Un autre groupe-cible potentiel comprend les
patients qui sont déjà sur la liste pour une
transplantation et dont l’état se détériore
progressivement pendant le délai d’attente:
développement d’une hypertension pulmonaire
grave et progressive, détérioration grave de l’état
général (NYHA IV), insuffisance rénale progressi-
ve due à l’insuffisance cardiaque (problématique
cardio-rénale). Il est souvent difficile d’évaluer
l’opportunité d’un DAVG dans ce groupe de pa-
tients. Le DAVG reste un traitement agressif et
onéreux, tout de même encore associé à une
morbidité et à une mortalité très importantes.
Les facteurs déterminants pour la prise de dé-
cision sont la vitesse et la gravité de la détério-
ration de l’état du candidat à la transplantation,
le délai d’attente et le profil de risques pour les
complications du DAVG.
L’étude de Miller (1, 2) a démontré l’utilité d’une
stratégie qui consiste à utiliser le DAVG dans
l’attente d’une transplantation. Cette étude
concernait 133 patients sur liste d’attente pour
une transplantation cardiaque, âgés de 50 ans en
moyenne et présentant une insuffisance cardia-
que terminale avec dépendance aux inotropes.
La survie à 6 mois après la pose d’un DAVG était
de 75%, soit après transplantation soit encore
en traitement DAVG (le dispositif utilisé était
le HeartMate II, un DAVG non pulsatile à long
terme). Les principales complications relevées
pendant le traitement DAVG étaient les sui-
vantes: 31% des patients ont eu besoin d’une
nouvelle intervention chirurgicale du fait d’une
hémorragie postopératoire, 20% ont connu un
état septique, 8% ont fait un AVC et 14% ont
développé une infection au niveau de la «trans-
mission». La durée médiane du traitement DAVG
dans cette étude était de 120 jours.
Pour les patients motivés présentant une in-
suffisance cardiaque fortement invalidante
et réfractaire à la thérapie et qui ne sont pas
transplantables du fait de leur âge et d’une
comorbidité telle qu’une insuffisance rénale
ou une BPCO, l’actuelle génération de DAVG
semble devenir une option envisageable en
guise de «thérapie de destination». On peut
attendre une survie raisonnable avec une qualité
de vie relativement bonne pour des patients
bien sélectionnés.
Le gain en survie reste toutefois relativement
limité par les complications: dans la première
phase (postopératoire), la défaillance du ven-
tricule droit et les hémorragies postopératoi-
res, dans la phase ultérieure, les infections pour
lesquelles ressort l’incidence élevée, à plus long
terme également, d’un état septique, les infec-
tions au niveau de la transmission ainsi que, dans
une moindre mesure toutefois, les complications
emboliques vasculaires cérébrales et les compli-
cations mécaniques avec le DAVG ou les piles.
Les chiffres sur la survie et les complications avec
un DAVG en thérapie de destination provien-
nent principalement de la génération des DAVG
pulsatiles (3, 4). Aux Etats-Unis, seul le DAVG
pulsatile (HeartMate XVE) est approuvé pour une
utilisation en guise de thérapie de destination. La
survie à 1 et 2 ans avec ce type de DAVG dans
l’indication destination serait respectivement de
seulement 56 et 32%. Si ces chiffres ne sont pas
bons, ils sont bien meilleurs que ceux de la thé-
rapie de soutien maximale sans DAVG. On peut
attendre de la génération actuelle de DAVG
non pulsatiles qu’elle donnera de meilleurs
résultats (appareil plus petit, moins de com-
plications mécaniques). Toutefois, les résultats
de l’étude de Miller indiquent que ce nouveau
type de DAVG entraîne également un nombre
relativement important de complications. Dans
cette étude qui concernait au bout du compte
des patients jeunes sans comorbidité notable,
on a constaté sur 6 mois 25 décès sur un total
de 133 implantations de DAVG, compte tenu
du fait que 56 patients avaient entre-temps pu
être transplantés. Le groupe-cible pour l’indica-
tion de thérapie de destination comprendra des
patients nettement plus âgés et présentant une
comorbidité. Ces patients ne sont de ce fait plus
candidats pour une transplantation, mais leur
âge et leur comorbidité impliquent un risque
nettement plus élevé de complications asso-
ciées au DAVG. Bien entendu, tout ceci doit être
replacé dans le contexte de la situation sans
issue à laquelle le candidat au DAVG doit faire
face. En cas d’insuffisance cardiaque terminale
réfractaire à la thérapie, l’espérance de vie n’est
plus que de quelques mois et la qualité de vie est
inexistante (patients invalidés et dépendants qui
sont souvent devenus dépendants de l’hôpital et
auxquels, en dehors de l’option du DAVG, on ne
peut plus proposer qu’une approche palliative).
La génération actuelle de DAVG permet d’espérer
peut-être prolonger la survie de quelques mois
à quelques années, mais elle offre surtout une
nouvelle chance au patient de se remettre sur
pied pour améliorer quelque peu sa qualité de
vie pendant un certain temps. Enfin, cette stra-
tégie est également appliquée et communément
acceptée pour d’autres affections terminales
telles qu’une chimiothérapie complexe et oné-
reuse dans le traitement d’un cancer colorectal
métastasé.
Cette thérapie étant complexe et onéreuse, le
grand défi est de sélectionner les bons patients
et de veiller au développement de l’expertise
(pour la sélection, l’implantation et le suivi
post-implantation). Il est à cet égard essentiel
que les expériences acquises soient rapportées
correctement par le biais d’une base de données
centralisée. La France rembourse le HeartMate
II en thérapie de destination dans certains cas.
En Allemagne, l’utilisation du DAVG en thérapie
de destination est également possible. En Belgi-
que, les pouvoirs publics n’interviennent pour
l’instant pas dans cette indication, en dépit
de l’existence de bons arguments en faveur de
cette option, à condition qu’elle soit mise en
œuvre dans un cadre bien strict (centres sélec-
tionnés jouissant d’une expertise en transplan-
tation et en technologie des DAVG, éventuel
quota annuel).
L’expérience acquise nous permet de mettre
en avant les éléments suivants en matière de
sélection (5).
Il doit tout d’abord être question d’une insuffi-
sance cardiaque réellement terminale ne répon-
dant plus au traitement, où le patient demande
une solution alternative et où le patient et son
entourage montrent qu’ils comprennent bien
les possibilités et les limitations qu’offre la vie
avec un DAVG.
Dans les conditions ci-dessous, le DAVG n’est
plus une bonne option même chez les patients
motivés.
- Un risque chirurgical élevé pour l’implanta-
tion, du fait par exemple de thoracotomies
antérieures.
- Un patient âgé de plus de 70 ans, sauf s’il ne
présente aucune comorbidité significative et
Vaisseaux, Coeur, Poumons n Numéro Spécial n 2009
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En Belgique, les DAVG à long terme sont
remboursés uniquement en tant que
traitement de transition pour les candidats
à la transplantation.