opinions Vendredi5 novembre 2010
Entre la caisse unique et la logique du profit, une
troisième voie
Par Jaques Vernet,
Jaques Vernet, ex-conseiller d’Etat genevois et Christophe Dunand,
enseignant à la Haute école de Suisse occidentale, proposent de
séparer la LAMal des assurances complémentaires
Les débats actuels sur les coûts de la santé et les caisses maladie montrent des lobbies très efficaces (peut-être
ce qui marche le mieux dans le système de santé suisse?), des clivages politiques et régionaux croissants, ainsi
qu’une incapacité à aborder les questions de fond pour trouver des solutions originales.
Les récentes propositions du conseiller fédéral Burkhalter sur le financement des hôpitaux, la limitation de la
sélection des bons risques, la surveillance des caisses et la gestion de leurs réserves ne manquent pas d’intérêt.
Mais elles ne régleront malheureusement pas un problème de fond. Depuis des années nous sommes
convaincus que laisser entre les mêmes mains la gestion de l’assurance sociale de base (LAMal) et celle des
assurances complémentaires est un défaut majeur. Nous sommes convaincus aussi qu’entre la solution actuelle
(privée commerciale) et celle de la caisse unique privée, il faut explorer une troisième voie.
Deux problèmes distincts et reliés, souvent confondus dans les discours, doivent être résolus. D’abord il s’agit de
maîtriser les coûts de la santé. Ensuite il faut trouver la forme institutionnelle qui permette de gérer la LAMal en
toute transparence (!) et de manière efficiente.
La question des coûts de la santé est à aborder en tant que telle. Nous nous contenterons d’en rappeler
quelques éléments saillants. La méfiance actuelle induite par l’absence de transparence des caisses laisse
penser qu’il est possible d’en réduire le train de vie et par exemple les bonus de leurs dirigeants. Mais la baisse
des coûts de la santé dépend d’abord de mesures externes à la gestion de la LAMal. Il s’agit de poursuivre la
rationalisation du système de soins et notamment de développer les réseaux de santé ainsi que de prévenir les
problèmes de santé. Aujourd’hui l’essentiel des dépenses vise à gérer des problèmes (approche curative), seuls
quelques pour-cent sont dépensés pour la promotion de la santé.
Des contrôles renforcés de l’OFSP sur les finances des caisses ne sont pas une solution. C’est le propre de la
logique mercantile que de maximiser les profits, alors que l’on attend d’une assurance sociale un esprit
mutualiste solidaire. Les caisses auront toujours une longueur d’avance face aux zélés fonctionnaires chargés
des contrôles et aux valeureux politiciens chargés de multiplier les bases légales permettant ces nouvelles
régulations.
La proposition d’une caisse unique publique n’est pas non plus sans défaut. D’abord elle suscite des réactions
viscérales de la droite, qui augurent mal du compromis politique nécessaire pour sortir de l’ornière actuelle. Les
plus pragmatiques relèveront aussi que la logique bureaucratique de la fonction publique et sa soumission au
politique ne facilitent pas une gestion efficiente. Ce qui pourrait être gagné en transparence et en crédibilité
serait perdu en efficience économique.
Comment trouver alors une forme d’organisation institutionnelle assurant l’efficacité nécessaire à la maîtrise des