14-Biblio-juillet-2015_Mise en page 1 23/06/15 10:31 Page144 Bibliothèque Julia Cagé Sauver les médias. Capitalisme, financement participatif et démocratie « démarchandisation » (limiter les besoins monétaires, s’appuyer sur le domaine public, développer la démocratie participative et la gouvernance des communs…). Cette alternative, le collectif OuiShare la défend depuis 2012. Société collaborative ne se veut pas un manifeste idéologique mais se concentre sur des exemples précis, des questions liées au développement du modèle collaboratif. Optimiste, le texte ne cède pourtant pas à toutes les sirènes de l’utopie, mettant en avant le risque de précarisation des travailleurs et la nécessité de contrer la fragmentation du marché du travail par la mise en place de structures syndicales solides. Comme Bernard Perret, Flore Berlingen, qui signe la dernière partie du livre, n’oublie pas l’État dans le modèle à venir : Paris, Le Seuil, coll. « La République des idées », 2015, 115 p., 11,80 € La presse d’information politique et générale va mal, très mal. Le numérique a amplifié l’effet des facteurs structurels de crise : désaffection du lectorat, baisse des ventes et croissance des coûts. Le livre de Julia Cagé rappelle les éléments d’un désastre annoncé : concurrence accrue pour les revenus issus de la publicité, dont le prix baisse inexorablement, moindre appétit des lecteurs pour une presse payante de qualité. Les journaux répondent à la baisse des revenus par la réduction des charges, qui entraîne une nouvelle dégradation de la qualité. Celleci accentue à son tour le déclin du lectorat, engendrant une spirale infernale à laquelle le numérique donne un coup d’accélérateur qui peut être mortel : sur l’internet, où des milliards de pages sont en concurrence, le prix de la publicité s’effondre et le consentement à payer s’avère faible et même inexistant pour certains lecteurs. Côté demande, l’auteure montre, données à l’appui, que la lecture est considérablement plus courte et hachée en mode numérique. Peutêtre sous-estime-t-elle une dérive de la demande qui ne saurait relever uniquement des évolutions de l’offre et qui se traduit par deux tendances : demande de spécialisation accrue et demande d’infotainment. Du côté de l’offre, Julia Cagé relève à juste titre le déclin du Le rôle du politique reste donc incontournable et complémentaire à celui des initiatives évoquées […] : quelle meilleure place que celle du terrain, de l’action, de la construction de solutions pour repérer les enjeux à porter au débat politique ? (p. 100). Bien sûr, tout n’est pas parfait dans les modèles dessinés ; mais à l’heure où nous sommes entourés de nostalgiques et de pessimistes, on ne peut que se réjouir que des intellectuels et des citoyens se mettent à l’œuvre pour penser et mettre en place de nouvelles solutions. Alice Béja 144