Jacques CAMUS - Conseiller Pédagogique en Education Musicale de l’Orne -
certains diront que des enfants très jeunes sont capables de reproduire des formules parfois même
difficiles… Et il est aussi utile de le faire à condition qu’on ne perde pas de vue que l’objectif final,
c’est qu’ils arrivent un jour à synchroniser ces formules avec une pulsation commune au groupe !
Selon le critère défini plus haut, on ne peut pas dire que ces enfants auront acquis le sens du rythme
s’ils n’ont pas encore acquis cette compétence transversale qui consiste à superposer un rythme à
une pulsation, pourtant si essentiel dans n’importe quel type de pratique instrumentale !
Progression possible (généralités) :
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Dans un premier temps, profitons de toutes les occasions qui nous sont données pour repérer, trouver,
frapper la pulsation moyenne (d’abord dans la vie courante - horloge, cœur, etc… - puis en musique -
comptines, chansons, jeux dansés...) Des études médicales prouvent que la position la plus naturelle
pour les petits c’est : assis sur une chaise, en frappant avec les deux mains sur ses genoux
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Ensuite, on apprendra à marcher sur place, à se balancer d’un pied sur l’autre en suivant la pulsation
(plus délicat)…
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Les danses et jeux dansés seront un excellent moyen de sensibilisation à la pulsation, surtout les dan-
ses traditionnelles à condition que la pulsation soit vraiment respectée et que les enfants cherchent à
s’accorder avec elle ; au début il n’y aura pas accord parfait des pas avec la pulsation, mais la persévé-
rance portera ses fruits un jour ; ne pas se décourager ! Se méfier donc, si l’objectif pédagogique est de
travailler sur l’acquisition de cette compétence, de certaines chorégraphies ou évolutions dites
« contemporaines » dans lesquelles on demande aux enfants surtout de jouer avec toutes les parties de
son corps, d’explorer l’espace, etc... sans rechercher vraiment la synchronisation parfaite des évolutions
avec la pulsation... Tout cela est utile mais ne sert à rien pour l’acquisition du sens rythmique !
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Ensuite au cycle 2 (G.S ou C.P par exemple) on travaillera les autres pulsations (double et moitié de la
moyenne). D’abord indépendamment de la pulsation moyenne, puis en rapport avec elle, en passant de
l’une à l’autre…. Pour ce faire, on utilisera la technique de la « pulsation parlée » sur une carrure de
quatre temps : tout en frappant la pulsation moyenne (1 2 3 4) on énonce à voix haute la pulsation rapide
(1 et 2 et 3 et 4 et) puis une fois bien installée, on frappe tout ce qu’on dit (= 8 frappés) ; on revient en-
suite à la pulsation moyenne en ne frappant cette fois-ci que les chiffres et en ne frappant rien sur les
« et »; puis pour passer à la « demie-pulsation », on ne frappe plus que le 1 et le 3, tandis que sur le 2 et
le 4, on fait un mouvement « dans le vide » (absolument indispensable avec les plus jeunes)
Exemple sur une « carrure » de 4 :
Moitié de la moyenne 1 . 3 . (= 2 frappés)
Pulsation moyenne 1 2 3 4 (= 4 frappés)
Double de la moyenne 1 et 2 et 3 et 4 et (= 8 frappés)
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En inscrivant le schéma précédent au tableau, les enfants se rendront vite compte que certains frappés
« tombent » verticalement en même temps et que cette concordance est à la base de tout...
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Lorsque tout cela est bien acquis et maîtrisé par tout le monde, on peut donc commencer à mettre en
place de petites polyrythmies en utilisant les 3 pulsations et en distribuant les rôles à des instruments
de famille différente (peau, bois, métal par exemple), mais là aussi nécessité d’une progression :
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Maître : pulsation frappée + enfants : chant ou parlé-rythmé en accord avec la pulsation du Maître
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2 groupes d’élèves ( groupe 1: pulsation moyenne + groupe 2 : pulsation double ou demie)
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En cycle 3 : aller vers la maîtrise de la synchronisation individuelle rythme + pulsation
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Il ressort donc de ce que l’on vient de dire qu’il ne faut pas attendre le CM pour travailler sur la polyryth-
mie... Mais comment faire avec des G.S qui n’ont pas encore acquis la pulsation ? Si l’on ne peut pas en-
core confier la pulsation à un petit groupe, c’est l’enseignant ou un métronome qui manifestera la pulsa-
tion. Ainsi, lorsqu’ils répéteront leur petite formule rythmique, la pulsation sera auditivement présente
dans la classe et les enfants devront faire un effort pour centrer leur attention sur ce qu’ils sont en train
de jouer sans être gênés déjà par cette pulsation qu’ils entendent...
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La « porte étroite » (accès à « l’initiation »), ce sera ensuite la capacité à synchroniser tout simplement la
formule « deux croches/noire » (Ex : « Prom’nons-nous» dans les bois...) avec une pulsation. Lorsque
cela est acquis, toutes les difficultés sont permises...!
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Ce n’est qu’au CM qu’on pourra prétendre aborder la « polyrythmie individuelle » qui exige que l’enfant
soit capable maintenant de synchroniser seul (avec 2 groupes musculaires différents) formule et pulsa-
tion (par exemple : marquage de la pulsation aux pieds + formules rythmiques en frappés de mains) ...
Bien sûr, nous sommes loin d’avoir épuisé la question de la pulsation, il y aurait encore
beaucoup de choses à dire, de conseils à donner… Ces quelques mots étaient destinés à évi-
ter les erreurs pédagogiques les plus grossières, à donner un point de vue d’ensemble sur la
question et à fournir quelques pistes pour démarrer le travail.