médicaments et chimio résistance en zone d`endémie

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UMR 216
Paludisme : médicaments et chimio
résistance en zone d’endémie
Jacques Le Bras
DIU Stratégies thérapeutiques
en pathologie infectieuse, 12 janvier 2012
1
Le paludisme à P. falciparum
Plasmodies
(Plasmodium falciparum)
Moustique
(Anopheles sp.)
• Monde
- 250 millions d’accès par an
1 million de morts
• France
- 4000 cas importés par an
16 morts
Homme
OMS 2008
2
Faire reculer le paludisme 1998-2010
- Réduire la morbidité et la mortalité :
→ intensifier l’accès et l’usage de la prévention
→ favoriser l’accès rapide à un traitement efficace
→ renforcer les systèmes de santé
→ soutenir les méthodes nouvelles d’un bon rapport
coût/efficacité
OMS
3
WHO Malaria report 2011
4
Fièvres, diag et traitt (OMS 2010)
5
Un diagnostic du paludisme de bonne
qualité devrait être ..
• Fiable
• Sûr
• Rapide
• Economique
• Accessible aux sujets à haut risque
• Lié à un traitement approprié efficace
Plasmodium falciparum
frottis mince et goutte épaisse
Cnrpalu
CNRP
Tests de diagnostic rapide (TDRs)
Cnrpalu
Microscopie et TDR selon les régions
Diagnostic (rapport OMS 2011)
10
Cycle et cibles de Plasmodium falciparum
SCHIZONTOCIDES préérythrocytaires
(et gamétocytocides) :
n = ~ 10
-inhibiteurs synthèses protéiques
(amino-8-quinoléines)
SCHIZONTOCIDES endoérythrocytaires
- lysosomotropes
(amino-4-quinoléines, amino-alcools, trioxanes)
- antimétabolites
(anti-foliques, anti-foliniques, anti-ubiquinone)
- inhibiteurs synthèses protéique
(cyclines)
XIXè siècle
mortalité du paludisme
- la moitié des soldats anglais stationnés
en Sierra Leone entre 1817 et 1836 ;
- 16% par an des soldats français
stationnés au Sénégal entre 1819 et
1838 ;
- guerre de sécession : l'armée de l'union
utilise 25 tonnes de quinine ;
- canal de Panama, guerres de Crimée,
guerres mondiales, d'Indochine, du
Viet-Nâm ...
CNRpalu
La quinine, premier médicament industriel
• 1826: 1,6 tonne de quinine extraites
d’écorce de Cinchona (usine Pelletier &
Caventou à Neuilly),
• 1856 : découverte de Cinchona ledgeriana,
• 1870 : plantation aux Indes,
• 1880 : plantation à Java, 90% de la quinine
• 1890 : le prix du kilo de quinine chute de
490 à 23 francs,
• 1930 : 10 000 tonnes d’écorces,
• 2002 : Amsterdam, monopole du marché
de la quinine.
CNRpalu
CH2
HO
N
H3C O
Quinine
QUININE
N
• Quinoléine-méthanol (v. 1630), administration IV rapide
dangereuse, demi-vie d'élimination 5 -18h ;
• cinchonisme = bourdonnements, hypoacousie, vertiges,
rapidement réversibles ;
• pas abortive ;
• lors de surdosage : hypotension, collapsus ;
• dose : 8mg/kg toutes les 8h pendant 5-7 jours en IV, IR,
IM (injection profonde dans la cuisse) ou per os ;
• hémoglobinurie (blackwater fever) si imunosensibilisation
• les chimiorésistances de P. falciparum sont peu
fréquentes (régions frontalières de la Thaïlande, Amazonie).
XXè siècle
CNRpalu
antipaludiques majeurs : 1940 -1945
• 1941→1944, USA : 17 000 composés :
– chloroquine (Résochin®), synthétisée en 1934 par suppression
d’une partie de l’hétérocycle de la quinacrine mais délaissée
pour toxicité par Bayer,
– une autre amino-4 quinoléine, l'amodiaquine (Flavoquine®),
– une amino-8 quinoléine, la primaquine ;
• 1945, Royaume Uni :
– pyriméthamine et proguanil (Paludrine®), également peu
coûteux.
CNRpalu
CH3
CH3
H
N
N
CH3
Chloroquine (Nivaquine®)
CHLOROQUINE
Cl
N
• Amino-4-quinoléine (1945) ; absorption très rapide, se concentre
dans les cellules, faible Vd :
concentrations transitoirement toxiques en IV ou IM, Cmax 1-8h,
demi-vie 2-3 j (demi-vie terminale 2 mois) ;
• peut entraîner une rétinopathie (> 75g par an),
parfois prurit très intense chez les sujets de race noire, troubles
digestifs, céphalées, vertiges, troubles visuels ; au-delà de 1g
(enfant) ou 4g (adulte) : hypotension artérielle, collapsus, arrêt
cardio-respiratoire ;
CNRpalu
chloroquine (2 )
• médicament de choix du traitement présomptif du paludisme en
zone d'endémie, du traitement curatif du paludisme à P.
falciparum contracté en Amérique Centrale et en Haïti et à P.
vivax, P. ovale, P. malariae contracté en toutes zones : 25 mg/kg en
3 jours ;
• en chimioprophylaxie, en l'associant avec le proguanil dans les
régions où des souches chloroquino-résistantes sont présentes
mais minoritaires ;
• chloroquino-R fréquente de P. falciparum, R de P. vivax observées
depuis 1989 en Asie.
CNRpalu
Cl
H
H
H
N
N
N
NH
•
NH
CH3
CH3
proguanil (Paludrine®)
biguanide de synthèse (1948) ; absorption
lente, complète, Cmax 3-6 h, biotransformation hépatique partielle
en cycloguanil (30%) qui est la forme active, variable selon les sujets
: les "métaboliseurs lents" risquent parfois un échec prophylactique,
demi-vie 8-24 h ;
PROGUANIL
• la cyclisation forme une molécule proche de la pyriméthamine :
résistance croisée ;
• le mieux toléré des antipaludiques, sans contre-indication, aphtose
buccale parfois ;
• chimioprophylaxie : 3 mg/kg/j (n'est plus utilisé en thérapeutique)
plus 1,5 mg/kg/j (Savarine®)
• analogue : chlorproguanil (Lapudrine®).
CNRpalu
H2N
N
Cl
N H2
N
pyriméthamine (Daraprim®)
H2C
•
C H3
diamino-pyrimidine de synthèse (1951) ;
absorption complète, Cmax en 2-6 h, Vd élevé avec
stockage tissulaire : demi-vie 4j ;
P Y R IM E T H A M IN E
• antifolinique inhibant la dihydrofolate réductase (DHFR), active sur
les stades préérythrocytaires et la gamogonie de l'Anophèle ;
• action lente, n'est plus prescrite en prophylaxie, est associée à un
sulfamide pour le traitement ;
• la résistance se sélectionne rapidement, est fréquente, en Asie du
Sud-Est et en Amérique du Sud, moindre en Afrique (30 à 50%);
• anémie mégaloblastique transitoire à haute dose, agranulocytose
(rare) ;
CNRpalu
Eradication 1943 - 1970
- DDT :
→ applications murales, USA (1943) ;
→ réussites : Italie, Corse, Grèce (1960) ;
→ quasi réussites : Vénézuela, Indes (1965)
résistance des anophèles : Grèce 1953.
- Programme global d ’éradication (1955) :
→ autres insecticides (malathion, propoxur…),
→ Antipaludiques (chloroquine, amodiaquine, proguanil,
pyriméthamine),
→ Afrique, région hors éradiction.
(Bruce-Chwatt, 1956, Bull OMS 15: 852)
CNRpalu
Désarroi et réajustement 1970 - 2000
- 1968
→
reconnaissance échec éradication ;
- 1973
→ redéfinition des objectifs : supprimer la mortalité, diminuer
la morbidité ;
- 1983
→ Alma Ata, intégration dans les soins de santé primaires ;
→ moustiquaires imprégnées, lutte intégrée (verbale) ;
→ chimiorésistances (SP, méfloquine), réduction de la
chimioprophylaxie.
CNRpalu
24
Chimiorésistance : définition
• Capacité d’une souche d ’agent pathogène
à se multiplier ou à survivre en présence de concentrations
d’un médicament qui détruit normalement les parasites de la
même espèce ou prévient leur multiplication.
• Résistance de P falciparum aux antipaludiques : toute fièvre
après 72h de traitement avec une persistance de la même
souche de P. falciparum que la souche initiale.
CNRpalu
Pourquoi le paludisme (à falciparum)
est chimiorésistant ?
• Production de la chimio-resistance : mutation(s),
• Usage massif des antipaludiques : 2 x 109 cp de
chloroquine en 1978 en Afrique,
• Le profil pharmacocinétique individuel d ’un
médicament contribue à la sélection des
parasites résistants (MQ > QU)
mefloquine.
quinine
artemisinin
26
chloroquine
pyrimethamine
CNRpalu
Racines de la Résistance
Facteurs influençant la progression de la résistance
– Immunité
– Choix des traitements
•Demi vie des molécules
– Qualité du traitement
– Couverture de traitement
– Rôle des migrants dans la diffusion de la résistance de p.
falciparum d’Asie en Afrique
Anderson Acta Trop. 2005
Voies des Pyrimidines des Plasmodium humains
atovaquone
CO2 + aspartate
dihydroorotate
ubiquinone H2
cytochrome
ubiquinone
cytochrome H2
1/2 O2
DHOD
orotate
UDP
pABA
H2O
dUTP
GTP
dUDP
pteridine
dUMP
dTMP
TS
ADN
DHPS
dihydropteroate
DHF
N5,N10-CH3THF
sulfadoxine
pyriméthamine, cycloguanil
THF
DHFR
28
CNRPalu
Accumulation de CQ, inhibition de la digestion de l’hémoglobine
plasma
pH 7,4 CQ = 1
cytosol
érythrocytaire
noyau
76t
Pfcrt k76
vacuole
digestive
pH 5,2 CQ
CQ
+ CQH+ = 600
pH 7,2
CQ
CQ
+ CQH+ = 20
cytoplasme
parasitaire
29
Pfcrt muté détermine
la CQ-R
pH 6,8
CQ + CQH+ = 5
Cnrcp
marqueurs génétiques opérationnels de la
résistance de P. falciparum
pyriméthamine ou cycloguanil :
S → N au niveau codon 108 + C → R au codon 59 + N → I au codon 51)
de la dhfr (S108N + C59R + N51I) ;
pyriméthamine-sulfadoxine :
5 mutations présentes dans 70% des échecs cliniques à SP (dhfr : S108N
+ C59R + N51I et dhps A437G + K540E) ;
chloroquine :
K → T au codon 76 de crt (nécessaire mais pas suffisant) ;
atovaquone :
Y → S, N, C au codon 268 du cytb.
CNRpalu
Propagation de la chimiorésistance
aux antipaludiques
1959
1978
1. Origines rares
(1 à 3 SNPs)
2. Migrations
1978
1980?
adapté de Ridley, 2002
3. Sélection intense
4. Transmission
Nair, 2003
Mortalité du paludisme
& chloroquino-résistance
Taux de mortalité attribuable au paludisme à Mlomp, Sénégal
6
Mortalité du
paludisme (pour
mille par an)
0-4 ans
4
5-9 ans
2
0
1985-89
1990-92
1993-95
L’émergence de la chloroquino-R dans une zone sous chimioprophylaxie de masse a un impact démontré sur la mortalité
attribuable au paludisme
32
(Trape et al., 1998)
Utilisation des antipaludiques à Dielmo, Sénégal,
1990 - 1999
Quinimax (x 50 g)
3
Monthly anti-malarial
malarial intake
Chloroquine (x 20 g)
Sulfadoxine (x 5g) + Pyrimethamine (x0,25g)
2,5
2
1,5
1
0,5
0
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
Noranate PLoS One 2007
Proportions de mutants pyriméthamine-R et
chloroquine-R à Dielmo, Sénégal, 1990 - 1999
70
60
50
40
30
20
10
0
90
%S108N (pyrim(pyrim-R)
%S108N
%K76T (CQ(CQ-R)
91
92
93
Traitement
quinine
94
95
96
97
98
99
Traitement chloroquine puis
sdx-pyriméthamine
Noranate PLoS One 2007
Retour de l’efficacité de la chloroquine au Malawi
Laufer, NEJM, 2006
Retour de la sensibilité à la chloroquine de P.
falciparum en Côte d’Ivoire, 2008-10 (n=772)
10000
1000
100
10
R2 = 0,8544
1
CI 1984-86
CI 1987-89
CI 1990-92
CI 1993-95
CI 1996-98
CI 1999-02
CI 2003-05
Valeurs de CI50
CI 2006
CI 2007
CI 2008
CI 2009
CI 2010
Fitness (potentiel reproducteur)
• Utiliser des antipaludiques qui forcent
Plasmodium à accumuler 2 mutations ou plus
pour survivre pourrait restreindre le
développement de la résistance.
• Lorsque diminue la pression médicamenteuse,
les souches mutantes régressent et les
souches sauvages redeviennent majoritaires.
Mutations de la DHFR de P. falciparum,
performances de l’enzyme et résistances
Mutation
Cinétique
(Kcat/Km)
Kinhib (nM)
pyrim. cyclog.
sauvage
6,8
1,5
2,6
S108N
3,7
13
15
S108N + C59R
0,18
72
82
S108N + C59R + I164L
0,17
383
1141
Sirawaraporn, 1997
Capacité de multiplication (fitness) des mutants DHFR
39
(Fohl & Roos, Molec Microbial, 2003)
OH
CH3
H
N
N
CH3
amodiaquine (Camoquin®)
AMODIAQUINE
Cl
N
• Amino-4 quinoléine (1947) ; 30 à 35 mg/kg en
3 à 5 jours per os ;
• active par son métabolite, la monodeséthyl-amodiaquine ;
• résistance croisée in vitro avec la chloroquine ;
• reste souvent cliniquement efficace quand la chloroquine ne l’est
plus ;
• agranulocytoses ou hépatites cytolytiques, parfois mortelles, lors
de la prise prolongée : ne doit pas être utilisée en
chimioprophylaxie.
CNRpalu
sulfadoxine - pyriméthamine
(Fansidar®)
• Anti-folates (1965) ; demi-vie de 4 jours (P) et 5-8 jours (S), les
sujets "acétyleurs rapides" élimineront rapidement la molécule
(cause d’échec) ;
• pas antipyrétique, action lente, résistance fréquente de P.vivax et
P.ovale ; risque d’agranulocytose, d’épidermolyse grave (< 0,02%) ;
• P : la résistance se sélectionne rapidement, est fréquente;
• dose unique de 1 et 20 mg/kg de P et S, respectivement, en IM ou 1
cp/20 kg per os ;
• altèrent la gamogonie chez l'Anophèle, ce qui diminue la
transmission.
CNRpalu
nouveaux antipaludiques de synthèse:
1950-1985
• 1950 →1970, extension des résistances à la
pyriméthamine, même associée à un sulfamide, et au
proguanil puis à la chloroquine ;
• 1965, Viêt-nam : 1%/jour de soldats sous chloroquine +
primaquine indisponibles ;
• 1965 →1985, criblage de 350 000 molécules :
méfloquine (Lariam®) et halofantrine (Halfan®) ;
• 1970, Artemisia annua (qinghaosu);
• 1996, résistance à la méfloquine en Thaïlande.
CNRpalu
N
HO
Méfloquine
N
®
(Lariam )
CF3
CF3
•MEFLOQUINE
quinoléine-méthanol (1972) : élimination lente
et variable, demi-vie de 6 à 41 jours ;
• traitement : 25 mg/kg en 2-3 prises orales à 8h d'intervalle,
chimioprophylaxie: 3 mg/kg/semaine ;
• complications neuro-psychiatriques dans 1/200 à 1/1700
traitements curatifs ;
• contre-indiquée dans les affections psychiatriques ou
neurologiques ;
• chimiorésistances de P. falciparum peu fréquentes sauf dans les
régions frontalières de la Thaïlande.
CNRpalu
halofantrine (Halfan ®)
•
9-phénanthrène-méthanol (1976) peu soluble ;
• absorption orale très variable selon les sujets (moy. 36%) : rechutes
tardives (1 à 3 sem.) liées à une absorption insuffisante ; une
seconde cure expose à un risque majoré d’allongement du QTc, Cmax
9 -17 h, demi-vie 14 -80h ;
• transformée dans l'organisme en métabolite débutylé actif, de
demi-vie 103 h en moyenne ;
•
même spectre d'activité que la méfloquine, chimiorésistances de P.
falciparum peu fréquentes (résistance croisée avec la méfloquine) ;
• allongement QTc fréquent, sans conséquences sauf chez des sujets
ayant des anomalies cardiaques.
CNRpalu
Cl
Atovaquone (Malarone®)
O
OH
O
•
Hydroxynaphthoquinone (1982), large
spectre antiprotozoaire;
• biodisponibilité 22%, clairance plus lente dans les
populations africaines (t1/2 73h) que dans les populations
asiatiques (t1/2 31h), action schizonticide lente (TDP 60h) ;
• potentialisation avec le proguanil (indépendamment de
l’action de son métabolite) ;
• association atovaquone-proguanil en traitement (1g + 400
mg/jx3) ou prophylaxie (250 mg + 100 mg/j) (Malarone®).
• Non utilisée en zone d’endémie
(prix,
45 émergence aisée de résistance)
Cnrp
Atovaquone - proguanil (AP)
Mise sur le marché
Malarone® Adulte (250 mg / 100 mg) :
- traitement curatif de l’accès palustre simple à P. falciparum chez l’adulte et
l’enfant de plus de 40 Kg. AMM France : 28 août 1997, commercialisation : 5
juillet 1999
- extension d’indication le 14 août 2001 à la « prophylaxie du paludisme à P.
falciparum chez l’adulte et l’enfant de 40 kg et plus », lancement en octobre
2001.
Malarone® Enfant (62,5 mg / 25 mg) :
- prophylaxie du paludisme à Plasmodium falciparum chez les enfants de 11 à 40 Kg
AMM : 16 juin 2003, commercialisation : 17 juin 2003
- extension d’indication le 30 juin 2008 au traitement
- chez les sujets de 5-11kg pour la présentation Malarone® Enfant,
- chez les sujets de 11-40kg pour la présentation Malarone®
Atovaquone - proguanil (AP)
Place dans le traitement des accès palustres
- Indications :
. prophylaxie du paludisme à P. falciparum
. traitement des accès palustres non compliqués à P. falciparum
France
- Traitement cher (52€)
- Non utilisé en zone d’endémie
Malarone®
Méfloquine
47
Atovaquone - proguanil (AP)
Mécanismes d’action et de résistance
● Atovaquone :
. analogue de l’ubiquinone;
. inhibition de la chaîne de transfert des électrons au niveau du
cytochrome b.
● Proguanil :
. potentialise l’action de l’atovaquone au niveau du potentiel de
membrane mitochondrial;
. cible propre non identifiée;
. métabolisé en cycloguanil, inhibiteur de la DHFR parasitaire.
● Résistance parasitaire : SNP cytb268 (Y268C, Y268S, Y268N?)
● Caractéristique du gène cytb :
. génome mitochondrial (6 kb);
. plusieurs copies mais 1 seule mitochondrie par parasite.
48
Ex-vivo atovaquone IC50 of P. falciparum
isolates imported in metropolitan France,1997-2010
pre-marketing n=107
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
1000
10000
100000
100
1000
10000
100000
100
1000
10000
100000
non-AP treatment n=887
lost to follow-up n=340
R
adequate clin. par. resp. n=118
0,1
1
10
100
I
late clinical failure (D0) n=8
0,1
1
10
S
late clinical failure (Dfail.) n=10
0,1
1
10
nM
Ex-vivo atovaquone IC50 of P. falciparum
isolates imported in metropolitan France,1997-2010
pre-marketing n=107
non-AP treatment n=887
PfcytB Y268 (wild) n=889
lost to follow-up n=340
PfcytB Y268 (wild) n=415
adequate clin. par. resp. n=118
PfcytB Y268 (wild) n=182
late clinical failure (D0) n=8
PfcytB Y268 (wild) n=12
late clinical failure (Dfail.) n=10
PfcytB 268S/C/N (mutant) n=25
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
0,1
1
10
100
1000
10000
100000
Resistance to atovaquone of P. falciparum
isolates imported in metropolitan France,1997-2010
1997-2010 Impact of phenotypic R AV-PG : 0.9%
(13/1398)
1997-2010 Impact of genotypic R AV-PG : 1.5%
(21/1408)
1997-2010 Impact of clinical R AV-PG : 0.6-3.4%
(28/4445 reported or 28/822 followed day28-44)
XXIè siècle
CNRpalu
Du qinghaosu à l ’artémisinine
CNRpalu
Du qinghaosu à l ’artémisinine
• 4ème siècle ap. JC : décoction de qinghaosu,
• 1970 : sesquiterpène lactones d ’Artemisia annua,
• 1980 : artémisinine en Chine ;
• 1990 : artésunate, artémether, antipaludiques de première intention
dans le SE asiatique ;
• 2000 : ACT, bithérapies contenant un dérivé de l’artémisinine,
recommandées dans tous les pays touchés par les chimiorésistances.
• 2010 : supériorité démontrée de l’artésunate IV sur la quinine IV.
CNRpalu
artemisinin
(=O) → DiHydroARTEMISININ (-OH)
→ ARTEMETHER (-OCH3) → ARTESUNATE (-O-succinyl)
• Artémisinine : absorption rapide mais incomplète par
voie orale ou IM (biodisponibilité 32%); clairance
rapide (t1/2 = 3-10h) ;
• artéméther IM, dosage : 1,5 mg/kg/j x 5
• artésunate IV, dosage : 2,4 mg/kg/j x 5 + h12
• dihydro-artémisinine : peu soluble, en association
• action rapide ;
• bien tolérée chez l’homme ;
• Pas de chimiorésistance démontrée.
CNRpalu
Méta analyse du rôle de 3J d’artésunate : parasitémie J28
Lancet, 2004
56
Artésunate IV vs. Quinine IV
Artesunate IV (IM) : 2,4 mg/kg H0, H12, H24
Dondorp, Lancet 2010
luméfantrine
• Benflumétol (1993). Pas absorbée chez le sujet à jeun
(t1/2 72-120h). La débutyl-luméfantrine, 5 à 8 fois plus
active que la molécule parente, est produite par la
CYP3A4 des microsomes hépatiques. La cinétique du
métabolite n’est pas connue ;
• action similaire à la méfloquine et l’halofantrine (TDP
54h) ;
• allongement de l’espace QTc, non dose dépendant ;
• association artémether-luméfantrine en traitement
80mg+480mg x2/j x 3 (Riamet®, Coartem®, 2000).
CNRpalu
Artéméther-Luméfantrine(A-L)
Riamet® ou Coartem® : cp à A=20mg + L=120mg
• Artéméther: dérivé liposoluble de l’artémisinine,
bonne biodisponibilité, t½ = 2h
Toxicité neurologique chez l’animal en IM, rien per os;
rien cliniquement chez l’homme.
Activité rapide dès le stade trophozoïte: TDP≈30h, et
bloque la formation des gamétocytes.
• Luméfantrine: Amino alcool apparenté à l’halofantrine;
biodisponibilité variable, t½ = 72-120h.
Toxicité cardiaque ? Non.
Activité schizonticide lente, TDP ≈ 54h
• Posologie adulte: 4 cp X 2/jour X 3 jours (6 prises en 3j)
CNRpalu
Les alternatives à la chloroquine, amodiaquine et
sulfadoxine-pyriméthamine sont 10 fois plus chères
Prix d’un traitement ((€)
Compexité croissante des traitements
Les prix diminueront si la demande augmente
CNRpalu
Critères pour le choix d ’un
antimalarique (dans l’ordre de priorité)
• 1- Mort rapide des parasites intraérythrocytaires.
• 2- Sécurité et absence de toxicité (bon index
thérapeutique).
• 3- Facilité d’administration (idéalement une forme orale
efficace en dose unique).
• 4- Faible coût.
• 5- Réfractaire au développement de résistance.
CNRpalu
Propriétés des molécules (1)
A: artemisine
P: pyrimethamine
M: mefloquine
Q: quinine
C: chloroquine
White NJ. (2004) JCI:113,8
− Plus la demi-vie d’une
molécule est longue
− Plus un parasite à une
probabilité d’être exposé
à des doses infra
thérapeutiques
• ↗ probabilité
d’émergence de
résistance
Propriétés des molécules (2)
• Justification du choix des ACTs
– Dérivés de l’artémisinine (½ vie courte, ↘ rapide de la
charge parasitaire, peu d’effets indésirables)
– Molécules partenaires (partner drug)
• Mefloquine, amodiaquine, lumefantrine, piperaquine…
– Principe des combinaisons (VIH, TB, cancers):
mutuelle protection contre les résistances
• Monothérapies
– Facilite l’émergence de résistance
– Molécule de ½ vie longue
CNRpalu
CT à base d’artémisinine
• Associations libres :
- artésunate + méfloquine (Mepha, Artequin®)
- artésunate + amodiaquine (Sanofi, Arsucam®)
- artésunate + sulfadoxine-pyriméthamine (Sanofi, Arsudar®)
- artésunate + sulfamethoxypyrazine-pyriméthamine (Dafra,
Coarinate®)
- artésunate + pyronaridine (MMV, Pyramax®)
- artésunate + atovaquone-proguanil
• Associations fixes :
- artéméther-luméfantrine (Riamet®, Coartem®)
- artésunate + amodiaquine (Coarsucam®, ASAQ®)
- dihydroartémisinine-pipéraquine (Duo-cotecxin®, Artekin®,
Eurartesim®)
64
CNRpalu
Antipaludiques développés à ce jour
Artesunate
Artemether
Mefloquine
Artesunateamodiaquine
Pyronaridine
Artemether
lumefantrin
Dh-artemisinine
piperaquine
Quinine
Chloroquine
Amodiaquine
Primaquine
Pamaquine
Mepacrine
Proguanil
Pyrimethamine
SulfadPyrimet
Artemisinin
Halofantrine
Atovaquoneproguanil
Cl-proguanildapsone
<1930
1930s
1940s
1950s
1960s
1970s
1980s
1990s
2000s
Non adoptés par les programmes de lutte antipaludique
Abandonnés à cause de la résistance
• Recours excessif aux médicaments des classes quinoline & antifolate : résistance (croisée)
• Médicaments mis sur le marché de façon séquencielle et sur-exploités
OMS, 2005
Stratégies de limitation de l’extension
des chimiorésistances:
• Diminuer la sélection des mutants résistants
• Comment ?
Limiter la pression médicamenteuse: en zone de
transmission intense ne traiter que les paludismes maladies
Éviter les monothérapies
Empêcher les traitements à dose insuffisante ou
incomplets
Éviter la persistance de concentration sanguine subinhibitrice
CNRpalu
Nécessité de la surveillance de la
résistance
• Surveiller quoi ? (résistances cliniques, de souche,
génétiques)
• Surveiller où ? (Pays, région, ville, quartier)
•Surveiller qui ? (malades ou porteurs, résidents ou
voyageurs)
•Surveiller quand ? (périodicité)
CNRpalu
Méthodes d’étude de la chimiorésistance
Tests in vivo
Dosages
Tests de culture in vitro
Tests moléculaires (PCR)
CNRpalu
Tests in vivo OMS 01 : interprétation
Echec thérapeutique précoce (ETP) : apparition d'un
paludisme grave à J1, 2 ou 3 + parasitémie ;
fièvre à J2 avec une parasitémie > à J0 ;
fièvre à J3 + parasitémie ;
parasitémie J3 = ou > 25% de J0.
Echec thérapeutique tardif (ETT) : paludisme grave +
parasitémie entre J4 et 28, sans ETP ;
fièvre + parasitémie entre J4 et 28 sans ETP.
Echec parasitologique tardif (EPT) : parasites sans fièvre
entre J4 et 28 sans ETP ni ECT
Réponse clinique et parasitologique adéquate (RCPA).
CNRpalu
globalatlas.who.int
70
marqueurs génétiques opérationnels de la
résistance de P. falciparum
pyriméthamine ou cycloguanil :
S → N au niveau codon 108 + C → R au codon 59 + N → I au codon 51)
de la dhfr (S108N + C59R + N51I) ;
pyriméthamine-sulfadoxine :
5 mutations présentes dans 70% des échecs cliniques à SP (dhfr : S108N
+ C59R + N51I et dhps A437G + K540E) ;
chloroquine :
K → T au codon 76 de crt (nécessaire mais pas suffisant) ;
atovaquone :
Y → S, N, C au codon 268 du cytb.
CNRpalu
Pharmacocinétique dans l ’évaluation
de la résistance
• Est-ce que l’échec est dû à une concentration
inadéquate du médicament?
• Population à risque d’échec:
–
–
–
–
Enfants de moins de 5 ans
Enfants malnutris
Femmes enceintes
Patients co-infectés par d’autres pathogènes
• Patients VIH+
Adoption et mise en place des ACT
Bosman & Mendis 2008
Que se passe t-il au Cambodge?
Site d’étude
Artemisinin-Resistant Plasmodium falciparum Malaria
, 7 days
, 3 days
, 7 days
, 3 days
MAS3 (4 mg artesunate/kg) ,
3 days
1000
100
10
1
AS7 (2 mg artesunate/kg),
0.1
0
2
4
6
8
7 days
10
12
PK levels
Time (hrs)
10000
DHA concentration (ng/mL)
®
DHA concentration (ng/mL)
10000
1000
100
10
1
0.1
0
2
4
6
8
10
12
Time (hrs)
Dondorp,
N Engl J Med 2009
Qualité des médicaments
• Médicaments contrefaits
– Investigation Asie du Sud Est
2007:
• 195 produits contrefaits sur 391
échantillons (Laos, Thaïlande, Myanmar,
Vietnam, Cambodge)
• Peu ou pas d’artesunate
– Beaucoup d’autres produits
potentiellement dangereux (produits
proscrits [metamizole, safrole,
ecstasy])
– Concentration de médicaments sous
optimale
Newton PlosMed 2008;5(2):e32
Médicaments en Afrique (1)
• Déréglementation économique en Afrique francophone
(crise, dévaluation du CFA), violations des
réglementations pharmaceutiques, prolifération de la
vente illicite des médicaments.
• 1) conséquences sur la qualité pharmaceutique des
produits:
- médicaments provenant de tous les continents dans le
secteur informel;
- la plupart sont de contrefaçon sans principe actif ou en
quantité insuffisante;
- la contrefaçon concerne surtout ceux à haute valeur
ajoutée (anti-retroviraux);
- le marché illicite des médicaments sert de support au
trafic des stupéfiants.
Médicaments en Afrique (2)
• 2) conséquences affectant la santé des
consommateurs:
- cas d’intoxications mortelles consécutives à la prise de
ces médicaments.
• 3) conséquences sur la mise en œuvre de la politique
sanitaire nationale:
- Si la qualité, l’efficacité et la sécurité ne sont pas
garanties, la confiance des malades est entamée;
- la facilité d’acquisition laisse croire que la fréquentation
des centres de santé n’est pas nécessaire.
Dr E M Samba, Directeur régional de l’OMS pour l’Afrique
Bilan de la surveillance des résistances du
palu importé en France 2010
• Peu d’échecs prophylactiques vrais
• La chimioprophylaxie, même inadéquate, limiterait le
risque de paludisme grave
• La résistance à la chloroquine commence à régresser
en Afrique de l’Ouest, ce qui expliquerait une baisse
de sensibilité à la méfloquine
• Pas de diminution d’efficacité des traitements :
– peu de résistance in vitro à la quinine ou à l’atovaquone
Antipaludiques en développement
• Tafénoquine (amino-8-quinoléine)
WRAIR, USA → GSK
• Ferroquine (chloroquine+ferrocène)
J. Brocard, Lille → SANOFI
• Trioxaquine (trioxane+chloroquine)
B. Meunier, Toulouse → SANOFI
• G25 (inhibiteur de la phosphatidylcholine)
H. Vial, Montpellier → SANOFI
• Fosmidomycine (inhibiteur de l’isoprénoïde)
H. Jomaa, Giessen, D → SANOFI
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