« Les femmes doivent s`affirmer dans le métier », souhaite B. Bihr

« Les femmes doivent s’affirmer dans le métier »,
souhaite B. Bihr
08/04/2015
Les directrices juridiques restent
minoritaires, et le plafond de verre
demeure un obstacle à l'évolution des
carrières des femmes juristes
d'entreprise. Rencontre avec Béatrice
Bihr, directrice juridique du laboratoire
Téva Santé et présidente de la
commission "DJ au féminin" du Cercle
Montesquieu.
Au sein du Cercle Montesquieu, la commission
« DJ au Féminin » apporte une touche
différente aux débats de la profession. Sans
militantisme et avec une volonté d’ouverture.
Elle travaille à un meilleur « positionnement »
des femmes au sein des directions juridiques.
Pourquoi la commission DJ au féminin a-t-elle été créée ?
La commission est née en juillet 2013, du constat de certains membres qu’il n’y avait aucune
organisation regroupant des directrices juridiques, alors qu’il existe par des associations
d’avocates. Le Cercle Montesquieu qui rassemble 350 directeurs juridiques, dont 40 % de femmes,
paraissait légitime pour fonder une telle structure. La commission a été créée autour de trois grands
axes : la convivialité, le partage d’expérience et la prise de positions dans le débat public. L’an
dernier, par exemple, nous avons réalisé un classement des cabinets d’avocats au regard de la
parité. Les résultats sont édifiants : dans les 100 plus gros cabinets, si 60 % de l’effectif est féminin,
il n’y a que 20 % de femmes parmi les associés. Cette étude nous sert notamment à sensibiliser
nos prestataires, sachant que les membres du cercle privilégient les cabinets qui partagent leurs
valeurs.
Quelles sont vos principales actions ?
Aujourd’hui, la commission DJ au féminin rassemble 60 membres, qui se réunissent toutes les 6
semaines. Nous organisons des rencontres autour de sujets généraux comme le leadership au
féminin, le coaching, la participation des femmes dans les conseils d’administration. Nous avons
également un programme de mentoring où 30 de nos membres parrainent 30 étudiantes en droit
des affaires, issues par exemple de l’École de droit de Sciences Po, d’HEC ou d’Assas. A travers
des rencontres, des échanges, l’idée est d’ouvrir ces jeunes femmes au métier de juriste et à la
réalité de son exercice. Certaines étudiantes visitent ainsi l’entreprise de leur marraine, participent à
des réunions, etc.
De façon générale, que constatez-vous de la position des femmes dans le métier ?
Comme pour beaucoup de postes à responsabilités, les femmes restent minoritaires dans notre
profession, ce qui est d’autant plus vrai pour les entreprises du CAC 40. Il existe un plafond de
verre que beaucoup de femmes ne s’autorisent pas à percer, parce que dès leur plus jeune âge, les
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Propos recueillis par Olga Stancevic
filles sont moins encouragées à prendre des initiatives ou des risques. Le poids des traditions reste
fort dans notre société et la réussite féminine dépend aussi beaucoup des hommes et de leur
ouverture d’esprit. Une fois que l’on dit cela, il faut se garder des caricatures. Fondamentalement, je
ne crois pas qu’il y ait un management féminin ou masculin. Car l’engagement au sein de
l’entreprise, la prise de décision, la vision stratégique, sont des qualités aussi bien masculines que
féminines. Notre commission joue donc un rôle subtil de positionner les femmes dans la profession,
sans pour autant verser dans le féminisme outrancier ou le militantisme. Finalement, nous sommes
pour la parité et les hommes sont d’ailleurs régulièrement invités à nos événements, en tant
qu’auditeurs ou orateurs.
La France est-elle différente des autres pays à ce sujet ?
Nous avons peu de contacts avec des associations équivalentes à l’étranger, mais plutôt des
retours de la part de nos membres qui se sont expatriées. Et je peux vous dire que, contrairement à
une idée reçue, elles sont nombreuses. Les femmes sont très mobiles ! (sourires) Aux États-Unis,
par exemple, il existe des réseaux internes au sein des grandes entreprises, qui rassemblent les
femmes. C’est le cas, par exemple, chez GE ou chez Microsoft. Leur but est de faire progresser les
femmes dans l’entreprise grâce à l’entraide, aux conseils, bref, au réseau, que les salariées ne
pensent pas systématiquement à activer.
Quels sont vos projets ?
Nous organiserons en juin un événement sur le thème du don, en invitant les auteurs de l’ouvrage
« La révolution du don : le management repensé à la lumière de l’anthropologie » , Alain Caillé et
Jean-Edouard Grésy. L’idée étant de voir ce que le don peut apporter aux donateurs, comment
l’organiser, en n’excluant pas nous-mêmes d’organiser une collecte lors de cette manifestation pour
une cause à définir. Nous sommes là encore dans les valeurs de la commission qui sont l’ouverture
à l’autre et le partage.
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1. « La révolution du don : le management repensé à la lumière de l’anthropologie », Alain Caillé et Jean-Edouard Grésy, Editions du Seuil, septembre 2014.
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