en se substituant au Congrès pour tenter de gérer la situation de chaos qui sévît dans le
pays. Ainsi, soit par la voie des « executive orders », sorte de décrets réglementaires
entrant en vigueur avec la seule signature du Président, soit par des délégations
législatives extrêmement vastes, Roosevelt concentre tout le pouvoir entre ses mains.
Son fameux programme « de 100 jours », qui comprend une série de strictes
mesures interventionnistes, constitue une délégation de pouvoir sans précédent, et
pour ainsi dire, la plus importante de toute l’histoire des Etats-Unis2. Ayant pour devise
principale3 que les situations extraordinaires exigent des pouvoirs extraordinaires, le
Président Roosevelt demande au Congrès les pouvoirs qu’il aurait eu en cas de guerre,
afin de pouvoir lutter contre la crise. Ainsi, au nom de la survie du pays, la solution
adoptée dépasse les limites posées par le principe fondamental de la séparation des
pouvoirs4.
Le même phénomène est observé plus d’un demi-siècle après en Argentine. En
juillet 1989, dans un contexte marqué par l’hyperinflation et l’instabilité économique, au
milieu d’une grande crise économique et sociale, l’arrivée et l’exercice du pouvoir de
Carlos Menem fait de ce dirigeant le symbole de l’hyper présidentialisme. Afin de
mettre fin au problème d’inflation excessive, et en accusant le pouvoir législatif d’un
manque de réactivité, Carlos Menem réussit à gouverner sans que le Parlement ne
parvienne à entraver sa pratique du pouvoir. En invoquant des situations d’urgence
économique, il arrive à effectuer des reformes structurelles radicales, sans l’autorisation
préalable du pouvoir législatif. Plus précisément, il émet massivement des décrets de
nécessité et d’urgence et utilise son pouvoir de veto partiel pour bloquer toute initiative
de la part du Congrès. Ainsi, se plaçant en conflit constant avec le pouvoir législatif, le
Président Menem adopte des mesures exceptionnelles et exerce un pouvoir autoritaire
durant les 10 ans de sa présidence.
Cependant, les reformes ultralibérales menées en Argentine par Carlos Menem,
constituaient dans la réalité l’application à la lettre des programmes d’ajustement dictés
par le Fonds Monétaire International (F.M.I). La dépendance économique d’un pays à
une institution internationale affecte sans conteste non seulement le contenu des
décisions prises par les gouvernants du pays mais également son organisation
institutionnelle. Ainsi, outre la mutation du processus législatif due à la marginalisation
du pouvoir législatif, l’intervention du FMI soulève des questions sérieuses sur le respect
des principes démocratiques et l’exercice de la souveraineté nationale.
D’ailleurs, le même phénomène de renforcement du pouvoir exécutif au
détriment du législatif survient à l’heure actuelle en Grèce. Dans un contexte de crise
2 C. Rossiter, Constitutional Dictatotorship, Crisis Government in modern democracies, Princeton University Press,
1948, p.260
3 Id. p. 256
4 Articles I, II de la Constitution américaine concernant les compétences des pouvoirs législatif et exécutif.