prouvé que les lessives
'Oates ne polluaient
pas"
n
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RHÔNE-POULENC
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La campagnepublicitaire de Quadrillagepour unc lessive
écologique
ct
celle d'Alice pourRhône-Poulenc, interdite parle
GSA
Rhône-Poulenc un Chat dans la gorge
o
Oui à la propreté », « Oui à l'environnement 0.
Européennes 89 : sur les affiches, non pas un
parti vert, juste un paquet de lessive. Le Chat
Machine L'offensive a été déclenchée deux
mois plus tôt, en février, avec pour cadre une
campagne paisible qu'il a fallu filmer au
Portugal, les arbres de l'Hexagone ayant la
fâcheuse manie de perdre leurs feuilles en
hiver. Un type, genre blaireau bienveillant,
petit-fils de la Mère Denis, pose sa valisette de
le Chat Machine sur une haie en expliquant
qu'elle est très bien, sa poudre, et en plus elle est
sans phosphates. Elle est bonne pour l'envi-
ronnement. Les autres, non ? Silence. Henkel
ne va quand même pas se faire lavage-kiri.
Car Henkel France, c'est aussi Supercroix,
X'Tra, Mir Couleurs, des détergents aux
phosphates. Le groupe allemand a hesite, apres
le rachat en 1986 de l'Union générale de
Savonnerie,
a
se jeter en France
a
l'eau sans
phosphates. Le Chat Machine reste une lessive
marginale qui indique timidement sur sa vali-
sette son «
sans phosphates ».
Quel avantage la
publicité peut-elle valoriser, ce que en jargon
marketing m'appelle le « bénéfice produit » ? Ici
intervient une immense nouveauté : les Fran-
çais, gagnés par un stress existentiel, se mettent
au vert.
L'agence Quadrillage démarre la campagne.
En quelques mois, la part de marché de
le Chat
triple.
Message
reçu : Ariel dégaine
à
son tour
sa formule écolo. Du coup Rhône-Poulenc se
rebiffe. La meilleure défense étant l'attaque, le
groupe français, par pleines pages de publicité,
explique qu'on ment aux Français, que les
phosphates, c'est bon pour la nature. Judas,
c'est ce Chat qui miaule
à
la mort dans les
violons d'un groupe qui se targue de fabriquer
un nouveau monde propre et sain. Les journa-
listes reçoivent d'épais dossiers techniques
pro-phosphates. Il faut cependant frapper
encore plus fort l'attention.
o Toute
la
tradition publicitaire anglaise ou
allemande repose sur une ahurissante violence
quand il s'agit de sujets de société »,
dit Nicolas
Monnier, d'Alice, l'agence de Rhône-Poulenc.
Alors, pourquoi ne pas les imiter ? Voila donc
un poisson dans un bassin d'eau sans phospha-
tes. Il crève, ventre en l'air. Le CSA décide
quand même
à
la mi-décembre d'interdire ce
spot de télévision. Trop violent. Diffamatoire.
Soit. Les panneaux publicitaires prendront le
relais. o
Quels produits remplacent les pho-
sphates dans les lessives ? Des produits qui
menacent la vie aquatique. »
Cette fois-ci,
à
le
Chat de protester contre une campagne d'une
o exemplaire brutalité ».
Les juges de la cour
d'appel de Versailles ordonnent
le 12
février la
cessation immédiate de la campagne de
Rhône-Poulenc contre les lessives sans pho-
sphates.
Henkel
France n'a pas attendu ce
jugement pour relancer l'attaque. Un
deuxième spot fait témoigner l'Europe verte en
faveur des lessives sans phosphates : 46 % de
part de marché en Belgique, 85 % aux Pays-
Bas, 92 % en RFA, 95 % en Italie, 100 % en
Suisse.
La lutte finale ne fait que commencer. Un
combat années 90 de société industrielle civili-
sée: Années d'éthique et d'arguments éthiques.
Les marques vont de plus en plus‘se prévaloir
d'une éthique civique, humanitaire, univer-
selle quitte mettre en cause d'importants
intérêts industriels. Après les contradictions au
sein du peuple, les contradictions au sein de
l'industrie.
Philippe Gavi
engrais pour les algues, mais aussi pour les
céréales et autres plantes terrestres, on ne se prive
donc pas de les employer à.hautes doses). Et il y
a aussi, comment
dire?
pardon ! nos... déjections.
Hé oui ! nous sommes tous des producteurs de
phosphates qui s'ignorent.
Alors, vous avez d'un côté Rhône-Poulenc, la
célèbre multinationale étatique française, qui ne
fabrique pas de «
produits lessiviels »
mais est
numéro deux mondial (et numéro un européen)
des producteurs de phosphates. Et, de l'autre
côté, le groupe allemand
Henkel,
qui a racheté
notre chère vieille marque le Chat, pour commer-
cialiser en France, sous un label sympa, fleurant
bon le savon de Marseille, des lessives sans
phosphates, réputées écologiques. Il n'en fallait
pas davantage pour déclencher un nouveau conflit
franco-allemand, encore plus irrationnel — mais
jusqu'ici moins meurtrier—que les précédents. La
80
LE NOUVEL OBSERVATEUR /NOTREÉPOQUE
lessive
à
l'allemande le Chat lave-t-elle plus vert
grâce
à
son absence de phosphates — sachant
d'ailleurs que le groupe Henkel
est, aussi, un gros
producteur de lessives
avec
phosphates... ? Ou
bien est-ce René Riu, directeur de V« activité
détergence » chez Rhône-Poulenc, qui a raison
d'affirmer : «
Les phosphates, c'est bon, sain et
naturel, sinon, on n'alimenterait pas les bébés
avec des produits genre Phosphatine ?
C'est — une fois n'est pas coutume— le Français
(Rhône-Poulenc) qui a ouvert le feu face
à
l'Alle-
mand. D'abord sournoisement. Le géant des
phosphates a rassemblé toute la documentation
scientifique disponible sur les éventuels méfaits
écologiques des lessives sans phosphates. Et sur
les incertitudes concernant le processus de l'eu-
trophisation par phosphates interposés. Puis il a
commandité quelques reCherches complémentai-
res. Le dossier compile en vrac des déclarations
du ministre de l'Environnement du Schleswig-
Holstein, constatant. telle ou telle prolifération
d'algues en mer du Nord malgré l'absence de
phosphates. Des études brésiliennes ou tunisien-
nes exonérant les phosphates de l'eutrophisation
constatée localement— dans des pays où on se lave
beaucoup... Des rapports irréprochables, éma-
nant de l'Institut Pasteur de Lyon, et illustrant les
méfaits des lessives
«
sans
»
A cet égard, le
professeur Paul Chambon précise deux choses
1) «
Les conditions de laboratoire ne sont pas
celles de la nature. »
2) o
Que.
Rhône
-Poulenc
ait
financé nos travaux n'a évidemment rien à voir
avec le fait que les résultats lui sont favorables. »
A partir de la, Rhône-Poulenc a monté l'auda-
cieuse campagne publicitaire que l'on sait, mon-
trant des poissons crevés, le ventre en l'air,
laissant entendre que ces malheureux poissons
étaient victimes des affreuses lessives « sans »