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3-En  1872,  Jhering  affirme  que  le  droit  est  régi  par  la  lutte.  La  loi  n’est  rien  d’autre  qu’une 
proposition.  Qui  est  destinataire  de  la  loi ?  Les  juges,  les  magistrats.  Au  centre  des  systèmes 
juridiques  ne  se  trouve  ni  le  peuple,  ni  les  parties  mais  le  juge.  Le  droit  n’est  pas  une  affaire 
d’intérêts, c’est une affaire de sentiments. L’énigme juridique de tous temps est que les juges ne 
prennent jamais la même décision pour un cas similaire.  
Kohler parle de Shakespeare et de son ouvrage Le marchand de Venise. Au XVème siècle, Shylock, 
un juif, prête de l’argent et exige une sûreté (s’il ne paie pas il doit prélever un livre de la chair, 
puis du cœur, d’Antonio). Antonio ne peut pas payer sa dette. Le Doge, à la Cour, fait appel à un 
expert juridique qui confirme la possibilité de prélever la livre de chair. Par contre, s’il est versé 
une  goutte  de  sang,  le  juif  est  considéré  comme  un  assassin  potentiel  (tentative  de  meurtre). 
Jhering affirme que ce conte est horrible en ce qu’il rend compte de l’interprétation littérale de la 
loi. Or Kohler soutient que cette assertion de Jehring est erronée : il ne voit pas que l’évolution 
du droit va vers davantage d’humanité.  
 Robert Jacob : Le prétendu « droit germanique » 
La  tradition  juridique  allemande  est  marquée par la  valorisation  du  peuple allemand  entendu 
comme ethnie. Ce « génie ethnique » correspond aux trois volets de l’œuvre des frères Grimm : la 
langue,  le  droit  (non  textuel)  et  le  mythe.  Leurs  contes  pour  enfants  constituaient  une 
ethnographie du peuple allemand. 
Pour les juristes allemands du XIXème siècle , le droit évolue en trois étapes : 1-La coutume, 2-La 
législation (produit d’une autorité politique qui ne peut pas bien comprendre l’âme du peuple), 
3-La science (il s’agit de reconstituer un droit primordial pour en faire un droit positif moderne). 
Le juriste est un organe du peuple habilité à créer la norme, c’est la science qui crée sa légitimité. 
Les juristes vont alors créer une sorte de mythe historiographique. Ce qu’il y a de faux dans le 
postulat de départ, c’est l’identité entre le droit et la langue, or le droit germain n’existe pas au 
Moyen-âge,  il  est  essentiellement  issu  du  droit  romain.  Pourtant,  pour  les  juristes  comme 
Savigny  l’existence  d’un  prétendu    droit  germanique  va  permettre  de  forger  le  mythe  d’un 
peuple allemand luttant contre les influences étrangères, notamment via le droit. . Le défi posé 
aux savants allemands est de dépoussiérer les textes juridiques. Une des caractéristiques de la 
pensée juridique allemande est qu’il y a  un ensemble de  maillons qui s’enchaînent, des contes 
des frères Grimm au nazisme.  
Agnès Antoine : Le droit maternel de Bachofen 
Le droit maternel est le titre, en 1861, d’un ouvrage de Bachofen. C’est un auteur au mieux cité, 
rarement  lu.  Nietzsche  notamment  a  été  influencé  pour  son  ouvrage  sur  la  tragédie.  Engels  a 
comparé son ouvrage au Capital ou à L’origine des espèces. 
Bachofen  a  tenté  d’explorer  un  nouveau  continent,  le  droit  maternel.  Bachofen  est  un  juriste 
suisse originaire de Bâle. Il s’intéresse à l’antiquité et plus particulièrement au droit de la famille. 
Son  voyage  en  Italie  va  l’inciter  à  s’intéresser  de plus  en  plus  aux  mythes.  Selon  lui  il  faut  se 
laisser  saisir  par  l’histoire  plutôt  que  l’enfermer  dans  des  concepts.  Dans  quelle  mesure  les 
mythes ont valeur de vérité ? Bachofen va généraliser le schème de la civilisation primitive qui 
est  selon  lui  gynécocratique.  Il  repère  ce  droit  dans  des  sources  comme  le  droit  de  la  famille 
(lignage avec la mère, attachement à une conception de la terre comme « matrie » (opposée à la 
patrie),…