Communiqué
Un gène macho est identifié chez la mouche
L’homme et la drosophile (mouche du vinaigre) produisent tous deux dans leur liquide
séminal des protéines essentielles pour assurer le succès de leur reproduction. Les insectes
mâles, quant à eux, optimisent leurs atouts en s’assurant de la fidélité de leur partenaire durant
une dizaine de jours. Le changement de comportement de la femelle, qui s’accompagne
notamment d’une augmentation du nombre d’œufs pondus, est dû au ‘sex peptide’, présent
dans le sperme. Ce dernier est stocké dans les spermathèques et les glandes séminales de la
femelle, afin que les nombreux ovocytes qu’elle libère durant cette dizaine de jours soient
fécondés de manière autonome et exclusive.
L’équipe de François Karch, professeur au Département de génétique et évolution de
l’Université de Genève, vient de mettre au jour le rôle d’un gène particulier, nommé Abd-B,
dans l’optimisation des chances de reproduction des mâles. Ce gène appartient à la famille des
gènes ‘architectes’, qui président au plan de construction des organismes à symétrie
bilatérale. ‘Nous avons découvert que le gène Abd-B est exprimé dans les glandes accessoires
de l’appareil reproductif mâle, tout comme celui du ‘sex peptide’. Par ailleurs, en puisant dans
notre collection d’allèles, nous avons identifié une mutation qui élimine l’expression du gène
Abd-B de façon spécifique’, explique le chercheur.
En collaboration avec l’Université de Cornell, les chercheurs ont démontré que les femelles
fécondées par les mâles mutants ne repoussent plus les nouveaux courtisans après un
accouplement. Le ‘sex peptide’, quant à lui, continue à être transmis aux femelles, mais sa
durée de vie diminue fortement. ‘Nous en concluons que le liquide séminal doit être activé
lors de l’éjaculation, pour que le ‘sex petide’ soit stabilisé une fois transféré à la femelle. Abd-
B joue donc un rôle-clé dans ce processus’, rapporte Dragan Gligorov, premier auteur de
l’article publié dans PLoS Genetics. En référence à ce phénotype, l’allèle muté a été baptisé
iab-6cocu.
Ces observations éclairent également certains aspects liés à l’évolution. Chez la drosophile, le
gène Abd-B est actif dans les parties de l’embryon qui vont donner naissance aux structures
génitales externes. Chez les mammifères, les homologues de ce gène, les gènes ‘architectes’
Hox10-13, sont également exprimés dans le bouton génital, la prostate et la glande séminale.
‘La position de ces gènes au sein des complexes Hox expliquerait ainsi la raison pour laquelle
les organes génitaux se développent toujours à l’extrémité postérieure des organismes à
symétrie bilatérale’, détaille François Karch, membre du Pôle de Recherche National
Frontiers in Genetics.