denses (D<1011 cm-2) ou de petite taille (diamètre inférieur à 2 nm).
Les échantillons décrits dans la première partie sont donc à la limite des domaines de validité
de la méthode des charges-images. Nous avons donc préféré utiliser la méthode des éléments
finis pour calculer les capacités CCF et les comparer avec les valeurs expérimentales. Un bon
accord a été trouvé entre elles, ce qui nous a permis de prouver que le chargement était
parfaitement compatible avec le stockage de porteurs dans les îlots.
On pourrait argumenter que le chargement de porteurs dans des pièges pourraient donner des
résultats similaires à ceux que l’on a obtenus dans cette partie. A cela, on peut apporter
plusieurs réponses. Tout d’abord, cela impliquerait une homogénéité remarquable des
caractéristiques de ces défauts, alors qu’en réalité on rencontre souvent des types variés de
pièges dans les hétérostructures Si/SiO2.
De plus, si on reprend notre modèle, il faudrait remplacer la notion de diamètre d’îlots par celle
de section efficace de capture des pièges, notée σC. Les différents types de défauts peuvent
être différenciés en fonction du type de porteurs qu’ils sont susceptibles de capter ; leur
section de capture en dépend fortement. On trouve des pièges coulombiens attractifs pour les
électrons (σC~10-13 cm2), des pièges coulombiens répulsifs (σC~10-20 cm2) et des pièges
neutres (σC~10-16 cm2) [Maneglia98] . Ces derniers sont les plus courants dans le volume
des isolants et aux interfaces Si/SiO2 [Buchanan91] .
Les densités surfaciques de ces pièges sont quant à elles souvent comprises entre 1010 cm-2 et
1012 cm-2 [Stoneham85, Vuillaume89, Buchanan91, Maneglia98] . On peut
donc, à partir de ces données quantitatives, évaluer la capacité liant ces lieux de chargement à
la grille, dans le cas où tous ces défauts forment des populations homogènes, coplanaires et
équidistantes de la grille.
Si on remplace les plans d’îlots des structures étudiées par des plans de défauts de différentes
natures, on obtient les valeurs de capacité représentées par la Figure 61 (îlots LPCVD) et la
Figure 62 (îlots implantés).
On remarque qu’en prenant les défauts ayant la section de capture la plus importante (pièges
attractifs coulombiens), il faut une densité supérieure à 1012 cm-2 pour atteindre les valeurs de
capacité extraites de nos mesures de courant sur les îlots. Or, dans la littérature, on trouve
rarement des densités de défauts si importantes. En ce qui concerne les pièges neutres, les
plus courants dans l’oxyde, il faudrait des densités énormes pour donner des valeurs de CCF
comparables à celles que l’on mesure sur nos composants.
Pour conclure, il paraît difficile d’attribuer des capacités CCF aussi importantes que celles que
l’on a mesurées et modélisées à des populations de pièges, en raison de leurs faibles sections
de capture. Il est donc plus plausible que le chargement soit lié aux îlots eux-mêmes. Le
chapitre suivant propose d’examiner l’influence de ce stockage de porteurs sur l’état de charge
du substrat.
87
-3
10
-4
10
-5
10
-6
10
-7
10
-8
10
-9
-2
CCF (F.m )
10
10
-10
10
-11
10
-12
10
-13
10
Valeur expérimentale (LPCVD)
Pièges attractifs coulombiens, σc=10
-16
Pièges neutres, σc=10
-12
2
cm
2
cm
Pièges répulsifs coulombiens, σc=10
10
10
11
10
-20
cm
2
12
10
13
-2
Figure 61 : Capacité CCF entre la
grille de contrôle et un plan de
défauts en fonction de la
densité
de
défauts.
Une
distance de 17,7 nm sépare la
grille des défauts, comme c’est
le cas pour le plan d’îlots
LPCVD. Trois sortes de défauts
ont été considérés, les pièges
attractifs coulombiens, répulsifs
coulombiens et neutres. La
droite horizontale montre la
valeur expérimentale obtenue
pour les îlots LPCVD dans la
partie III.3.a.
Densité de pièges (cm )
Valeurs expérimentales : A3 et A31
-2
10
-3
10
-4
10
-5
-2
CCF (F.m )
10
-12
Pièges attractifs coulombiens, σc=10
-6
2
cm
10
-7
10
-8
10
Pièges neutres, σc=10
-9
10
10
-10
10
-11
10
-12
-16
2
cm
Pièges répulsifs coulombiens, σc=10
10
10
10
11
12
10
-20
2
cm
10
13
Figure 62 : Capacité CCF entre la
grille de contrôle et un plan de
défauts en fonction de la
densité de défauts. Une distance
de 5 nm sépare la grille des
défauts, comme c’est le cas
pour le plan d’îlots implantés.
Trois sortes de défauts ont été
considérées,
les
pièges
attractifs coulombiens, répulsifs
coulombiens et neutres. Les
droites horizontales montrent
les
valeurs
expérimentales
obtenues
pour
les
îlots
implantés dans la partie III.3.a.
-2
Densité de pièges (cm )
IV. Influence du chargement observé sur les
caractéristiques électriques des composants
Les phénomènes de chargement caractérisés par les mesures de courants (cf. partie II), et par
la suite modélisés (cf. partie III), doivent, pour être utiles, pouvoir être mis à profit dans un
transistor. Les caractéristiques d’un tel composant seront alors influencées par la présence ou
non des charges.
Dans notre cas, l’étude a uniquement porté sur des capacités MOS. Il est donc exclu de faire
des mesures de courants de drain pour vérifier l’action des charges stockées à proximité du
plan d’îlots. Il est néanmoins possible de faire des mesures de capacité de façon quasistatique, qui peuvent nous donner des informations sur l’état de charge du substrat (en
déplétion et en inversion). En effet, outre la capacité des couches séparant la grille du substrat,
ce type de mesure rend compte de la présence éventuelle d’une zone de charge d’espace due
88
à la déplétion du substrat, ou d’une couche d’inversion apparaissant à sa surface. Il est donc
possible à partir de ces mesures de prévoir le comportement de transistors élaborés à partir
des techniques évoquées au début de ce chapitre.
Outre l’évaluation de la fenêtre mémoire séparant les courbes C(VG) mesurées sur les
capacités MOS en état écrit ou effacé, il peut être intéressant d’observer la tension à laquelle
on passe d’un état à l’autre. On peut notamment vérifier que cette tension correspond à celle
que l’on doit appliquer pour observer les pics de courant transitoire.
Après avoir examiné les résultats des caractérisations en courant (partie III), il apparaît que
les meilleures conditions possibles pour réaliser les mesures de capacité sont de se placer à
basse fréquence, ou de les réaliser de façon quasi-statique. En effet, on a pu voir que les
courants de déplacement correspondant au chargement ont lieu quand le régime d’inversion
est établi dans le substrat. Or, dans le cas de mesures de capacité à haute fréquence, le
capacité de la zone d’inversion n’est pas prise en compte. En effet, en régime d’inversion, une
partie de la charge présente à la surface du substrat correspond à la déplétion, un processus
lié à la diminution du nombre de charges majoritaires. La constante de temps de formation de
cette charge est donc rapide, de l’ordre de la constante de temps diélectrique (10-12 s à
température ambiante pour le silicium), et un signal sinusoïdal peut la moduler quelle que soit
sa fréquence. L’autre partie de la charge, qui se trouve à la surface du substrat, est due à
l’inversion. Il s’agit dans ce cas de l’apparition d’un nombre important de porteurs minoritaires.
Ceux-ci sont issus de la génération thermique de paires électron-trou, un phénomène bien plus
lent que la relaxation diélectrique.
Il est donc possible que la polarisation de la structure par un signal sinusoïdal soit à même de
moduler la charge de déplétion mais pas la charge d’inversion, et on a alors une capacité
constante alors que le substrat se trouve inversé. Dans notre cas, c’est un phénomène gênant,
car les modifications du champ électrique ne seront pas discernables sur les courbes C(V) dans
cette zone. En effet, lorsque la capacité évolue avec la tension de grille, toute modification du
champ électrique au sein du composant se signale par une variation anormale de la courbe CVG. Dans le cas de mesures HF, il n’est donc pas possible d’observer les conséquences du
chargement au cours du régime d’inversion, la capacité restant constante dans tous les cas de
figure.
Des mesures en mode quasi-statique ont pu être réalisées sur les échantillons contenant des
couches de SiOX élaborées par LPCVD puis recuites. Dans le cas des structures élaborées par
implantation de silicium et recuits oxydant, il s’est avéré impossible d’effectuer de telles
mesures, à cause des courants de fuite trop importants auxquels nous sommes confrontés
avec ce type de structure. Les mesures quasi-statiques sont en effet basées sur des mesures
de charge réalisées au cours de marches de tension de grille et on en déduit la capacité des
structures étudiées. Lorsque les courants de fuite sont trop importants, il devient difficile de
différencier la charge correspondant au comportement capacitif du dispositif de la charge de
conduction due aux fuites.
Ces mesures ont été réalisées à l’aide d’un coulombmètre Keithley 595 car sa technique de
mesure quasi-statique permet de mesurer à la fois la capacité de la structure et le courant qui
la traverse au cours d’une seule et unique mesure. Ceci est extrêmement avantageux pour
étudier l’effet du courant sur la capacité, étant donné qu’on est dans ces conditions
absolument sûr d’avoir les mêmes conditions initiales et de mesure. Les courbes obtenues sont
89
par conséquent tout à fait comparables, notamment en ce qui concerne les champs
électriques, qui dans le cas de mémoires peuvent varier d’une mesure à l’autre, de par la
propension de la structure à conserver une mémoire des polarisations qu’elle a subies.
Comme nous l’avons évoqué précédemment, lorsque le substrat est inversé, la mesure quasistatique permet de prendre en compte la zone d’inversion, contrairement aux mesures
dynamiques, pour lesquelles cette prise en compte dépend de la fréquence utilisée. C’est ce
qui explique l’aspect des courbes présentées sur la Figure 63, où l’on peut voir que la capacité
est croissante au début de la zone de forte inversion. Ainsi, au cours d’une mesure, toute
modification du champ électrique due au chargement de pièges présents dans la capacité peut
être discernée.
Sur la Figure 63, on peut voir que l’influence des courants de chargement est plutôt faible sur
les courbes de capacité. Les échantillons obtenus par implantation (Figure 63a et b) montrent
d’ailleurs une perturbation moindre de la capacité que les échantillons issus de la démixtion
d’une couche de SiOX déposée par LPCVD (Figure 63c). Ceci peut être attribué à l’épaisseur de
la couche d’oxyde tunnel : elle est évaluée par TEM à 6.1nm pour les structures implantées,
alors qu’on s’attend seulement à une épaisseur de 3 nm dans le cas du SiOX.
120
120
100
100
80
60
60
40
40
20
20
0
80
80
60
60
40
40
20
20
0
(a)
(b)
0
-4
-3
-2
-1
0
1
2
3
-4
VG (V)
200
180
160
60
120
100
80
20
60
40
0
20
(c)
-20
0
-2
-1
VG (V)
0
1
2
3
C (pF)
IG (pA)
140
40
-3
-3
-2
-1
0
1
2
0
3
VG (V)
80
-4
C (pF)
80
IG (pA)
100
C (pF)
IG (pA)
100
Figure 63 : Courant de grille et capacité quasistatique en fonction de la tension appliquée à
la grille. Les graphes correspondent aux trois
types de composants étudiés dans ce chapitre :
(a) capacités élaborées par implantation de
silicium dans une couche d’oxyde et ayant subi
le recuit A3 ;
(b) capacités élaborées par implantation de
silicium dans une couche d’oxyde et ayant subi
le recuit A31 ;
(c) capacités élaborées à partir d’une couche
de SiOX recuite.
Il est évident que plus les charges sont stockées loin du substrat, moins elles influencent l’état
de charge de ce dernier. Si les échantillons implantés stockent un plus grand nombre de
charges au cours d’une rampe de tension sur la grille, comme le montre le calcul intégral
effectué dans la troisième partie de ce chapitre (Tableau 4), l’influence de ces charges est donc
probablement amoindrie par l’éloignement entre le lieu de stockage et le substrat.
Sur les échantillons implantés ayant subi le recuit A3, on remarque une inflexion sur la partie
90
de la courbe correspondant à la déplétion, pour des polarisations comprises entre 0 et -1,5 V.
Elle n’est pas visible lorsque c’est un recuit A31 qui a été utilisé et elle s’explique par le fait que
le champ résidant dans la capacité n’est plus proportionnel à la tension de grille, mais inclut la
contribution de la charge stockée. A cette charge stockée correspond certainement un courant
de déplacement dont on ne distingue pas la présence. En effet, il est probable que la distance
trop importante entre les îlots et le substrat aboutisse à un courant de déplacement ayant le
même ordre que les courants de fuite.
D’ailleurs, les structures issues de la démixtion du SiOX montrent une inflexion du même type,
associée cette fois à un pic de courant, d’amplitude modeste, pour une polarisation de grille
d’environ –0,5 V. Quand la polarisation de grille vaut environ 0 V, le courant de déplacement
revient à la normale, et la courbe de capacité évolue de façon normale jusqu’à l’inversion. Si
on augmente la tension de grille, on assiste à l’apparition du pic de courant de forte amplitude
étudié dans les parties III et IV de ce chapitre, et qui est accompagné par une nouvelle
inflexion de la courbe C(VG), si importante qu’elle marque un palier.
Sur la plage de tension correspondant au palier, la valeur de la capacité est quasiment
constante, ce qui signifie que le champ électrique régnant à proximité du substrat est lui aussi
constant. Cette observation est donc tout à fait en accord avec le modèle électrique équivalent
utilisé dans les parties III et IV, qui prévoit que lorsque le pic de courant est à son maximum,
la différence de potentiel entre le substrat et le lieu de stockage des charges est constant.
En effet, si on reprend ce modèle, les équations (2) et (8) donnent :
(2) VG = VCF + VFS
(8) QFG = CFS VFS
⎫⎪
⎬ ⇒ QFG = CFS VFS − CCF VG − VFS
− CCF VCF ⎪⎭
(
)
(26)
On peut différencier cette expression :
dQFG
dt
= CFS
(
dVFS
= CFS
dVFS ⎞
⎛ dV
− CCF ⎜ G −
⎟
⎜ dt
dt
dt ⎟⎠
⎝
dVFS
dVG
+ CCF
− CCF
dt
dt
{
)
(27)
K
Or, d’après le résultat (19)
dQFG
dt
= −K.CCF ,
Rappelons que ce résultat est vrai lorsque dQFG+dQCF=0, c’est à dire lorsque le régime
transitoire est parfaitement établi.
Les relations (19) et (27) aboutissent à l’égalité suivante :
(CFS + CCF )
91
dVFS
dt
=0
(28)
On en conclut que la différence de potentiel entre la grille flottante et le substrat est constante
lorsque dQFG+dQCF=0. Cette condition correspond au maximum du courant de déplacement
puisque si on différencie la relation (19), on obtient :
dIdéplacement
dt
2
=
d QFG
dt
2
=
(
−d K.CCF
dt
) =0
(29)
Lorsque le potentiel VFS est constant, l’état de charge du substrat n’évolue plus, alors que le
balayage en tension continue sur la grille : on assiste alors à un palier sur la courbe C(VG),
comme on peut l’observer sur la Figure 63c.
Les mesures de capacité, confrontées aux mesures de courant, montrent que les courants de
déplacement ont une influence sur l’état de charge du substrat, d’autant plus importante que
l’oxyde tunnel est fin. De plus, le modèle électrique introduit dans les parties II et III de ce
chapitre permet de prévoir qualitativement cet effet, à savoir des inflexions dans les courbes
C(VG). Pour observer ces derniers, les mesures quasi-statiques sont particulièrement utiles
dans le cas où le pic de courant apparaît lorsque le substrat est inversé. C’est le cas le plus
courant, puisqu’il correspond au chargement en électrons depuis un substrat P.
Les inflexions notées sur les courbes C(VG) apportent une information importante puisqu’ils
donnent une estimation de la largeur de la fenêtre mémoire qu’auront les dispositifs mémoires
adoptant les architectures étudiées ici. Ainsi, étant donnée la faible amplitude des paliers
observés, on peut conclure que les fenêtres seront faibles pour les technologies étudiées dans
ce chapitre.
La fenêtre mémoire la plus large (1 V) a été observée sur les dispositifs élaborés par LPCVD
(Figure 63c). C’est bien-sûr une valeur relativement faible par rapport aux objectifs des
mémoires FLASH (>3 V). Pour augmenter cette fenêtre, on pourrait envisager de créer le plan
d’îlots à une distance plus faible du substrat, mais l’oxyde tunnel étant épais de seulement
3nm dans le cas des capacités élaborées par SiOX, ce paramètre ne laisse pas une marge de
manœuvre suffisante. Il est donc préférable d’augmenter la densité d’îlots, afin de stocker une
charge plus importante, comme c’est le cas par exemple pour les échantillons implantés. Ces
derniers gagneraient par contre à voir leur épaisseur tunnel diminuée, pour augmenter le
couplage entre le plan d’îlots et le substrat et améliorer la fenêtre mémoire occasionnée par le
chargement observé.
Si, comme on vient de le voir, les résultats expérimentaux concernant la capacité des
structures étudiées sont conformes aux prévisions du modèle présenté dans ce chapitre, la
partie suivante propose de simuler les courants transitoires observés grâce à un modèle
numérique fondé sur la mise en équation des cinétiques de chargement.
V. Confrontation à un modèle cinétique de chargement
Dans le cadre de l’hypothèse selon laquelle les pics de courant observés correspondent à un
courant de déplacement, un modèle a été proposé par C. Busseret et al. [Busseret04] , à
partir des observations de S. Ferraton et al. [Ferraton04] . Que C. Busseret soit remercié
92
d’avoir bien voulu adapter ce modèle aux structures étudiées dans ce chapitre, suivant les
principes que nous détaillons maintenant.
Rappelons tout d’abord que, selon ce modèle, le courant de déplacement est directement lié au
changement de l’état de charge des îlots. L’hypothèse fondamentale est que chaque îlot ne
peut stocker qu’une seule charge et que les îlots sont neutres avant la mesure. Lorsqu’on
balaye la grille avec une tension VG, le chargement des îlots donne lieu à un courant
s’écrivant :
J=
δQ
δN
=q
δt
δt
(30)
Dans cette relation, Q est la charge totale stockée dans les îlots et N est le nombre d’îlots
chargés.
En jouant sur les dérivées, on peut réécrire le courant ainsi :
J=q
δN δdSi δVg
δdSi δVg δt
(31)
où dSi est le diamètre des îlots.
Le premier terme de cette égalité n’est autre que la distribution en taille des îlots, qui peut être
déterminée parallèlement par microscopie électronique en transmission (TEM). Le deuxième
terme désigne la relation qui existe entre la tension appliquée et le diamètre des îlots
concernés par le chargement dans ces conditions de polarisation. Enfin, le troisième terme est
la vitesse de la rampe de tension appliquée à la grille de contrôle ; ce terme est connu puisqu'il
s'agit d'un paramètre expérimental aisément contrôlable par les appareils de mesure.
D'après la relation(31), pour une rampe donnée, il est possible de simuler le courant de
chargement de la grille flottante, et donc le courant de déplacement résultant, qui peut alors
être comparé aux résultats expérimentaux. La distribution en taille des îlots peut être connue
par avance, ou servir de paramètre d’ajustement si ce n'est pas le cas.
Dans le cas de mémoires à grilles flottantes continues, ces courants de déplacement
demeurent constants tant que l'on maintient la rampe de tension sur la grille [Bez90,
Laffont03] . En effet, les épaisses couches de polysilicium utilisées comme grilles flottantes
peuvent contenir un grand nombre de charges. Les polarisations et les temps d'écriture
couramment utilisés ne permettent donc pas d'injecter un nombre suffisamment grand de
porteurs pour les saturer en charge. Il n'est d'ailleurs pas du tout intéressant de les saturer en
charge : on cherche plutôt à en injecter seulement la quantité nécessaire pour obtenir une
fenêtre mémoire acceptable, tout en limitant l'énergie dissipée par le signal électrique
d'écriture. Ceci revient typiquement à limiter la tension et le temps d'écriture, et il est
également bénéfique d'optimiser le signal d'écriture en leur conférant des caractéristiques V(t)
plus élaborées que de simples rampes de tension constantes [Bez03] .
Etant donnée la nature granulaire de la grille flottante des mémoires à nanocristaux, on fait
93
l'hypothèse qu'au cours de la mesure, la grille flottante est totalement chargée. C'est alors que
le courant de déplacement relatif au chargement des îlots s'annule, ce qui correspond bien aux
observations. En particulier, l’intégration du courant de déplacement, menée dans la partie
III.2. de ce chapitre, montre qu’une même charge est impliquée dans le chargement du
dispositif, quelle que soit la vitesse de la rampe de tension appliquée à la grille. Pour décrire ce
comportement, spécifique aux grilles flottantes discrètes, il est nécessaire de mettre en
équation la saturation de la charge.
V.1. Mise en équation de la saturation de la charge
On peut définir un temps tinj (dépendant de dSi, le diamètre des îlots) tel qu'une fois ce temps
écoulé, tous les nanocristaux de diamètre dSi peuvent être considérés comme chargés.
Comme, par hypothèse, les îlots sont définis comme chargés lorsque leur charge vaut q (un
électron par îlot), et ce quel que soit le diamètre de l’îlot, on peut écrire tinj comme la durée
écoulée depuis le début de la mesure telle que l’intégrale du courant traversant l’oxyde tunnel
entre le substrat et l’îlot soit égale à q :
tinj ( dSi )
∫
0
IS→I (F ( t, dSi ) ) dt = q
(32)
Dans cette égalité, IS→I désigne le courant passant entre le substrat et l’îlot, et dépend de
F(t,dSi), le champ électrique appliqué entre la grille flottante et le substrat sous l'influence de la
grille de contrôle. Pour déterminer ce courant, le champ est calculé dans la structure en tenant
compte de la courbure des bandes dans le substrat. La densité de courant entre le substrat et
le plan d’îlots (notée JS→I) est ensuite simulée en utilisant les hypothèses semi-classiques WKB
pour une couche de SiO2 ayant l’épaisseur de l’isolant tunnel de la structure étudiée. Enfin, le
courant IS→I est calculé par la relation simple suivante :
2
⎛d ⎞
IS→I = JS→I.π. ⎜ Si ⎟
⎝ 2 ⎠
(33)
En fait, on multiplie la densité par la surface apparente de l’îlot, vue du substrat, de manière
analogue au modèle du taux de recouvrement évoqué dans la partie III.b. de ce chapitre.
Les îlots de faibles dimensions (moins de 10 nm de diamètre) contiennent des porteurs dont
les propriétés sont affectées par des effets quantiques. En particulier, seuls des niveaux
d'énergie discrets peuvent accueillir ces porteurs. Ces énergies dépendent du diamètre de
l'îlot: l'écart entre chaque niveau est par exemple d’autant plus important que les dimensions
de l'îlot sont faibles. Or pour charger un îlot, il est nécessaire d’aligner la bande de conduction
du substrat sur les niveaux d’énergie que peuvent adopter les porteurs injectés au sein de
l’îlot. En conséquence, pour placer un électron dans un îlot, il faut une polarisation d'autant
plus importante que l'îlot est petit, et ce pour compenser le décalage en énergie des niveaux
confinés par rapport à la bande de conduction.
Pour prendre en compte ce phénomène dans le deuxième terme de la relation(31), C Busseret
a apporté quelques améliorations [Busseret05] aux travaux qu’il avait réalisés dans
l’article précédemment cité [Busseret04] .
94
V.2. Détermination de la tension de grille permettant le
chargement d'un îlot en fonction de son diamètre
Pour un îlot de diamètre dSi, en utilisant l’approximation tirée des travaux théoriques de
A. Zunger et al. [Zunger96] , on peut évaluer l’accroissement (noté ∆EG) du ''gap'', l’énergie
séparant la bande de valence de la bande de conduction, dû au confinement quantique :
∆EG =
3.77
1,37
dSi
(34)
Toujours d'après A. Zunger et al., on peut considérer que les deux tiers de cet accroissement
concernent la bande de conduction. Ceci signifie que la différence d’énergie entre la bande de
conduction et le niveau fondamental (c’est-à-dire le premier niveau confiné) vaut :
∆EC =
2 ⎛⎜ 3.77 ⎞⎟
3 ⎜ d1,37 ⎟
⎝ Si ⎠
(35)
C’est sur l’énergie de ce niveau fondamental qu’il faudra aligner la bande de conduction du
substrat pour effectuer le chargement, et ce à l’aide de la tension appliquée à la grille, ce qui
permet d’écrire la relation suivante :
Fox (Vg (t), dSi ).e(dSi ) = ∆EC
(36)
où e(dSi) est l’épaisseur d’oxyde présent entre l’îlot et le substrat, qui dépend évidemment du
diamètre de l’îlot.
La relation (36) rend compte du fait que le chargement ne débute pas tant que les niveaux
d’énergie de départ et d’arrivée des porteurs ne sont pas alignés. C'est cette relation qui est
utilisée pour déterminer le deuxième terme de l'équation (31). De plus, pour l'intégrer à la
définition du chargement donnée par l’égalité (32), un temps tdéb est défini comme le temps
mis pour atteindre la polarisation VG permettant aux niveaux d’être alignés, tel que :
Fox (Vg (t déb ), dSi ).e(dSi ) = ∆EC
(37)
L’équation (32) devient donc:
tinj ( dSi )
∫
tdéb ( dSi )
IS→I (F ( t, dSi ) ) dt = q
95
(38)
V.3. Utilisation du modèle pour simuler les courbes
expérimentales
Le modèle décrit précédemment (i.e. l'équation (31) avec les conditions (36) et (38) relatives
à la tension de grille et au temps d'injection) a été appliqué à la simulation des courbes
expérimentales présentées dans la partie II.1. de ce chapitre.
Dans un premier temps, pour déterminer les valeurs de IS→I en fonction du champ électrique
régnant dans la structure et pouvoir utiliser la relation (38), il est nécessaire de simuler le
courant traversant une couche d'oxyde sous l'action du champ électrique F(t,dSi). Pour ce faire,
un calcul de courant standard s'appuyant sur les hypothèses WKB est utilisé, avec des
paramètres adaptés aux structures étudiées. Les technologies utilisées semblant générer un
nombre important de défauts dans l’oxyde tunnel, il a fallu adapter les simulations de courant
à la présence d’un isolant aux propriétés non idéales. En particulier, cet isolant laissant passer
un courant trop important (par effet tunnel assisté par des pièges [conduction ''hopping''], ou
par des phénomènes de conduction thermoïonique [assistée par l’énergie thermique]). De plus
le piégeage de charges par cette barrière isolante entraîne un décalage en tension qui
nécessite un offset de la polarisation dans le modèle, ce qui est donc susceptible d’ajouter un
paramètre d’ajustement.
C’est à ce stade que l’on a écarté les échantillons élaborés par implantation, car nous n’avons
pas pu modéliser de façon satisfaisante le comportement fortement fuyant de leur isolant
tunnel. La prise en compte d’une telle barrière nécessite un modèle de courant adapté de
courant tunnel ''piège à piège''. Pour une densité importante de pièges, il devient en effet
impossible de simuler convenablement de tels courants par un modèle tunnel-direct comme
celui dont on dispose, même en essayant de diminuer la hauteur de barrière et/ou la masse
effective des électrons dans l’isolant.
En ce qui concerne les échantillons élaborés par démixtion du SiOX, il a fallu, pour obtenir des
résultats proches des valeurs expérimentales, réduire la masse effective apparente des
électrons dans l’oxyde. On l’a faite passer de 0,5me (ce qui correspond à un oxyde thermique
de bonne qualité) à 0,3me, me étant la masse de l’électron. La hauteur de barrière Si/SiO2 a
quant à elle été maintenue à 3.1 eV.
Une fois le courant entre le substrat et les îlots simulé, il ne reste que le premier terme de la
relation (31) à déterminer, ce qui revient à chercher la distribution en taille permettant
d’obtenir des courbes proches des résultats expérimentaux. Ceci se fait par approches
successives pour ajuster les simulations aux valeurs expérimentales. Pour les échantillons issus
de la démixtion d’une couche de SiOX, en introduisant la distribution présentée par la Figure 64
dans le simulateur, on aboutit aux courbes simulées présentées sur la Figure 65, où elles sont
confrontées avec les courbes expérimentales.
On constate un bon accord entre les courants simulés et les résultats expérimentaux, quelle
que soit la rampe. La dispersion en taille est crédible, étant donné que le maximum de la
courbe de dispersion est atteint pour un diamètre de 5,5 nm alors que l’épaisseur visée pour la
couche de nanocristaux est 5 nm. Malheureusement, au moment où ce mémoire a été rédigé,
aucune donnée n’était disponible quant à la taille moyenne et la distribution en taille des
nanocristaux au sein de ces échantillons, ce qui n'a pas permis de comparer la distribution
trouvée à des données expérimentales.
96
7
Nombre d'îlots (u. arb.)
6
5
4
Figure 64 : Dispersion en taille des
îlots correspondant aux courbes de
courants simulées de la Figure 65
[Busseret05].
3
2
1
0
3
4
5
6
7
dSi (nm)
120
0,2 V/s expérimental
0,2 V/s simulée
0,5 V/s expérimental
0,5 V/s simulée
100
0,9 V/s expérimental
0,9 V/s simulée
IDS (A)
80
1,4 V/s expérimental
1,4 V/s simulée
60
40
20
0
1.0
1.2
1.4
1.6
1.8
Figure 65 : Courbes de
courant obtenues sur les
échantillons
élaborés
par
démixtion d’une couche de
(en pointillés) et
SiOX
courbes simulées avec la
distribution présentée par la
Figure 49 (en trait plein),
pour des rampes comprises
entre
0,2
et
1,2
V/s
[Busseret05].
2.0
VDS (V)
V.4. Conclusion
Contrairement aux calculs développés précédemment dans ce chapitre et qui permettent
d'extraire des paramètres depuis les courbes expérimentales, le modèle utilisé dans cette
partie permet de simuler entièrement les courbes de courant. L’accord entre les courbes
simulées et les données expérimentales est satisfaisant. De plus, les hypothèses utilisées sont
pertinentes du point de vue physique (masse effective des électrons dans l’isolant, nombre de
charges par îlot…) et permettent de mettre en évidence des phénomènes physiques
importants comme l’aspect probabiliste du chargement, l'effet quantique du confinement des
porteurs dans les îlots, ainsi que la courbure des bandes à proximité de l’interface
substrat/oxyde tunnel.
En revanche, on peut retenir que les paramètres d'ajustement sont nombreux : ils concernent
la simulation préalable du courant traversant l’oxyde tunnel et la distribution en taille des îlots.
En ce qui concerne le courant, l’utilisation d’un modèle s’apparentant au modèle du taux de
recouvrement peut être une source d’imprécision s’ajoutant à la mauvaise connaissance des
propriétés de la couche d’isolant tunnel séparant le substrat du plan d’îlots.
97
La distribution en taille des îlots peut quant à elle être précisée par une étude par microscopie
en transmission, mais quand elle n’est pas disponible, elle représente un paramètre difficile à
fixer, a fortiori lorsqu’on n’a pas une bonne connaissance des propriétés de l’oxyde tunnel, ce
qui est le cas pour nos échantillons.
Enfin, ce modèle rend intrinsèquement compte du fait qu’une charge constante est injectée
dans la grille flottante quelle que soit la vitesse de la rampe de tension. Il est en mesure de
prévoir la proportionnalité des maxima de courant avec la vitesse de la rampe de tension de
grille, comme le montre la Figure 66. Mais cette prévision ne trouve pas son fondement dans
les éléments théoriques utilisés pour simuler le courant. Il s’agit au contraire de la
conséquence de l’ajustement du modèle sur les courbes expérimentales, pour lesquelles on a
effectivement un rapport de proportionnalité entre les maxima de courant et la vitesse de la
rampe utilisée.
100
IG(MAX) (pA)
80
Figure 66 : Maxima des pics de courant
simulés (cf. Figure 65) en fonction de
la vitesse de la rampe de tension
appliquée à la grille.
60
40
20
0
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
1.2
1.4
K (V/s)
En conclusion, cette approche est tout à fait complémentaire aux calculs développés dans la
partie III de ce chapitre. Elle est plus théorique, car elle met en jeu des principes physiques
quantiques ou classiques propres aux nanostructures en silicium.
A l’opposé, l’extraction de paramètres s’appuie seulement sur l’utilisation d’un circuit
équivalent, et ne quantifie pas les différentes résistances que l'on peut trouver dans la
description. Ce sont surtout les effets capacitifs qui sont étudiés, en analysant particulièrement
les effets de la variation du potentiel de la grille flottante. En ne faisant pas porter les calculs
sur les aspects résistifs du circuit équivalent, c'est à dire sur le courant tunnel responsable du
chargement des îlots, l'extraction de paramètres s'affranchit des problèmes liés au transport
de porteurs dans des isolants présentant des courants de fuite importants. Ceci explique
pourquoi les échantillons élaborés par implantation n'ont pas pu être simulés avec le modèle
physique, alors qu'ils n'ont pas posé de problème particulier pour l'extraction de paramètres.
L’extraction peut donc s'avérer utile pour tirer des conclusions de dispositifs dont le matériau
ou la structure n’est pas parfaitement connue, ou difficile à modéliser. Il n’en reste pas moins
que la simulation totale d’une courbe démontre une compréhension plus profonde de la
physique régissant le fonctionnement des dispositifs étudiés.
98
VI. Conclusion
Ce chapitre s’inscrit dans un effort visant à déterminer le lieu de chargement dans les
mémoires FLASH à nanocristaux de silicium. Il représente l’aboutissement d’une large étude
qui nous a amenés à caractériser un grand nombre d’échantillons, dont certains montraient un
effet mémoire intéressant, sans que l’on puisse déterminer a priori si le stockage de charges
avait lieu dans les îlots ou pas.
Pour répondre à cette problématique, notre travail a consisté à mesurer les courants
transitoires apparaissant lorsque l’on balaye rapidement en tension la grille de contrôle des
composants choisis. Ces derniers doivent être traversés par des courants de fuite
suffisamment faibles pour que les courants transitoires correspondant au chargement des îlots
puissent être mesurés. A partir de ces mesures, il est possible d’extraire la capacité existant
entre les lieux de stockage et la grille de contrôle. Deux filières d’élaboration de nanocristaux
ont été considérées : l’implantation de silicium dans une couche d’oxyde et le recuit de SiOX
élaboré par LPCVD.
Pour remonter aux paramètres structuraux des lieux de stockage, la capacité liant le plan d’îlot
à la grille de contrôle a été modélisée en utilisant la méthode des éléments finis, ce qui permet
de prendre en compte la géométrie des îlots de manière bien plus précise que les calculs
littéraux utilisés jusqu’alors. Une autre méthode, analytique et donc plus légère que les
éléments finis, a également été proposée. Elle donne des résultats satisfaisants pour des
densités d’îlots faibles (inférieures à 1011 cm-2) ou pour des nanocristaux de petite taille
(diamètres inférieurs à 2 nm). On a alors montré que les dimensions et la densité des îlots
données par les analyses structurales ou par les paramètres d'élaboration étaient tout à fait
compatibles avec les courants mesurés. Ceci nous a permis de conclure que les porteurs sont
plutôt stockés dans les îlots que dans des défauts présents dans les structures.
Cette technique se distingue des mesures statiques de courant car elle peut être appliquée à
des dispositifs comportant des épaisseurs d’isolants importantes. Elle permet également
d'étudier l’impact des courants transitoires sur l’état de charge du substrat. Les fenêtres
mémoires occasionnées par le chargement de porteurs dans les îlots sont faibles, inférieures à
1 V. Dans le cas des îlots obtenus par implantation, l’oxyde tunnel est trop épais, et amenuise
l’influence des électrons stockés dans les îlots, qui ont pourtant une densité importante
(1,5.1012 cm-2). En ce qui concerne les îlots élaborés par LPCVD, la densité de nanocristaux est
trop faible (1,5.1011 cm-2) alors que l’oxyde tunnel est relativement fin (3 nm). Ce dernier point
aurait donc permis une fenêtre mémoire plus importante si la densité d’îlots avait été plus
élevée.
La modélisation de la capacité existant entre les îlots nous a permis d’extraire des paramètres
à partir des données expérimentales. D’autres approches peuvent être envisagées pour mettre
en évidence les courants de chargement. Un modèle permettant de les simuler a été appliqué
avec succès aux courants transitoires mesurés sur les échantillons élaborés par LPCVD. Ceci
nous a permis de confronter cette approche aux extractions de capacité îlots/substrat. La
simulation du courant de chargement présente un intérêt certain du fait des aspects théoriques
pris en compte pour la mettre en œuvre. Ceci permet en effet de valider des éléments
fondamentaux de compréhension, relatifs aux mécanismes de chargement des îlots ou à leurs
propriétés physiques intrinsèques.
99
En revanche, les paramètres d’ajustement sont nombreux, à moins d’avoir une très bonne
connaissance des paramètres structuraux et du transport dans l’isolant tunnel. L’extraction de
la capacité îlots/substrat qui fait principalement l’objet de ce chapitre, ne se heurte pas à ces
obstacles et est utilisable sur des échantillons dont la structure et le mode de conduction de
l’oxyde tunnel ne sont pas bien connus. En privilégiant les aspects capacitifs au détriment du
courant tunnel de chargement, cette technique n’apporte pas une compréhension physique du
chargement, mais plutôt un moyen de donner des informations sur les nanocristaux (densité,
diamètre), et ce à partir des données expérimentales. On dispose ainsi de deux approches
complémentaires, que l’on peut choisir d’utiliser selon la connaissance que l’on a des
échantillons et le but de l’étude.
Le point le plus important de ce chapitre est la modélisation de la capacité existant entre le
plan d'îlots et la grille. En la comparant avec les valeurs extraites des mesures de courant, on a
pu conclure quant au chargement dans les îlots, en accordant une attention particulière à deux
paramètres structuraux : le diamètre des îlots et leur densité surfacique. Ils sont tous deux
extrêmement importants dans nos modèles, mais également dans la perspective de la
miniaturisation des composants.
En effet, si on diminue la surface de la zone active des mémoires Flash à nanocristaux, on
réduit également le nombre d’îlots qui y sont présents. Pour une densité donnée, il existe des
dimensions minimales à donner à la zone active pour qu’elle contienne au moins un nanocristal
en moyenne. Lorsqu’on n’a plus que quelques îlots dans la zone active, leur disposition est très
importante. Si on ne maîtrise pas cette disposition, c’est-à-dire si l’on n’organise pas
spatialement les îlots, il est sage de s’assurer qu’on a en moyenne plusieurs nanocristaux dans
la zone active pour que ceux-ci fonctionnent de façon satisfaisante et reproductible.
On peut par exemple se fixer comme limite un nombre de cinq îlots par composant.
Considérons une zone active carrée de côté C. Sa surface vaut CL2 et, pour une densité d’îlots
D, le nombre d’îlots qu’elle contient, noté n, est donné par :
n = D.C
2
La contrainte selon laquelle il faut qu’au moins n=5 îlots soient présents dans la zone active
(Figure 67) aboutit aux inéquations suivantes :
2
D.C ≥ 5 ⇒ D ≥
5
C
2
On peut constater que pour miniaturiser une cellule mémoire, c’est-à-dire diminuer la valeur
de L, il est nécessaire d’augmenter la valeur de D. Ceci montre l’importance de la densité
d’îlots. Le diamètre des îlots n’intervient pas dans ces relations. Il apparaît pourtant évident
qu’une densité importante d’îlots de diamètre élevé aboutit à leur coalescence. Sans en arriver
jusque là, il est nécessaire que la distance entre les nanocristaux (notée d par la suite)
demeure suffisamment grande pour que des électrons ne transitent pas par effet tunnel entre
les îlots. Dans le cas contraire, tous les bénéfices des mémoires Flash à nanocristaux seraient
remis en cause, puisqu'un défaut dans une barrière d'oxyde serait suffisant pour que toute
l'information contenue dans la mémoire soit perdue.
100
Figure 67 : Schéma d’une zone active de
mémoire Flash à nanocristaux, représentée
par un carré de côté C, et contenant 5 îlots. Ce
nombre est par la suite considéré comme le
nombre minimal permettant de s’assurer de la
reproductibilité des cellules mémoire.
Le schéma représenté sur la Figure 68 rend compte de l'espace libre que l'on trouve autour
d'un nanocristal compris dans un plan homogène.
Figure 68 : L’espace libre que l’on trouve
autour d’un îlot de diamètre ∅ , faisant
partie d’un plan homogène de nanocristaux
peut être schématisé par un carré de
côté L. Si on augmente la densité du plan, L
diminue et les îlots sont alors plus proches
les uns des autres.
A partir de cette représentation, pour une densité d'îlots (notée D), on peut calculer la distance
moyenne séparant les îlots. La distance moyenne entre deux îlots, notée d, peut s'écrire :
⎛L − ∅ ⎞
d = 2⎜
=L−∅ =
⎜ 2 ⎟⎟
⎝
⎠
1
−∅
D
D’après cette relation, si on augmente la densité D, on diminue d, la distance inter-îlots, et ce
d’autant plus que le diamètre des nanocristaux ( ∅ ) est important. Par la suite, nous
chercherons à conserver une distance supérieure à 2 nm entre les îlots pour éviter tout
transfert électronique entre les îlots : d ≥ 2 nm .
101
La Figure 69 montre un graphe présentant l'évolution de la distance séparant les îlots en
fonction de leur densité, pour des nanocristaux de diamètres différents. On peut constater qu'il
faut des densités de l'ordre de 1012 cm-2 pour conserver une distance d telle que d>2 nm entre
les îlots. Ce critère est respecté avec une densité d'environ 1013 cm-2 pour les îlots les plus
petits (2 nm de diamètre).
On a donc déterminé deux contraintes sur la densité des îlots. Pour un diamètre d’îlot donné,
ces contraintes déterminent la faculté de miniaturisation de la technologie qui a été utilisée
pour les élaborer. On peut considérer que la longueur de grille sous-entendue dans
l’appellation ''nœud technologique'' peut être assimilée au côté du carré (C) représentant la
zone active sur le schéma présenté sur la Figure 67. Dans ces conditions, nous avons cherché
à quel nœud pouvaient aboutir les technologies étudiées dans ce chapitre, à partir du diamètre
moyen et de la densité des îlots qu’elles permettent d’élaborer.
Figure
69
:
Espace
séparant les îlots (d) en
fonction de leur densité,
pour plusieurs diamètres
d'îlots (2, 5, 8 et 10 nm).
La zone de couleur rouge
correspond aux distances
inférieures à 2 nm entre
les îlots.
Dans ce sens, la Figure 70 montre les densités compatibles avec les contraintes que nous
avons fixées précédemment pour les différents nœuds technologiques visés par l’industrie.
Deux diamètres ont été considérés, 5 nm (identique à celui des îlots LPCVD étudiés dans ce
chapitre) et 2,2 nm (identique à celui des îlots implantés également étudiés dans ce chapitre).
Pour les îlots les plus petits (2,2 nm de diamètre), on remarque tout d’abord qu’ils peuvent
permettre d’évoluer jusqu’au nœud 11 nm. La densité dont nous avons disposé dans le cas des
îlots implantés (1,5.1012 cm-2 environ), pourrait donc nous permettre d’atteindre le nœud 22
nm. Pour les îlots les plus gros (5 nm de diamètre), on constate qu’ils peuvent atteindre le
nœud 16 nm. La densité dont nous avons disposé dans le cas des îlots LPCVD (1,5.1011 cm-2
environ), ne semble pas pouvoir assurer la réduction des dimensions au delà du nœud 65 nm.
L’implantation semble donc représenter la technologie la plus prometteuse pour la réalisation
de composants fortement miniaturisés, en raison de la forte densité des îlots et de leur petite
taille. Les îlots LPCVD affichent des perspectives moins lointaines, à cause de leur faible densité
et de leur diamètre (relativement) important.
102
Ces considérations ne prennent pas en compte les dispersions qui peuvent apparaître dans le
positionnement des nanocristaux au sein des zones actives. Néanmoins, nous avons montré
que les paramètres pris en considération par nos modèles pouvaient à eux seuls permettre
d’évaluer l’aptitude des différentes technologies caractérisées à la miniaturisation. Dans la
perspective de l’entrée en production au niveau du nœud 65 nm, le contenu de ce chapitre
peut s’avérer être utile pour le choix de la technologie à utiliser ainsi que les densités à
atteindre pour en tirer pleinement profit.
Figure 70 : Densité d’îlots
en fonction des nœuds
technologiques
visés
pour la fabrication de
composants
mémoires.
Les densités compatibles
avec
les
contraintes
déterminées
dans
le
texte correspondent aux
parties colorées. Deux
diamètres
ont
été
considérés : 2,2 nm (en
haut) et 5 nm (en bas).
103
104
Chapitre III. Etude de composants
comportant quelques nanocristaux de
silicium : vers l’étude de l’îlot unique
S'il est possible avec les techniques de caractérisation présentées dans la chapitre II de mettre
en évidence un chargement en électrons à proximité des plans d’îlots, il demeure en revanche
impossible de montrer que les porteurs sont stockés au sein des îlots eux-mêmes.
Le moyen le plus pertinent pour le vérifier est l'observation de phénomènes monoélectroniques par caractérisation électrique ; cela permet en outre d'accéder aux paramètres
géométriques des îlots. La mise en évidence de ces phénomènes est limitée dans le cas des
capacités MOS car elles contiennent de nombreux nanocristaux. En effet, même les techniques
d’élaboration d’îlots les plus performantes aboutissent à des objets dont les paramètres
géométriques sont statistiquement dispersés.
En caractérisant plusieurs milliers de ces objets, il n’est possible d’observer qu'un
comportement général, comme par exemple des courants de chargement. En revanche,
l'hétérogénéité de la structure empêche de discerner la manifestation des effets monoélectroniques, car la réponse d'un îlot dépend quantitativement beaucoup de ses dimensions
propres. Mais ceci ne signifie pas pour autant que ces phénomènes n'ont pas lieu.
Par exemple, on peut s’attendre à ce que les îlots obtenus par implantation et recuit oxydant,
dont le diamètre vaut environ 2 nm, qui sont étudiés dans le chapitre II, présentent des effets
quantiques à cause du confinement important des porteurs qui s’y trouvent. Ceci devrait
influencer le courant qui les traverse et, par exemple, au cours d’un balayage en tension sur la
grille, on devrait voir apparaître des pics de courants, ce qui n’est pas le cas dans nos
échantillons, même à basse température. On ne peut conclure ni à l’absence ni à la présence
de confinement quantique dans ces nanocristaux, à cause de la dispersion statistique de leurs
diamètres, illustrée par la Figure 71.
On constate que la dispersion est assez importante et, dans le meilleur des cas (recuit oxydant
A3), on trouve des îlots de moins de 1 nm et d'autre de plus de 4 nm, dans les composants
étudiés. Il est donc tout à fait envisageable que des effets de confinement aient lieu dans ces
nanocristaux, mais les niveaux d’énergie engendrés sont alors distribués. Quand on augmente
le nombre d’îlots jusqu’à obtenir de larges populations, les énergies forment alors un
continuum.
De même, le blocage de Coulomb, qui est un phénomène capacitif, dépend beaucoup des
dimensions des îlots et des barrières de potentiel. Les caractéristiques électriques spécifiques à
ce phénomène vont donc être lourdement affectées par les dispersions géométriques.
105
Figure 71 : Dispersion des diamètres des nanocristaux obtenus par recuit de capacités MOS
dont l’oxyde contient des atomes de silicium implantés à basse énergie, comme décrit dans la
partie I du chapitre II. A gauche, le recuit est réalisé sous atmosphère réductrice (A1) et à
droite sous atmosphère oxydante (A3). Les mesures sont effectuées par MET (Microscopie
Electronique en Transmission) [Normand03].
Il faut ajouter à cette description l'influence des défauts. Leur présence dans le volume de
l’oxyde et aux interfaces Si/SiO2 contribue à rendre les observations de phénomènes de
confinement ou de blocage de Coulomb difficiles sur des composants MOS de taille
micrométrique.
Pour tenter de remédier à cela, on peut envisager l’étude de composants présentant des
surfaces réduites. La caractérisation porte alors sur un nombre réduit d’îlots, ce qui peut
aboutir à l’atténuation des effets de la dispersion. C’est dans cette optique que s’inscrit la
première partie de ce chapitre en décrivant un procédé permettant d’isoler des régions de
faibles dimensions dans des capacités MOS dont l’isolant contient quelques nanocristaux.
La deuxième partie aborde quant à elle la caractérisation électrique de composants élaborés
par une technique radicalement différente. Son principe est de placer un îlot (ou quelques îlots
alignés) entre deux électrodes métalliques, à la surface d’une couche d’isolant. Sous l’influence
d’une troisième électrode (équivalent à la grille de contrôle dans la technologie MOS), ceci
permet de réaliser des transistors ou des mémoires à un électron. Dans cette partie, les
résultats expérimentaux sont accompagnés d’une description des outils qui peuvent être mis
en œuvre pour prévoir les caractéristiques de tels composants. La capacité des îlots est
certainement le paramètre clé pour prévoir le fonctionnement des dispositifs de ce type, et
c’est pourquoi nous avons porté une attention particulière à la modélisation des couplages
existant entre les îlots et les éléments conducteurs (les électrodes) ou semi-conducteurs (le
substrat) qui les entourent. Cette modélisation a été effectuée d’une part en utilisant un
modèle analytique simple et, d’autre part, grâce à la méthode des éléments finis, et elle a
permis d’aboutir à plusieurs considérations à prendre en compte pour la réalisation de
composants fonctionnant à température ambiante.
106
I. Présentation d’un procédé d’isolation de capacités
La mise au point de ce procédé répond à un certain nombre de problématiques. Il s’agissait
comme on l’a déjà dit précédemment d’étudier des ensembles de seulement quelques îlots au
lieu des larges populations dont la caractérisation n’aboutit pas à des résultats satisfaisants en
termes d’effets mono-électroniques. Il s’agissait également de caractériser de façon optique
ces îlots, pour mieux connaître leurs caractéristiques. A partir de cette caractérisation, on
voulait également se donner la possibilité de repérer les ensembles de nanocristaux qui ont
des caractéristiques propices à la caractérisation électrique de phénomènes de blocage de
Coulomb ou de résonance tunnel, et donc de ne pas courir le risque de caractériser des zones
où les îlots sont coalescents, ou trop dispersés (en localisation ou en taille).
Pour élaborer des composants de très faible surface, on ne peut se contenter de réduire la
taille des grilles des capacités que l’on crée. En effet, les pointes utilisées pour réaliser les tests
électriques limitent la réduction des dimensions des grilles à quelques centaines de microns
carrés. Or, avec les densités d’îlots généralement utilisées, plusieurs centaines d’îlots sont
encore situés dans la zone active de telles capacités, ce qui ne nous exonère pas des effets
négatifs de l'hétérogénéité géométrique. Il est par conséquent nécessaire d’étudier des
capacités ayant des grilles suffisamment grandes pour être caractérisées sous pointes, mais
ayant des zones actives de section extrêmement petites, pour ne prendre en compte que
quelques îlots. C’est dans cette optique que le projet de mettre au point le procédé d’isolation a
été initié.
Il consiste à graver chimiquement les différentes couches sur la quasi-totalité des échantillons,
et de ne conserver intactes que de très petites zones, en les protégeant par un matériau
résistant aux solutions utilisées pour la gravure. La zone protégée est alors un plot de forme
cylindrique, et on fait croître une épaisse couche d'oxyde thermique à la place des couches
gravées, ce qui isole électriquement le plot. Si au départ le diamètre des plots était
relativement important (500 nm), les derniers développements ont permis de créer des plots
de 70 nm de diamètre.
Une fois ces plots réalisés et entourés d'oxyde thermique, il reste à les contacter, c'est-à-dire à
déposer une grille métallique qui sera en contact avec eux. Cette grille est de dimensions bien
plus importantes que le plot, ce qui a le double avantage de simplifier les problèmes
d'alignement et de permettre la caractérisation électrique sous pointes. La partie de la grille qui
n'est pas connectée au plot se trouve sur l'oxyde thermique et ne doit donc pas contribuer à la
conduction, qui ne doit donc concerner que le plot.
I.2. Description des échantillons et du procédé d’isolation
Les structures de base destinées à subir l’isolation (Figure 72) sont des capacités MOS,
constituées d’un substrat (dopé N) sur lequel une couche de 5 nm de poly-silicium est
déposée. Une couche de SiOX, d’épaisseur variable selon les échantillons, est obtenue par
LPCVD à des températures voisines de 600°C, selon la technique décrite dans la partie I du
chapitre II.
107
Enfin, une nouvelle couche de 50 nm de polysilicium est déposée. Il est intéressant de noter
que contrairement aux échantillons du même type étudiés dans le chapitre II, on ne trouve
pas de couches de SiO2 déposées de part et d’autre du SiOX. En effet, nous avons montré au
cours de nombreuses études expérimentales que ces dernières contenaient souvent de
nombreux défauts. Il est donc préférable de ne pas les utiliser en couches minces comme
jonctions tunnel tant que des solutions techniques ne sont pas apportées à la présence de ces
défauts.
Pour isoler une partie de la capacité présentée par la Figure 72, et ainsi garder une zone ne
contenant que quelques îlots, il faut réaliser une gravure sélective. Pour ce faire, on dépose
d’abord sur l'échantillon une épaisse couche de résine dont seules les zones exposées à un
faisceau d'électrons seront conservées.
Poly N+
SiOX
Si
Figure 72 : Représentation schématique
des composants utilisés pour réaliser le
process d’isolation.
Poly N+
En effet, la résine ''insolée'' préservera la partie du composant qu'elle recouvre des attaques
chimiques effectuées par la suite. Les étapes successives pour la réalisation de ces isolations
sont les suivantes :
• En premier lieu, une épaisse couche (50 nm) de nitrure (Figure 73a) est préalablement
déposée par PECVD (Plasma Enhanced Chemical Vapor Deposition, pour dépôt chimique en
phase vapeur assisté par plasma), dans le but de réaliser un ''masque dur''.
Nitrure
Nitrure
Poly N+
Poly N+
Poly N+
SiOX
Si
SiOX
Si
Poly N+
(a)
(b)
Figure 73 : (a) Schéma de la structure après le dépôt d’une couche de nitrure par PECVD.
(b) Schéma du même échantillon après définition par lithographie e-beam d’une zone
protégée et gravure des couches de poly-silicium et de SiOX.
108
Cette couche est utile à plusieurs titres : premièrement, elle évite les contaminations par
les résidus organiques issus de la résine utilisée par la suite pour la lithographie e-beam.
Deuxièmement, le nitrure a une meilleure adhérence sur le polysilicium que la résine, ce
qui assure une meilleure cohésion du masque dur sur l’échantillon au cours des attaques
chimiques qui suivent la lithographie.
• Une couche de résine de 50 nm est évaporée sur la totalité de la surface du composant. Il
s’agit d’une résine négative nommée QSR5, développée par Quantiscript, un partenaire
industriel de l’université de Sherbrooke (Québec). Cette résine une fois exposée au faisceau
d’électrons d’un MEB (Microscope Electronique à Balayage) résiste à une attaque à l’EthylMéthyl Kétone (MEK), contrairement aux zones ''non-insolées''.
• Des disques de 100 à 500 nm de diamètre sont définis par exposition de la surface de la
résine à un faisceau d’électrons fourni par un MEB, dans notre cas un JEOL 6300 modifié (il
est muni d’un dispositif d’interruption du faisceau [''beam-blanker''] et d’un porteéchantillon mobile et mécanisé). Chaque lithographie crée plusieurs dizaines de ces
disques, placés en réseau et régulièrement espacés d’une dizaine de microns. Toutes ces
dimensions sont contenues dans un fichier créé par le logiciel DESIGNCAD, dont on peut
voir une copie d’écran sur la Figure 74a.
Ce fichier a un format qui peut être lu par NPGS (Nanometer Pattern Generation System),
le logiciel qui pilote le MEB, le ''beam-blanker'' et le porte-échantillon. Le faisceau utilisé
pour l’exposition est obtenu avec une tension d’accélération de 30 keV et, au total, une
dose d’environ 15000 mC/cm2 est utilisée pour définir un disque de 100 nm de diamètre
tel que ceux présentés par les Figure 74 (b) et (c). Avec un courant de faisceau de 500 pA,
cette dose représente un temps d’exposition de 3,5 s par disque (diamètre : 100 nm).
(a)
(b)
10 µm
10 µm
(c)
Figure 74 : (a) Copie d’écran de la matrice de plots distants de 10 µm définie sous
DESIGNCAD. (b) Image obtenue par MEB des plots de résine après développement à la
MEK. Les points de résine font environ 100 nm de diamètre (c).
109
En plongeant les échantillons dans une solution de MEK, on développe la lithographie ebeam : La résine est gravée partout où elle n’a pas été exposée au faisceau d’électrons. La
MEK a une vitesse d’attaque de 100 nm/minute, ce qui donne 30 secondes d’attaque dans
notre cas.
• Plusieurs étapes de gravure humide sont alors réalisées. Tout d’abord, pour graver la
couche de nitrure, deux solutions ont été étudiées : la première, un plasma CF4+02 réalisé
dans l’enceinte d’un réacteur PECVD, a l’avantage d’être rapide (de 10 à 40 nm/min.) et le
défaut de n’être que peu sélective par rapport au silicium, ce qui pose un problème à cause
de la couche de poly-silicium qui se trouve sous le nitrure. La deuxième solution est une
attaque à l’acide phosphorique (H3PO4 à 85 %) porté à une température de 130°C. Elle est
très sélective par rapport au silicium (avec un rapport 10) mais a le désavantage d’être très
lente (6-7 Å/min.). Notons qu’elle peut être considérablement accélérée en portant sa
température à 140°C, mais ceci nécessite un dispositif permettant la recondensation des
vapeurs émises, étant donné que c’est la température d’ébullition de l’acide phoshorique.
Ces deux méthodes ont été utilisées à différents stades du procédé, en choisissant dans
chaque cas la plus appropriée. Etant donné que le poly-silicium va ensuite être également
gravé, le plasma CF4+02 peut être utilisé lors de cette étape, en se mettant dans des
conditions de sur-gravure, après avoir vérifié précisément la vitesse d’attaque. En effet,
cette dernière dépend de nombreux paramètres extérieurs et varie sensiblement d’un jour
à l’autre.
• Pour attaquer les couches de poly-silicium et l’isolant contenant les îlots, les échantillons
sont plongés dans une solution de HNO3/HF/H2O dont la composition est, en volume,
[50:1:100] à 40°C (la température maintenue à l'aide d'un bain-marie). Cette attaque
dure entre 6 min. 30 sec. et 8 min. Il est possible de contrôler son avancement de façon
visuelle, chaque couche ayant une couleur différente. La couleur initialement dorée ou grismétallique, correspondant au poly-silicium, passe après environ 4 ou 5 minutes à un bleuviolet sombre, la couleur du SiO2 contenant les îlots. Ensuite, on observe à nouveau une
couleur gris-métallique, qui est celle de la couche de poly-silicium recouvrant le substrat.
Quand cette couleur est observée de manière uniforme sur tout l’échantillon, l’attaque est
arrêtée.
• Une couche d’oxyde thermique est ensuite créée. Auparavant, il est important d’enlever la
couche de résine insolée, car dans le cas contraire, des molécules organiques pourraient
diffuser dans le composant et occasionner la formation d’impuretés électriquement actives.
Pour ce faire, les échantillons sont soumis à un plasma de dioxygène pendant 3 min. 30 s,
avec une puissance de 100 W. On a alors des plots constitués d’un empilement polySi/nanocristaux + SiO2/poly-Si, surmonté d’une couche de nitrure, comme on peut le voir
sur la Figure 75, dans le cas d’un plot de 300 nm de diamètre.
L’oxyde thermique peut alors être réalisé dans un four classique, à 900°C pendant 35 min.
sous dioxygène pur, afin d’obtenir une couche de 20 nm autour des plots (Figure 76a). Il
s’agit là d’une technique d’isolation très connue, appelée LOCOS (Local Oxidation of
Silicon), et qui n’est pas sans conséquence sur la structure du plot. Des simulations
110
physiques ont été réalisées en utilisant le logiciel SUPREM4, dans le but de vérifier si
l’intégrité des plots ne risquait pas d’être atteinte par cette étape. Comme on peut le voir
sur la Figure 77, on peut s’attendre à une réduction de la zone active, en raison des ''becs
d’oiseau'' qui se créent aux interfaces poly-Si/Si3N4 et poly-Si/SiO2/substrat.
Figure 75 : Image MEB d’un plot de 300 nm de diamètre après gravure chimique de la résine
insolée (vue de dessus). On distingue clairement la couche de nitrure, plus claire, au
sommet du plot.
Cr/Au
Nitrure
SiO2
Poly N+
Poly N+
SiO2
SiOX
Poly N+
SiOX
Poly N+
Si
Si
(a)
(b)
Figure 76 : (a) Schéma de la structure après croissance de la couche d’oxyde thermique.
(b) Représentation schématique des plots après la réalisation de la grille en chrome/or.
Il semble que, selon ce modèle, la structure ne soit pas radicalement transformée par cette
opération d’oxydation haute température. Les becs d’oiseau sont des phénomènes bien
connus, qui ont été étudiés à l’époque où les oxydes thermiques étaient utilisés pour isoler
les composants dans les circuits fortement intégrés. Ils sont connus pour générer des
contraintes, ce qui peut avoir de graves répercussions pour les mesures électriques. A
l’époque, les épaisseurs d’isolant étaient plus importantes que celles visées dans notre
cas ; on peut penser que le nombre de contraintes est par conséquent moins important.
111
Si3 N4
Si3N4
Poly
Poly
SiO2
SiO2
Substrat
Substrat
Si3 N4
Si3N4
Poly
Poly
SiO2
SiO2
Substrat
Substrat
Figure 77 : Résultat des simulations physiques réalisées grâce au logiciel SUPREM4, pour des
croissances d’oxyde de 10, 20 et 30 minutes, comparées avec la structure initiale (notée ''O
min.'').
On ne peut toutefois pas exclure qu’elles aient une influence sur les caractéristiques
électriques des composants. D’autre part, on peut constater qu’après 30 min., la
simulation prévoit une épaisseur d’environ 15 nm d’oxyde, ce qui correspond aux mesures
d’ellipsométrie effectuées après 30 min. dans notre four.
• La couche de nitrure située au-dessus des plots est ensuite gravée. Il est important que la
couche de poly-silicium qui se trouve sous le nitrure reste intègre ; c’est pourquoi le plasma
CF4+02 n’a pas été retenu pour cette étape. Les échantillons sont plongés dans une
solution d’acide phosphorique à 85 % porté à une température de 130°C.
Comme elle est très sélective par rapport au silicium, il est possible d’utiliser une durée
correspondant à une légère sur-gravure sans compromettre la présence de la couche de
poly-silicium. Il faut dans ces conditions 1h30 pour graver une couche de 50 nm de nitrure,
comme c’est le cas de ces échantillons.
La Figure 78 montre une image MEB d’un plot de 100 nm de diamètre réalisée après la
gravure de la couche de nitrure. Cette dernière est complètement réalisée, étant donné
qu’on n’observe pas à son sommet la couche claire que l’on peut voir sur la Figure 75.
112
Figure 78 : Plot de 100 nm de diamètre dépourvu de la couche de nitrure qui se trouvait
jusque là à son sommet et le protégeait des gravures chimiques successives. A ce stade, une
grille métallique peut être évaporée par-dessus pour le caractériser électriquement.
Enfin, une grille est créée sur les dispositifs, afin de pouvoir contacter les plots de silicium.
Ceci nécessite la prise d’un point de référence commun aux lithographies e-beam et
optique pour aligner les grilles avec les plots correspondants.
Pour ce faire, c’est la technique du soulèvement (lift-off) qui a été utilisée : une résine
Shipley S1818 est étalée sur les échantillons préalablement chauffés à 115°C pendant 1
min. Une épaisseur de résine de 1,6 mm est obtenue grâce à l’utilisation d’une tournette à
4500 tours/min. pendant 20 s. Elle est durcie en déposant les échantillons pendant 1 min.
à 115 °C sur une plaque chauffante. Des motifs de 50 µm par 50 µm sont définis par
lithographie optique, en s’alignant sur les marques définies lors de la lithographie e-beam.
Les zones de résine exposées sont éliminées par un bain au développeur pendant 1 min.
15 s.
Une couche de chrome de 10 nm puis une couche d’or épaisse de 200 nm sont alors
évaporées sur les échantillons (Figure 76b). Le chrome a été choisi pour sa bonne tenue
mécanique sur l’oxyde de silicium. L’or est quant à lui utilisé parce qu’il s’oxyde très peu
lorsqu’il est exposé à l’air, au cours du temps, et pour sa tenue mécanique lors des tests
sous pointes. On plonge finalement les échantillons dans de l’acétone pour effectuer le
soulèvement.
Sur de tels échantillons, on a cherché à montrer qu’il était possible de repérer les plots de par
la luminescence qu’ils libèrent lorsqu’ils sont excités par le faisceau électronique du MEB. Cette
technique est appelée cathodoluminescence, et elle s’appuie sur une théorie qui prédit que les
électrons excitateurs vont pénétrer tout d’abord dans la bande de conduction des îlots, avant
de se recombiner de manière radiative avec des trous présents dans la bande de valence. Les
photons émis lors de ce processus ont alors l’énergie correspondant à la différence énergétique
entre les bandes de conduction et de valence des nanocristaux, c’est-à-dire à leur gap.
113
En d’autres termes, la longueur d’onde des photons émis permet de remonter au diamètre des
îlots, car le confinement des porteurs dans les nanocristaux fait en sorte que le gap dépend de
la taille des îlots. Cette dépendance peut être évaluée par des relations analytiques approchées
ou par un calcul théorique utilisant le formalisme quantique. Par cette méthode, il est donc
possible de déterminer dans un échantillon les zones présentant des îlots et le diamètre de
ceux-ci.
Pour ce faire, il suffit de comparer l’image MEB d’un réseau de plots avec le signal de
cathodoluminescence obtenu dans les mêmes conditions. La Figure 79 montre que les plots
visibles sur l’image MEB correspondent parfaitement aux points repérés par
cathodoluminescence. En revanche, il s’est avéré impossible de repérer les îlots eux-mêmes.
Ce n'est pas directement la résolution spatiale de la sonde qui est en cause, celle-ci étant du
même ordre que son diamètre à savoir environ un nanomètre.
En revanche, la résolution de la mesure est limitée par la diffusion des électrons d’excitation
dans le matériau, qui se propagent dans un volume d’autant plus grand que la tension
d’accélération des électrons est importante. Les imperfections du matériau entourant les
nanocristaux peuvent donc être le siège de recombinaisons radiatives en dehors de la zone de
génération des électrons. Ceci aboutit à l'émission d'un signal lumineux caractéristique des
défauts de l'isolant et émanant d'une surface plus large que la zone des îlots.
Figure 79 : Signal obtenu par cathodoluminescence (a) et image en électrons secondaires
(b) pour une matrice de plots de 500 nm de diamètre.
De fait, l’analyse des longueurs d’ondes obtenues nous a démontré la présence de nombreux
défauts, notamment aux longueurs d'onde correspondant aux interfaces entre les îlots et la
matrice isolante. Le repérage individuel des îlots est donc tout à fait envisageable dans l'avenir,
à condition d'améliorer la matrice isolante (par exemple par l’application de recuits adaptés) et
de limiter la tension d'accélération du faisceau excitateur afin de réduire le plus possible
l'extension de la zone de diffusion.
114
I.3. Conclusions et perspectives
Cette partie a donc montré la faisabilité d’un procédé d’isolation compatible avec la technologie
CMOS et permettant d’avancer dans la création de composants ne comportant que quelques
îlots dans leur zone active. L’originalité de ces composants tient au fait qu’en leur sein, le
transport est de type ''vertical'', c’est-à-dire que les porteurs se déplacent perpendiculairement
aux interfaces des couches. Les dimensions caractéristiques, comme par exemple la taille des
barrières de potentiel, sont donc déterminées par les épaisseurs des couches. Ce paramètre
est certainement l’un des mieux contrôlés dans les technologies actuelles, et c’est celui qui
peut être amené à des dimensions nanométriques avec la meilleure reproductibilité. Ce point
représente donc un avantage certain par rapport aux composants monoélectroniques
couramment rencontrés dans la littérature et pour lesquels le transport se fait
''horizontalement'', c’est-à-dire parallèlement à la surface du substrat.
On trouve dans la littérature un nombre important de composants verticaux élaborés grâce à
des technologies basées sur les matériaux III-V, car ceux-ci sont souvent élaborés par
épitaxie, une technique qui permet l’élaboration maîtrisée de couches ultra-minces épaisses de
quelques couches atomiques seulement. On peut ajouter que les matériaux III-V présentent
souvent bien moins de défauts que l’hétérojonction Si/SiO2, ce qui est favorable à l’observation
d’effets monoélectroniques.
Mais le coût des matériaux III-V et leur faible pénétration dans les technologies de production
de masse en microélectronique confèrent une grande importance à la réalisation de
composants verticaux utilisant la technologie silicium, et donc à la première partie de ce
chapitre.
Enumérons maintenant les conclusions que l’on peut tirer de cette partie, qui ouvrent
également bon nombre de perspectives :
Tout d’abord, nous nous somme heurtés à un certain nombre de difficultés en mettant au
point ce procédé. Le manque de reproductibilité des étapes de gravure humide est l’une
d’elles, et plus particulièrement celles qui concernent l’attaque du SiO2 contenant les
nanocristaux et la gravure des couches de poly-silicium. Les solutions utilisées sont
efficaces pour des couches épaisses, mais elles donnent lieu à des incertitudes trop
élevées pour qu’il soit possible de contrôler la gravure de quelques nanomètres de
profondeur.
On doit donc envisager de passer à d’autres types de gravure. En ce qui concerne les
gravures humides, des solutions de KOH et de HF ont été récemment utilisées pour graver
respectivement le poly-Si et le SiO2. Les étapes de gravure sont un peu plus
reproductibles, mais il demeure très difficile de réaliser de façon reproductible des plots de
dimensions inférieures à 200 nm tels que ceux dont on peut voir une image MEB sur la
Figure 80.
115
Figure 80 : Image MEB
d’un réseau de plots de
200 nm de diamètre
obtenues
par
des
gravures humides au
KOH et au HF. Au centre,
une ligne de référence
montre
la
séparation
entre
la
couche
de
nitrure et le reste du
plot, pour une hauteur
conforme à celle que l’on
attend (117,3 nm).
Il apparaît donc prometteur de mettre en place des étapes de gravure sèche, comme la
RIE (Reactive Ion Etching) par exemple, qui consiste à graver les couches par des
faisceaux d’ions énergétiques. La mise en œuvre de ces techniques est à l’heure actuelle
au centre des projets menés le cadre de la collaboration entre le LPM et le CRN² (Centre
de recherche en nanofabrication et nanocaractérisation, Université de Sherbrooke,
Québec).
D’autre part, l’isolation par un oxyde thermique est, comme on l’a dit, génératrice de
contraintes. On pourra donc à l’avenir se tourner vers la technique qui a succédé au
LOCOS dans l’industrie microélectronique : le STI (Shallow Trench Isolation). Elle utilise
un oxyde déposé, qui ensuite est aplani par un polissage mécaniquo-chimique (CMP,
Chemical and Mechanical Polishing). Le matériel nécessaire à la réalisation d’épaisseurs de
10 ou 20 nm par CMP est d’une technologie avancée et représente un investissement
important. De plus, il n’est justifié que si les oxydes déposés ont une qualité diélectrique
suffisante, alors que dans les faits, ils sont souvent de bien moins bons isolants que les
oxydes thermiques.
On a par ailleurs montré que la cathodoluminescence pouvait permettre de discerner les
zones contenant des îlots de celles qui n’en comportent pas. Avec la résolution que l’on
peut attendre du photodétecteur, cette technique permettra certainement de repérer
spatialement les îlots de très petite taille (quelques nanomètres de diamètre), tout en
déterminant leur diamètre, ce qui ouvre une perspective alternative à l’arrangement des
îlots après leur élaboration.
Généralement, la notion d'arrangement d'îlots correspond au choix de leur emplacement
et de leur taille. Grâce à la cathodoluminescence, il sera possible d’agir différemment, en
créant le composant là où les îlots ont des positions et des diamètres que l’on juge
satisfaisants pour caractériser les phénomènes monoélectroniques ou relatifs au
confinement de porteurs en leur sein. Il sera par exemple possible d’éviter les îlots
coalescents, les zones ne comptant aucun îlot ou présentant trop de défauts.
116
La caractérisation électrique a quant à elle donné des résultats décevants. Les courbes
montrent la présence de courants de fuite importants, que l’on peut imputer soit au
matériau de base, soit aux défauts créés par le procédé de fabrication. On peut par
exemple penser aux contraintes induites par la création de l’oxyde thermique, ou à
l’utilisation de nitrure pour le masque dur. Les préconisations apportées par cette partie
pourront amener les caractérisations électriques à apporter toutes les informations que
l’on peut attendre d’elles, en ce qui concerne notamment l’occurrence de phénomènes
mono-électroniques.
Enfin, le procédé d’isolation présenté dans cette partie est également original car il est
appliqué à des échantillons élaborés par des techniques identiques à celles qui sont
utilisées pour élaborer des mémoires FLASH à nanocristaux. La caractérisation électrique
des zones isolées par notre procédé pourrait donc permettre d’évaluer les différentes
techniques d’élaboration des nanocristaux (dont certaines sont présentées dans la partie
I.2.c du chapitre I). Par exemple, on pourrait envisager d’évaluer les possibilités de
miniaturisation de chacune de ces techniques, qui sont en rapport étroit avec les
dispersions en localisation et en tailles. Pour ce faire, on pourrait envisager d’utiliser la
technique de mesure des courants transitoires présentée dans le chapitre II pour estimer
le nombre de charges stockées dans les îlots et le couplage nanocristaux/grille. Ceci
donnerait une idée assez précise du nœud technologique que les différentes techniques
d’élaboration peuvent atteindre en matière de mémoires FLASH.
Les perspectives ouvertes par cette étude sont donc importantes. L’approche choisie par le
procédé d’isolation présenté ici est parfois appelé descendant, ou ''top-down'' en anglais, car
elle consiste à faire des objets nanométriques à partir de composants bien plus gros. Ceci rend
les techniques décrites dans cette partie attractives car elles offrent la possibilité de pousser la
miniaturisation jusqu’aux composants à quelques électrons tout en évitant les révolutions
technologiques qui pourraient remettre en question leur utilisation à l’échelle industrielle. Le
chapitre suivant présente une toute autre approche, que l’on appelle ''bottom-up'' car elle
propose d’organiser des objets de dimensions nanométriques (les îlots) pour en faire des
composants mésoscopiques, à savoir des transistors ou des mémoires à un électron.
II. Elaboration de composants à quelques îlots par AFM
Pour organiser spatialement des îlots déposés aléatoirement sur une couche d’isolant, la
possibilité d’utiliser la pointe d’un microscope AFM (Atomic Force Microscope) a fait l’objet des
recherches menées dans le cadre du projet DotSET, financé par la région Rhône-Alpes. Il s’agit
de choisir quelques nanocristaux et de les placer individuellement entre deux ou trois
électrodes, que l’on peut alors polariser pour mesurer le courant traversant les nanocristaux.
Deux obstacles s’opposent classiquement à la réalisation de ce type de composants. Tout
d’abord, si l’on veut mesurer le courant traversant quelques îlots ayant un diamètre de
quelques nanomètres, il est nécessaire que l’écart entre les électrodes soit de l’ordre de la
dizaine de nanomètres, ce qui nécessite l’utilisation de techniques de lithographie très
pointues. Cet aspect a été étudié par T. Fournier au CRTBT (Centre de Recherche sur les Très
Basses Températures, CEA-CNRS, Grenoble).
117
Ensuite, il faut que les îlots étudiés se trouvent entre les électrodes créées, ce qui n’est pas
naturellement le cas lorsque les îlots ne sont pas organisés a priori. Comme on l’a déjà évoqué
dans le chapitre I, l’organisation spatiale des îlots a priori a été étudiée par un certain nombre
d’équipes de recherche. Mais peu de solutions ont été trouvées pour organiser ces îlots a
posteriori, c’est-à-dire une fois que les électrodes ont été fabriquées. C’est à ce type
d’approche que s’apparente la nanomanipulation par AFM, une technique déjà proposée pour
des îlots métalliques [Carlsson99] , et qui a été développée pour des îlots en silicium par
S. Decossas au LPM et au LTM (CNRS, Grenoble) [Decossas04a,b] .
La partie II.1. résume ces travaux d’élaboration. De plus, peu de caractérisations électriques
ont été proposées par rapport à ces techniques d’organisation a posteriori, en particulier à
propos de la nanomanipulation d’îlots de silicium par AFM. C’est sur ce point que notre travail
s’est focalisé, et la partie II.2. rend compte des résultats obtenus dans ce sens.
II.1. Procédé d’élaboration
Les échantillons caractérisés par la suite (partie II.2.) sont obtenus à partir d’un substrat de
silicium sur lequel on crée une couche d’oxyde thermique. Les premiers échantillons considérés
comportaient une couche d’oxyde thermique d’environ 30 nm d’épaisseur. Sur la surface de
l’isolant, des nanocristaux de silicium ayant un diamètre moyen de 20nm ont été déposés par
LPCVD, avec une densité d’environ 1010 cm-2 (Figure 81). La création de ces nanocristaux est
due à T. Baron (LTM-CNRS, Grenoble), avec des paramètres technologiques similaires à ceux
qu'on peut trouver dans les références [Baron00] et [Baron02].
Figure 81 : Image AFM des îlots déposés
par LPCVD sur l’oxyde épais. Les îlots, peu
denses, ont un diamètre d’environ 20 nm
(Image : S. Decossas).
Figure 82 : Image MEB des électrodes
métalliques réalisées par lift-off, espacées
d’environ 60 nm (Image : T. Fournier).
Ensuite, une couche de résine positive a été déposée puis c’est la technique du lift-off qui a été
utilisée pour créer les électrodes. Par e-beam, on expose au faisceau d’électrons les zones
correspondant aux électrodes, puis on ôte la résine insolée par un révélateur. Une fine couche
de titane (5nm) et une autre plus épaisse d’or (15nm) sont alors évaporées. En plongeant les
dispositifs dans un solvant adapté, on ôte la résine, qui soulève les couches de métal sur toute
leur surface, mises à part les zones définies par e-beam. Ces étapes, réalisées par T. Fournier
118
(CRTBT-CNRS, Grenoble), ont ainsi abouti à des électrodes espacées de quelques dizaines de
nanomètres (60nm pour les électrodes que l'on peut voir sur la Figure 82).
Ensuite, grâce à une pointe AFM, trois îlots ont été amenés individuellement entre les
électrodes, après avoir plongé l'échantillon dans un bain dilué de HF. Cette précaution permet
d'ôter l'oxyde natif des îlots, ce qui est nécessaire car il assure une trop forte cohésion des îlots
avec la couche d'oxyde et demande des forces trop importantes pour être mécaniquement
désolidarisé de cette couche. Les échantillons décrits par la suite ont été structurés par AFM
par S. Decossas (LTM-CNRS, Grenoble). La Figure 83 montre un dispositif comportant trois des
îlots identiques à ceux représentés sur la Figure 81 entre les électrodes montrées par la Figure
82.
Figure 83 : Image AFM des deux
électrodes reliées par une chaîne de
trois îlots [Decossas04a].
On distingue nettement les trois îlots, situés entre la pointe de l’électrode supérieure et
l’électrode inférieure, qui est carrée. La Figure 84 présente le profil de la zone active de ce
composant, réalisée en mode contact, c’est-à-dire en posant la pointe du microscope AFM sur
le matériau. Les trois flèches rouges dessinées montrent que la zone séparant les électrodes
comporte trois bosses, qui attestent de la présence des nanocristaux. Les résultats de la
caractérisation de ces échantillons sont décrits au cours de la partie II.2.
Figure 84 : Profil obtenu
par AFM en mode contact
de la zone comprise entre
les deux électrodes, et
qui comporte les îlots
(indiqués par les flèches
rouges) [Decossas04a].
119
Des échantillons un peu différents quant à leur architecture ont été également élaborés. Tout
en empruntant les mêmes techniques que précédemment, une grille a cette fois été ajoutée,
pour tenter de moduler le courant traversant la structure, et ainsi chercher à mettre en
évidence un effet comparable à l'effet de champ dans les transistors MOS conventionnels.
Tout d'abord, un dispositif comprenant trois îlots et 3 électrodes (drain, source et grille) a été
réalisé. Une image AFM de ce composant est présentée sur la Figure 85. Les paramètres sont
identiques à ceux du composant décrit précédemment, mis à part l'épaisseur de la couche
d'oxyde thermique (20 nm), l'écart entre les électrodes (35 nm) et le diamètre des îlots
(10 nm).
G
S
D
Figure 85 : Image AFM
d'un dispositif comprenant
3 îlots placés entre deux
électrodes
(drain
et
source)
et
une
grille
(Image : S. Decosses).
Enfin, un dispositif comportant un îlot unique a été élaboré selon la même technique, sur un
oxyde thermique de 20 nm d'épaisseur, entre deux électrodes séparées de 26 nm (dont on
peut voir une image MEB sur la Figure 86).
Figure 86 : Image MEB des
électrodes métalliques réalisées par
lift-off, espacées de 26 nm (Image :
T. Fournier).
120
La Figure 87 montre une image AFM en mode contact du composant et la Figure 88 présente
un profil réalisé toujours en mode contact et qui atteste de la présence de l'îlot, tout en
donnant une idée de sa hauteur.
Du point de vue morphologique, l'élaboration de ces dispositifs a été une réussite. De
nombreux dispositifs ont été ainsi fabriqués et caractérisés. A cette occasion, nous avons pu
expérimenter concrètement l’intérêt de la nanomanipulation. En effet, de nombreuses
configurations ont pu être testées, étant donné que l’organisation des îlots par cette technique
peut tout à fait être modifiée à de nombreuses reprises. Ceci permet de tester une infinité de
configurations, et en particulier choisir des îlots de tailles différentes, ou leurs positions par
rapport aux électrodes. Cette souplesse ouvre des perspectives importantes dans l’élaboration
de dispositifs innovants.
Au cours de notre travail, elle a d’ores et déjà permis d’élaborer des démonstrateurs dotés de
caractéristiques électriques remarquables à température ambiante, comme le montre la partie
suivante.
Figure 87 : Image AFM d'un
dispositif comprenant 1 îlot
unique d'environ 25 nm de
diamètre placé entre deux
électrodes (drain et source)
et une grille [Decossas04a].
Figure 88 : Profil réalisé par
AFM en mode contact sur un
dispositif comprenant 1 îlot
unique (noté nc-Si pour
nanocristal
de
silicium)
d'environ 25 nm de diamètre
placé entre deux électrodes
(drain et source) et une
grille. Le profil a été réalisé
perpendiculairement à l'axe
drain-source, et l'électrode
qu'on peut distinguer est par
conséquent
la
grille
[Decossas04a].
121
II.2. Caractérisation des dispositifs comprenant trois nanocristaux
de silicium entre deux électrodes métalliques
Cette partie présente les principaux résultats de la caractérisation électrique de composants à
un et trois îlots placés entre deux ou trois électrodes. Comme on l’a évoqué dans la partie
précédente, l’organisation des nanocristaux par AFM permet de caractériser les composants et
ensuite de modifier leur architecture. On peut alors à nouveau les caractériser pour
comprendre l’impact des modifications effectuées sur les caractéristiques électriques
mesurées. Il aurait été fastidieux de retranscrire ici l’ensemble de ce travail et, par
conséquent, seuls les résultats les plus importants sont par la suite décrits.
Dans un premier temps, ce sont les dispositifs dépourvus de grille et comportant trois
nanocristaux de silicium alignés entre deux électrodes qui ont été caractérisés. Pour ce faire,
un contact arrière a tout d'abord été pris sur le substrat. Les mesures sont faites par
l’intermédiaire de 3 pointes, une sur chaque électrode du dispositif étudié, et une troisième sur
le contact arrière. Ceci nous a permis de polariser le substrat, comme on va le voir plus tard.
Toutes les mesures ont été faites à un température de 300K.
Dans un premier temps, on a polarisé l’une des électrodes que l'on considérera comme étant le
drain et on a relié l’autre (la source) à la masse. Le substrat lui aussi a été relié à la masse. La
Figure 89 montre le courant mesuré sur l’électrode polarisée en fonction de la tension qui lui
est appliquée.
4.0
3.5
ID (pA)
3.0
T=300 K
VSUB= 0 V
2.5
2.0
1.5
1.0
0.5
0.0
3.5
4.0
4.5
5.0
Figure 89 : Courant
mesuré sur le drain en
fonction de la polarisation
appliquée entre le drain
et
la
source,
à
température
ambiante.
Pendant la mesure, le
substrat est porté à la
masse. La courbe rouge
est issue du lissage de la
courbe expérimentale (en
noir). Les traits bleus
matérialisent les paliers
qui semblent apparaître
dans la caractéristique
obtenue.
VDS (V)
On observe que le courant est sujet à des variations rapides, qu'on peut attribuer à la présence
de bruit ou à des résonances tunnel entre les électrons injectés et des niveaux d'énergie situés
dans la zone active.
122
Un bruit de type télégraphique permet d’interpréter les variations rapides du courant par le
piégeage et le dépiégeage de porteurs à proximité de la zone active. Ces porteurs peuvent
influencer la conduction des îlots, par effet de champ. En ce qui concerne la résonance tunnel,
elle peut correspondre à la présence d'états situés par exemple à la surface des nanocristaux
de silicium ou au niveau de l'interface îlot/SiO2. Les courbes ont été réalisées en utilisant un
temps d'intégration standard qualifié de moyen, c'est-à-dire qu'on utilise des rampes de
tension relativement lentes. Dans ces conditions, pour chaque point de polarisation, l'appareil
prend quelques dizaines de points et moyenne les résultats obtenus. Le fait d’augmenter le
temps d'intégration et de pousser à plusieurs centaines le nombre de mesures considérées n’a
apporté aucune amélioration en termes de niveau de bruit.
Si on lisse la courbe expérimentale représentée en noir sur la Figure 89, on remarque la
présence de paliers, typiques du blocage de Coulomb. Ces paliers s’observent de manière
reproductible, comme le montre la Figure 90. Sur ce graphique, les courbes de courant sont
lissées de la même manière que sur la Figure 89 (courbe rouge), et ce afin d’atténuer les effets
du bruit. On observe bien les paliers de courants, qui apparaissent à des tensions comparables
pour toutes ces mesures.
5
Figure 90 : Courant mesuré
4
sur le drain en fonction de la
IG (pA)
polarisation appliquée entre le
drain
3
et
la
température
source,
à
ambiante.
Pendant la mesure, le substrat
2
est porté à la masse. Les trois
courbes correspondent à trois
1
mesures
prises
dans
les
mêmes conditions et donnent
0
3.0
3.5
4.0
4.5
VG (V)
5.0
une idée de la reproductibilité
du résultat.
Cette progression par paliers du courant peut s’expliquer au travers de la théorie du blocage
de Coulomb. En effet, pour les tensions les plus faibles, le transport est bloqué car il est
impossible d'injecter un électron dans l'un des trois îlots. Lorsqu'on augmente la tension, il
devient possible d'ajouter au moins un électron dans chaque îlot, car l’énergie des porteurs est
suffisante pour surmonter l'énergie de chargement de chaque îlot présent dans la chaîne.
Si on augmente encore la polarisation, on finit par injecter des porteurs dont l’énergie est
suffisante pour surmonter les forces électrostatiques dues au premier électron injecté et il est
alors possible de placer au moins deux électrons par îlot. Dans ces conditions, la conductivité
de la chaîne augmente, car plus de porteurs sont disponibles pour les sauts tunnel entre îlots.
On assiste alors à une marche dans la courbe I(V), et à chaque fois qu'il est énergétiquement
possible d'augmenter le nombre de porteurs pouvant être présents simultanément dans les
123
nanocristaux, on a une nouvelle marche de courant. Notons qu'entre chaque îlot, les
événements tunnel sont séquentiels, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent avoir lieu simultanément.
L'augmentation du courant est donc uniquement due à l'augmentation du nombre de porteurs
disponibles pour la conduction.
Les courbes représentées sur la Figure 90 marquent des paliers larges de 0,35 V environ.
D’après la théorie orthodoxe, comme nous le montrerons dans la troisième partie de ce
chapitre, la capacité totale de l’îlot qui est responsable de tels paliers peut être déduite par la
relation :
C TOT =
q
= 0, 46 aF
∆Vpaliers
(39)
Cette valeur est faible, mais les simulations capacitives également développées dans la
troisième partie de ce chapitre montreront que ces valeurs sont tout à fait cohérentes avec le
système étudié, étant données la forme des électrodes et l'épaisseur de la couche séparant les
îlots du substrat. Une mesure identique à celle effectuée pour la Figure 90 a été faite en
polarisant le substrat avec une tension de -9 V (Figure 91).
4
T=300 K
VSUB= -9 V
Figure 91 : Courant
mesuré sur le drain en
fonction de la polarisation
appliquée entre le drain
et
la
source,
à
température
ambiante.
Pendant la mesure, le
substrat est porté à un
potentiel de -9 V.
ID (pA)
3
2
1
0
5
6
7
8
9
10
VDS (V)
Etant donné qu’une couche d’oxyde épaisse d’environ 30 nm sépare la surface de l’échantillon
du substrat, la contribution de cette polarisation en termes de courant doit être négligeable.
Ainsi, la seule influence notable du substrat polarisé est d'ordre électrostatique, ce qui laisse
donc entrevoir la possibilité de l'utiliser comme une grille de transistor MOS. Comme dans le
cas où le substrat était à la masse, on peut observer des oscillations rapides du courant. En
revanche, on ne discerne pas de paliers mais de larges pics de courant. Ce phénomène ne
peut s’expliquer par la théorie orthodoxe du blocage de Coulomb. Le champ électrique créé par
la tension négative appliquée au substrat semble changer considérablement les propriétés de
conduction de la chaîne d’îlots. On peut penser que sous l’influence de ce champ, le silicium qui
constitue le nanocristal est déplété, une zone de charge d’espace est créée, ce qui modifie la
124
densité de porteurs au sein de l’îlot et fait sensiblement diverger le comportement du
composant de celui d’une chaîne d’îlots métalliques.
Enfin, on a mesuré le courant de drain en maintenant une tension drain-source constante et en
faisant varier la polarisation du substrat, afin de mieux étudier son influence électrostatique. La
Figure 92 montre le courant de drain mesuré en suivant ce principe ; on a pour cela fixé la
tension drain-source à 4,7 V.
1.0
T=300 K
0.9
VDS= 4,7 V
0.8
Figure 92 : Courant mesuré sur
le drain en fonction de la
polarisation
appliquée
au
substrat,
à
température
ambiante. Pendant la mesure,
le drain est porté à un potentiel
de 4,7 V, alors que la source
est reliée à la masse.
0.7
ID (pA)
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2
0.1
0.0
0.0
-0.5
-1.0
-1.5
-2.0
VSUB(V)
On constate à nouveau des oscillations rapides dans le courant de drain. Le niveau moyen du
courant, quant à lui, diminue à mesure qu’on augmente la polarisation (négative) du substrat.
On peut attribuer là encore ces oscillations à un bruit de type télégraphique, même si il semble
qu'une certaine régularité apparaisse quant aux tensions auxquelles apparaissent ces pics.
Cette dernière remarque évoque un comportement conforme aux prévisions de la théorie
orthodoxe.
En effet, sous l’influence électrostatique d’une électrode de grille (ici le substrat), on s’attend à
trouver une modulation périodique du courant drain-source. Ici, si on considère le signal
comme périodique, on a une période de 0,07 V environ. D’après la théorie, on peut en déduire
la capacité existant entre l’îlot responsable de cette modulation et le substrat par la relation
suivante :
CG =
q
 2, 29 aF
∆VG
(40)
Cette valeur est relativement importante, et elle est en outre plus importante que la capacité
totale trouvée par la relation (39). Les oscillations observées sur la Figure 92 ne sont donc pas
dues au mécanisme de blocage de Coulomb avec les paramètres capacitifs déduits des paliers
observés sur la Figure 89 et la Figure 90.
125
La diminution du niveau moyen du courant de drain lorsqu’on augmente la tension appliquée
au substrat peut être interprétée comme la transition d’un comportement ''en marches''
(Figure 90) à un comportement ''en pics'' (Figure 91), pour lequel le courant passe entre les
pics par des valeurs très faibles.
II.3. Caractérisation des dispositifs comprenant un et trois nanocristaux de
silicium entre deux électrodes métalliques et une grille
Des mesures de courant ont été réalisées sur les dispositifs comprenant respectivement un et
trois îlots, munis d’une grille, tous deux décrits dans la partie II.1 de ce chapitre.
A T=77K, les mesures du courant de drain en fonction de la polarisation drain-source montrent
un courant très bas, bruité, et qui ne varie pas avec la tension de drain (Figure 93). On peut
remarquer les oscillations de la courbe expérimentale, en noir sur la Figure 93, qui peuvent
indiquer la présence de résonances tunnel dans la zone active du composant. Ces oscillations
ne peuvent en aucun cas être des artefacts de mesure, étant donné que les appareils utilisés
ont une résolution de l’ordre du fA (10-3 pA).
0.08
T=77 K
ID (pA)
0.06
Figure
93
:
Courant
mesuré sur le drain en
fonction de la polarisation
appliquée entre le drain et
la
source,
à
T=77K.
Pendant la mesure, le
substrat est relié à la
masse. La courbe orange
est issue du lissage de la
courbe expérimentale (en
noir).
VSub= 0 V
0.04
0.02
0.00
-0.02
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
VDS (V)
De même, toujours à T=77K, les mesures du courant de drain en fonction de la polarisation
appliquée à la grille montrent que celle-ci ne module pas du tout le courant ID (Figure 94).
Nous observons au contraire un courant faible et constant, parcouru de très faibles pics. Ces
derniers sont certainement dus au piégeage ou au dépiégeage de porteurs à proximité ou à la
surface des îlots.
En effet, la polarisation à laquelle ils interviennent n’est absolument pas reproductible, comme
le montrent les trois courbes de la Figure 94, qui ont été réalisées dans des conditions
absolument identiques. Ces pics semblent donc pouvoir être reliées au processus de bruit
télégraphique.
126
0.4
T=77 K
VDS= 5 V
ID (pA)
0.3
Figure 94 : Courant mesuré
sur le drain en fonction de la
polarisation appliquée à la
grille substrat, à T=77K.
Pendant la mesure, le drain
est porté à un potentiel de 5
V, alors que la source est
reliée à la masse.
0.2
0.1
0.0
0.0
-0.5
-1.0
-1.5
-2.0
-2.5
-3.0
VG (V)
Nous n’avons donc pas reproduit les résultats relatifs au dispositif caractérisé dans la partie
II.2. Tout était pourtant favorable à l’observation de caractéristiques similaires à celles
obtenues sur un composant à 3 îlots sans grille, avec notamment des îlots de diamètre
inférieur, ou la présence d’une grille qui devait permettre de moduler l’énergie des îlots.
A ce stade, il est donc impossible de comprendre les raisons pour lesquelles les composants
adoptent un comportement si différent selon qu’une grille est présente ou non à proximité de
la zone active.
On peut remarquer que les courants obtenus sont très faibles et bien inférieurs dans le cas de
l'îlot unique que dans celui de la chaîne de trois îlots. On peut penser que la résistance totale
du dispositif est très importante et limite les possibilités de distinguer le courant de conduction,
à moins d'appliquer des tensions très importantes entre le drain et la source.
Plusieurs facteurs peuvent contribuer à l'augmentation de la résistance globale du dispositif.
Tout d'abord, la taille des barrières peut être largement modifiée par l'oxydation de surface des
îlots. On a en effet remarqué que les caractéristiques électriques des dispositifs évoluent au
cours du temps, dans le sens d'une diminution suivie d'une disparition du courant conduit par
les îlots. Il est donc probable que l’augmentation de la résistivité soit liée à la formation d’une
couche d’oxyde natif. Nous avons pourtant essayé de réaliser les mesures de courant très
rapidement après les déplacements d'îlots, qui sont précédés d'un bain d'acide fluorhydrique,
justement pour éliminer cet oxyde natif. En effet, la présence de cet oxyde a également pour
conséquence l’augmentation de la résistance mécanique entre le substrat et les îlots, ce qui
rend difficile le déplacement des particules par la pointe AFM. On sait en revanche que l'oxyde
natif se reforme relativement rapidement, atteignant plusieurs angströms après quelques
minutes d'exposition à l'air.
De plus, même si les espaces entre les îlots et entre les électrodes et les îlots semblent réduits
sur les images AFM, nous ne disposons pas de données quantitatives fiables sur les épaisseurs
réelles des jonctions. Enfin, par rapport à un SET où les électrodes et les îlots sont métalliques,
127
on peut s'attendre à des jonctions dont les résistances sont bien plus élevées. En effet, la
valeur de la résistance d’une jonction dépend non seulement de la transparence de l’isolant
dont est faite la jonction, mais aussi du nombre de porteurs dans la bande de conduction du
côté de l'émetteur et du nombre d'états disponibles dans la bande de conduction du récepteur.
Dans le cas du silicium massif, intrinsèque, le niveau de Fermi se trouve au milieu de la bande
interdite, et dans la bande de conduction elle-même, la probabilité de trouver un électron est
relativement faible (10-10 pour E=EF). De plus, le volume réduit des boîtes de silicium utilisées
entraîne un nombre assez faible d'états disponibles dans la bande de conduction, inférieur à 10
pour les îlots de moins de 10 nm de diamètre ! Ceci a pour effet de rendre les transparences
des jonctions tunnel bien plus faibles que dans le cas métallique, puisqu'un îlot en métal laisse
environ un électron par atome à la conduction et qu'un îlot de 10 nm de diamètre compte
environ 20000 atomes.
A l’avenir, il est donc important de s'attacher à diminuer les résistances des jonctions. Etant
donnée l'absence de données précises concernant leurs épaisseurs réelles (à cause des effets
de convolution de l'AFM), d'autres voies peuvent être envisagées. Thelander et al. ont par
exemple réussi à contacter un îlot métallique (de 7 nm de diamètre) à l'aide d'un nanotube de
carbone et à observer des effets monoélectroniques à basse température (jusqu'à 200 K
environ) [Thelander01] . Il reste néanmoins à mieux définir le transport dans ce nanotube,
car il est nécessaire qu'il ait des caractéristiques capacitives pour que le blocage de Coulomb
puisse être observé. Il faudra de plus s’assurer que les effets monoélectroniques sont dus aux
îlots et non aux nanotubes.
II.4. Conclusion
Le déplacement d’îlots au moyen d’une pointe AFM permet d’élaborer des composants
électroniques ayant les morphologies recherchées pour l’observation d’effets monoélectroniques. Cependant, leur caractérisation électronique ne montre pas de tels effets.
Nous avons mesuré le courant obtenu à température ambiante sur un dispositif comportant
une chaîne de trois îlots et qui n’a pas été doté d’une électrode de grille lorsqu’on polarisait
l’une des deux électrodes. Ce courant n’est pas linéaire avec la tension appliquée, et on peut
distinguer des paliers de courants analogues à ceux qui sont occasionnés par le blocage de
Coulomb. Si on utilise le substrat comme une grille, on observe des oscillations mais celles-ci
ne sont pas périodiques, contrairement à ce qu’on peut attendre du blocage de Coulomb. Les
courbes sont en outre très bruitées, ce qui peut être associé à du bruit télégraphique et/ou à
des résonances tunnel avec des pièges présents à proximité de la chaîne d’îlots.
Lorsqu’une grille est ajoutée, les échantillons conduisent un courant très faible, parcouru de
pics de forte amplitude associé au bruit déjà évoqué précédemment. Ces courants très faibles
ne montrent pas d’évolution cohérente en fonction des polarisations appliquées, que ce soit à
la grille ou au drain.
Les résultats obtenus en présence d’une grille diffèrent donc grandement de ceux obtenus
sans grille. Pour expliquer ce fait, il est intéressant de se pencher sur les interactions
électrostatiques existant entre les électrodes, le substrat et les îlots.
128
En effet, en étudiant le système considéré au travers d’un modèle électrique simple, on peut
voir que les paramètres les plus importants pour l’observation de blocage de Coulomb sont les
capacités des jonctions séparant les différents éléments des composants. C’est ce que propose
la partie suivante.
III. Modélisation simple des composants à quelques îlots
Lorsqu’on élabore des structures à quelques îlots, on est constamment à la recherche
d’indications relatives aux aspects géométriques favorables à leur fonctionnement électrique.
Cette recherche va de paire avec la compréhension des phénomènes physiques qui ont lieu en
leur sein. Parallèlement aux observations de la partie II de ce chapitre, notamment en ce qui
concerne l’échec des caractérisations électriques relatives aux dispositifs à un ou à trois îlots
munis d’une grille de contrôle, il s’agit de modéliser de tels composants.
L’étude des composants comprenant quelques îlots doit tenir compte des effets monoélectroniques, le blocage de Coulomb et le confinement quantique. Ce dernier phénomène ne
sera pas pris en compte par la suite, pour deux raisons :
• Tout d’abord, la technique de lithographie e-beam permet un espace minimal séparant les
électrodes de l’ordre de 10 nm. Dans la perspective de la réalisation de composants utilisant
un îlot unique comme zone active, ceci implique de choisir des îlots d’une dizaine de
nanomètres de diamètre. Ceci permet de négliger l’effet du confinement quantique, ce qui ne
sera plus possible pour des îlots de taille inférieure.
• Ce choix d’îlots relativement gros est renforcé par la résolution de l’AFM. La première partie
de ce chapitre montre qu’il est important de pouvoir imager in-situ les nanocristaux au cours
de l’élaboration des composants. Mais la résolution des images obtenues se heurte au
problème de la convolution de la pointe avec l’objet mesuré. Pour les pointes couramment
utilisées, il est donc préférable de s’en tenir à des îlots de diamètre supérieur à 10 nm.
En prenant en compte ces considérations, et en se focalisant sur les modalités d’apparition du
phénomène de blocage de Coulomb, un travail axé sur l'électrostatique a été entrepris, dans le
but de déterminer l'influence qu'ont les paramètres géométriques sur les caractéristiques
électriques des dispositifs. Deux aspects ont fait l'objet d'un intérêt particulier :
• La possibilité d'utiliser les multi-jonctions tunnel pour permettre l'observation de blocage de
Coulomb à température ambiante ;
• Les conditions nécessaires au fonctionnement à différentes températures de composants
utilisant un îlot unique.
Cette partie propose le calcul de la capacité de quelques îlots placés entre trois électrodes,
après que l’on ait précisé les hypothèses qui lui sont préalables et que l’on ait rappelé les
résultats principaux de la théorie dite orthodoxe du blocage de Coulomb.
129
III.1. La théorie orthodoxe du blocage de Coulomb
La théorie orthodoxe du blocage de Coulomb correspond à la mise en équation du circuit
équivalent au système composé d’îlots placés entre plusieurs réservoirs d’électrons
[Likharev85] . Dans un premier temps, nous examinerons le cas d’un îlot relié à deux
réservoirs par deux jonctions tunnel. Ensuite, nous verrons l’effet d’un troisième réservoir
d’électrons polarisé sur le système, qui peut agir de manière analogue à la grille d’un transistor
MOS.
III.1.a. Cas d’un îlot placé entre deux réservoirs d’électrons
Dans le système étudié ici (schématisé sur la Figure 95), l’îlot central, que l’on appellera
également par la suite nanocristal ou dot, est relié aux réservoirs (que l’on pourra appeler par
la suite électrodes) par deux jonctions tunnel. Du point de vue des charges électriques, ces
dernières se comportent à la fois comme des capacités et comme des résistances. En effet,
elles sont composées d’isolant (air ou SiO2) et, à ce titre, elles peuvent être décrites comme
des couches de diélectriques. D’autre part, elles peuvent laisser passer des charges (par effet
tunnel), ce que l’on peut associer au comportement d’une résistance.
Figure 95 : Représentation
schématique d’un système
comprenant deux électrodes
(en jaune) séparées par un
îlot (en rouge) auquel elles
sont liées par des jonctionstunnel.
Cette dualité est le point de départ de la théorie orthodoxe, qui met tout d’abord en équation
la répartition des charges dans le système en s’appuyant sur son aspect capacitif. Dans un
deuxième temps, elle étudie l’effet du transfert d’une charge entre les éléments du système.
Elle conclut en déterminant les conditions dans lesquelles un tel transfert est
thermodynamiquement possible. Dans la suite de cette partie, ces trois phases sont
développées.
i. Relations liées à l’aspect capacitif de la double-jonction tunnel
Des relations élémentaires de l’électronique peuvent être écrites si on admet que le système
étudié (schématisé par la Figure 95) est équivalent, du point de vue électrique, au circuit
représenté par la Figure 96.
130
R2
R1
Q
C2
C1
V2
V1
Figure 96 : Schéma électrique
équivalent d’un îlot entouré
de
deux
jonctions-tunnel
polarisée par une tension V.
V
On note Q la charge présente dans l’îlot, en faisant l’hypothèse qu’aucune charge d’offset n’est
présente dans l’îlot. Tout d’abord, en ce qui concerne les différences de potentiel, on peut
écrire :
V = V1 + V2
(41)
Ecrivons tout d’abord les relations entre les potentiels et les charges sur chaque jonction :
⎧⎪Q1 = C1V1
⎨
⎪⎩Q2 = C2 V2
(42)
La conservation de la charge implique que :
Q + Q2 − Q1 = 0
(43)
A partir des ces trois relations, on peut calculer l’énergie potentielle du système, qui est la
somme des énergies potentielles relatives aux capacités C1 et C2 :
2
EP =
Q2
2C2
2
+
Q1
2C1
2
=
C2.V2
2
2
+
C1.V1
2
(44)
En régime statique et lorsque aucun porteur ne transite entre les électrodes et l’îlot, l’énergie
totale du système est égale à EP.
L'équation (44) a pour variables V1 et V2. Il est possible de l’exprimer en fonction de V et Q.
Pour cela, écrivons, d'après les relations (41) et (43) :
131
Q + C2V
⎧
⎪V1 =
C1 + C2
⎪
⎨
−Q + C1V
⎪
⎪V2 = C + C
1
2
⎩
(45)
L'énergie potentielle peut alors être réécrite en fonction de V et Q, grâce aux relations (44) et
(45) :
EP =
1
(
2 C1 + C2
2
)
{ (
2
)
2 2
(
2
2 2
C1 Q + C2 V + 2C2 VQ + C2 Q + C1 V − 2C1VQ
)}
(46)
D'où :
EP =
(
(Q
+C )
1
2 C1
2
+ C1C2V
2
2
)
(47)
ii. Relations liées à la possibilité qu’ont les porteurs de transiter entre les
électrodes et l’îlot
Si des porteurs peuvent traverser les jonctions par effet tunnel, l’énergie totale du système
n’est plus égale à EP, mais elle est donnée par la relation :
ETOT = EP − W
(48)
où W est le travail fourni par la source de tension en réponse au déséquilibre de charge dû au
transfert des électrons. Pour compenser une variation de la charge ∆Q, la source de tension
fournit un travail W tel que :
W = ∫ V(t) ⋅ I(t) ⋅ dt = V.∆Q
(49)
Sur la Figure 97, les transferts d’électrons par les jonctions-tunnel sont schématisés par des
flèches rouges, et le nombre d’électrons est compté positivement lorsque le transfert se fait du
pôle positif vers le pôle négatif de la source de tension.
132
n2
n1
R2
R1
Figure 97 : Schéma électrique
équivalent d’un îlot entouré de
deux jonctions-tunnel, où sont
reportés (en rouge) les transferts
d’électrons, comptés positivement
dans le sens des flèches pointillées.
Q
C2
C1
V2
V1
V
Dans ce cas de figure, la charge portée par l’îlot vaut Q=q(n2-n1). Or les équations (45)
permettent de déterminer l'influence de tels transferts sur la tension Vi aux bornes de la
jonction i concernée :
∆Vi =
niq
(50)
C1 + C2
Dans ces conditions, comme Qi=Ci.Vi, une variation de charge ∆Qi intervient, telle que :
Ci
∆Qi = ni
q
C1 + C2
(51)
On peut alors exprimer le travail fourni par la source de tension au cours du transfert d'un
électron dans la jonction i :
Ci
Wi = −ni
qV
C1 + C2
(52)
L'énergie totale donnée par l'équation (48) devient alors :
ETOT = EP − W1 − W2
=
(
( (n
+C )
1
2 C1
2
2
)
2
2
− n1 q + C1C2 V
) + n CC
1 1
1
+ n2C2
+ C2
qV
(53)
Seules les transitions aboutissant à réduire l’énergie totale sont possibles, ce qui entraîne une
condition sur la polarisation pour que des porteurs traversent le système :
V >
(
q
2 C1 + C2
133
)
(54)
Il existe donc une plage de tension centrée sur le point V=0 pour laquelle aucun courant ne
peut traverser le composant : c’est le phénomène de blocage de Coulomb. Par analogie au
transistor MOS, une troisième électrode peut être ajoutée au système afin de contrôler la
conduction entre les deux électrodes que comprenait le système étudié précédemment.
III.1.b. Influence d’une troisième électrode sur le système
Au système précédemment étudié (représenté par la Figure 96), on ajoute une troisième
électrode qui agira comme une grille de contrôle sur l’îlot par l’intermédiaire d’une jonction
purement capacitive, c’est-à-dire uniquement par effet de champ et non par échange de
porteurs. La Figure 98 montre le nouveau circuit ainsi obtenu, et schématisé sur la Figure 99.
VG
CG
R2
R1
Figure 98 : Schéma électrique
équivalent d’un îlot entouré de
deux jonctions-tunnel et d’une
jonction capacitive.
Q
C2
C1
V2
V1
V
Figure 99 : Représentation
schématique
d’un
système
comprenant un îlot (en rouge)
placé entre trois électrodes (en
jaune).
La grille polarisée avec une tension VG, donne lieu à une charge QG dans l’îlot, dont la valeur
est liée à VG par la relation :
(
QG = CG VG − V1
134
)
(55)
Dans cette relation, CG est la capacité reliant l’îlot à la grille. La relation de conservation de la
charge (43) devient donc :
Q − Q1 + Q2 + QG = 0
(56)
Les relations (42) restent valables, et en les combinant avec (55) et (56), on obtient :
(
)
(57)
C2 V + CG VG + Q
⎧
⎪V1 =
C1 + C2 + CG
⎪⎪
⎨
C1 + CG V − CG VG − Q
⎪
⎪V2 =
C1 + C2 + CG
⎪⎩
(58)
Q − C1V1 + C2 V2 + CG VG − V1 = 0
Comme V=V1+V2, on a :
(
)
L’énergie potentielle s’écrit alors :
2
EP =
Q2
2C2
2
2
+
Q1
+
2C1
QG
2CG
2
=
C2 V2
2
2
+
C1V1
2
+
(
CG VG − V1
2
2
)
(59)
Soit, à partir de la relation (58) :
EP =
1
2
2
2
2⎤
⎡
⎢C2CG V − VG + C1C2 V + C1CG VG + Q ⎥
⎦
2 C1 + C2 + CG ⎣
(
)
(
)
(60)
Le travail fourni par les sources de tension se calcule comme dans le cas de la double jonction
simple, mais il y a cette fois deux composantes, une par source de tension. Le travail fourni
lors de l’arrivée d’un électron dans l’îlot par la jonction n°2 est :
W1 =
C
∑ ∫ V(t)I(t)dt = C1 qV +
sources
CG
C
(
q V − VG
)
(61)
de tension
Le travail fourni lors du départ d’un électron de l’îlot au travers de la jonction N°1 est quant à
lui donné par :
W2 =
∑ ∫ V(t)I(t)dt =
sources
de tension
135
C2
C
qV +
CG
C
qVG
(62)
L’énergie totale est alors donnée par la relation suivante :
ETOT = EP − W1 − W2
(63)
2
=
(
Q
2 C1 + C2 + CG
−
n2q
) (C1 + C2 + CG )
n1q
⎡ C +C V−C V ⎤−
⎡C V + C V ⎤
1
G G⎦
1
G G⎦
⎣ G
C1 + C2 + CG ⎣
(
)
(
)
Là encore, seules les transitions aboutissant à réduire l’énergie totale sont possibles, ce qui
entraîne une condition sur la polarisation pour que des porteurs traversent le système :
V >
(
q
2 C1 + C2 + CG
)
(64)
Ces considérations sont utiles pour simuler le courant traversant des nanostructures régies par
le blocage de Coulomb. En effet, ces équations peuvent être utilisées pour établir
analytiquement les flux d’électrons traversant les jonctions tunnel, comme nous le montrons
dans la partie suivante.
III.1.c. Modélisation du courant traversant une double jonction tunnel
A partir des éléments théoriques énoncés précédemment, il est possible de simuler le courant
traversant une structure comportant un ou plusieurs îlots conducteurs, en tenant compte de
l’influence d’une seule ou de plusieurs grilles.
Dans un premier temps, suite aux travaux théoriques de Likharev et al. [Likharev85] ,
plusieurs articles ont tenté de confronter cette théorie aux résultats expérimentaux recueillis
sur des systèmes simples à deux jonctions tunnel en série [Amman91,Hanna91] . Il
s’agissait de calculs analytiques réalisés sur l’équation pilote, qui comme on le verra par la
suite décrit l’état des jonctions en fonction du nombre d’électrons présents dans le réservoir se
trouvant entre elles. Cette résolution analytique se révèle lourde en termes de temps de calcul
[Amman91] , à moins de se trouver en présence d’un système fortement dissymétrique
propice à d’importantes approximations quant aux grandeurs caractéristiques des jonctions
(résistance et capacité) [Hanna91] .
Dans le but de réduire le temps nécessaire aux calculs, la méthode Monte Carlo a ensuite été
mise en œuvre [Fonseca95, Chen96] , ce qui a ouvert la perspective de simuler des
systèmes comprenant un nombre important de jonctions. Cette méthode de calcul consiste à
générer des configurations électroniques pour les îlots du système de façon pseudo-aléatoire,
et à tester si elles sont proches de l’état d’équilibre.
Cette partie s’attache à appliquer la théorie orthodoxe à deux jonctions tunnel placées en
série, avec un îlot unique situé entre elles et à simuler le courant traversant ce système. Le
système étudié est représenté sur la Figure 96. Rappelons que, comme l’indique l’équation
(45), les potentiels V1 et V2 peuvent s’exprimer en fonction de Q, la charge
supplémentaire portée par l’îlot:
136
Q + C2V
⎧
⎪V1 =
C1 + C2
⎪
⎨
−Q + C1V
⎪
⎪V2 = C + C
1
2
⎩
(65)
Si N est le nombre d’électrons excédentaires sur l’îlot, on a Q=-N.q (q>0). N peut varier
consécutivement à un événement tunnel, et l’énergie totale du système varie alors d’une
quantité ∆E telle que :
±
∆E1 ( V ) =
±
∆E2
2
2
C
(Q ± q)
Q
−
±q 2 V
2C∑
2C∑
C∑
(66)
2
2
C
(Q m q)
Q
( V ) = 2C − 2C ± q C1 V
∑
∑
∑
Dans la notation utilisée pour définir ∆E, l’exposant explicite le sens dans lequel se fait le
transfert d’électrons (''+'' correspond à un transfert vers le pôle positif de la source de tension
et ''–'' à un transfert vers le pôle négatif). L’indice correspond quant à lui à la jonction
concernée par ce transfert.
Là encore, seuls les événements tunnel donnant lieu à une variation négative de l’énergie ont
une probabilité non nulle d’avoir lieu. Cette probabilité est d’autant plus grande que la valeur
absolue de la variation d’énergie est élevée. On peut d’ailleurs définir le taux de transition
tunnel noté Γ grâce à la règle d’or de Fermi :
±
Γj
(
±
R j , ∆E j
)
⎛
±
−∆E j
⎜
=
2 ⎜
±
R jq ⎜⎜ 1 − exp β .∆E
j
⎝
1
(
où Rj est la résistance tunnel de la jème jonction et β =
)
⎞
⎟
⎟
⎟⎟
⎠
(67)
1
.
kT
A partir des taux de transition tunnel des deux jonctions entourant l’îlot, la probabilité pour que
ce dernier contienne N électrons supplémentaires peut être calculée grâce à l’équationpilote [VanHouten92] :
{
}
+P (N + 1, V ) {Γ (N + 1, V ) + Γ (N + 1, V )}
−P(N, V) {Γ (N, V ) + Γ (N, V ) + Γ (N, V ) + Γ
dP(N, V)
+
−
= P (N − 1, V ) Γ1 (N − 1, V ) + Γ2 (N − 1, V )
dt
−
1
+
1
(68)
+
2
−
1
+
2
−
2
}
(N, V )
Cette relation décrit comment évolue dans le temps la probabilité P(N,V) d’avoir N électrons
supplémentaires lorsqu’une polarisation V est appliquée. Lorsque le système est à l’équilibre,
on a :
137
dP(N, V)
=0
dt
(69)
Amman et al. ont judicieusement remarqué que l’équation (68) pouvait être simplifiée en
écrivant que l’équilibre du système, polarisé à l’aide d’une tension V, était atteint lorsque la
probabilité totale de passage entre deux états adjacents (par exemple de N électrons à N+1
électrons) était nulle [Amman91,VanHouten92] . En d’autres termes, on peut décrire
l’équilibre du système par la relation :
{
+
}
−
{
−
}
+
P (N, V ) Γ1 (N, V ) + Γ2 (N, V ) − P (N + 1, V ) Γ1 (N + 1, V ) + Γ2 (N + 1, V ) = 0
14444442444444
3 144444444
42444444444
3
N→N+1
(70)
N+1→N
Notons que cette relation est équivalente à l’équation (68) exprimée dans le cas d’un système
à l’équilibre (équation (69)) : en effet, si on réécrit la relation (71) dans le cas d’une
configuration à N-1 électrons, on a :
{
+
}
−
{
−
+
}
P (N − 1, V ) Γ1 (N − 1, V ) + Γ2 (N − 1, V ) − P (N, V ) Γ1 (N, V ) + Γ2 (N, V ) = 0
144444444
42444444444
3 14444442444444
3
N −1→N
(71)
N→N −1
Si on soustrait (70) de (71), on obtient bien la relation (68) dans le cas particulier précisé par
l’égalité (69).
Pour simplifier les notations, il est commode de définir les fonctions x(N,V) et y(N,V) telles
que :
+
−
−
+
x (N, V ) = Γ1 (N, V ) + Γ2 (N, V )
y (N, V ) = Γ1 (N, V ) + Γ2 (N, V )
(72)
Ainsi, (70) revient à écrire :
x(N, V).P (N, V ) = y(N + 1, V).P (N + 1, V )
144
42444
3 14444244443
N→N+1
(73)
N+1→N
Cette relation a été utilisée par Amman et al. pour déterminer de proche en proche les
probabilités des différentes configurations électroniques [Amman91] . Pour ce faire, ils
utilisent une relation analytique générale, dont le cheminement n’est malheureusement pas
détaillé, ce que soulignent d’ailleurs Hanna et al. [Hanna91] .
A partir de la relation (73), il est pourtant possible d’obtenir simplement une relation
analytique permettant de définir les probabilités des différentes configurations électroniques de
l’îlot.
138
Tout d’abord, d’après (73), écrivons la relation suivante :
P (N + 1, V ) =
x(N, V)
P (N, V ) , ∀y(N+1,V)>0
y(N + 1, V)
(74)
Ainsi, il apparaît qu’en connaissant la probabilité P(N,V), on peut déterminer la probabilité
P(N+k) :
N+k −1
P (N + k, V ) =
∏
x(N, V)
∏
y(N, V)
P (N, V ) , k ≥ 1
i =N
N +k
(75)
i =N+1
Cette relation ne permet de déterminer toutes les probabilités que si l’on en connaît une. Cela
n’est pas le cas en général, mais il reste la possibilité d’en fixer une arbitrairement, de calculer
les autres et d’appliquer une relation de normalisation à l’ensemble des probabilités ainsi
déterminées.
Intuitivement, on peut choisir de fixer la probabilité d’une configuration électronique N0 dont
on sait qu’elle sera très peu probable à un nombre très petit. Si on connaît la configuration la
plus probable, on peut en déterminer une très peu probable en ajoutant ou en retirant
plusieurs électrons afin de s'éloigner de l'équilibre. Ensuite, de proche en proche, les autres
probabilités peuvent alors être calculées grâce à (75).
Cette solution se heurte toutefois à des obstacles numériques. En effet, si on choisit une
configuration N0 très peu probable, il risque de lui correspondre une probabilité très faible, à
côté de laquelle les probabilités des configurations les plus probables seront très grandes. Il
s’ensuit alors des difficultés d’ordre numérique dues à la grandeur limitée des nombres utilisés
dans les logiciels de calcul numérique. Dans le cas de SCILAB, que nous avons utilisé pour
implémenter le modèle présenté dans cette partie, et comme c'est également le cas pour la
plupart des outils de simulation numérique, on dispose de nombres codés sur 8 octets (flottant
double précision), ce qui permet de traiter des nombres compris entre 10-307 et 10307
[Rouault04] .
Ceci pose donc une contrainte sur N0 et rend ce type de traitement susceptible de donner des
calculs erronés pour des polarisations importantes ou pour de très basses températures de
fonctionnement, car dans ce dernier cas les probabilités des états éloignés de l'équilibre sont
très faibles.
L’alternative à cette méthode consiste à chercher la configuration la plus probable et à fixer la
probabilité de cette configuration. Pour les configurations correspondant à un nombre
d’électrons plus important, la relation (75) peut être utilisée. Pour un nombre d’électrons plus
faible, il suffit de remarquer que (73) peut s’écrire :
x(N − 1, V)P (N − 1, V ) = y(N, V)P (N, V )
1444424444
3 1442443
N−1→N
N→N−1
139
(76)
D’où :
P (N − 1, V ) =
y(N, V)
P (N, V ) , ∀x(N-1,V)>0
x(N − 1, V)
(77)
Ceci aboutit par conséquent à une relation analogue à (75) mais permettant de calculer, à
partir d’une probabilité P(N), la probabilités des configurations P(N-k) :
N−k +1
P (N − k, V ) =
∏
y(N, V)
i =N
N −k
∏ x(N, V)
P (N, V ) , k ≥ 1
(78)
i =N−1
A ce stade, il faut donc déterminer la configuration la plus stable. Pour ce faire, il est
intéressant d’utiliser la méthode simple et rapide proposée par Cordan et al. [Cordan99] .
Elle consiste à étudier plus particulièrement le troisième et dernier terme de la relation (68),
que l’on rappelle ci-dessous :
{
+
−
+
−
}
P(N, V) Γ1 (N, V ) + Γ1 (N, V ) + Γ2 (N, V ) + Γ2 (N, V ) = P(N, V)Γt (N, V )
(79)
Ce terme correspond à la probabilité de quitter la configuration à N électrons supplémentaires,
pour passer à N-1 ou N+1 électrons. En déterminant la configuration donnant lieu à la plus
petite valeur de Γt , cette configuration peut être considérée comme la plus probable. Il s’agit là
d’une méthode relativement légère du point de vue du traitement numérique, puisqu’elle ne
nécessite pas de calculer les probabilités, mais plus simplement de calculer Γt pour un nombre
suffisamment important de configurations électroniques.
Soit N0 le nombre d’électrons excédentaires sur l’îlot tel que Γt(N0,V) soit le minimum de tous
les Γt(N,V). On peut déterminer toutes les probabilités correspondant aux configurations
comportant plus ou moins d’électrons en utilisant les expressions (75) et (78) mais en
pratique, on se limitera à un certain nombre d’électrons noté ∆N en plus ou en moins par
rapport à la configuration la plus probable. C’est ce que Cordan et al. appellent la troncature,
et pour les polarisations courantes, il est en général suffisant de considérer les configurations
situées à ±4 électrons de la configuration la plus probable [Cordan99] .
Une fois ces probabilités calculées, il faut leur appliquer une relation de normalisation, à savoir
diviser chacune d’elle par la somme de toutes les probabilités considérées. Pour résumer, les
probabilités se calculent ainsi :
140
−1
⎧⎛ N + ∆N
⎞
⎪⎜ 0
P (i, V ) ⎟
si N=N0
⎪⎜
⎟
⎟
⎪⎜ i =N −∆N
⎠
⎪⎝ 0
N
+
1
⎪
⎪
y(N, V)
−1
⎛ i =N0 + ∆N
⎞
⎪
i =N0
⎜
⎟
⎪
P (i, V )
si N0 − ∆N ≤ N<N0
⎜
⎟
⎪ N
⎜ i =N −∆N
⎟
⎪
⎠
x(N, V) ⎝ 0
P=⎨
i =N0 −1
⎪
⎪ N−1
⎪
x(N, V)
−1
⎪
⎛ i =N0 + ∆N
⎞
i
=
N
⎪
⎜
0
P (i, V ) ⎟
si N0 < N ≤ N0 + ∆N
⎪ N
⎜
⎟
⎜ i=N −∆N
⎟
⎪
⎠
y(N, V) ⎝ 0
⎪
⎪ i =N0 +1
⎪0 si N<N − ∆N ou N>N + ∆N
⎪⎩
0
0
∑
∏
∑
∏
∏
(80)
∑
∏
Une fois les probabilités connues, il ne reste plus qu’à calculer le courant traversant le
système. A l’équilibre, le courant est en principe le même quelle que soit la jonction
considérée. Pour les deux jonctions, le courant se calcule en utilisant les relations suivantes :
I1(V) = q
N0 + ∆N
∑
i =N0 −∆N
I2 (V) = q
N0 + ∆N
∑
i =N0 −∆N
+
−
P(i, V) ⎡Γ1 (i, V ) − Γ1 (i, V ) ⎤
⎢⎣
⎥⎦
(81)
+
−
P(i, V) ⎡Γ2 (i, V ) − Γ2 (i, V ) ⎤
⎣⎢
⎦⎥
Toutes ces équations ont été implémentées sous SCILAB 3.1.1, un logiciel de calcul numérique
développé par l’INRIA sous licence libre [Scilab05] . Les résultats ont été comparés avec
ceux du simulateur MOSES 1.1 [Chen96] , qui utilise la méthode Monte-Carlo et fait
référence dans le domaine pour la modélisation des phénomènes de blocage de Coulomb. On
trouve une parfaite concordance entre les courbes de courant issues des deux méthodes de
simulation, comme l’illustre la Figure 100, qui montre la courbe I-V correspondant à une
structure faiblement asymétrique (C1>C2 et R1<R2), et ce pour deux températures différentes.
1.5
1.0
IDS (pA)
0.5
Modèle analytique T=4.2 K
MOSES 1.1 T=4.2 K
Figure 100 : Courbes I-V simulées
à
l’aide
du
modèle
décrit
précédemment (points) et avec le
simulateur MOSES 1.1 (traits),
pour un îlot entouré de deux
jonctions tunnel. Les paramètres
R2=1012 Ω,
sont :
R1=1010 Ω.,
-19
-19
C1=4.10 F, C2=3.10 F, T=4.2
K (en orange) et T=300 K (en
bleu).
Modèle analytique T=300 K
MOSES 1.1 T=300 K
0.0
-0.5
-1.0
-1.5
-1.5
-1.0
-0.5
0.0
0.5
1.0
VDS (V)
141
1.5
Il suffit de quelques secondes pour réaliser ces graphes, quel que soit le simulateur utilisé. Sur
cet exemple, on constate qu’avec les capacités choisies, un palier très net apparaît autour de
VDS=0 V pour une température de 4,2 K. A température ambiante, ce palier est très peu
marqué, car l’énergie thermique a alors une influence sur l’état de charge de l’îlot, au même
titre que la polarisation drain-source.
En d’autres termes, l’énergie de chargement de l’îlot est du même ordre de grandeur que
l’énergie thermique apportée au système, et cette dernière rend la distinction entre les états
bien moins nette. Ceci est confirmé par la Figure 101, où l’on peut voir la variation de l’état de
charge de l’îlot avec la tension drain-source.
3
Modèle analytique T=4.2 K
MOSES 1.1 T=4.2 K
Q (nombre d'électrons)
2
Modèle analytique T=300 K
MOSES 1.1 T=300 K
1
0
-1
-2
-3
-1.5
-1.0
-0.5
0.0
0.5
1.0
1.5
Figure 101 : Etat de charge d’
un îlot entouré de deux
jonctions tunnel, simulé à
l’aide du modèle analytique
(points) et avec le simulateur
MOSES 1.1 (traits), à une
température de T=4.2 K (en
orange) et T=300 K (en bleu).
Les
paramètres
sont les
mêmes que ceux spécifiés pour
la Figure 100.
VDS (V)
On voit bien qu’à T=4,2 K, les marches sont bien dessinées, et la transition entre les états est
abrupte. A T=300 K, ce n’est plus du tout le cas, et l’îlot passe de façon quasi-continue d’un
état à l’autre lorsqu’on fait varier VDS. On peut constater que là encore le modèle analytique
donne des résultats qui correspondent parfaitement à ceux qui sont obtenus grâce à MOSES
1.1 ; la durée des simulations est par ailleurs du même ordre pour les deux méthodes.
Le modèle analytique permet d’avoir accès à d’autres variables : par exemple, dans le but de
mieux visualiser la différence entre les hautes et les basses températures, on peut représenter
sur un graphe les probabilités de chaque état électronique en fonction de la polarisation drainsource. C’est ce que montre la Figure 102, à T=4,2 K et à température ambiante.
Dans ce dernier cas (Figure 102b), les probabilités sont étalées et pour une tension drainsource donnée, plusieurs états sont susceptibles d’êtres adoptés par l’îlot avec des probabilités
non négligeables. Dans le cas des basses températures (Figure 102a), il existe généralement
un état prépondérant pour chaque point de polarisation, les autres états étant négligeables.
Il est à noter que les simulations de courant et de charges présentées sur la Figure 100 et sur
la Figure 101 sont aussi rapides pour le modèle analytique que pour la méthode Monte Carlo.
142
(a)
Probabilité
0.75
N=3
N=-2
N=-1
N=0
N=1
1.00
0.50
0.25
0.00
-1.5
N=-3
0.75
N=2
Probabilité
1.00
(b)
N=-3
N=3
N=-2
N=-1
N=0
N=1
N=2
0.50
0.25
-1.0
-0.5
0.0
0.5
1.0
0.00
-1.5
1.5
VDS (V)
-1.0
-0.5
0.0
0.5
1.0
1.5
VDS (V)
Figure 102 : Probabilités des différents états électroniques pour un îlot entouré de deux
jonctions tunnel, à une température de T=4.2 K (a) et T=300 K (b). Les paramètres sont les
mêmes que ceux spécifiés pour la Figure 100.
Si on veut adapter le modèle analytique pour prendre en compte l’effet de la grille sur les
variables du dispositif, il est possible d’utiliser les relations de la partie III.b. Il suffit de modifier
les équations donnant les potentiels aux bornes des jonctions ((65)) et les énergies mises en
jeu au cours des transferts de porteurs ((66)). Ces expressions sont alors remplacées par les
relations (58) (pour les potentiels) et (63) (pour les énergies).
Là encore, on trouve une parfaite concordance entre les courbes de courant issues des deux
méthodes de simulation, comme le montre la Figure 103, où l’on peut voir la courbe I-V
correspondant à la même structure que la Figure 100, mais avec une grille liée à l’îlot par une
capacité de 0,2 aF.
Par rapport à la Figure 100, on constate que pour les deux températures, le palier est bien
moins large, ce qui correspond à la présence de la grille, qui ajoute sa capacité à la capacité
totale et fait ainsi baisser l’énergie de chargement des îlots. Cette grille permet de contrôler le
courant, ce que l’on peut vérifier en faisant varier la tension de grille VG tout en appliquant une
polarisation drain-source constante. C’est ce que montre la Figure 104 pour un composant
identique à celui dont la caractéristique ID-VDS est représentée sur la Figure 103.
1.5
1.0
IDS (pA)
0.5
Modèle analytique T=4.2 K
MOSES 1.1 T=4.2 K
Figure 103 : Courbes I-V simulées à
l’aide du modèle analytique (points)
et avec le simulateur MOSES 1.1
(traits), pour un îlot entouré de deux
jonctions tunnel et d’une grille de
contrôle. Les paramètres sont :
R1=1010 Ω., R2=1012 Ω, C1=4.10-19 F,
C2=3.10-19 F, CG=2.10-19 F, T=4.2 K
(en orange) et T=300 K (en bleu).
Modèle analytique T=300 K
MOSES 1.1 T=300 K
0.0
-0.5
-1.0
-1.5
-1.5
-1.0
-0.5
0.0
0.5
1.0
VDS (V)
143
1.5
100
Modèle analytique T=300 K
MOSES 1.1 T=300 K
Modèle analytique T=4.2 K
MOSES 1.1 T=4.2 K
80
IDS (fA)
60
40
20
0
0.0
0.5
1.0
1.5
2.0
2.5
3.0
VG (V)
Figure 104 : Courbes ID-VG
simulées à l’aide du modèle
analytique (points) et avec le
simulateur MOSES 1.1 (traits),
pour un îlot entouré de deux
jonctions tunnel et d’une grille
de
contrôle.
Une
tension
VDS=0,1 V est appliquée au
drain. Les paramètres sont :
R2=1012 Ω,
R1=1010 Ω.,
-19
C2=3.10-19 F,
C1=4.10 F,
-19
CG=2.10 F, T=4.2 K (en
orange) et T=300 K (en bleu).
Conformément à ce que prédit la théorie, on retrouve bien dans ce graphe l’oscillation du
courant de drain lorsqu’on fait varier la tension de grille. La température permet une amplitude
plus importante des oscillations et on peut voir que les pics sont séparés par des zones de
courant nul.
Ceci montre qu’à T=4,2 K, le composant passe alternativement en régime de blocage de
Coulomb et en régime passant. Au contraire, à T=300 K, le dispositif ne montre pas de zones
de blocage, à cause de l’énergie de chargement de l’îlot, qui est insuffisamment grande par
rapport à l’énergie thermique qui lui est apportée. Dans ces conditions, la grille a toujours un
effet de champ sur le courant de drain, mais elle ne fait plus que le moduler.
Notons que pour les graphes ID-VG, le temps nécessaire au modèle analytique est bien moins
important que pour MOSES. Pour réaliser les 120 points de chacune des courbes du graphe
présenté sur la Figure 104 par exemple, il faut environ 4s pour le modèle analytique contre
une durée comprise entre 50s (T=4.2 K) et 1 min. 30s (T=300 K) pour MOSES 1.1.
La Figure 105 montre l’effet de la grille sur la probabilité d’avoir 0, 1, 2, 3 ou 4 électrons dans
l’îlot.
1.00
N=0
Probabilité
0.75
0.50
N=3
N=2
N=1
N=4
0.25
0.00
0.0
0.5
1.0
1.5
2.0
2.5
3.0
VG (V)
144
Figure 105 : Probabilités des
différents états électroniques
pour un îlot entouré de deux
jonctions tunnel et d’une grille,
à une température de T=4.2 K
(pointillés) et T=300 K (trait
plein). Les paramètres sont les
mêmes que ceux spécifiés pour
la Figure 103 et la Figure 104.
Lorsque la polarisation de la grille augmente, le nombre de porteurs susceptibles d’être
présents simultanément dans l’îlot augmente lui aussi. La grille agit en rendant plus profond le
puits de potentiel formé par le nanocristal et on voit encore une fois que l’augmentation de la
température élargit la base des pics de probabilité, ce qui a pour conséquence de diminuer les
zones où un seul état est très probable alors que les états adjacents le sont peu, comme c’est
le cas à basse température.
Les graphes P(VDS) et P(VG) permettent ainsi de s’apercevoir que l’apparition et l’importance
des effets monoélectroniques sont conditionnées par la séparation des états électroniques de
l’îlot. Pour que ces effets soient marqués, il est nécessaire que sur des plages importantes de
polarisation (de grille ou de drain), un état soit très probable (P≈1) alors que les états
adjacents le sont peu (P≈0).
Les comparaisons entre le modèle analytique et le simulateur MOSES 1.1 montrent que les
deux approches donnent des résultats rigoureusement semblables. Il est parfois plus rapide
d’utiliser le modèle analytique pour les dispositifs ne comportant qu’un îlot, notamment pour
étudier l’influence de la grille. En revanche, pour un nombre d’îlots supérieur à un, il est
souvent plus rapide d’utiliser la méthode Monte-Carlo. En effet, les algorithmes permettant de
résoudre l’équation-pilote de façon analytique sont dans ce cas difficiles à optimiser pour
proposer une vitesse de calcul acceptable.
III.1.d. Modélisation du courant traversant une multi-jonction tunnel
C’est avec le simulateur MOSES 1.1 que les simulations concernant des systèmes à plus d’un
îlot ont été réalisées. Il est bien sûr possible d’ajouter une ou même plusieurs grille, ce qui
permet de simuler le courant traversant les îlots dans un environnement où plusieurs
conducteurs sont susceptibles d’interagir par effet de champ (grille de contrôle, substrat…).
La Figure 106 montre les courbes ID(VGS) correspondant à des dispositifs comprenant entre un
et trois îlots. Pour ces graphes, les paramètres utilisés pour les résistances tunnel et les
capacités des jonctions sont différents selon qu’il s’agisse de jonctions îlot/îlot ou de jonctions
électrode/îlot ; en revanche, une seule capacité de grille a été utilisée pour tous les îlots. On
remarque que lorsqu’on augmente le nombre d’îlots, les niveaux de courant diminuent, en
raison de la mise en parallèle de plusieurs résistances tunnel.
On observe également que le palier de Coulomb (autour de VDS=0 V) s’élargit pour les
dispositifs comprenant plus d’un îlot, et ce en raison de la capacité îlot/îlot qui a été choisie
petite et qui est donc propice aux effets de blocage de Coulomb.
La comparaison de ces graphes permet déjà d’entrevoir les avantages et les inconvénients de
l’utilisation de multi-jonctions tunnel par rapport à la structure à un seul îlot généralement
retenue pour les SET.
145
(a)
80
R1=R2=2.10
60
10
(b)
0.6
Ω
C1=C2=0,2 aF
10
R1=R3=2.10
T=4,2 K
T=300 K
12
R2=5.10
0.4
T=4,2 K
T=300 K
C1=C3=0,2 aF
40
C2=0,1 aF
0.2
IDS (pA)
20
IDS (pA)
Ω
Ω
0
-20
0.0
-0.2
-40
-0.4
-60
-80
-0.6
-3
-2
-1
0
1
2
3
-3
VDS (V)
-1
0
1
2
3
VDS (V)
(c)
0.25
0.20
0.15
R1=R4=2.10
10
Ω
R2=R3=5.10
12
Ω
T=4,2 K
T=300 K
Figure 106 : Courbes ID(VDS) simulées pour
des dispositifs à 1 îlot (a), 2 îlots (b) et 3
îlots (c), munis d’une grille. Chaque îlot a la
même capacité de grille (CG=0,1 aF) et les
autres paramètres utilisés sont indiqués sur
chaque graphe. Deux températures ont été
considérées, T=4.2 K (traits pleins noirs) et
T=300 K (points oranges).
C1=C4=0,2 aF
0.10
C2=C3=0,1 aF
0.05
IDS (pA)
-2
0.00
-0.05
-0.10
-0.15
-0.20
-0.25
-3
-2
-1
0
1
2
3
VDS (V)
Tout d'abord, on remarque une nette diminution du courant de drain lorsqu'on augmente le
nombre d'îlots. Cette diminution peut avoir un aspect négatif sur les applications logiques, car
il peut devenir impossible de discerner l’état passant de l’état non-passant. De plus, la
reproductibilité de tels composants peut être problématique, quelques charges parasites étant
à même de changer sensiblement la valeur du courant. En réponse à cette problématique, il
est possible de rendre les résistances tunnel plus petites ; mais dans ce cas, on se heurte au
fait que la capacité des jonctions augmente, ce qui peut remettre en question le blocage de
Coulomb et donc le fonctionnement du composant, du moins à température ambiante.
En revanche, l’utilisation de multi-jonctions tunnel fait augmenter la largeur du palier de
Coulomb autour de VDS=0V, ce qui signifie qu’avec des moyens technologiques identiques, on
augmente l’intensité des effets mono-électroniques, ce qui se traduit concrètement par
l'augmentation de la température de fonctionnement envisageable pour ces composants.
Bien entendu, ceci repose sur l’hypothèse que la jonction îlot/îlot a une capacité moindre que
la jonction électrode/îlot, hypothèse qui a été utilisée dans le choix des paramètres de la Figure
106. C’est ce que la suite de cette partie propose de vérifier.
La géométrie de nos composants rend a priori difficile l’utilisation de modèles analytiques
simples. En effet, les échantillons étudiés comportent des électrodes ''triangulaires'' et, si les
îlots sont disposés à la surface d'une couche de SiO2, ils ne sont en revanche pas encapsulés
dans de l'oxyde et sont donc également entourés d'air. La présence de deux isolants et de
formes géométriques relativement complexes nous a donc orientés vers les méthodes utilisant
les éléments finis, pour estimer de façon plus précise la capacité des jonctions présentes dans
nos composants. Mais celle-ci est dans les faits assez lourde en temps de calcul, surtout si on
veut tester de nombreuses configurations architecturales, ce qui est le cas lorsqu'on modélise
le fonctionnement de composants innovants.
146
Par la suite, nous avons donc tout de même commencé par évaluer avec un modèle analytique
simple les capacités des jonctions îlot/électrode et îlot/plan. Les valeurs obtenues ont dans un
deuxième temps été comparées aux résultats obtenus grâce au logiciel FEMLAB, qui utilise la
méthode des éléments finis pour résoudre les problèmes d’électrostatique.
Pour conclure, les domaines de validité des expressions analytiques par rapport aux résultats
donnés par FEMLAB ont été déterminés en supposant que la méthode des éléments finis
puisse être prise comme référence. On a ainsi examiné dans quelles conditions les hypothèses
faites par le calcul analytique étaient justifiées. Ces hypothèses sont détaillées dans la partie
III.2.a., alors que les calculs de capacité et les conclusions que l’on peut en tirer sont
présentés dans la partie III.2.b.
III.2. Calcul des capacités îlot/électrode et îlot/plan par calcul
littéral
III.2.a. Hypothèses
Au cours de cette étude, on considère qu'un îlot de silicium adopte un comportement analogue
à celui d'un îlot métallique. Cette hypothèse implique qu'un nanocristal de silicium ait un
potentiel uniforme et une densité de charge volumique nulle, toute la charge engendrée par la
polarisation des électrodes étant surfacique.
Deux effets sont par conséquent négligés : le confinement quantique et la déplétion dans l'îlot.
Jusqu'ici, les îlots utilisés dans le projet ont des diamètres suffisamment grands pour rendre le
confinement quantique négligeable. Pour des diamètres plus petits, on peut s'attendre à ce
que la conductance du dispositif soit modifiée à cause des résonances tunnel entre niveaux
électroniques confinés, ce qui n'entre pas dans le champ de l'étude électrostatique présentée
ici. De plus, la densité de porteurs participant à la conduction dans le silicium est bien moins
importante que dans un métal, ce qui a là encore une grande influence sur la conductance de
nos dispositifs.
Avec la réduction de la taille des îlots, la répartition de la charge est également modifiée. Le
modèle en bandes ne s'applique alors plus comme dans le silicium massif, et il faut tenir
compte de la discrétisation de l'énergie que peuvent adopter les électrons confinés. La prise en
compte de la déplétion dans les îlots est en général complexe, et c'est donc plus
particulièrement le cas pour les îlots de petite taille, pour lesquels il est alors nécessaire de
mettre en œuvre des moyens numériques permettant de résoudre ces problèmes dans les 3
dimensions.
Des calculs de ce type ont été publiés dans la littérature, mais les moyens numériques sont
lourds pour prendre en compte le confinement dans les trois dimensions. Il est nécessaire non
seulement de faire des hypothèses pour simplifier le traitement de ces problèmes, mais aussi
de travailler sur les algorithmes de calcul pour avoir des modèles légers. Ces deux points
nécessitent une quantité de travail suffisante pour en faire des thèmes de recherche à part
entière. Par conséquent, le travail présenté ici ne prend en compte ni la déplétion dans les
îlots, ni le confinement quantique.
147
Les électrodes sont quant à elles considérées comme des plans infinis. En toute rigueur, ce
n'est évidemment pas le cas, mais c'est la taille relative des électrodes par rapport aux îlots qui
nous a amenés à cette hypothèse. Dans la réalité, les électrodes ont des dimensions finies, et
les capacités calculées sont donc majorées. Dans ces conditions les énergies de chargement
proposées sont donc minorées, et les résultats ne devront donc pas être considérés comme
absolus.
Cela étant, on recherche des énergies de chargement élevées, et comme on peut s'attendre à
ce que les énergies réelles soient supérieures à nos calculs, les températures de
fonctionnement déduites de nos calculs seront inférieures aux températures réelles. Ceci ne
fera que renforcer nos conclusions quant aux paramètres permettant de tendre vers le
fonctionnement à température ambiante. De plus, notre démarche vise avant tout à
comprendre physiquement comment la géométrie influence l'énergie de chargement des îlots,
ce à quoi une prise en compte des valeurs relatives peut donner une réponse satisfaisante.
III.2.b. Calcul de la capacité de quelques îlots entourés de trois électrodes
i. Calcul de capacités par la méthode des charges-images
Pour ce calcul, on schématise les systèmes étudiés comme des sphères alignées entre deux
plans, le tout étant plongé dans un milieu isolant composé de SiO2 (Figure 107). On peut
remarquer qu’il n’y a que deux types de jonctions : la jonction inter-îlots et la jonction
îlot/électrode.
Figure 107 : Représentation schématique
d'un composant comprenant trois îlots
(en verts) placés entre deux électrodes
(en noir). Cette structure est considérée
comme étant plongée dans une matrice
de SiO2.
r
d
La détermination de leur capacité par la méthode des charges-images aboutit aux expressions
suivantes [Durand66,Leroy01] :
Pour la jonction îlots/îlot,
Cdot − dot =
⎛
⎛ d ⎡2(r + r ) + d⎦⎤
⎞⎞
4πεr ε0r1r2
+ 1⎟ ⎟
.sinh ⎜ acosh ⎜ ⎣ 1 2
⎜
⎟⎟
⎜
r1 + r2 + d
2r1r2
⎝
⎠⎠
⎝
⎡
⎛
⎛ d ⎡2(r + r ) + d⎦⎤ ⎞ ⎞ ⎤
x ∑ ⎢sinh ⎜ n.acosh ⎜ ⎣ 1 2
⎟⎟ ⎟⎟ ⎥
⎜
⎜
2r1r2
n=1 ⎢
⎝
⎠ ⎠ ⎥⎦
⎝
⎣
∞
où r1 et r2 sont les rayons des îlots et d est la distance qui les sépare ;
148
−1
(82)
Pour la jonction îlot/plan,
⎛
⎛
⎛ d
⎞⎞ ∞ ⎡
⎛ d
⎞ ⎞⎤
Cdot −plan = 4πεr ε0r.sinh ⎜ acosh ⎜
+ 1 ⎟ ⎟ . ∑ ⎢sinh ⎜ n.acosh ⎜
+ 1⎟ ⎟⎥
⎝ 2r
⎠ ⎠ n=1 ⎣
⎝ 2r
⎠ ⎠⎦
⎝
⎝
(83)
où r est le rayon de l'îlot et d la distance qui le sépare du plan.
Depuis les premiers travaux portant sur les nanocristaux, la capacité d'un îlot est considérée
comme étant celle d'une sphère conductrice isolée. Il est évident que dans le cas de
nanocristaux séparés d'électrodes par des jonctions-tunnel, cette approximation est sévère. La
Figure 108 compare la capacité d'une sphère conductrice isolée avec celle d'une sphère
comprise entre deux plans infinis calculée avec les expressions données ci-dessus, pour
différentes valeurs de d, la distance sphère-plan.
r = 5 nm
5
4.5
r
d
C (aF)
4
d
3.5
3
2.5
2
0
100
200
300
400
500
d (nm)
Méthode des images
Sphère isolée
Figure 108: La courbe rouge représente la capacité d'une sphère conductrice de 5 nm de
rayon placée entre deux plans infinis en fonction de la distance qui la sépare des plans. La
courbe noire représente la capacité de la même sphère sans les plans infinis, c’est-à-dire
lorsqu’elle est complètement isolée.
On constate qu’une distance de plusieurs centaines de nanomètres entre les électrodes et le
nanocristal est nécessaire pour que les deux méthodes de calcul aboutissent aux mêmes
valeurs de capacité. Un tel espacement entre l’îlot et les électrodes n'est pas compatible avec
un système de jonctions-tunnel, ce qui justifie le calcul par la méthode des charges-images.
Lorsque la distance séparant la sphère des plans infinis est de l’ordre de quelques nanomètres,
c’est-à-dire l’épaisseur d’une jonction-tunnel, la capacité augmente très nettement. L’énergie
de chargement est par conséquent très faible, ce qui prouve que l’épaisseur des jonctionstunnel est un paramètre à prendre en compte pour l’observation du blocage de Coulomb, ce
que le modèle de la sphère isolée ne prévoit pas.
149
ii. Application à des composants à 1 et 3 îlots
Les calculs menés précédemment peuvent permettre de déterminer le diamètre que les îlots
doivent avoir pour que leur énergie de chargement soit supérieure ou égale à 5 kT. En fixant la
distance électrode-îlot à 2 nm, la Figure 109 montre l’évolution de l'énergie de chargement
d'un nanocristal en fonction de son rayon.
d = 2 nm
0.25
r
d
d
E (eV)
0.2
0.15
0.1
0.05
0
1
2
3
4
5
r (nm)
Méthode des images
kT
5kT
Figure 109: En rouge, capacité d'une sphère conductrice placée entre deux plans infinis en
fonction du rayon de la sphère. Les jonctions qui séparent les plans du nanocristal sont
épaisses de 2 nm. Les droites parallèles à l’abscisse représentent des valeurs d’énergie à
atteindre pour observation du blocage de Coulomb à température ambiante de kT (en noir) et
5kT (en mauve).
D'après ce graphe, un rayon inférieur à 1 nm est nécessaire pour satisfaire la contrainte
EC>5kT. Si ce rayon est supérieur à 5 nm, l'énergie de chargement devient inférieure à kT et il
est alors peu probable d'observer les effets du blocage de Coulomb. Des îlots de 2 nm de
diamètre sont difficiles à maîtriser, l'AFM n’ayant pas une résolution suffisante. Il est donc
nécessaire de chercher comment obtenir des énergies de chargement plus importantes.
Les résultats de la caractérisation électrique décrits dans la deuxième partie de ce chapitre
montrent que c’est un dispositif à trois îlots qui donne les meilleurs résultats électriques. Une
solution réside donc peut être dans l'utilisation de structures contenant plusieurs îlots.
Afin de mieux comprendre l'intérêt qu'il peut y avoir à utiliser des composants comprenant
plusieurs nanocristaux, on a fixé des paramètres géométriques compatibles avec ceux des
structures expérimentales : des îlots ayant un diamètre de 10 nm, espacés de 2 nm.
150
La grille et le substrat ont également été pris en compte, avec des dimensions qui là encore
sont cohérentes avec les dispositifs caractérisés dans la deuxième partie de ce chapitre. La
capacité de tels nanocristaux a été calculée dans des structures comprenant 1, 2 et 3 îlots, et
on en a déduit les énergies de chargement, présentées par la Figure 110.
On constate que plus le nombre d’îlots est important, plus leur énergie de chargement
augmente. De plus, comme on pouvait s'y attendre, à T=77K, on est plus proche des
conditions propices à l'observation du blocage de Coulomb qu'à température ambiante.
Nombre d'îlots
EC à T=300 K
EC à T=77K
1
2
3
0,4 kT
0,5 kT
0,8 kT
1,4 kT
1,9 kT
3,2 kT
Figure 110 : Energies de chargement exprimés en facteurs de kT
pour T=300 K et T=77 K dans des structures comprenant entre
1 et 3 îlots de 10 nm de diamètre espacés de 2 nm.
Il est à noter que l’énergie donnée par la Figure 110 pour les structures à 3 îlots ne concerne
que l'îlot central de la chaîne. Les deux autres îlots, les plus proches des électrodes, ont une
énergie de chargement inférieure. Par exemple, à T=300 K, elle n'est que de 0,5 kT pour les
deux îlots périphériques contre 0,8 kT pour l’îlot central. Pour comprendre la différence entre
ces deux valeurs, il faut comparer les capacités de jonctions dot/dot et dot/plan. La Figure 111
montre les énergies de chargement correspondant aux capacités de ces deux types de
jonctions, pour des îlots ayant un rayon de 3,5 nm et 5 nm.
r = 3,5 nm
r = 5 nm
0.04
0.035
0.06
0.03
0.05
0.025
) 0.04
V
e(
E
)
V
e( 0.02
E
0.03
0.015
0.02
0.01
0.01
0
0.005
0
0.5
1
1.5
d (nm)
2
2.5
3
2 Sphères
Sphère/plan
kT
0
0
0.5
1
1.5
d (nm)
2
2.5
3
2 Sphères
Sphère/plan
kT
Figure 111 : Energies de chargement correspondant aux capacités de jonctions dot/dot
(courbes rouge) et dot/plan (courbes bleues), pour des îlots de 7 nm de diamètre (graphe de
gauche) et de 10 nm de diamètre (graphe de droite). La valeur de kT à 300 K a été
matérialisée par la droite horizontale de couleur verte.
151
On remarque que la jonction îlot-îlot donne une énergie de chargement bien plus importante
qu'une jonction îlot-plan. Ceci explique pourquoi l’association de plusieurs îlots est bénéfique :
elle a pour conséquence une augmentation de l’énergie de chargement.
L’association de trois îlots est particulièrement intéressante. C’est le plus petit nombre
permettant d’avoir au moins un îlot qui ne comporte que des jonctions îlot/îlot. Elles lui
permettent d’avoir une énergie de chargement élevée, tout en limitant l’étude à un nombre
tout de même réduit de nanocristaux. On peut objecter que les autres îlots ont une énergie de
chargement plus faible, ce qui pourrait remettre en cause l’observation de blocage de
Coulomb. Mais le comportement électrique d’une chaîne d’îlots est régi par l'élément ayant la
capacité la plus petite, étant donné qu'il pourra à lui seul bloquer le courant dans toute la
chaîne.
Si l’on se réfère à la Figure 110, on voit tout de même que la valeur critique de 5 kT n'est
atteinte par aucune des structures proposées à température ambiante, même pour l'élément
central du dispositif à 3 îlots. Cette constatation est plutôt défavorable à l'observation du
blocage de Coulomb sur nos structures, dont les paramètres sont proches de ceux utilisés pour
ces calculs. On peut tout de même remarquer que pour les modélisations, le milieu dans lequel
les îlots sont placés est le SiO2, alors que dans les dispositifs réels, les îlots sont seulement
posés sur la couche de SiO2, l'environnement étant simplement composé d'air. La Figure 112
montre les valeurs obtenues dans les mêmes conditions que précédemment mais avec des
îlots entourés d'air, dont on considère qu'il a une permittivité égale à celle du vide.
Nombre d'îlots
EC à T=300 K
EC à T=77K
1
2
3
1,4 kT
2 kT
3,2 kT
5,6 kT
7,7 kT
12,4 kT
Figure 112 : Energies de chargement exprimés en facteurs de kT pour T=300
K et T=77 K dans des structures comprenant entre 1 et 3 îlots de 10 nm de
diamètre espacés de 2 nm, plongés dans l'air et non plus dans le SiO2.
Comme on pouvait s'y attendre, les énergies de chargement sont à peu près multipliées par
quatre par rapport au cas d'îlots entourés d'une matrice de SiO2 (voir Figure 110). En effet, la
valeur de la permittivité du SiO2 est de 3,9ε0, c'est-à-dire 3,9 plus élevée que celle utilisée pour
l'air. Ceci divise par environ quatre la capacité de chaque îlot et multiplie donc d’autant leur
énergie.
Les énergies de chargement semblent dans ce cas suffisamment grandes pour assurer
l'observation de blocage de Coulomb à 77 K, quel que soit le nombre d'îlots considérés. Mais
on remarque qu'à 300 K, le valeur de 5kT n'est toujours par atteinte, y compris avec trois îlots.
L'hypothèse d'îlots entourés d'air n'est en fait pas strictement justifiée non plus, étant donnée
la présence d'oxyde sous les îlots. Les valeurs des énergies de chargement sont donc
comprises entre les valeurs présentées par la Figure 110 et la Figure 112, même si on peut
penser qu'elles sont plus proches des valeurs obtenues pour les îlots entourés d'air, étant
donné que la majorité des lignes de champ se développent dans ce milieu.
152
Néanmoins, les valeurs de la Figure 112 doivent être légèrement minorées pour tenir compte
de la couche d’oxyde ; il est donc évident que pour que le blocage de Coulomb soit clairement
observé à température ambiante, la capacité totale des îlots doit être réduite. Comme nous
l'avons déjà évoqué, les jonctions sphère/grille et sphère/substrat ont été prises en compte et
elles sont peut être un moyen d’augmenter l’énergie de chargement.
Si l’on s’intéresse par exemple à l’énergie de chargement de l’îlot central d’une chaîne de trois
nanocristaux, quatre jonctions sont à considérer. Avec les paramètres utilisés pour calculer les
valeurs présentées par la Figure 112, les jonctions îlot/substrat et îlot/grille ont respectivement
des capacités de 0,36 aF et 0,34 aF. La capacité totale de l’îlot étant évaluée à 1,9 aF, la
présence de la grille et du substrat contribue à près du tiers de cette valeur. Il est par
conséquent possible d’augmenter l’énergie de chargement de l’îlot considéré en diminuant la
capacité des jonctions îlot/substrat et îlot/grille. Ceci revient à éloigner la grille et le substrat de
la chaîne de nanocristaux. On peut par exemple envisager d’utiliser un oxyde plus épais entre
la zone active et le substrat.
Il est également bénéfique de placer l’électrode de grille loin de la chaîne d’îlots, mais on
dispose d’une marge de manœuvre moins importante. En effet, si la distance séparant la grille
de la zone active est trop importante, les tensions nécessaires pour moduler le courant drainsource seront élevées. L’un des avantages de ce type de composant serait alors remis en
cause, à savoir le fonctionnement à faibles polarisations, qui garantit une consommation
électrique modérée.
Cette partie nous a donc apporté des conclusions intéressantes sur les architectures à donner à
nos composants. Il apparaît bénéfique de s’orienter vers des dispositifs à trois îlots alignés et
les capacités de grille et de substrat sont à prendre en compte pour l’observation de blocage
de Coulomb. Les calculs menés dans cette partie concernent des électrodes de formes
parallélépipédiques, dont on assimile l’extrémité à un plan infini. La nanomanipulation apparaît
facilitée par l’usage d’électrodes de forme triangulaire. En effet, cette forme facilite l’accès aux
pointes AFM lorsque l’on amène les nanocristaux dans la zone active des composants. Mais on
peut se demander si les valeurs de capacité obtenues dans cette partie peuvent être utilisées
comme approximations pour les électrodes triangulaires. Afin de le déterminer, une approche
utilisant la méthode des éléments finis a été utilisée pour calculer les capacités électrode/îlot.
III.3. Calcul des capacités îlot/électrode et îlot/plan par la
méthode des éléments finis
Dans un premier temps, les valeurs de capacité électrode/plan calculées dans la partie III.2
ont été comparées aux valeurs obtenues par la méthode des éléments finis. Conformément à
ce que l’on a fait dans le chapitre II, nous avons limité les lignes de champ prises en compte à
celles qui proviennent de l’hémisphère qui est en regard de l’électrode.
Rappelons que cette restriction vise à tenir compte du mode de polarisation des nanocristaux
dans nos composants. En effet, si un îlot est en présence d’un seul plan conducteur (Figure
113a), toutes les lignes de champ partant du nanocristal vont être reliées au plan en question.
153
Si l’îlot est placé entre deux électrodes, les lignes de champ vont être partagées entre chacune
des électrodes (Figure 113b). Pour rendre compte de cette situation au moment de calculer la
capacité des îlots, on peut remarquer que chaque électrode reçoit les lignes de champ de la
partie hémisphérique de l’îlot qui est directement en regard avec elle (Figure 113c). Ainsi, la
capacité d’une jonction îlot/électrode peut se ramener au cas simple de l’évaluation de la
capacité liant l’électrode à un hémisphère de diamètre équivalent à celui de l’îlot (Figure 113d).
(a)
(b)
(c)
(d)
Figure 113 : Schémas représentant un îlot associé à un ou plusieurs plans, ainsi que
quelques lignes de champ électrique (en pointillés noirs).
Les résultats obtenus en faisant cette restriction quant aux lignes de champ électrique peuvent
alors être comparés aux valeurs issues des calculs littéraux utilisés dans la partie III.2, ce que
montre la Figure 114. Globalement, les ordres de grandeur sont respectés quels que soient les
paramètres utilisés pour ce graphe. On remarque tout de même que les expressions littérales
sont d’autant plus proches des valeurs de capacité fournies par la méthode des éléments finis
que les îlots sont petits. A rayon constant, la méthode des charges images de la partie III.2 est
d’autant plus proche des éléments finis que l’îlot considéré est proche du plan.
On s’attend à ce que les dispositifs expérimentaux aient des jonctions dont l’épaisseur est
inférieure à 4 nm, et se situent donc dans un domaine où les expressions utilisées dans la
partie III.2 sont valides. Il est à noter qu'un calcul similaire portant sur des électrodes
planaires séparées cette fois par une couche d'air donne des résultats en tout point
semblables, mis à part que les valeurs de capacités diffèrent d'un facteur 3,9, ce qui est tout à
fait en accord avec le rapport des permittivités diélectriques εr/ε0 attendu pour des structures
ayant l'une pour isolant l'air (permittivité ε0) et l'autre le SiO2 (permittivité εr)
154
10
C (aF)
r=2 nm
r=4 nm
r=8nm
Expressions littérales
1
1
Figure 114 : Capacité entre un
îlot métallique et une électrode
planaire également métallique,
entourés de SiO2. Trois rayons
ont été considérés, et dans
chaque cas les valeurs trouvées
par la méthode des éléments
finis (points dessinés en noir)
ont été comparées aux valeurs
obtenues par les expressions
littérales présentées dans la
partie III.2 (courbes oranges).
10
distance plan/îlot (nm)
Après plusieurs études concernant la nanomanipulation d’îlots par AFM, nous nous sommes
progressivement tournés vers des électrodes de forme triangulaire, qui offrent un dégagement
supérieur, ce qui s’avère utile pour apporter des nanocristaux dans la zone active des
composants à l’aide de la pointe AFM. La jonction électrode triangulaire/îlot a donc également
été modélisée par la méthode des éléments finis, avec des structures similaires à celle qui est
représentée par la Figure 115.
Pour rendre compte de la nature réelle de nos échantillons, il est nécessaire de prendre en
compte le fait que les îlots sont majoritairement entourés d'air, et qu'il n'y a de l'oxyde que
sous les structures. Pour la simulation par la méthode des éléments finis, l'îlot et l'électrode ont
été donc placés à la surface d'une couche de SiO2 et plongés dans un milieu analogue à l'air
(isolant de permittivité ε0).
Figure 115 : Structure
maillée
utilisée
sous
FEMLAB pour modéliser
une électrode triangulaire
et un îlot. Ils sont
disposés à la surface
d’une couche de SiO2 et
laissés à l’air libre.
155
Afin de déterminer si l’approximation plan/îlot est toujours valable pour estimer la valeur de la
capacité liant une électrode triangulaire à un îlot, les résultats relatifs à ces électrodes et à un
plan conducteur ont été comparés dans le graphe présenté par la Figure 116. Pour faire cette
étude, les capacités plan/îlot ont été modélisées avec les expressions littérales de la partie
III.2., mais en utilisant ε0 comme permittivité, c'est-à-dire en considérant que les îlots sont
seulement entourés d'air. On peut remarquer que l'approximation plan/îlot donne les meilleurs
résultats lorsque les îlots sont petits. De plus, c'est pour des distances électrode/îlot (notées d
sur le graphe) supérieures à 1 nm que l'on obtient le meilleur accord entre la méthode des
éléments finis et les expressions littérales.
∆ /îlot pour r=2nm
∆ /îlot pour r=4nm
∆ /îlot pour r=8nm
Plan/îlot pour r=2nm
Plan/îlot pour r=4nm
Plan/îlot pour r=4nm
C (aF)
1
0.1
1
10
d (nm)
Figure 116 : Capacité
calculée par la méthode
des
éléments
finis
entre un îlot métallique
et
une
électrode
également métallique,
posés sur une couche
de SiO2 et entourés
d’air. Trois rayons ont
été considérés, et dans
chaque cas les valeurs
trouvées
pour
une
électrode triangulaire
(en
noir)
ont
été
comparées aux valeurs
obtenues
calculées
pour
un
plan
(en
orange).
Les divergences entre les deux approches, que l'on peut noter pour les distances électrode/îlot
les plus faibles, peuvent être attribuées au fait que les expressions littérales prennent en
compte toutes les lignes de champ. A l'inverse, la méthode des éléments finis ne tient compte
que de celles qui proviennent de l'hémisphère qui est en regard avec l'électrode, pour les
raisons que l'on a déjà évoquées précédemment (voir Figure 113). De plus, les expressions
littérales ne tiennent pas compte non plus de la couche d'oxyde placée sous le système
électrode-dot, alors que la permittivité de cette couche est différente de celle de l'air, ce qui a
certainement une influence non négligeable, du moins en ce qui concerne les lignes de champ
qui traversent le SiO2.
Dans le cas des dispositifs comprenant plusieurs îlots, qui forment des multi-jonctions tunnel,
les capacités îlot/îlot entrent en jeu dans la capacité totale des nanocristaux de la chaîne. Il
convient là encore de vérifier si les expressions littérales de la partie III.2. peuvent être
utilisées pour estimer la valeur des capacités îlot/îlot. Pour ce faire, elles ont à leur tour été
comparées avec les résultats fournis par la méthode des éléments finis. C'est ce que présente
la Figure 117, et on peut constater qu'il existe un profond désaccord entre les deux approches.
Quelle que soit la distance séparant les îlots, on voit sur le graphe que la méthode des
éléments finis donne des valeurs systématiquement inférieures à celles calculées à partir des
expressions du chapitre III.2. Il semble donc que cette fois, les expressions littérales donnent
156
des résultats qui sont fortement affectés par les approximations faites. La géométrie des îlots
est certainement à l'origine de ces divergences, leur aspect sphérique rendant les lignes de
champ bien plus courbées que lorsqu'il s'agit d'une forme géométrique composée de plans, ce
qui est le cas pour les électrodes.
C (aF)
10
îlot/îlot r=2nm
Calcul littéral r=2nm
îlot/îlot r=4nm
Calcul littéral r=4nm
îlot/îlot r=8nm
Calcul littéral r=8nm
1
0.1
1
10
Figure 117 : Capacité
entre un îlot métallique et
une électrode planaire
également
métallique,
séparés par du SiO2. Trois
rayons ont été considérés
et, dans chaque cas, les
valeurs trouvées par la
méthode des éléments
finis (points dessinés en
noir) ont été comparées
aux valeurs obtenues par
les expressions littérales
présentées dans la partie
III.2 (courbes orange).
distance îlot/îlot (nm)
Si l’on fait le bilan des informations que l'on peut tirer de cette étude, on peut tout d'abord
souligner que les expressions littérales de la partie III.2. correspondent assez bien aux valeurs
calculées par la méthode des éléments finis dans un certain nombre de cas. Si on définit le bon
accord entre les deux méthodes comme une divergence inférieure à 10% entre elles, il est
possible de déterminer les conditions d'écartement et de diamètre aboutissant à ce bon
accord. C'est ce que propose la Figure 118 ; pour les jonctions îlot/plan, le meilleur accord est
obtenu pour les valeurs représentées en bleu ; on peut voir qu'il correspond à des distances
îlot/plan plutôt faibles, inférieures à 2,5 nm.
Figure 118 : Domaines de
correspondance
entre
les
résultats obtenus par éléments
finis et les modèles analytiques
développés dans la partie
III.2.,
pour
les
jonctions
îlot/plan
(en
bleu)
et
îlot/électrode triangulaires (en
vert). En ordonnée, ce sont les
rayons (r) des îlots qui sont
représentés, et en abscisse on
trouve la distance d entre l'îlot
et le plan ou l'électrode
triangulaire.
157
En ce qui concerne la jonction îlot/électrode triangulaire, on peut trouver un bon accord entre
les deux méthodes lorsque le rayon de l'îlot et la distance îlot/électrode correspondent aux
valeurs représentées en vert sur la Figure 118. On remarque que plus on augmente la
distance d, plus la taille des îlots doit être importante pour que les modèles donnent des
valeurs de capacité similaires.
Enfin, pour les jonctions îlot/îlot, l'accord n'est pas bon, certainement à cause de la géométrie
de ce type de jonction. On peut penser qu'il existe une différence trop grande entre la capacité
liant deux îlots (qui prend en compte toutes les lignes de champ) et la capacité de la jonction
îlot/îlot (qui prend en compte uniquement les lignes de champ liant les nanocristaux lorsqu'ils
sont placés entre deux électrodes polarisées).
En conclusion, il est correct d'utiliser la relation (83) pour estimer les capacités plan/îlot (ce qui
est utile pour calculer le couplage des îlots avec le substrat) et îlot/électrode triangulaire (sous
certaines conditions, elle permet d'évaluer le couplage existant entre les électrodes et les
îlots). En revanche, la relation analytique (82) de la partie III.2. n'est pas appropriée aux
jonctions îlot/îlot. Dans ce dernier cas en effet, les valeurs trouvées par la méthode des
éléments finis sont systématiquement inférieures à celles calculées à partir des expressions
littérales.
Cette dernière remarque est à mettre en parallèle avec le fait que dans la partie III.2., on a
souligné que les jonctions îlot/îlot avaient des valeurs de capacité plutôt basses, en tout cas
inférieures aux jonctions électrode/îlot. Par conséquent, la méthode des éléments finis ne fait
que nous conforter dans cette conclusion. L'intérêt que nous portons aux multi-jonctions
tunnel pour observer le blocage de Coulomb à température ambiante est donc conforté par ce
résultat, car il peut permettre de diminuer la capacité totale d'îlots ayant surtout des jonctions
avec d'autres îlots, comme c'est le cas pour les éléments d'une chaîne, par exemple.
Toujours dans le but de déterminer les paramètres qui influent sur la capacité totale des îlots,
on peut remarquer que les capacités liant un plan conducteur et un îlot séparés par une
couche de SiO2 (Figure 114) sont bien supérieures à celles liant un îlot à un autre (Figure 117)
ou un îlot à une électrode (Figure 116) séparés par une couche d'air et reposant seulement sur
la couche d'oxyde. L'origine de ce phénomène tient tout simplement à la permittivité de
l'oxyde, qui est plus importante que celle de l'air. Les capacités mettant en jeu du SiO2
donnent par conséquent lieu à des capacités importantes, susceptibles d'amoindrir les effets de
blocage de Coulomb, particulièrement à température ambiante.
Parmi les différentes capacités entrant dans le calcul de la capacité totale des îlots, celle liant le
substrat aux îlots correspond à des lignes de champ qui se déploient toutes dans de l'oxyde.
C’est donc elle qui a l’impact le plus négatif sur l'observation du blocage de Coulomb, comme
le montre la Figure 119, où l'on peut voir les courbes de courant simulées à température
ambiante pour des dispositifs comportant trois îlots (de diamètres 4 et 8 nm), en prenant en
compte ou pas l'influence du substrat.
On constate que le palier de Coulomb (autour de VDS=0 V) est d'autant plus large que le
diamètre des îlots est petit, ce qui était attendu. Mais on remarque également que ce palier est
bien plus large lorsqu'on élimine la contribution du substrat à la capacité totale. Il convient
donc pour s'assurer de telles observations de faire diminuer le couplage îlot/substrat, par
exemple en augmentant très sensiblement l'épaisseur de la couche d'oxyde placée sous le
158
système étudié
(a)
0,25
0,20
0,15
Avec influence du substrat
Sans influence du substrat
0,10
Diamètre des îlots : 4 nm
Diamètre des îlots : 8 nm
0,10
R2=R3=5.10
Ω
12
Ω
0,00
0,05
IDS (pA)
10
R1=R4=2.10
0,05
IDS (pA)
(b)
0,15
Avec influence du substrat
Sans influence du substrat
-0,05
10
Ω
12
Ω
R1=R4=2.10
R2=R3=5.10
0,00
-0,05
-0,10
-0,15
-0,10
-0,20
-0,25
-3
-2
-1
0
1
2
-0,15
3
-2
VDS (V)
-1
0
1
2
VDS (V)
Figure 119 : Courants simulés à l'aide de MOSES 1.1 pour des composants comportant 3
îlots alignés entre deux électrodes et une grille. Deux diamètres ont été considérés : 4 nm
(a) et 8 nm (b). Les courbes diffèrent selon que l'on prend en compte l'influence du substrat
(courbes noires) ou non (courbes et points orange). Les résistances tunnel ont été
déterminées arbitrairement d'après les calculs de Y. Leroy sur des îlots métalliques
[Leroy01].
En fait, cela ne suffit pas car, comme on peut le voir sur la Figure 114, la valeur de la capacité
substrat/îlot tend à se stabiliser quand on augmente l'épaisseur d'oxyde. Ainsi pour une
épaisseur de 20 nm (comme c'est le cas pour nos échantillons), on a une capacité de 0,93 aF,
alors que pour une épaisseur de 1µm, on a encore une capacité de 0,8 aF.
L'augmentation de l'épaisseur de SiO2 sous le composant est donc une manière de limiter
l'influence du substrat, mais on peut imaginer d'autres moyens pour la rendre bien plus faible,
comme par exemple l'utilisation d'un autre matériau. Certains isolants ont en effet de faibles
constantes diélectriques, on les appelle matériaux low-k et ils permettant un couplage très
restreint entre les conducteurs qu'ils isolent. On peut donc envisager à l'avenir de les utiliser
pour réduire cette capacité parasite liée au substrat et augmenter ainsi la température de
fonctionnement des composants élaborés.
La Figure 120 met en évidence l'influence de l'utilisation de tels matériaux, en représentant la
température de fonctionnement de deux composants à trois îlots en fonction de la constante
diélectrique du matériau utilisé pour la couche séparant le dispositif du substrat. Les énergies
de chargement ont été calculées en utilisant les modélisations par éléments finis présentées cidessus. Pour cette figure, elles sont considérées comme suffisantes pour assurer le
fonctionnement des composants lorsqu'elles sont supérieures à 25kT. On a donc pris une
condition de fonctionnement cinq fois supérieure au critère EC>5kT utilisé précédemment, et
ce dans le but de s'assurer que le terme de ''température de fonctionnement'' corresponde à
une température à laquelle le composant peut être utilisé de manière fiable une fois inséré
dans un circuit sujet aux échauffements.
On constate qu'avec un matériau dont la constante diélectrique vaut 2,5 (les silsesquioxanes
par exemple), la température de fonctionnement passe de 105 K à 140 K (soit 35 K de plus)
pour des îlots de 16 nm de diamètre et de 250 K à 325 K (soit 75 K de plus) pour des îlots de
8 nm. Ce matériau permettrait donc de faire fonctionner à température ambiante un
composant qui, avec du SiO2 comme isolant, n'aurait pas permis de dépasser les 250 K. Ceci
montre aussi que plus les îlots sont petits, plus l'apport du matériau low-k est important.
159
500
3 îlots, diamètre 8 nm
3 îlots, diamètre 16 nm
450
Tfonctionnement (K)
400
350
300
250
200
150
100
Air
Organosilicates
50
Low-K poreux
Silsesquioxanes
0
1.0
1.5
2.0
2.5
Fluorosilicates
3.0
3.5
SiO2
4.0
εisolant
Figure 120 : Température de fonctionnement de dispositifs comportant 3 îlots (de diamètres
8 et 16 nm), en fonction de la constante diélectrique de la couche séparant le dispositif du
substrat. Les traits verticaux correspondent aux constantes de quelques familles de
matériaux low-k (à faible constante diélectrique) envisagés dans la microélectronique.
Notons enfin que cette solution risque de se heurter à la qualité isolante parfois médiocre de
ces matériaux. De manière plus radicale, une autre solution permettant d'éviter le couplage
capacitif avec le substrat serait de le remplacer par une plaque d'alumine. En effet, l'alumine
est un isolant, ce qui éviterait la mobilisation de porteurs en regard de ceux mis en jeu dans le
dispositif et rendrait ainsi nulle la capacité îlot/substrat. Ces substrats isolants, utilisés
habituellement pour les applications radiofréquences, sont toutefois relativement onéreux. Ils
ne constituent donc pas vraiment une alternative dans le cadre d'un procédé de fabrication de
type MOS, mais ils peuvent fournir une preuve expérimentale de l'importance du couplage
avec le substrat pour l'obtention de composants fonctionnant à température ambiante.
IV. Conclusion
Ce chapitre apporte sa contribution à l'étude des solutions permettant d'élaborer des
composants mono-électroniques à base de nanocristaux de silicium. Deux voies ont pour cela
été explorées. La première est une approche consistant à faire des composants nanométriques
à partir d'échantillons de taille importante, par un procédé d'isolation compatible avec les outils
de la technologie MOS. Il a été mis au point au cours de la collaboration avec le CRN² de
Sherbrooke au Québec, et il aboutit à des composants ''verticaux'', c'est-à-dire que le
transport d'électrons s'y fait perpendiculairement à la surface du substrat. Ce type de
dispositifs est courant pour les matériaux III-V mais il est plutôt rare dans le cas du silicium.
Un certain nombre de difficultés sont apparues au cours de l'élaboration du procédé d'isolation.
Pour y remédier, un recours aux techniques de STI (Shallow Trench Isolation) et de gravures
160
sèches de type RIE (Reactive Ion Etching) est envisagé. Mais malgré ces difficultés, des zones
actives d'environ 70 nm de diamètre ont été réalisées avec succès.
Enfin, la cathodoluminescence ouvre des perspectives intéressantes pour repérer des zones
actives où les îlots sont homogènes en taille et en disposition. Ce sont ces zones que l'on
pourra choisir pour élaborer les composants ; ainsi, la cathodoluminescence peut offrir une
alternative à l'organisation spatiale des îlots, en permettant d'élaborer des composants de
tailles très faibles à partir d'îlots disposés aléatoirement. Si on se réfère à la conclusion du
chapitre II, on peut penser que la cathodoluminescence permettra la diminution du nombre
d'îlots que doivent comporter les zones actives des dispositifs mémoires pour être
reproductibles. Nous avions considéré ce nombre égal à 5, mais notre procédé d'isolation
associé au repérage des positions des nanocristaux par cathodoluminescence pourrait le faire
tendre vers 1, et constituer ainsi le trait d'union entre les dispositifs MOS à quelques îlots et les
composants mono-électroniques, tout en assurant la réduction des dimensions jusqu'aux
nœuds technologiques les plus lointains.
Ce chapitre aborde également une deuxième approche, fondamentalement différente de la
première, et qui consiste à élaborer des composants à quelques îlots en plaçant ces derniers
entre des électrodes. Ceci a été réalisé au moyen d'une pointe AFM, dans le cadre d'un projet
financé par la région Rhône-Alpes, qui nous a permis d'étudier des dispositifs comportant un et
trois îlots, avec ou sans grille de contrôle. La caractérisation électrique de ces composants a
montré la présence de blocage de Coulomb à température ambiante dans les dispositifs à trois
îlots qui n'étaient pas dotés d'une grille de contrôle. En polarisant le substrat, on a également
réussi à moduler le courant de drain, ce qui laisse présager une action similaire à l'effet de
champs des transistors MOS, mais régie dans ce cas par la physique du blocage de Coulomb.
En revanche, les échantillons munis d'une grille (comportant un ou trois îlots) n'ont pas montré
de caractéristiques électriques satisfaisantes.
Les courbes attendues pour ce type de composant sont conformes aux prédictions de la
théorie du blocage de Coulomb. Cette théorie a été détaillée, jusqu'à la description de deux
approches permettant de simuler les courbes de courant, à l'aide d'un modèle analytique
(dispositifs à un îlot) et d'un logiciel réputé utilisant la méthode Monte Carlo (MOSES 1.1 pour
les composants à plusieurs îlots).
Pour expliquer ces faits expérimentaux et guider la conception vers de nouvelles architectures,
nous avons développé un modèle capacitif. En effet, le blocage de Coulomb est un phénomène
classique que l'on peut décrire de façon semi-quantitative en étudiant la capacité des îlots
présents dans la zone active des composants. Une première approche analytique a été menée,
en faisant des hypothèses géométriques et en considérant des îlots de type métallique. Elle a
débouché sur deux conclusions :
• Le couplage avec le substrat et avec la grille doit être pris en compte lors de l'élaboration
des composants, car ils représentent environ les deux tiers de la capacité d'un îlot ;
• L'énergie de chargement apportée par une jonction îlot/îlot est bien plus importante que
celle obtenue pour une jonction îlot/électrode.
Ce dernier point plaide en la faveur de dispositifs contenant au moins trois îlots. En effet, le ou
les îlots qui ont plusieurs jonctions avec d'autres îlots vont avoir une énergie de chargement
161
plus élevée que les autres. Ils vont ainsi conditionner la conductance du composant et rendre
plus aisée l'observation de blocage de Coulomb. Ces conclusions, issues de l'approche
analytique, sont corroborées par le fait que la caractérisation du blocage de Coulomb a été
réussie sur un dispositif dépourvu de grille et comportant trois îlots alignés. Pour vérifier les
valeurs de capacité données par les modèles analytiques et définir les domaines de validité de
ces derniers, une approche utilisant la méthode des éléments finis a également été utilisée.
Dans le cas des jonctions qui nous intéressent, on peut remarquer que l'on ne se trouve pas
toujours dans ces domaines, notamment en ce qui concerne les jonctions îlot/îlot.
Les conclusions sur le couplage avec le substrat et la grille ne sont pas pour autant remises en
cause, au contraire. Les jonctions îlot/îlot engendrent une énergie de chargement encore plus
faible que celle que l'on a calculée analytiquement. Ceci renforce encore l'intérêt que nous
portons aux dispositifs comprenant plusieurs îlots. La méthode des éléments finis, plus lourde
à mettre en place que les expressions analytiques, s'impose néanmoins pour modéliser nos
composants. Les expressions littérales font des approximations géométriques trop importantes
pour être utilisées de façon quantitative. Le manque de souplesse des éléments finis est
tempéré par le fait que notre approche se concentre sur la jonction-tunnel, qui est une brique
de base à partir de laquelle il est possible d'élaborer de nombreuses architectures. En
travaillant sur seulement deux types de jonctions, les jonctions îlot/électrode et îlot/îlot, il est
donc possible de modéliser toutes sortes de composants, même assez complexes, construits
en plaçant des îlots entre des électrodes métalliques.
Pour illustrer les perspectives ouvertes par les constatations faites dans ce chapitre, et
notamment le fait que la jonction îlot/îlot soit propice à l'élévation de l'énergie de chargement
des nanocristaux, on peut envisager un composant appelé mémoire non-volatile à un électron
(NVSEM), et inspiré du piège à électrons proposé par K.K. Likharev [Likharev03]. La Figure
121 montre la représentation schématique d’un tel composant, qui reprendrait les éléments
d'une mémoire Flash conventionnelle, mais en utilisant la brique de base évoquée
précédemment, à savoir la jonction-tunnel.
Figure 121 : Schéma d'une
SENVM (Single Electron NonVolatile Memory, mémoire
non-volatile à un électron).
162
Pour s’assurer du fonctionnement de tels dispositifs à température ambiante, il sera utile de
trouver une solution au problème que représente le couplage avec le substrat de silicium, qui
est séparé de la zone active de notre composant par une couche d’oxyde. Pour diminuer la
valeur de cette capacité, nous suggérons l’utilisation d’une couche de matériau à faible
constante diélectrique (isolants ''low-k'') en lieu et place de la couche d’oxyde. Si l’on veut la
supprimer totalement, par exemple pour confirmer expérimentalement l’importance de son
influence, un substrat en alumine pourra être utilisé à la place du substrat de silicium.
163
164
Conclusion générale
A
u cours de cette thèse, nous avons eu l'occasion de vérifier que les îlots de silicium
représentaient une brique de base attrayante pour continuer à réduire la taille des
composants microélectroniques dans les années qui viennent. Plus que l'îlot lui même, ces
dispositifs utilisent les propriétés spécifiques de la jonction-tunnel qu'il forme avec une
électrode ou avec un autre îlot. Ceci débouche sur tout un ensemble de composants, dont on a
montré qu'ils étaient en mesure d'accompagner l'évolution des transistors et des mémoires, du
nœud 65 nm aux dispositifs à un électron.
Cet intérêt pour la jonction-tunnel est dû à la dualité de son comportement électrique, qui est
à la fois capacitif et résistif. Deux moyens sont à notre disposition pour modifier l'état de
charge des objets séparés par une jonction-tunnel : le transfert de porteurs de l'un à l'autre
(par effet tunnel) et la variation du potentiel existant entre eux, qui modifie leur charge,
conformément aux lois du couplage capacitif.
Ce travail de thèse s'est attaché à modéliser ce dernier aspect de façon simple. Il est souvent
négligé ou traité trop sommairement dans les travaux de simulation, alors qu'il est crucial pour
la compréhension des phénomènes comme le blocage de Coulomb.
On a tout d'abord utilisé la modélisation de la capacité liant un plan d'îlot et une électrode
métallique pour extraire les paramètres des nanocristaux à partir de mesures de courants
transitoires. Ces mesures ont été effectuées sur des composants de type mémoire Flash à
nanocristaux, dont on a montré que le chargement se faisait très certainement dans les îlots et
non dans les défauts que l'on peut trouver à leur proximité.
Ces composants contenaient des nanocristaux élaborés par deux techniques bien connues,
l'implantation de silicium dans une couche d'oxyde et la formation de SiOX par LPCVD. Pour
utiliser notre modèle, il est nécessaire que les échantillons choisis montrent des courants de
fuite suffisamment bas pour que les courants de chargement puissent être mesurés. Les
échantillons pour lesquels c’est le cas ont été soumis à cette technique, ce qui nous a permis
de confirmer ou de modifier les données structurales dont nous disposions à propos des
populations d'îlots qu’ils contiennent.
Cette approche consistant à extraire des paramètres depuis les données expérimentales a été
confrontée à un modèle proposant de simuler totalement les courants de chargement. Ce
dernier demande une très bonne connaissance du matériau et de ses caractéristiques
électriques pour être mis en œuvre, mais il peut aboutir à une meilleure compréhension
physique des phénomènes régissant le chargement des îlots. En revanche, l’extraction de
paramètres peut être utilisée lorsqu’on ne connaît que partiellement les données structurales
des échantillons étudiés, et peut même nous aider à les déterminer. Nous disposons donc de
deux approches complémentaires permettant une grande souplesse dans l’interprétation de
nos données expérimentales.
165
A partir de l’extraction de paramètres que nous avons présentée, nous avons ensuite utilisé
leur densité et leur diamètre pour évaluer l'aptitude à la miniaturisation des deux techniques
d’élaboration de nanocristaux que nous avons eu l’occasion d’étudier, à savoir l'implantation
ionique à très basse énergie et de la LPCVD. L'implantation à très basse énergie tout d'abord,
avec des îlots de 2,2 nm de diamètre tels que ceux que l'on a caractérisés, pourrait être
utilisée pour les mémoires Flash jusqu'au nœud 11 nm. La densité dont nous disposions
(1,5.1012 cm-2), correspond au nœud 22 nm et pourrait théoriquement évoluer vers une limite
que nous avons évaluée à environ 5,7.1012 cm-2. Au delà, les îlots seraient trop proches les uns
des autres pour conserver leurs avantages par rapport aux mémoires Flash conventionnelles.
Les nanocristaux élaborés par LPCVD que nous avons caractérisés avaient quant à eux des
diamètres de 5 nm, ce qui pourrait à haute densité mener les mémoires Flash jusqu'au nœud
16 nm. Mais nos modèles ont montré que les échantillons sur lesquels les mesures de courant
ont été effectuées étaient peu denses (1,5.1011 cm-2). Une telle densité permettrait tout de
même de réaliser des mémoires pour le nœud 65 nm, qui est d'ailleurs le nœud visé par
certains industriels comme Motorola pour l'entrée en production des mémoires Flash à
nanocristaux.
Les technologies d'élaboration étudiées dans cette thèse sont donc d'ores et déjà susceptibles
de jouer un rôle dans le domaine des mémoires Flash, du nœud 65 nm aux nœuds inférieurs à
20 nm.
Mais dans un futur plus lointain, les îlots de silicium pourraient également être d'une grande
utilité pour fabriquer des SET (Single Electron Transistors) ou des SEM (Single Electron
Memories). Pour le démontrer, nous avons tout d'abord mis au point un procédé visant à faire
des composants nanométriques à partir d'échantillons de taille importante. Il aboutit à des
composants ''verticaux'', peu courants dans la technologie silicium. Nous avons également pu
constater que la cathodoluminescence pouvait représenter une alternative à l'organisation des
îlots, en permettant de visualiser les emplacements des nanocristaux, ainsi que leur diamètre,
et ce avant même d'élaborer les composants.
Dans un deuxième temps, le blocage de Coulomb a été mis en évidence à T=300 K sur des
composants de type SET réalisés par nanomanipulation de nanocristaux de silicium, à l'aide
d'une pointe AFM. En modélisant là encore l'aspect capacitif des jonctions îlot/électrodes, mais
aussi celui des jonctions îlot/îlot, on a pu établir que ces dernières donnaient lieu à des
énergies de chargement élevées et donc propices à l'observation de blocage de Coulomb.
A partir de ces constatations, il est apparu évident que les multi-jonctions-tunnel étaient plus
aptes à montrer ce phénomène que les composants ne comprenant qu'un îlot de silicium. Le
chapitre III ouvre ainsi la perspective de créer des composants mémoires analogues au piège
à électrons de K.K. Likharev, mais en silicium. On peut penser à une mémoire non volatile à un
électron (SENVM) constituée de trois électrodes et six îlots de diamètres différents. Ce
nouveau composant devrait permettre le même usage que les mémoires Flash actuelles mais
avec les dimensions d'un composant mono-électronique.
A l'avenir, il sera très intéressant de fabriquer des démonstrateurs de ces composants,
d'étudier les courants qui les parcourent de façon expérimentale mais aussi théorique.
Concernant ce dernier point, il conviendra d'utiliser des modèles à la physique plus poussée
(prenant notamment en compte les effets quantiques dans le silicium). Le simulateur utilisé
166
dans le chapitre III, MOSES 1.1, s’appuie sur la théorie orthodoxe, établie pour des îlots
métalliques. Il en est de même pour le modèle analytique que nous avons proposé pour les
dispositifs à un îlot, mais celui-ci pourrait être adapté avec des modèles simples de résistances
tunnel prenant en compte le matériau qui compose les îlots dans nos échantillons, le silicium.
Ainsi, pour des architectures variées et potentiellement complexes, nous pourrions déterminer
de façon rapide à la fois les dimensions à donner aux objets implémentés dans la zone active,
mais aussi calculer le courant délivré par le composant, quelles que soient les polarisations
appliquées aux électrodes.
D'un point de vue expérimental, on pourra pousser encore plus loin les limites de la
nanomanipulation en remplaçant les pointes AFM par des nanotubes de carbone que l'on aura
fait croître sur celles-ci. Les îlots déplacés pourront alors avoir des diamètres bien inférieurs,
certainement de l'ordre de 2 ou 3 nm, rendant possible la fabrication et la caractérisation de
composants comme les SENVM. Une étude devra également être envisagée pour confirmer
nos calculs concernant le couplage îlots/substrat, qui semble être assez prépondérant dans la
capacité totale des nanocristaux de nos dispositifs expérimentaux. Pour ce faire, nous
recommandons de limiter cette capacité en utilisant des matériaux low-k ou des substrats
isolants en alumine.
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THESE SOUTENUE DEVANT L'INSTITUT NATIONAL DES SCIENCES APPLIQUEES DE LYON
NOM : BEAUMONT
Prénoms : Arnaud
DATE de SOUTENANCE : 12 décembre 2005
TITRE : Etude des mécanismes de transport électrique dans des structures à base de
nanocristaux de silicium ordonnés.
NATURE : Doctorat
Numéro d'ordre : 2005-ISAL-00119
Ecole doctorale : Electronique, Electrotechnique, Automatique
Spécialité : Dispositifs de l’électronique intégrée
Cote B.I.U. - Lyon : T 50/210/19
/
et
bis
CLASSE :
RESUME :
Les nanocristaux de silicium sont des amas sphériques d’atomes de silicium, dont le diamètre est
typiquement de l'ordre de la dizaine de nanomètres. Si on les utilise comme zone active dans un
composant électronique, leurs très faibles dimensions font apparaître des phénomènes qui pourraient les
amener à jouer un rôle important dans la microélectronique, à court et à long terme.
A court terme, ils pourront être utilisés comme nano-grilles flottantes dans les mémoires FLASH, dont la
miniaturisation pourra ainsi être poursuivie. A partir de mesures de courants transitoires effectuées sur ce
type de composant, nous avons montré qu’il était possible de mettre en évidence le rôle prépondérant
que jouent les îlots de silicium dans l’effet mémoire observé. Cette méthode a été validée sur des
dispositifs comportant des nanocristaux élaborés par implantation ionique et par dépôt chimique en phase
vapeur (CVD).
A plus long terme, les nanocristaux pourraient représenter la brique de base d'une électronique monocharge, en utilisant le phénomène de blocage de Coulomb. Nous avons montré que ce dernier régissait en
particulier le transport dans une chaîne de trois îlots de silicium à température ambiante. Ce travail
propose également une projection sur les caractéristiques morphologiques que devront respecter ces
composants pour jouer un rôle dans la microélectronique.
MOTS-CLES : MOS, Mémoire FLASH, Nanocristaux, Courant transitoire, SET, Blocage de Coulomb,
Modélisation, Eléments finis.
Laboratoire (s) de recherches : Laboratoire de Physique de la Matière (LPM, UMR 5511)
Directeur de thèse : Abdelkader Souifi (professeur, INSA de Lyon)
Président de jury : Carole Plossu (professeur, INSA de Lyon)
Composition du jury : Jacques Gautier (rapporteur), Philippe Dollfus (rapporteur), Thierry Baron
(examinateur), Pascal Normand (examinateur), Carole Plossu (examinateur), Abdelkader Souifi
(directeur de thèse), Vincent Aimez (membre invité).
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