Avis de recherche : Égalité et justice dans les familles musulmanes
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le consensus (ijma’), Layth faisait référence au raisonnement (ijtihad) et à
l’opinion personnelle (ra’y) comme outils juridiques.
L’imam Shafi’i (m. 820), fondateur de l’école Shafi’i, a également traité
de ces différences, principalement en termes d’emplacement géographique,
avec une référence particulière pour l’Irak, Médine et la Syrie. Dans son vaste
ouvrage al-Umm, il parle de son désaccord avec les juristes de ces régions.
Shafi’i proposait que le consensus des érudits et la Sunna du prophète soient
les critères qui permettent de juger de l’authenticité de l’ikhtilaf, plutôt que
l’opinion générale locale sur laquelle insistait Malik. Dans son traité al-Risala,
écrit à la demande du calife Mahdi, Shafi’i plaidait pour que le désaccord entre
les juristes soit réglementé sur base de la Sunna et de l’ijma. Contrairement
à Ibn Muqaffa, qui proposait que le calife réglemente le désaccord, Shafi’i
considérait que la communauté d’érudits était plus compétente pour cette
tâche. Shafi’i réclamait une réglementation de l’ikhtilaf, mais il le considérait
aussi comme un phénomène juridique important, ce que l’on peut observer
à travers toute l’histoire du droit islamique.
Dans son ouvrage sur l’histoire de la législation islamique6 le cheik
Muhammad al-Khudri (m. 1927) décrit la manière dont l’ikhtilaf a constitué
l’une des caractéristiques dominantes du fiqh à travers son histoire, qui
remonte à l’époque des compagnons du prophète Mahomet, c’est-à-dire
la période 11-40 AH / 633-660 ap. J.-C. Il existe plusieurs exemples de
divergences d’opinions entre les compagnons sur divers sujets religieux.
La plupart de ces divergences concernaient des cas où le Coran et la
Sunna n’offraient pas de consignes précises. Mais il y avait également
des différences dans les interprétations des préceptes coraniques. Dès
que l’empire musulman a commencé à s’étendre, les compagnons ont
commencé à voyager dans des régions diverses du califat. Al-Khudri
parle de sept grands centres où le fiqh a commencé à se développer en
plusieurs traditions juridiques locales autour de ces compagnons. Il divise le
développement du fiqh du septième au vingtième siècle en six périodes, en
expliquant la primauté de l’ikhtilaf à chacune de ces périodes.