Région DIMANCHE 9 MARS 2014 42 Santé La « boîte à outils » d’un psychiatre alsacien pour apprendre à méditer Le succès du diplôme Méditation à la fac de médecine de Strasbourg Depuis sa création en 2012, les candidats français et étrangers se bousculent pour suivre l’enseignement autour de la méditation à la faculté de médecine de Strasbourg, unique en France. « Nous en sommes à la deuxième promotion d’une soixantaine d’étudiants, explique le Dr JeanGérard Bloch, rhumatologue et créateur du diplôme d’université Médecine, méditation et neurosciences, à la faculté de médecine de Strasbourg. De 200 candidats la première année, nous en sommes cette année à 450. Et ces demandes sont issues de toute la France mais aussi de pays étrangers, Suisse, Belgique, Angleterre, Brésil ou Canada. » Une réponse à un besoin d’intériorité La méditation peut se pratiquer partout, y compris devant les plus beaux paysages… que les thérapies familiales et en Richard Meyer, groupe. Il s’est ensuite intéressé un psychiatre aux nouvelles thérapies corporelqui travaille en Alsace, les, émotionnelles et transpervient de publier un livre sonnelles. pour apprendre Diminuer le stress à méditer à partir des douze principales De cette expérience, il a introduit psychothérapies qu’il les concepts de somatanalyse, de a intégrées dans une somatothérapie et somatologie. Ces concepts prennent en compsorte de boîte à outils te la personne dans sa globalité, adaptable et utilisable et considèrent le corps en interrede façon personnalisée. lation avec les autres dimensions Mulhousien d’origine, le Dr Richard Meyer a créé l’Association française pour une approche intégrative et éclectique de la psychothérapie (AFIEP). Et l’éclectisme, il connaît ! Car son parcours professionnel est jalonné par des expériences et une curiosité insatiable. Après trois ans passés dans une congrégation religieuse, il a étudié jusqu’au doctorat la sociologie et l’ethnologie à Paris-Sorbonne. Il a également fait des études de psychiatrie au CHU de Strasbourg, puis à Lausanne et à Dakar. En Suisse, il a complété sa formation avec les thérapies cognitivo-comportementales, ainsi de la personne : psychiques et émotionnelles. Il a ainsi créé l’EEPSSA (École européenne de psychothérapie socio- et somatoanalytique) qui forme des praticiens dans toute la France. Récemment, le psychiatre s’est penché sur la méditation, notamment à travers l’engouement suscité par la « pleine conscience », une thérapie occidentale basée sur trois méthodes, le yoga, le Zazen (issu de la tradition bouddhique) et Vipassana (une des plus anciennes techniques de méditation indienne), et développée par un Américain, Jon Kabat-Zinn, dans les années soixante-dix. « Cette méditation de la ’’pleine Santé mentale : colloque à Colmar, débat et portes ouvertes à Strasbourg Dans le cadre des semaines d’information sur la santé mentale, un colloque ouvert au public se tiendra jeudi 13 et vendredi 14 mars au Cref, 5, rue des Jardins à Colmar. Parmi les conférences au programme de jeudi, à 9 h 15 : les représentations sociales de la folie ; à 10 h : la folie, d’une pathologie sociale à une pathologie médiatique ; à 11 h : réinsertion professionnelle et handicap psychique ; à 14 h : l’éducation thérapeutique peut-elle enrichir le soin en psychiatrie ? à 14 h 45 : usagers-experts : la part du savoir des malades dans le système de santé ; à 15 h 30 : informations aux patients sur le web : info ou intox ? Vendredi ; 9 h : l’organisation de la psychiatrie citoyenne ; 9 h 45 : la folie face au public ; 10 h 45 : l’information du patient et de son entourage ; 11 h 30 : information sur les troubles du spectre de l’autisme tout au long de la vie ; 14 h : l’information : qui la sélectionne, qui la transmet ; 14 h 45 : les conseils locaux de santé mentale du Haut-Rhin. Entrée libre sur inscription (www.santementale68.fr). Dans le Bas-Rhin, le centre hospitalier d’Erstein organise un ciné-débat, mardi 18 mars à 18 h, salle de la Bourse à Strasbourg, sur le thème « Information et santé mentale. » D’autres centres hospitaliers ouvriront leurs portes ce même jour, de 14 h à 17 h 30, tels que les GEM Route Nouvelle Alsace, 37 avenue de Colmar à Strasbourg et Aube, 42 rue de la 1re-Armée à Strasbourg. Groupe de parole sur les tumeurs cérébrales à Colmar L’ARTC (Association pour la recherche sur les tumeurs cérébrales) Alsace propose des groupes de parole pour les familles de personnes atteintes d’une tumeur cérébrale. En tant qu’aidants, les personnes concernées peuvent avoir besoin d’être écoutées et de partager leurs expériences. Dans ce but, l’ARTC propose des rencontres mensuelles, le 2e mardi du mois – soit les 11 mars, 8 avril, 13 mai et 10 juin – de 17 h à 19 h, dans la salle de réunion au sous-sol du service de neurologie, dans le bâtiment 18 du centre hospitalier Louis-Pasteur à Colmar (accès par l’ascenseur en face du bureau des infirmières). FCONTACTER ARTC, tél. 03.89.77.40.55 ; courriel : [email protected] conscience’’ permet de diminuer le stress et de prévenir les rechutes dépressives, relève le psychiatre. Et les statistiques montrent que cela marche ! » À tel point que la « pleine conscience » est aujourd’hui utilisée dans beaucoup d’hôpitaux et que la faculté de médecine de Strasbourg propose un enseignement de cette méditation, au travers d’un diplôme universitaire (lire ci-contre). Richard Meyer estime néanmoins que la « pleine conscience » est une méditation limitée dans le temps. « La méditation change la personnalité. Il faut savoir accompagner ces changements. Beaucoup de gens, effrayés par ces changements, arrêtent la ’’pleine conscience’’ après deux ou trois mois. Ils ont amélioré leurs symptômes, stress ou dépression, et ne veulent pas aller plus loin. » Car pour lui, c’est après des mois de pratique qu’on a « la révélation d’une vie intérieure, qui donne accès à un processus de plus en plus riche, profond et authentique. » Il fait l’analogie avec la psychanalyse : « Il faut des années de divan. C’est la même chose avec la méditation, il faut des mois et des mois de pratique. » Archives Thierry Gachon Avec à la clé, selon lui, « une amélioration du stress, de l’angoisse ou de l’inadaptation aux autres et une augmentation du bien-être intérieur ». Dans son ouvrage, intitulé La pleine présence, il préconise un accompagnement sur des années « pour des gens qui veulent aller plus loin » en s’appuyant sur les douze principales psychothérapies corporelles et verbales pour apprendre à méditer. Se préparer à la mort Il propose trois étapes : un protocole de la pratique ; une « morale du bonheur, en se sensibilisant à ce qui rend heureux, à ce qui amène à du mieux et à ce qui, au contraire, tire en arrière ». Et un objectif recherché, « la sagesse de l’être », mais aussi une préparation à l’aboutissement de toute vie humaine, la mort, « qui est une entrée dans l’extase, un moment de pur vécu, sans conscience mentale », dont « nous devons accepter que nous ne saurons jamais rien ». G. D.-A. FLIRE La pleine Présence, une méditation basée sur les 12 principes psychothérapiques, de Richard Meyer, Guy Trédaniel éditeur, 23 €. Le médecin explique ce succès par une convergence de plusieurs facteurs. « Il y a d’abord la rencontre entre la sagesse de l’Orient et les sciences de l’Occident. Ensuite, des scientifiques de très haut niveau en neurosciences font cette expérience personnelle de la méditation. » Enfin, selon lui, la méditation répond à un besoin lié au mode de vie actuel. « Il y a une intuition collective d’un besoin de rééquilibrage face à une accélération et une cadence très rapide. Or, on a aussi besoin de calme, de lenteur, de silence et de vie intérieure. La méditation est une des réponses possibles à ce besoin. » L’enseignement strasbourgeois est unique en France, « et sans doute en Europe », précise encore le Dr Bloch. S’adressant à des professionnels, il propose un mélange équilibré entre la pratique, « qui occupe la moitié du temps », et l’apport théorique. « On aborde tout ce qui tourne autour de la méditation, de la conscience, du lien corps-esprit, par différentes entrées : la philosophie, les neurosciences, la psychologie, l’histoire de la pensée et de la médecine. Cette multidisciplinarité est très importante. » Aujourd’hui, les progrès de Le Dr Jean-Gérard Bloch, créateur du diplôme. Photo Dominique Gutekunst l’imagerie permettent de voir ce qui se passe dans le cerveau d’une personne qui médite. « Ceci permet de considérer comme réel et valide ce qui relevait d’une expérience intérieure », poursuit le rhumatologue. « Mais, prévient-il, il y a un risque réducteur de considérer que c’est le cerveau qui produit cette expérience intérieure. Il ne faut pas croire que parce qu’on voit ce qui se passe, on a tout compris ! On ne voit qu’une partie de ce qui se passe au niveau du cerveau lorsqu’on fait une expérience qui est de l’ordre de l’esprit. Et ce n’est pas parce qu’on a une carte du territoire qu’on connaît ce territoire. » Être bienveillant avec soi-même Lui-même, dans sa pratique, enseigne le programme de méditation qui dure huit semaines. « Son intérêt est de permettre à ceux qui le suivent de s’autonomiser et d’arriver à une médecine participative, expérimentielle et expérimentale. L’idée étant de développer une bienveillance et d’abord vers soi-même en s’autorisant à se consacrer du temps. Ce n’est ni égotiste ni égoïste, car pour bien s’occuper des autres, il faut savoir bien s’occuper de soi-même. » Geneviève Daune-Anglard FEN SAVOIR PLUS www.ifpcm.fr www.association-mindfulness.org