Le lait : entre discours nutritionnel et représentations

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UNIVERSITÉ DE TOULOUSE II
LE MIRAIL
CENTRE D’ÉTUDES DU TOURISME,
DE L’HÔTELLERIE ET
DES INDUSTRIES DE L’ALIMENTATION
MASTER TOURISME - HOTELLERIE - ALIMENTATION
Parcours « Sciences Sociales appliquées à l’Alimentation »
MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE
Le lait :
entre discours nutritionnel
et représentations symboliques
Présenté par :
Marion Burgevin
Année universitaire : 2011 - 2012
Sous la direction de : Laurence Tibère
Le CÉTIA de l’Université de Toulouse II –
Le Mirail n’entend donner aucune
approbation, ni improbation dans les projets
tutorés et mémoires de recherche. Ces
opinions doivent être considérées comme
propres à leur auteur(e).
Remerciements
L’élaboration de ce mémoire a été possible grâce au soutien de plusieurs
personnes.
Je tiens donc à remercier :
 mon maître de mémoire, Madame Laurence Tibère, pour les conseils
qu’elle m’a prodigués ;
 Monsieur Christophe Serra Mallol qui a toujours été disponible pour
répondre à mes questions concernant l’élaboration de ce mémoire ;
 tous les mangeurs qui ont bien voulu remplir mon questionnaire ;
 Martine Derouineau et Christine Derouineau pour le temps qu’elles m’ont
accordé.
Sommaire
INTRODUCTION
p.6
Partie 1 : Le lait, un aliment incontournable de l’alimentation
française
p.8
1. Le lait
p.8
2. La consommation du lait
p.16
Partie 2 : Pourquoi le mangeur consomme-t-il des produits
laitiers ?
p.30
1. Hypothèse 1 : le rôle des allégations nutritionnelles
p.30
2. Hypothèse 2 : l’influence des croyances
p.37
3. Hypothèse 3 : la montée de la médicalisation de l’alimentation
p.42
Partie 3 : Méthodologie
p.49
1. Le choix de la méthode d’enquête
p.49
2. Le protocole d’enquête
p.52
3. Le guide d’animation
p.57
CONCLUSION
p.60
INTRODUCTION
Dans la vie des humains, l’alimentation tient une place importante. En effet, les
journées sont rythmées par les repas. Chez le mangeur traditionnel français, on
observe trois repas. Ils sont structurés de manière similaire ; d’un jour à l’autre, on
va retrouver des groupes d’aliments identiques. Le repas sera composé de
protéines avec les viandes, poissons, œufs ; de légumes verts crus ou cuits ; de
féculents ; d’un produit laitier et/ou d’un fruit. L’alimentation du français est donc
très diversifiée.
Cependant, à l’intérieur de ces groupes d’aliments, il existe pour le mangeur un
choix très important. En effet, lorsque celui-ci va faire ses courses, il doit
sélectionner ses produits parmi une multitude de propositions. Il se trouve face à
des rayons entiers pour un même produit. Les industries agroalimentaires
rivalisant d’efforts marketing avec des packagings différents, des slogans, des
publicités et des messages adressés aux consommateurs.
Face à cet hyper- choix, le mangeur se sent souvent désorienté et perdu.
De plus, les dernières crises sanitaires compliquent encore cette situation. En
effet, depuis plusieurs années, elles se sont multipliées. Dans ce contexte,
comment choisir de consommer un produit lorsque l’on a perdu confiance en lui et
que l’on a peur pour sa santé ?
C’est cette inquiétude qu’ont engendrée la crise de la vache folle en 1996 ou
encore la grippe aviaire en 2004. On a pu constater à la suite de ces évènements
une diminution de la consommation de viandes rouges pour le premier et de
volailles pour le second. Plus récemment en 2011, la souche rare d’Escherichia
coli a causé un vent de panique chez les consommateurs et a entrainé une
diminution très importante des ventes des légumes frais.
Les médias, ont un rôle majeur dans ces crises puisqu’ils les relayent et
contribuent à amplifier ce sentiment d’insécurité par rapport à la nourriture. Difficile
de ne pas modifier ses comportements alimentaires quand les journaux titrent « le
concombre tueur ».
Cette insécurité a fait naître chez le consommateur le désir de choisir des aliments
bons pour la santé. Il devient un expert en nutrition et de plus en plus exigeant par
rapport à ses choix alimentaires.
Il veut savoir ce qu’il ingère ; dans ce contexte, « le principe d’incorporation » de
Claude Fischler prend toute son importance.
Les règles nutritionnelles prennent également une grande place dans les choix du
consommateur et ce pour tous les groupes d’aliments.
C’est pourquoi, j’ai décidé de m’intéresser au lait et aux produits laitiers. En effet,
si ceux-ci étaient consommés depuis plusieurs années par une majorité de la
population, on remarque une diminution de sa présence dans les repas du
Français. J’ai donc voulu comprendre l’évolution de la consommation de ces
produits.
De plus, j’ai choisi ce sujet car il est d’actualité. De fait, de nombreuses publicités
ainsi que les recommandations nutritionnelles données par les différentes
institutions (médicale, école, Etat…) visent à augmenter nos apports en calcium.
Mais on constate aussi l’émergence de nouveaux courants anti-laits qui dénoncent
la propagande de l’industrie laitière.
Ce constat, mes différents questionnements ainsi que mes premières lectures
m’ont permis d’en arriver à cette question de départ qui est : « Quels sont les
différents arguments et visions des acteurs anti-lait et pro-lait ? »
Dans ce mémoire, j’étudierai dans une première partie le lait en tant qu’aliment
incontournable de l’alimentation française, aussi bien d’un point de vue nutritionnel
que d’un point de vue social en intégrant les différentes représentations
symboliques. La deuxième partie traitera des hypothèses qui répondront à la
problématique. Et enfin, la troisième partie exposera la méthodologie à appliquer
sur le terrain pour vérifier ces hypothèses.
Partie1 : Le lait, un aliment incontournable de l’alimentation
française
Le lait est un aliment que l’on consomme quotidiennement. Il est présent quasi
systématiquement à chaque repas sous forme de lait ou de produits laitiers dans
la population française.
Dans cette partie, je vais étudier l’histoire du lait, sa consommation en France, ses
représentations et ses statuts.
1 Le lait
1.1 Le lait sous toutes ses formes 1
Le lait se définit depuis 1909 comme « le produit intégral de la traite totale et
ininterrompue d’une femelle laitière bien portante, bien nourrie et non surmenée ».
Le lait est à la fois un aliment et une boisson d’un grand intérêt nutritionnel.
Selon les civilisations, on consomme du lait d’animaux domestiques : de vache, de
brebis, de chèvre, de jument, de bufflonne, de yack, de chamelle et de renne.
En France, c’est le lait de vache qui est le plus consommé mais on trouvera
également en bouteille du lait de brebis et de chèvre qui est également apprécié.
Il existe sous différentes formes :
-
le lait cru : il est embouteillé directement après la traite ;
-
les laits ayant subi un traitement thermique : pasteurisé, stérilisé et stérilisé
UHT ;
-
le lait entier, ½ écrémé, écrémé : dépend du pourcentage de matières
grasses ;
-
les laits déshydratés : en poudre, concentré ;
-
les laits supplémentés : en fer, en vitamines, en calcium, en zinc, en
magnésium ;
1
le lait fermenté : les yaourts ;
CNIEL. Les produits laitiers, le lait, la vie [en ligne]. Disponible sur : < www.produits-laitiers.com/lesproduits-laitiers/varietes/le-lait/>. (Consulté le 21-02-2012).
-
le lait biologique.
C’est le lait qui va servir à faire le fromage, les yaourts, les desserts lactés.
1.2 Le lait, un aliment nutritionnel 2
Le lait est un aliment complet pour le nourrisson ; c’est le seul indispensable
jusqu’à l’âge de 6 mois.
1.2.1 Qualités organoleptiques
La couleur du lait varie du blanc au jaune en fonction de la teneur en matières
grasses et en carotènes.
La flaveur évolue selon la température de dégustation : l’odeur du lait froid est
neutre ; le goût du lait est caractéristique.
La texture du lait est liquide.
1.2.2 Qualités nutritionnelles
Le lait contient tous les micronutriments et macronutriments essentiels.
Il est riche en calcium qui participe à la construction du squelette et à la solidité
des os et des dents.
Il est également riche en vitamine D qui aide à fixer le calcium sur les os.
Le lait contient majoritairement de l’eau c’est pourquoi il est considéré comme une
boisson. Pourtant, sa composition complète fait qu’on peut aussi le considérer
comme un aliment.
Le lait est donc un aliment incontournable pour une alimentation équilibrée.
L’annexe A, présente la composition nutritionnelle du lait pour 100ml.
1.2.3 Qualités hygiéniques
Le lait dans le pis de la vache est stérile. Mais dès la traite, il est contaminé par
des micro-organismes.
2
VIERLING Elisabeth. Aliments et boissons, filières et produits. 3e édition. Paris : Editions Doin, 2008, p.
15-54.
Cependant, grâce aux différents procédés de conservation appliqués au lait pasteurisation, stérilisation (UHT ou non) – c’est un aliment hygiénique.
De plus, lors de la collecte, des prélèvements sont effectués et certaines bactéries
sont recherchées comme les salmonelles dont la tolérance est de 0 ou les
bactéries thermorésistantes.
Le lait ayant subi un traitement thermique est donc microbiologiquement sain.
1.3 La place du lait en France 3
Auparavant, il était difficile d’estimer les consommations car le lait, du fait de sa
fragilité, n’était pas taxé et la production n’était pas enregistrée.
De 1815 à 1824, la consommation par an et par habitant était de 63 kg ; elle
passe à 124 kg entre 1895 et 1904 et à 164 kg entre 1935 et 1938.
En 1991, c’est dans les régions de l’ouest et de l’est qu’on achetait le plus de lait.
En 2006, c’est toujours dans l’ouest que l’on en consommait le plus.
Figure 1 : Variations de la consommation en fonction des régions
3
AMBROISE Martin et al. Apports nutritionnels conseillés pour la population Française. Paris : Editions
Tec et doc, 2001, p. 421.
Ce sont les régions du nord-ouest qui consomment le plus de lait. Cette
consommation plus importante peut être liée au fait que ce sont des régions
productrices de produits laitiers.
Par ailleurs, la consommation annuelle moyenne de lait et de produits laitiers est
particulièrement forte chez les enfants et les adolescents. Les enfants
consomment 15% de leurs produits laitiers frais hors domicile.
Cependant, on peut constater que même dans cette catégorie de population, il y a
une diminution de la consommation.
Figure 2 : consommation des produits laitiers en France chez les enfants et
adolescents
Consommation de produits laitiers en France
Lait
Ultra-frais
Fromage
20,4
18,5
83,1
87,3
232,1
3 à 5 ans
25,1
65,4
19,8
63,6
23,5
73,3
17,8
61,4
196,5
192,3
164,1
144,1
141,8
6 à 10 ans
11 à 12 ans
13 à 14 ans
15 à 16 ans
16 à 17 ans
Figure 3 : évolution de la consommation de lait chez les enfants
Evolution de la consommation du lait
chez les enfants
1999
234,6
206,3
227,1
185,3
Garçons de 3 à 10 ans Filles de 3 à 10 ans
2007
200,5 181,6
Garçons de 11 à 14
ans
184,1
146,8
Filles de 11 à 14 ans
Pour le lait et les yaourts, les consommations des hommes et des femmes sont
équivalentes, tandis que le fromage est consommé en quantité supérieure par les
hommes.
On observe d’une manière générale, une baisse de la consommation du lait.
« En 2006, un ménage français moyen a acheté 102 litres de lait au
prix moyen de 69 centimes/l. Les trois quarts des volumes
correspondent à du lait UHT demi-écrémé, viennent ensuite le lait
UHT écrémé (7 %) et entier (4 %). Les laits spécifiques, en
particulier ceux destinés à l’alimentation des bébés et petits enfants,
sont achetés pour 9 % de volume à un prix nettement supérieur :
1,15 €/l. Les laits pasteurisés et crus correspondent à des achats
marginaux (respectivement 2 litres/an et moins de 1 litre/an).
Rapportée à une personne, la consommation annuelle de lait est de
44,5 l, dont 32,9 l de lait UHT demi-écrémé.
D’un point du vue tendanciel, les achats de lait ne cessent de
diminuer (réduction de 6 litres par ménage en 3 ans) mais les laits
spécifiques progressent (+ 0,8 l, soit + 10 % depuis 2003) à la faveur
de la multiplication de ces produits et des campagnes publicitaires» 4.
Figure 4 : achats de lait en 2006
4
OFFICE DE L’ELEVAGE. Comité lait de vache. La consommation des produits laitiers par les ménages
Français en 2006, 7 février 2008, p.4.
Tableau 1 : structure des dépenses des consommations des ménages Français
Années 1980
Années 1990
Années 2000
Années 2003
3,8%
3,8%
3,1%
3,1%
19,1%
16,7%
15,7%
15,9%
34,2%
42,9%
39,2%
40,4%
44,6%
36,5%
50,3%
30,7%
Produits
agricoles
Produits
industriels
alimentaires
Services
Autres
Source : INSEE, 2006
Ce graphique et ce tableau nous montrent bien la diminution de la consommation
du lait ½ écrémé, des laits spécifiques, ainsi qu’une légère augmentation du lait
écrémé et du lait pasteurisé.
La consommation du lait jusqu’à aujourd’hui continue de diminuer.
1.4 Histoire de lait 5
C’est à la période du néolithique, quand l’homme est devenu agriculteur, qu’il
commence à boire du lait. Vers 8000 av. J. C. l’homme va commencer à faire des
élevages et, par ce biais, accéder à la consommation de lait.
Du moyen âge jusqu’au XV ème siècle, le lait n’était ni un signe de distinction
sociale, ni considéré comme ayant des qualités nutritionnelles. Puis, à partir du
XVème siècle, on a pu observer un changement progressif de son statut.
1.4.1 Le rejet
Dans l’antiquité, les grecs et les romains boudaient catégoriquement le lait, optant
volontiers pour les légumes, les fruits, les céréales, etc.
Au moyen âge, ce sont les régions du nord-ouest de la France qui consommaient
du lait. La Bretagne était d’ailleurs considérée comme le pis fromager de la
France.
A cette époque, les laitages formaient la base de l’alimentation des pauvres
5
Observatoire CNIEL des habitudes alimentaires. Mémoire lactée [en ligne]. Disponible : <
http://www.lemangeur-ocha.com/>. (Consulté le 22-12-2011).
Un proverbe illustre d’ailleurs bien cette perception : « Fromage, poyre et pain est
repas de villain. »
Ils symbolisaient aussi, aux yeux des gens, les populations isolées, arriérées dont
voici un exemple :
« Le lait fournit à des nations entières, principalement aux habitants des
montagnes, la nourriture ordinaire, journalière, fondamentale. Les
hommes de ces contrées sont gras, lourds, stupides ou du moins
graves, sérieux, pensifs, sombres. Il n’est pas douteux que l’usage
habituel du lait ne soit une des causes de cette constitution populaire.
La gaîté, l’air leste, la légèreté, les mouvements aisés, vifs et vigoureux
des peuples qui boivent habituellement du vin en est le contraste le plus
frappant.»6
Au IXème siècle, les médecins recommandaient une grande prudence à l’égard du
lait. D’ailleurs, le traité arabe de diététique d’Isaac le Juif expliquait que les
produits laitiers sans exception doivent être considérés comme indigestes et
détestables.
Au XIVème siècle, le lait était peu utilisé car c’était une denrée très fragile qui avait
une mauvaise conservation. On s’en servait dans les bouillies ou les sauces et les
potages. Il était consommé exclusivement cuit ou bouilli.
De plus, de nombreuses sauces étaient préparées avec du vin et il était interdit de
consommer simultanément lors d’un même repas du lait et du vin. Cette
interdiction émanait des médecins.
Au XVème siècle, le lait était déconseillé aux hommes adultes sains qui risquaient
de s’affaiblir à en boire trop et était interdit aux adolescents dont la croissance
exigeait des aliments plus substantiels.
Une autre raison expliquant le fait que le lait était désapprouvé, c’est que les
vaches de la région méditerranéenne étaient de très mauvaises laitières et ne
pouvaient donc pas subvenir aux possibles besoin en lait de la population.
6
Observatoire CNIEL des habitudes alimentaires. Mémoire lactée [en ligne]. Disponible : <
http://www.lemangeur-ocha.com/>. (Consulté le 22-12-2011).
1.4.2 L’acceptation
Au XVIème siècle, l’église autorisait la consommation de lait uniquement les jours
gras car il faisait partie des aliments gras.
Au XVIIIème siècle, l’église accorde des dispenses locales ; les chrétiens peuvent
ainsi boire du lait en jour maigre comme en jour gras. On observe un
reclassement des laitages dans les produits maigres.
A partir du XVIIIème siècle, on a donc commencé à voir des changements quant à
la consommation du lait. Il est passé d’aliment marginal méprisé à un aliment de
référence.
On assiste à la naissance de la cuisine au beurre et à la crème.
Le lait devient une bonne nourriture qui présente quelques inconvénients.
Le discours médical a également évolué, puisqu’en 1765, on pouvait voir écrit
dans l’encyclopédie : « le lait de vache est le lait par excellence, il possède le plus
grand nombre des qualités génériques du lait ».
Le lait va même intervenir dans les régimes contre la goutte.
1.4.3 L’intégration
Du milieu du XVIIIème siècle à nos jours, la consommation de produits laitiers a
cru, celle de lait a doublé entre 1900 et 1950 : les progrès de l’hygiène et de la
pasteurisation étant pour beaucoup dans cette augmentation.
En 1926, est créé à Paris un « office du lait » dont l’objectif est de promouvoir la
consommation de laitages et de soutenir par un mécanisme de subventions les
établissements et les organismes qui distribuent du lait.
Dès 1930, avec la découverte du principe de réfrigération, la consommation du lait
se répand dans les villes. Très vite, des industriels se lancent dans la
transformation du lait pour des produits dérivés de grande consommation. Ainsi,
en 1951, la technique de conservation par ultra haute température révolutionne la
filière lait. En effet, mis en brique, celui-ci se conserve à température ambiante
sans crainte d'oxydation pendant 6 à 18 mois. La consommation du lait prend
alors une dimension inattendue, que les grands industriels vont développer.
Le 18 septembre 1954, Pierre Mendès France annonce que chaque jour, un verre
de lait avec du sucre sera servi à l’école,.
Le 26 novembre 1954, une circulaire précise que tous les enfants scolarisés dans
le premier degré bénéficieront, à partir du 1 er janvier 1955, de distributions de lait
et de sucre dans les établissements privés et publics.
Le lait est élevé au rang d’aliment indispensable à la santé, idée qui perdure
encore aujourd’hui.
Cependant, on voit arriver une nouvelle tendance, avec des discours controversés
à propos du lait et des bénéfices.
Mais qu’en est-il de l’image du lait ?
2. La consommation du lait
2.1 Le lait : images et mythes
Comme on a pu le constater, dans son histoire, l’image du lait a été modifiée au
fur et à mesure des années. Nous allons nous intéresser ici aux symboles qu’il
véhicule.
2.1.1 Les images
« Les aliments sont porteurs de sens et ce sens leur permet d’exercer des effets
symboliques et réels, individuels et sociaux »7.
C’est le cas du lait qui a une image symbolique très forte.
Le lait est considéré comme un aliment bâtisseur, il renforce les os, le squelette et
les dents. Il permet d’être plus fort, de résister aux épreuves.
7
FISCHLER Claude. L’homnivore. Paris : Editions Odile Jacob, février 2001, p.88
Il représente la pureté et la vie. C’est d’ailleurs le premier aliment exclusif du
nourrisson.
Il est source de santé, de bien-être et d’un vieillissement réussi.
« Le choix de consommer tel ou tel produit s’inscrit dans une logique de
protection-prévention qui prend sa source dans la pensée magique :
croire aux vertus du produit incorporé ».8
Lorsqu’on boit du lait, on incorpore ses bénéfices.
C’est le principe d’incorporation décrit par Fischler 9 :
« Acte fondamental sur lequel se cristallise l’angoisse de l’homnivore.
C’est le mouvement par lequel nous faisons franchir à l’aliment la
frontière entre le monde et notre corps, le dehors, le dedans. Ce geste
est à la fois banal et porteur de conséquences potentiellement
irréversibles.»
L’incorporation répond à des enjeux à la fois vitaux et symboliques.
Le lait a toujours une image positive. Cette théorie est confirmée par Fischler :
« Les produits laitiers sont classés par les gens dans une famille santé
ou laitage, mais jamais ils ne sont renvoyés à des classes négativement
connotées. »10
Dans l’esprit des gens le lait devient presque un alicament.
Le lait a donc différentes représentations dans l’inconscient des humains. Mais
cette image est toujours positive.
Et elle n’est pas nouvelle puisqu’on la trouve dès l’antiquité et même dans
certaines légendes.
8
GINESTE Muriel. Les formes sociales de l’équilibre alimentaire. Thèse de doctorat sociologie. Toulouse :
Université de Toulouse II-Le Mirail, 2003, p. 258-264.
9
FISCHLER Claude.op.cit., 2001, p. 66.
10
FISCHLER Claude. Le bon et le saint. Cahier de l’OCHA, n°1, CIDIL, p.20.
2.1.2 Les mythes autour du lait 11 12
Le lait a toujours eu une charge symbolique très forte. A ce titre, il fait partie de
nombreux mythes. Nous en verrons ici quelques-uns dans lesquels il a un rôle
important.
Les hindous pensaient que le monde était né d’une mer de lait vigoureusement
barattée par les dieux.
De cette agitation est sortie la vache, ce qui explique aujourd’hui son caractère
sacré venant de son statut de mère nourricière des hommes. Pour les hindous,
littéralement obsédés par la notion de pureté et la crainte de la souillure, le lait
représente le seul aliment pur de par sa couleur blanche.
C’est un récit vieux de trois mille ans qui en explique les raisons.
Les dieux étaient très satisfaits d’avoir créé la vache, source inépuisable de
nourriture pour les hommes. Quand le dieu Agni aperçut la vache, il en tomba
amoureux et la pénétra.
Le récit explique que : « sa semence devint le lait qui est dans la vache. »
Le dieu Agni étant le dieu du feu purificateur des rituels, son sperme, et donc le
lait, représente la pureté absolue.
Les autres aliments potentiellement souillés peuvent ainsi être purifiés s’ils sont
cuits dans le lait ou frits dans le beurre.
Les Peuples du Sahel pensaient eux que l’univers n’avait été créé qu’à partir
d’une seule goutte de lait.
Les récits mythologiques autour du lait ne manquent pas non plus : Zeus nourri
par la chèvre Amalthée, Hercule faisant gicler du lait pour former la Voie Lactée,
notre galaxie (du grec gala : lait) ou encore Romulus et Remus nourris par le lait
d’une louve.
11
BLIN Dominique et al. L’allaitement maternel : une dynamique à bien comprendre. 2ème édition.
Ramonville : Editions Erès, 2007, p.88-123.
12
CNIEL. Histoire, sociologie et images du lait [en ligne]. Disponible sur :
http://www.cniel.com/publicat/Questions_sur/pdf/QS_HS2.pdf. (Consulté le 29/02/2012).
Les textes orphiques de la Grèce antique présentaient le lait comme une boisson
divine où l’on pouvait puiser l’immortalité.
De plus, en Egypte, il existe une croyance en la fertilité de l’eau et du lait qui est
illustrée par la vénération d’Isis durant les dernières dynasties égyptiennes. Elle
symbolise la fécondité, mais elle est aussi appelée Isis lactans, celle qui nourrit et
qui, tous les 10 jours, descend le Nil en répandant son lait sur les autels funéraires
de son époux défunt pour assurer la perpétuation de la race.
Le lait représente ici la fertilité.
Une expression religieuse marque également cette représentation : « Sur toutes
les terres promises coulent des ruisseaux de miel et de lait. »
Il est vrai que le lait est également un symbole religieux important.
Il représente l’amour divin et la dépendance de l’homme envers son Créateur.
C’est aussi un symbole d’abondance, de richesse et de prospérité collective.
Dans la religion chrétienne le lait, de par sa couleur blanche, est symbole de
pureté. En effet, la robe de la mariée doit être blanche ce qui est le signe de sa
virginité et donc de sa pureté.
Mais, le lait est aussi pour certaines religions source d’interdiction alimentaire.
Il est dit : « Tu ne feras pas cuire un chevreau dans le lait de sa mère. » (Exode :
23 ; 19 et 34 ; 26. Dt 14 ; 21). Certains auteurs ont vu dans cet énoncé une façon
de rappeler en permanence le tabou de l’inceste (sa transgression était, chez les
Anciens Hébreux, punie de mort). En effet, la présence dans la même marmite
(dans le même lit) d’une mère (symbolisée par son lait) et de son fils et leur «
fusion » sous l’action du feu (de l’âtre ou de la passion amoureuse) pourrait bien
constituer un cas « d’inceste… culinaire. » Par la suite, le tabou sera étendu : il se
traduit par l’interdiction faite aux Juifs pratiquants d’ingérer au cours d’un même
repas produits laitiers et produits carnés.
Dans les civilisations anciennes, le lait était étroitement associé à l’eau, symbole
de vie.
La déesse iranienne des eaux est aussi celle qui permet aux femmes d’avoir du
lait. Dans de très nombreuses cultures, des cérémonies autour de la traite et des
offrandes de lait avaient pour but de faire tomber la pluie. Depuis la fin du
paléolithique jusqu’à aujourd’hui, les eaux « galactophores » furent l’objet de
cultes : en buvant l’eau miraculeuse de ces « sources laitières », les femmes et
les animaux dont le lait était tari voyaient leur sécrétion lactée reprendre.
Le lait est également souvent associé au sang. Ils furent assimilés à un point tel
que, pendant longtemps, on considéra qu’entre les deux, la seule différence était
la couleur (les vampires des anciennes légendes suçaient indifféremment le lait et
le sang de leurs victimes humaines). On leur attribua aussi la vertu d’être des
élixirs de longue vie : les vieillards malades étaient incités à boire du sang et du
lait, ce dernier étant considéré comme particulièrement bénéfique s’il était tété
directement au sein d’une femme !
Si le lait est spontanément associé à la féminité, il a aussi été présenté, parfois,
comme un trait caractéristique des hommes. L’Occident chrétien verra ainsi surgir
de nombreuses légendes de « Saints laitiers » : ne se contentant pas de faire jaillir
des « sources laitières », ils interviendront pour empêcher le lait de tourner et iront
même jusqu’à offrir leur sein aux nourrissons abandonnés.
De même, si le lait est l’aliment des enfants, êtres faibles et fragiles, il peut aussi
être la nourriture quotidienne d’adultes à la force terrifiante. Dans l’Odyssée, le
cyclope Polyphème attaque les compagnons d’Ulysse après avoir empli « son
vaste sein de chairs humaines et de grands traits de lait pur ». Dans les contes
scandinaves, l’ogre dévoreur d’enfants est décrit comme un grand buveur de lait.
Comme nous venons de le voir, le lait fait partie de nombreux mythes, ce n’est pas
un aliment banal.
C’est pourquoi, il se retrouve souvent au cœur des débats nutritionnels.
2.2 Discours nutritionnels : entre abondance et controverse
On va rencontrer essentiellement deux types de discours nutritionnels.
Le premier est véhiculé par la plupart des médecins, par les nutritionnistes,
diététiciens et relayés par les médias via le biais du Centre National
Interprofessionnel de l’Economie Laitière (CNIEL).
Il prône les bienfaits du lait.
Le deuxième discours, plutôt anti-lait, émerge depuis quelques années. Il met en
garde contre une consommation excessive, inutile voire dangereuse du lait.
2.2.1 Le discours pro-lait
Le discours nutritionnel encourage la consommation de lait et de produits laitiers
car ils sont source de calcium, minéral important pour la croissance et la solidité
des os.
2.2.1.1 Le calcium 13 14
Le corps humain contient 1000 à 1200 mg de calcium dont 99% se trouve
localisés dans l’os et forment avec le phosphate inorganique des cristaux qui se
fixent sur la trame protéique rendant ainsi la charpente osseuse très solide. C’est
le processus de calcification ou minéralisation.
Le calcium non osseux (1%) qui se trouve dans le sang joue un rôle essentiel
dans sa coagulation, dans l’innervation nerveuse, dans l’activité musculaire et
cardiaque, dans la pression artérielle, dans les mécanismes enzymatiques.
Le squelette évolue et se renouvelle tout au long de la vie car l’os est un tissu
vivant en perpétuel remaniement sous l’influence d’hormones et de facteurs de
croissance.
La masse et la solidité de l’os vont dépendre de l’apport de « matériaux »
bénéfiques à l’os tels que les protéines, le calcium et l’activité des cellules
osseuses. C’est parce que notre système osseux se renouvelle intégralement
entre 3 et 4 fois dans une vie, que l’organisme a besoin du calcium apporté par
l’alimentation car il ne sait pas en fabriquer.
13
CNIEL. Les produits laitiers : les meilleurs amis de la croissance. Montpellier : Pôle éditorial et
enseignement du CNIEL, 2010, p.12.
14
CNIEL, CIDIL. Guide d’applications pédagogiques : alimentation et activités physiques. Yvelines : Pôle
éditorial et enseignement du CNIEL, 2010, p.7-8.
Tableau 2 : les besoins et apports conseillés en calcium par jour en mg 15
Entretien
Enfants 1-3
ans
Enfants 4-9
ans
Adolescents
10-14 ans
Adolescents
15-18 ans
Adultes
>
18 ans
Femme
>
55 ans
Homme >
65 ans
Femme
enceinte
(dernier
trimestre)
Femmes
allaitantes
1
2
50
Rétention
(croissance,
fœtus, lait)
90
Coefficient
d’absorption
réelle
40
Besoin
nutritionnel
moyen1
350
Apports
nutritionnels
conseillés2
500
100
140
40
600
800
170
250
45
930
1200
260
100
40
920
1200
260
/
38
690
900
280
/
30
930
1200
280
/
30
930
1200
200
220
55
760
1000
200
250
45
1000
1300
BNM suffisant pour 50% de la population
ANC = BNM + 30%
2.2.1.2 Les populations ciblées
Un
apport
alimentaire
suffisant
de
calcium
peut
être
particulièrement
recommandé :
-
pour les enfants et les adolescents qui sont en pleine croissance ; ils en ont
besoin pour permettre une minéralisation optimale du squelette mais aussi
pour atteindre, à 18 ans, une densité minérale osseuse optimale ;
-
pour les femmes enceintes du fait de l’augmentation des besoins calciques
essentiellement au cours du troisième trimestre, moment où le fœtus
accumule le calcium ;
15
AMBROISE Martin et al. Apports nutritionnels conseillés pour la population Française. Paris : Editions Tec
et doc, 2001, p. 137.
-
pour les femmes allaitantes car une partie du calcium est utilisée pour la
lactation ;
-
pour les femmes ménopausées qui ont un risque plus grand d’ostéoporose
probablement accentué par la diminution des œstrogènes ;
-
pour les personnes âgées qui sont plus exposées aux fractures ; en effet, le
vieillissement est responsable d’un défaut d’adaptation de l’absorption
intestinale du calcium ce qui entraîne une diminution progressive de la
densité minérale osseuse.
2.2.1.3 Les recommandations officielles
16
Le Programme National Nutrition Santé (PNNS) : depuis 2001, l’objectif général
du programme est d’améliorer l’état de santé de l’ensemble de la population en
agissant sur l’un de ses déterminants majeurs qu’est la nutrition.
En ce qui concerne le calcium, les recommandations visent à augmenter la
consommation afin de réduire de 25% le nombre d’individus ayant des apports
calciques en dessous des apports nutritionnels recommandés.
Le lait et les produits laitiers sont la source privilégiée de calcium. Le PNNS
préconise d’en consommer 3 par jour (ou 4 selon leur richesse en calcium), et de
les diversifier car leur composition est très différente d’un aliment de ce groupe à
l’autre.
Le Groupe d’Etude des Marchés de Restauration Collective et Nutrition
(GEMRCN) : cette charte datant de 2007 contient des repères et objectifs
prioritaires à atteindre pour améliorer la qualité nutritionnelle des repas servis en
restauration scolaire.
Il y un contrôle de l’exécution des prestations, sur la base de fréquences de
présentations de plats.
Dans le cas des besoins nutritionnels en lien avec le calcium, la recommandation
du GEMRCN est d’augmenter les apports calciques.
16
ASCOMED, CNIEL. Les produits laitiers comment leur en parler ? . Paris : Pôle éditorial et enseignement
du CNIEL, 2010, p. 8.
Pour cela, il propose des fréquences de consommation :
-
fromages contenant au moins 150mg de calcium par portion : 8 repas sur
20 successifs au minimum ;
-
fromages contenant plus de 100mg et moins de 150mg de calcium par
portion : 4 repas sur 20 successifs au minimum ;
-
produits laitiers ou desserts lactés contenant plus de 100mg de calcium et
moins de 5g de lipides par portion : 6 repas sur 20 successifs au minimum.
Il fournit également des recommandations sur les grammages devant être servis
aux enfants.
Tableau 3 : grammages (en g) des produits laitiers servis en restauration collective
selon l’âge
Produits prêts à
consommer
Fromages
Produits laitiers frais
Fromage
blanc,
fromage frais
Yaourt
Petit suisse
Lait ½ écrémé (en
ml)
Desserts lactés
Enfants en
maternelle
20
Enfants en classe
élémentaire
30
100 à 120
100 à 120
100 à 120
100 à 125
60
100 à 125
60
100 à 125
120
125
125
125
100
100
100
Adolescents
30 à 40
Nous avons vu ici que le lait est décrit comme un aliment indispensable et que, à
ce titre, il est conseillé pour toutes les tranches d’âge.
Nous pouvons donc nous demander ce qui, depuis quelque temps, met en doute
ces certitudes.
2.2.2 Le discours anti-lait
Depuis plusieurs années, on a vu émerger des revendications contre le lait.
Ces remises en question, émanant dans un premier temps des médecines
douces, se sont propagées à une partie du corps médical. Nous allons voir dans
les paragraphes suivants quels sont leurs arguments.
2.2.2.1 Le lait : un agrobusiness
Toutes les recommandations sur la consommation du lait se fondent sur des
études scientifiques. Selon ce nouveau courant, il semblerait que ces études
soient biaisées. En effet, la plupart des études scientifiques seraient demandées
par les industries laitières. Les médecins n’auraient donc pas le choix dans leurs
conclusions. Payés par les industries laitières pour faire ces études, ils ne peuvent
donc pas dire que le lait est mauvais pour la santé. Voilà un des arguments
avancés par les anti-laits.
De plus, l’industrie laitière est présente lors de nombreuses conférences ou
colloques médicaux qu’elle parraine ou sponsorise.
Cette omniprésence leur vaut le qualificatif « d’envahisseurs de la voie lactée »17.
Nous allons voir quelques exemples qui montrent que l’industrie laitière serait aux
commandes des recherches scientifiques.
Ainsi, le financement de l’Institut Français pour la Nutrition (IFN) est en grande
partie apporté par les industries laitières. L’IFN est une structure influente qui joue
un rôle de conseil auprès des pouvoirs publics. Cependant sa crédibilité a des
limites « lorsqu’il s’agit de dire le rôle des aliments transformés sur la santé, ces
aliments-mêmes fabriqués par les bailleurs de fond de l’IFN »18.
En France, la direction du programme national nutrition santé PNNS, une
émanation des ministères de la santé, de l’éducation nationale et de l’agriculture a
été confiée à la fin de l’année 1999 à un médecin siégeant à l’institut Candia.
Dès l’année suivante, le PNNS se fixait l’objectif prioritaire d’augmenter chez tous
les français la consommation du calcium.
« Comment ? En consommant notamment trois produits laitiers par
jour. Ces recommandations ont été d’autant plus facilement entérinées
par le PNNS qu’y participaient deux cadres de Candia, un de Danone,
un autre médecin membre du conseil scientifique de Candia, un
médecin membre du conseil scientifique de Danone, un médecin
17
18
SOUCCAR Thierry. Lait, mensonges et propagandes. Vergèze : Editions Thierry Souccar, 2008, p.49
SOUCCAR Thierry. ibid. 2008, p.51
membre du conseil scientifique de Nestlé, un représentant de Kellogg’s
qui ne vend pas de laitages mais en fait la promotion active (des corn
flakes à rien, c’est pas génial à croquer). Ne manquait à la réunion que
mamie nova, elle avait oublié de mettre son réveil »19.
Pendant les années 1990, on va voir un lien se tisser entre les autorités sanitaires
et l’industrie laitière, pas seulement en France mais aussi aux Etats unis.
« En juin 1999, Le National Dairy Council (qui fédère les acteurs de
l’industrie laitière Américaine), monte aux Etats-Unis, sous couvert de
communication scientifiques, une gigantesque opération de promotion
des laitages. Son nom ? « Le sommet du calcium ». Médecins et
chercheurs y sont invités, moyennant rétribution, à chanter à l’unisson
la gloire du calcium laitier ».20
On peut constater à travers ces différents exemples que les recommandations
peuvent être influencées par l’industrie laitière.
L’alimentation est devenue une industrie avec des enjeux économiques
planétaires.
2.2.2.2 Le lait, un aliment dangereux ?
Les recommandations en France pour la consommation des produits laitiers se
fondent sur leurs bienfaits pour la santé. Cependant, comme nous l’avons vu
précédemment, il serait possible que les études les démontrant ne soient pas
totalement fiables. On peut donc se demander quels sont les risques d’une
consommation excessive de produits laitiers.
Le Professeur Henri Joyeux, chirurgien-cancérologue à la faculté de médecine de
Montpellier explique que :
« Nous vivons l’intoxication par le lait, ce que j’appelle le lactoolisme.
Evidemment, il s’agit des laitages de vache sous toutes leurs formes.
19
20
SOUCCAR Thierry. Op.Cit, 2008, p.55
SOUCCAR Thierry. Op.Cit, 2008, p.54
Les lobbies du lait sont mondiaux et veulent faire consommer tous les
humains évolués de la même façon. Voilà un des plus purs excès de la
mondialisation qui consiste à formater le peuple du lait, l’immense secte
des laitages, avec des allégations santé encore le plus souvent fausses
ou faussées».21
Selon des études scientifiques, augmenter la consommation de calcium n’aurait
pas d’impacts sur la prévention de l’ostéoporose et donc sur les fractures.
C’est en Suède, en Norvège, aux Etats-Unis, en Allemagne, en Irlande, au
Royaume-Uni, en Finlande, en Australie et en Nouvelle Zélande que l’on
consomme le plus de lait par personne et par an. C’est aussi dans ces pays que le
nombre annuel de fractures du col du fémur est le plus élevé.
A contrario, en Chine où l’on consomme encore très peu de lait (10 kg/pers/an), le
taux de fracture du col du fémur est l’un des plus faibles au monde (5 à 6 fois plus
basse qu’aux Etats-Unis). De même, au Togo l’ostéoporose est extrêmement rare
(il consomme moins de 10 kg/pers/an de lait) ainsi qu’au Cambodge, au Laos, en
Nouvelle Guinée…
Figure 5 : rapport entre consommation de lait et fractures du col du fémur
21
Pr JOYEUX Henri, Dr SCHNEBELEN Arnal. Comment enrayer l’épidémie des cancers du sein ? Editions FX de
Guibert, 2007.
Le lien entre prévention de l’ostéoporose et consommation de lait est donc
discutable.
Cependant, l’autre « cheval de bataille » du mouvement anti-lait est encore plus
grave puisqu’il dénonce le lait comme étant un accélérateur du cancer.
Lorsque l’être humain boit du lait, il absorbe du même coup les substances
destinées à favoriser la croissance du veau. Leur concentration dans le lait de
vache dépend du stade de la traite. La plus connue de ces substances s’appelle
IGF-1 (insulin-like grouwth factor 1). C’est un facteur de croissance, un agent qui
conduit les cellules à se multiplier, mais pas seulement les cellules saines.
Il donne donc « un coup d’accélérateur aux cellules précancéreuses et
cancéreuses. Plusieurs études ont trouvé que les personnes qui avaient les taux
d’IGF-1 les plus élevés dans le sang avaient un risque augmenté de cancer du
sein avant 50 ans mais aussi des cancers de la prostate et du poumon ».22
Ces deux pathologies sont les principales incriminées par une consommation de
lait trop importante. Mais ce ne sont pas les seules, on retrouvera d’autres
maladies comme les problèmes d’acné ou encore l’otite…
Le lait serait donc un aliment indispensable à notre alimentation, mais à
consommer sans excès.
2.2.3 La multitude des discours alimentaires
Comme nous venons de le voir, il existe de très nombreux discours nutritionnels
contradictoires autour du lait.
Certains auteurs comme Claude Fischler ou Jean-Pierre Poulain parleront
d’ailleurs de « brouhaha diététique » et de « cacophonie alimentaire » :
«Cet affrontement passe par un affrontement sur le terrain de la
recherche, un choc d’experts et de scientifiques, chacun suscitant et
invoquant des études à l’appui de ses thèses. […] Les discours
22
SOUCCAR Thierry. op.cit. 2008, p.147.
diététiques se mêlent, s’affrontent ou se confondent aux discours
culinaires et gastronomiques, les recueils de régimes aux recueils de
recettes, les manuels de nutrition aux guides gastronomiques. »23
Cette cacophonie des discours traduit la modernité alimentaire.24
Dans ce contexte, le mangeur se trouve désorienté. Cela crée de l’anxiété par
rapport à son choix des aliments.
On peut donc se demander quelle est la part des arguments scientifiques et la part
des arguments magiques dans la consommation du lait et des produits laitiers.
23
24
FISCHLER Claude. L’homnivore. Op.cit. 2001, p.202.
POULAIN Jean-Pierre. Sociologies de l’alimentation. Paris : éd. PUF, 2002, p.53.
Partie 2 : Pourquoi le mangeur consomme-t-il des produits
laitiers ?
Dans cette partie, nous allons nous intéresser à ce qui pousse les consommateurs
à choisir de consommer des produits laitiers. C’est pourquoi nous allons essayer
de répondre à la problématique suivante : quelle est la part des arguments
scientifiques et celle des arguments magiques dans leur choix ?
Pour cela, nous allons aborder 3 hypothèses susceptibles de répondre à la
problématique posée.
1. Hypothèse 1 : le rôle des allégations nutritionnelles
Les allégations nutritionnelles sur les aliments que nous consommons sont de
plus en plus nombreuses. Nous allons voir quelles sont celles inscrites sur les
produits laitiers et dans quelle mesure elles peuvent influencer le mangeur dans
son choix alimentaire.
1.1 Les allégations en général
Il existe différents types d’allégations : les allégations nutritionnelles et les
allégations santé. On les trouve sur les étiquettes des produits. Le consommateur
doit donc être habitué à la lecture des étiquettes pour les comprendre et les
interpréter.
1.1.1 Définitions
1.1.1.1 Allégations nutritionnelles
Les allégations nutritionnelles se définissent règlementairement comme suit:
« On entend par allégation nutritionnelle toute représentation et tout
message publicitaire qui énonce, suggère ou implique qu’une denrée
alimentaire possède des propriétés nutritionnelles particulières :
- soit en raison de l’énergie qu’elle fournit ou ne fournit pas, ou qu’elle
fournit à un taux réduit ou accru ;
- soit en raison des nutriments qu’elle contient ou ne contient pas, ou
qu’elle contient en proportion réduite ou accrue.
La mention qualitative ou quantitative d’un nutriment ne constitue pas
une allégation nutritionnelle dans la mesure où elle est prescrite par
une disposition législative ou règlementaire ».25
Un produit ayant une allégation nutritionnelle possède donc des caractéristiques
spécifiques.
1.1.1.2 Allégations santé
Les allégations santé vont, elles, porter sur des bienfaits que le produit aurait sur
la santé. Elles sont définies de manière règlementaire et ne sont autorisées que
sous certaines conditions :
« Les allégations de santé ne sont autorisées que si les informations
suivantes figurent sur l’étiquetage ou, à défaut d’étiquetage, sont
communiquées dans le cadre de la présentation du produit ou de la
publicité faite pour celui-ci :
a) une mention indiquant l’importance d’une alimentation variée et
équilibrée et d’un mode de vie sain ;
b) la quantité de la denrée alimentaire concernée et le mode de
consommation requis pour obtenir l’effet bénéfique allégué ;
c) s’il y a lieu, une indication à l’attention des personnes qui devraient
éviter de consommer la denrée alimentaire en question,
d) un avertissement approprié pour ce qui concerne les produits
susceptibles de présenter un risque pour la santé en cas de
consommation excessive ».26
Les allégations de santé peuvent porter sur une multitude de bienfaits de la
solidité des os à la diminution des risques cardio-vasculaires.
25
26
SOROSTE Alain. Lamy Dehove. France :Editions Wolters Kluwer France, mai 2008.
SOROSTE Alain. Ibid. mai 2008
1.1.2 Les acteurs impliqués par la mise en place ces allégations
1.1.2.1 L’industrie laitière
L’industrie laitière est représentée en France par la maison du lait, qui comprend
tous les acteurs de la filière laitière.
On retrouvera les fédérations de producteurs et de transformateurs, les
organismes interprofessionnels, financiers, de formation, de liaison, les syndicats
de produits et la revue laitière.
C’est le Centre National de l’Industrie et de l’Economie Laitière (CNIEL) qui va être
en grande partie responsable de la mise en place des allégations nutritionnelles et
santé sur les produits laitiers.
En effet, en collaboration avec les acteurs de la filière laitière, le CNIEL :

organise la promotion collective des produits laitiers et en valorise l'image,

définit et met en œuvre des programmes de recherche d'intérêt collectif,

participe à la recherche nutritionnelle et à la diffusion de ses résultats.
Bien sûr, les grands groupes agro-alimentaires de la filière des produits laitiers Danone, Candia…- ne sont pas non plus étrangers à ces allégations puisque cela
leur permet de proposer des gammes de produits bénéfiques pour la santé.
Ils ont donc un rôle important dans le financement des recherches permettant
d’aboutir à des produits de qualités ayant des vertus spécifiques.
1.1.2.2 Les acteurs de la nutrition
Si des allégations peuvent être émises c’est parce que, au niveau de la nutrition,
des recommandations sont mises en place.
C’est l’agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement
et du travail (ANSES) qui est à l’origine des différentes prérogatives en matière
d’alimentation.
Elle a été créée le 1er juillet 2010 par la fusion de deux agences sanitaires
françaises : l'AFSSA (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) et
l'AFSSET (Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du
travail).
C’est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle des
ministres chargés de la santé, de l'agriculture, de l'environnement, du travail et de
la consommation.
L'ANSES intervient dans les domaines du travail, de l'environnement, de
l'alimentation, de la santé et du bien-être des animaux, de la santé des végétaux
avec un objectif prioritaire : contribuer à assurer la sécurité des travailleurs et des
consommateurs.
En santé humaine, l'Agence évalue les propriétés nutritionnelles et fonctionnelles
des aliments ainsi que l'ensemble des risques auxquels l'homme peut être exposé
au travers du travail, de l’environnement et de l'alimentation.27
L’AFSSA émet donc des recommandations qui sont relayées par les pouvoirs
publics grâce à des rapports sur la nutrition (PNNS, GEMRCN…).
A partir de ces avis, les industriels essaient de créer des produits répondant aux
critères nutritionnels et ayant des effets bénéfiques sur la santé.
1.2 Les allégations sur les produits laitiers
Les produits laitiers font partie des aliments qui ont des allégations nutritionnelles.
Figure 6 : étiquetages et allégations sur les produits laitiers
Produits laitiers en fonction de l'étiquetage
90%
22%
Produits avec
étiquetage
nutritionnel
8%
Produits avec au Produits avec au
moins une
moins une
allégation
allégation santé
nutritionnelle
27%
18%
8%
Produits avec
repères
nutritionnels
Produits avec au
moins une
recommandation
de consommation
Produits avec
adjonction de
vitamines et
minéraux
Source : étude sectorielle des produits laitiers ultra frais, 2009
27
28
Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Présentation et
missions de l’ANSES [en ligne]. Disponible sur : < http://www.anses.fr/ >. (Consulté le 12-03-2011).
28
OBSERVATOIRE DE LA QUALITE DE L’ALIMENTATION. Étude Sectorielle Des Produits Laitiers
Ultra-Frais 2009. Mai 2010, p.14.
Nous allons donc voir celles qui les concernent à savoir des allégations
nutritionnelles et des allégations santé.
Le tableau 4 présente les allégations nutritionnelles que l’on retrouve sur les
produits laitiers, les allégations les plus citées et celles que l’on retrouve le moins
souvent.
Tableau 4 : liste des allégations nutritionnelles les plus citées sur les produits
laitiers
Nombre de produits
concernés
142
119
64
30
19
12
12
11
9
8
8
8
7
7
7
6
5
4
4
4
Allégations nutritionnelles
0% de matières grasses
Source de calcium
0% de sucres ajoutés
Enrichi en vitamines D
Source naturelle de calcium
Sources de fibres
Allégé en sucres
Source de vitamine D
Source de protéines
Pauvre en graisses saturées
Source naturelle de protéines
Source de vitamines E
Sans matières grasses
Contient du bifidus
0,9% de matières grasses
Source naturelle de vitamines et minéraux
Sans sucres ajoutés
A teneur garantie en calcium
Faible teneur en matières grasses
Riche en calcium
Source : étude sectorielle des produits laitiers ultra frais, 2009 29
Si on s’intéresse aux plus citées, on remarquera qu’elles portent soit sur un
allègement en sucre ou en graisses soit sur un enrichissement en calcium ou en
vitamines D.
Pour les allègements, ces allégations nutritionnelles vont intéresser les personnes
faisant un régime. Pour la source de calcium, elles interpelleront les publics vus
29
OBSERVATOIRE DE LA QUALITE DE L’ALIMENTATION. Étude Sectorielle Des Produits Laitiers
Ultra-Frais 2009. Mai 2010, p.20.
dans la première partie qui sont concernés par la solidité des os (enfants,
adolescents, femmes ménopausées, personnes âgées).
Car même s’il n’y a pas explicitement d’informations sur la santé, celles-ci, pour le
consommateur, en découlent automatiquement.
Nous allons maintenant voir dans le tableau 5, quelles sont les allégations santé
qui concernent les produits laitiers.
Tableau 5 : liste des allégations santé les plus citées sur les produits laitiers
Nombre de produits
concernés
23
14
9
6
4
4
3
3
3
3
3
3
3
Allégations de santé
Aide à réguler le transit dès 15 jours
Très digeste
Agit au cœur de la flore intestinale
+ de vitamines D, calcium mieux fixé
Le calcium intervient dans le développement du tissu
osseux
Renforcez votre flore intestinale
Le calcium intervient dans le maintien de votre capital
osseux
Participe à renforcer les défenses naturelles de
l’organisme dans le cadre d’une consommation
quotidienne
Consommé quotidiennement dans le cadre d’une
alimentation variée et équilibrée et d’un mode de vie sain,
aide à réguler le transit lent dès 15 jours
Aide à renforcer les défenses naturelles
Réduit le mauvais cholestérol de 10%
Le lactobacillus rhamnosus aide à renforcer les défenses
naturelles
Source de vitamine E, qui contribue à la protection des
membranes cellulaires
Source : étude sectorielle des produits laitiers ultra frais, 2009
30
Les allégations santé vont, elles, porter principalement sur le confort digestif, sur
la solidité des os et sur les défenses immunitaires.
Ces indications vont donc concerner tous les mangeurs.
30
OBSERVATOIRE DE LA QUALITE DE L’ALIMENTATION. Étude Sectorielle Des Produits Laitiers
Ultra-Frais 2009. Mai 2010, p.23.
J’ai réalisé un mini-questionnaire (annexe B) pour interroger les gens sur leur
consommation des produits laitiers. Si la majorité les consomme pour leur goût,
certains évoquent comme raison de consommation le fait qu’il soit source de
calcium et donc important pour la solidité des os.
Les allégations nutritionnelles et de santé représentent donc une motivation du
choix pour le mangeur.
1.3 Le rôle des médias
Afin d’influencer le choix des consommateurs et de les pousser à acheter des
produits laitiers bons pour la santé, l’industrie laitière fait appel aux médias.
En effet, que ce soit à la télévision, à la radio ou dans des magazines et des
journaux, on trouve de nombreuses publicités incitant à acheter des produits
laitiers.
La télévision représente un axe très utile pour communiquer ces allégations.
Effectivement, à chaque tranche d’âge sa publicité. D’ailleurs, les consommateurs
les connaissent bien et sont capables d’en citer plusieurs.
Pour les jeunes enfants, on retrouvera des slogans comme un produit laitier
« c’est bon pour une croissance solide », « c’est parti pour bien grandir ».
Pour les enfants et les adolescents, il est impossible de passer à côté de la
publicité mettant en scène un loup et 3 petits squelettes mangeant des produits
laitiers. De même, certaines marques revendiquent une efficacité sur le plan
scolaire pour un produit laitier qui redonne de l’énergie.
Et, si les slogans ne suffisent pas, l’utilisation de stars du sport comme Gaël
Monfils termineront de convaincre les plus sceptiques sur les bienfaits des
produits laitiers.
Ces publicités s’adressent à la fois aux enfants qui vont demander à leurs parents
d’acheter ces produits, mais aussi aux parents qui font les courses et qui veulent
le meilleur pour leurs enfants.
Les adultes ne sont pas en reste, puisqu’on retrouvera des publicités qui mettent
en avant un goût similaire pour les produits allégés parfaits pour les régimes ; de
même pour celles qui promettent aux femmes ménopausées de voir leur risque de
fractures réduit.
Dans le mini-questionnaire (annexe B), une des questions reposait sur la
connaissance des slogans par les consommateurs.
Cela m’a permis de vérifier l’efficacité de ces publicités que, mêmes les gens qui
ne consomment pas de lait, connaissent.
L’accroche qui revient quasi-systématiquement (chez 83% des personnes
interrogées) est « Les produits laitiers sont nos amis pour la vie ».
Comme nous avons pu le constater, le mangeur se retrouve face à un vaste choix
de produits.
Cette situation d’abondance et de diversité va faire émerger de nouvelles
interrogations. Le mangeur va devenir plus exigeant, il prend conscience des
effets directs et indirects des aliments sur sa santé31.
C’est dans ce contexte, que les allégations nutritionnelles vont jouer un rôle
fondamental dans le choix de la consommation des produits laitiers.
2. Hypothèse 2 : l’influence des croyances
Le consommateur, bien que guidé par ses désirs et ses goûts, choisit également
ses aliments en fonction des représentations que ceux-ci ont pour lui.
La plupart du temps, ces choix symboliques sont pleinement conscients mais,
parfois, ils font appel à des images et des perceptions inconscientes.
Dans cette partie, nous étudierons les représentations qui poussent le mangeur à
consommer du lait.
31
PROUST Isabelle. Désirs et peurs alimentaires au XXIème siècle. Paris : Editions Dalloz, 2006, p.45.
2.1 Le lait, symbole de vie
2.1.1 Le lait, le premier aliment de la vie
Le lait maternel est l’aliment naturel du nourrisson.
L’allaitement maternel satisfait à lui seul les besoins nutritionnels du nourrisson les
six premiers mois de la vie. Compte tenu des bénéfices qu’il apporte, aussi bien à
la maman qu’au bébé, l’allaitement est une question de santé publique. C’est
pourquoi, l’Organisation Mondiale de la Santé recommande l’allaitement exclusif
pendant 6 mois.
De plus, de nombreux psychologues ont mis en évidence que ce premier contact
avec l’alimentation est déterminant pour nos comportements alimentaires
ultérieurs.
Le lait s’adapte parfaitement aux besoins de l’enfant : sa composition se modifie
dans le temps et au cours de la tétée pour le satisfaire pleinement.
Il permet une continuité de la vie intra à extra-utérine.
Allaiter représente le don de soi, la maman transmet un peu d’elle-même lorsque
le bébé ingère son lait.
C’est dans ce sens que le lait représente la vie. En effet, il accompagne la
naissance d’un enfant, il participe donc à ce processus de création de la vie.
Au Sénégal, le lait transmet le moral et la morale : « avec le lait se
transmet la bonté, la beauté, l’angoisse, l’intelligence… » […] Le lait
donné symbolise la générosité, le dévouement, l’abandon et l’oubli de
soi. »32
On retrouve ici la notion d’incorporation de Claude Fischler décrite dans la
première partie.
Dans le mini-questionnaire (annexe B), 27% des personnes évoquent en
repensant au lait la maternité, l’allaitement et les bébés. Cela montre l’image de
vie du lait.
32
BLIN Dominique et al. L’allaitement maternel : une dynamique à bien comprendre. 2ème édition.
Ramonville : Editions Erès, 2007, p.91-94.
2.1.2 La couleur blanche
La pureté du lait est traduite par sa couleur blanche. C’est d’ailleurs pour cela que
les femmes se mariaient en blanc pour marquer leur virginité.
De plus, on parle bien de neige blanche immaculée lorsque celle-ci n’a pas été
souillée par différentes traces.
Par nature, ce qui est blanc est à caractère sacré, pur, merveilleux, magique.
Le blanc, pour certains n’est pas une couleur, c’est la synthèse de toutes les
couleurs qui composent le spectre solaire :
« Pour les Chinois par exemple, le blanc est l’absence de couleur. Par
analogie, il symbolise également la virginité, l’âme délivrée des
tourments de la chair et de la passion, la beauté dépouillée de toute
parure, la nudité, la transparence, la clarté, la sincérité, la vertu, la paix,
la justesse, la vérité, l’incorruptibilité. »33
Le blanc renvoie également à la vie après la mort puisque, par exemple, les anges
de Dieu sont entièrement vêtus de blanc.
Dans l’Antiquité, on attribuait aussi le blanc aux spectres et aux apparitions.
De même, le blanc symbolise la paix puisqu’en temps de guerre, le blanc
s’opposait au rouge et on brandissait le drapeau blanc pour marquer la fin des
hostilités.
Cette couleur traduit d’une manière générale le commencement du monde, du
temps, et donc la vie sur terre.
On retrouve cette notion dans le dictionnaire des symboles fondamentaux :
« Le blanc est une des quatre couleurs utilisées par le peintre
paléolithique. Il se sert des parois comme d’une zone blanche et
réservée, apposant les autres couleurs en fonction d’aspérité de la
roche ou de projection de la vision. Ainsi, la couleur blanche précède
33
COLIN Didier. Dictionnaire des symboles, des mythes et des légendes. Italie : Editions Hachette, 2000.
toute création. Elle se situe à l’aube des temps, d’où l’image de pureté,
de neutralité, d’innocence, de virginité qu’on lui associe. »34
2.2 Le lait, souvenir d’enfance
Dans les réponses du mini-questionnaire, 37 % des personnes interrogées ont
répondu que le lait évoquait l’enfance, le petit déjeuner.
Le lait renvoie donc à une image rituelle du petit déjeuner, à un souvenir
d’enfance, de famille. Cela fait appel à des souvenirs affectifs.
« Manger est un acte de métissage permettant la rencontre et la
cohabitation symbolique de soi et de l’autre ».35
Ici, l’autre représente celui qui a préparé le petit déjeuner, souvent la mère.
Le lait rappelle donc des souvenirs agréables, une époque d’insouciance où les
parents prenaient soin de l’enfant, une période pendant laquelle l’enfant se sentait
en sécurité entouré par sa famille.
Si l’on s’intéresse à la symbolique de la jeunesse, de l’enfance, on va avoir
comme interprétation cette notion d’innocence de l’enfance :
« Pour l’homme paléolithique, l’enfance et la jeunesse représentent la
promesse de vie, le potentiel qui n’a pas encore trouvé le moyen de
s’exprimer. »36
Le lait renvoie donc ici à une image positive.
2.3 Le lait, symbole de nature et de terroir
2.3.1 La nature
Les personnes interrogées dans le mini-questionnaire évoquent à 54 % l’image
d’une vache en pensant au lait ; cela leur fait aussi penser à la montagne, à
l’herbe fraîche, à la campagne, à la ferme, aux animaux de la ferme, à la nature.
34
PHILIBERT Myriam. Dictionnaire des symboles fondamentaux. Monaco : Editions du rocher, 2000, p.65-66.
CORBEAU Jean-Pierre, POULAIN Jean-Pierre. Penser l’alimentation. Entre imaginaire et rationalité.
Toulouse : Editions Privat, 2008, p.108.
36
PHILIBERT Myriam. Ibid, 2000, p.226.
35
Le lait a donc ici une image de paysage de vacances, calme, où il y a beaucoup
d’espace, de libertés.
Le symbolisme de la vache est aussi très important. La vache représente la mère
nourricière. Elle illustre la féminité, la maternité.
Elle représente la terre, dans la mythologie, par son union avec le ciel (le taureau).
Le lait qu’elle produit a un caractère sacré, puisque le lait était une des boissons
des dieux.
Dans la mythologie Egyptienne, Nout déesse du ciel est parfois représentée
comme une vache céleste avec un corps constellé d’étoiles et un pis nourricier. 37
L’image de la vache renvoie donc à la fois à la nature (et à mère nature) mais
aussi à la terre.
2.3.2 Le fromage, symbole de terroir
Pour 16 % des consommateurs, le lait est synonyme de fromage.
Pour eux, lorsqu’ils l’évoquent, cela ne signifie pas simplement un bon plateau de
fromage, ils traduisent l’authenticité, le terroir, le savoir-faire.
Le lait, via le fromage, est ici un symbole d’identité nationale, il fait partie du
patrimoine français.
Ce qui correspond bien à l’étiquette que le Français a pour les étrangers : un
béret, une baguette et un fromage.
Le fromage est un fort symbole national puisque la France est le premier
exportateur mondial de fromage. Elle en possède actuellement plus de 400
variétés différentes dont la fabrication est de plus en plus artisanale.
Il existe d’ailleurs une citation de Charles de Gaulle qui montre bien cette
importance du fromage : « Comment voulez-vous gouverner un pays où il existe
plus de 300 sortes de fromage ? » ; ou encore celle de Winston Churchill affirmant
qu’il y a en France « autant de fromage que de jours de l’année ».
37
PHILIBERT Myriam. Op.cit., 2000, p.65-66.
La notion d’authenticité et de terroir, se traduit par les labels. Les labels sont pour
le consommateur un gage de qualité. De nombreux fromages sont labélisés : 46
appellations d’origine contrôlée, également appellations d’origine protégée, 4
labels rouges, 3 labels régionaux et 2 qui bénéficient du certificat de conformité.
Les différentes images et symboles que représente le lait, influencent donc le
choix du mangeur dans sa consommation des produits laitiers.
3. Hypothèse 3 : la montée de la médicalisation de
l’alimentation
Le mangeur devient un expert de l’alimentation. Il est de plus en plus informé sur
ses besoins nutritionnels, il fait attention à sa santé.
Dans ce contexte, le choix des aliments devient un choix de santé.
On assiste à une montée de la médicalisation de l’alimentation.
3.1 La médicalisation de l’alimentation
Cette conviction que l’aliment ingéré doit être bon pour la santé ne date pas d’hier.
Déjà dès le 5ème siècle avant Jésus Christ, Hippocrate parlait de l’importance, pour
la santé, d’un régime sain : « Que ton aliment soit ta seule médecine ».
Un des principes de l’école d’Hippocrate était qu’il fallait essayer de combattre la
maladie et de corriger les faiblesses du corps par les qualités intrinsèques des
aliments38.
3.1.1 La transition nutritionnelle39
Pour comprendre ce phénomène de médicalisation de l’alimentation, il faut
s’intéresser à son contexte d’apparition.
38
RAOULT-WACK Anne-Lucie. Dis-moi ce que tu manges… Paris : Editions Découvertes Gallimard, 2001,
p.32.
39
POULAIN Jean-Pierre. Sociologies de l’alimentation. Paris : Editions : PUF, 2002, p.109-116.
On a assisté tout d’abord à une transition épidémiologique. On est passé d’un taux
de mortalité élevé et d’une espérance de vie courte à une espérance de vie élevée
et à un taux de mortalité faible.
La transition alimentaire qui accompagne cette transformation épidémiologique va
comporter différentes étapes :
-
contexte de famine et disette : accès difficile à l’alimentation ;
-
progrès agronomiques qui ont permis d’assurer une alimentation suffisante
à la population ; c’est le début de la transition : il y a une esthétisation de
l’alimentation et du goût ;
-
contexte d’abondance alimentaire : on observe une nouvelle esthétique du
corps, la minceur devient un signe de distinction ;
-
contexte de surabondance alimentaire : développement de ce modèle de
minceur qui devient synonyme de santé ;
-
apparition de l’anomie alimentaire, de la dérégulation : intensification de la
pression du modèle de l’esthétique corporelle de minceur ayant pour
conséquence la venue de troubles du comportement alimentaire.
Parallèlement à ces étapes, il y a donc eu une disparition des maladies
infectieuses et une apparition des maladies dégénératives.
Afin de combattre ces nouvelles maladies, au XXème siècle, il y a une progression
des connaissances scientifiques dans le domaine de la diététique et de la
nutrition.
Ces connaissances se sont diffusées au sein de toute la population et ont
participé à l’apprentissage et à la prévention de ces maladies.
Cependant, ces avancées rapides de la science et la durée de vie très courte des
produits aboutissent à des recommandations fluctuantes, éphémères et parfois
contradictoires40.
40
RAOULT-WACK Anne-Lucie. Op.cit., 2001, p.33.
3.1.2 La montée des régimes
Le mangeur se retrouve face à un hyper- choix pour son alimentation mais aussi à
une multitude de régimes liés à cette médicalisation de l’alimentation et surtout ce
culte de la minceur.
«
Plus la réalité culturelle devient complexe, plus on fait des
distinctions subtiles et plus les sous-groupes sont nombreux. En
matière d’alimentation, cela se manifeste de façon particulière au XX ème
siècle par l’envolée du nombre de régimes alimentaires et de
mouvements diététiques. Le lien entre alimentation et santé est l’un des
aspects les plus débattus des habitudes alimentaires actuelles ».41
Dans un contexte où l’esthétique corporelle est de plus en plus importante, le
mangeur choisit ses aliments pour rester mince et en forme. Pour cela, il s’appuie
sur les nombreux régimes qu’il peut trouver dans des livres, des magazines ou
encore sur internet.
En effet, de nos jours, il n’y a pas un seul magazine féminin qui ne possède pas,
dans son sommaire, une page consacrée à tel ou tel régime.
Les livres sur la nutrition écrits par des nutritionnistes et concernant des nouveaux
régimes (macro nutrition, micro nutrition, hyper protéiné) fleurissent eux aussi sur
tous les étals des librairies.
Il y a donc un engouement pour ces régimes minceurs où l’aliment devient le plus
important pour la santé.
3.1.3 Quand l’alimentation devient un facteur de bonne santé
Dans le livre L’alimentation ou la troisième médecine, le Dr J Seignalet42 exposera
au fil des pages l’importance d’une alimentation saine pour avoir une bonne santé.
41
MAKELA Johanna. Alimentations modernes et classification des aliments. Colloque sur les alimentations
particulières, 19 janv. 2012.
42
SEIGNALET Jean. L’alimentation ou la troisième médecine. 5ème édition. Paris : Editions de l’œil, 2004.
L’alimentation est le premier outil pour se battre contre les maladies car, là où la
médecine ne soigne que les symptômes, l’alimentation, elle, soigne la cause,
l’origine du problème.
C’est le cas,
par exemple, dans la maladie cœliaque où l’on exclut de
l’alimentation le gluten qui cause cette pathologie.
« Pour mieux prévenir ou traiter les états pathologiques, il faut d’abord
comprendre leur mécanisme. Ceci est impossible si l’on se cantonne
dans une seule spécialité médicale. Mais bien des mystères
s’éclaircissent si l’on parvient à développer une vision globale, basée
sur des connaissances dans les principaux secteurs de la médecine et
dans diverses branches scientifiques. Une réflexion poussée permet
souvent de relier des faits apparemment disparates et de reconstituer la
chaine des événements qui conduisent au développement d’une
maladie. L’alimentation moderne est le premier maillon de cette chaine
qui aboutit aux divers troubles : auto-immunité, encrassage et
élimination ».43
Cette citation montre bien l’importance d’une alimentation saine pour être en
bonne santé.
L’ensemble de la population Française admet un lien entre l’alimentation et la
santé.
Ainsi, selon une étude dans le baromètre santé nutrition du CFES en 1996, les
Français considèreraient que l’aliment est un facteur impliqué dans les maladies
cardio-vasculaires, le diabète, l’ostéoporose et le cancer.44
Dans le mini-questionnaire, à la question « Pensez-vous que le lait a des effets
bénéfiques sur la santé ? », 82,8% des consommateurs interrogés répondent que
le lait a un rôle important pour être en bonne santé.
Les rôles qui lui sont attribués le plus souvent sont : favorise la croissance, lutte
contre l’ostéoporose, contribue à satisfaire la ration journalière de calcium.
Cela confirme bien cette perception de l’aliment-santé.
43
SEIGNALET Jean. Ibid. 2004, p.591.
POULAIN Jean-Pierre. Manger aujourd’hui, attitudes, normes et pratiques. Toulouse : Editions Privat,
2008, p.121-128
44
3.2 Le lait, un alicament ?
3.2.1 Alicament : définition
Le terme alicament provient de la contraction du mot aliment et médicament. Bien
qu’il n’existe pas de définition règlementaire, cela désigne un aliment ayant des
vertus thérapeutiques, ayant un impact positif sur la santé physique et psychique.
Les nutriments pouvant avoir des effets potentiellement positifs sur la santé sont
les fibres, certaines vitamines (B9, A, C, E), les minéraux comme le calcium, les
flavonoïdes (propriétés anti-oxydantes), les phyto-œstrogènes (aide à éliminer le
cholestérol), les pré-biotiques et pro-biotiques…
Dans le cas des produits laitiers, les nutriments qui pourront leur valoir le titre
d’alicament sont le calcium, comme nous l’avons vu dans la première partie, ainsi
que les pré-biotiques et pro-biotiques rajoutés industriellement, principalement aux
yaourts.
3.2.2 Yaourt et pro-biotiques
Pro-biotique : organisme vivant ayant un effet favorable sur l’organisme
Ce type d’aliment est de commercialisation récente. Ils appartiennent à la famille
des laits fermentés non traditionnels.
Ils vont ressembler au yaourt, mais la flore sera spécifique, ce qui va leur donner
leurs aromes caractéristiques.
Ils sont préparés avec du lait de vache mais de plus en plus souvent avec du lait
de chèvre et de brebis.
Les bactéries classiques du yaourt sont lactobacillus bulgaricus et streptococcus
thermophilus. On va rajouter à ces deux bactéries des bactéries thermophiles qui
sont pour la plupart des bactéries intestinales :
-
lactobacillus acidofilus et casei : renforce le système immunitaire
-
lactobacillus bifidus ou bifidobacterium longum ou bifido bifidum : régule le
transit intestinal.
On attribue à ces laits fermentés des effets pro-biotiques. Les ferments lactiques
sont des bactéries qui colonisent l’intestin en se combinant à la flore intestinale, ils
permettent donc de réguler, de rééquilibrer la flore, d’empêcher le développement
des virus (gastro-entérite). Ils ont un effet hypocholestérolémiant, antimutagène
(éviterait le cancer).
Ces effets ne peuvent s’observer que s’il y a une consommation régulière et
suffisante de laits fermentés.
3.2.3 Alicament : bénéfices ou supercherie commerciale ?
Dans les pays de l’Union européenne, une directive interdit aux producteurs
d’attribuer aux denrées alimentaires des propriétés de prévention, de traitement et
de guérison. Malheureusement, les principes énoncés dans ce texte sont
susceptibles d’interprétations.
« Si un spot publicitaire allègue qu’en buvant chaque jour une bouteille
d’un produit X vous pouvez espérer diminuer sensiblement votre
cholestérol, cette formulation entre-t-elle dans le champ d’application de
l’interdiction d’attribuer aux denrées alimentaires des propriétés de
traitement ? À y regarder de près, la réponse est non, puisque la
publicité n’affirme pas que la consommation du produit fera baisser
votre taux de cholestérol mais que vous êtes en droit de l’espérer ».45
La notion d’alicament n’étant pas approuvée par les autorités compétentes en
matière de nutrition (AFSSA), il semblerait que cela ne soit qu’un pur produit
marketing.
Le fait que Danone se soit retrouvé obligé de retirer la mention « aide à renforcer
les défenses naturelles » de son produit Actimel © est un exemple supplémentaire
qui conduit à se demander si ces produits laitiers sont vraiment bénéfiques pour la
santé.
C’est dans ce contexte où notre façon de manger influence notre santé, dans un
bon ou un mauvais sens, que la médicalisation de l’alimentation va avoir un
impact sur la consommation des mangeurs, notamment en ce qui concerne les
produits laitiers.
45
Manger Bouger. Alicaments : Des Bénéfices Nutritionnels Peuvent Cacher Des Déséquilibres En Sel, Sucre Et
Graisses [en ligne]. Disponible sur : < http://www.mangerbouger.be/ALICAMENTS-DES-BENEFICES>.
(Consulté le 13-03-2012).
Partie 3 : Méthodologie
Le lait fait partie de l’alimentation des français. Comme nous l’avons vu, il existe
divers possibilités quant à ce qui pousse les mangeurs à consommer ou non des
produits laitiers. Cela m’a conduit à envisager trois hypothèses : le rôle des
allégations nutritionnelles, l’influence des croyances et la montée de la
médicalisation de l’alimentation. L’application sur le terrain va permettre de les
confronter et de les vérifier.
1. Le choix de la méthode d’enquête
1.1 La méthodologie en général46
La méthodologie est la réflexion préalable sur la méthode qu’il convient de mettre
au point pour conduire une recherche.
Il existe plusieurs méthodes qui permettent de collecter de l’information :
-
l’observation directe : l’observateur se rend sur le terrain pour étudier un
groupe au naturel ;
-
l’observation participante : l’observateur participe réellement aux activités
des sujets observés ;
-
le questionnaire : technique d’élaboration et de collecte de données
chiffrées
« il prend la forme d’une série de questions rédigées et
préétablies, et posées de façon standardisée à un échantillon
d’individus, de façon à établir des liaisons statistiques
destinées à expliquer leurs pratiques, conduites ou opinions à
partir de leur position dans l’espace social ».47
-
les entretiens individuels non directifs : l’enquêté organise son discours à
partir d’un thème qui lui est proposé, il choisit librement les idées qu’il va
développer sans limitation, sans cadre établi ;
-
les entretiens individuels semi-directifs : l’enquêteur s’est fixé des zones
d’exploration et veut obtenir que le sujet traite et approfondisse un certains
nombres de thèmes ;
46
BERTHIER Nicole. Les techniques d’enquête en sciences sociales. Méthodes et exercices corrigés. Paris :
Editions Armand colin, 2010.
47
SAVARESE Eric. Méthodes des sciences sociales. Poitiers : Editions ellipses, 2006, p.37.
-
l’entretien collectif : entretien non directif de groupe sur un sujet précis.
1.2 Le qualitatif
Afin de récolter de l’information, il est donc nécessaire de réaliser une enquête.
Celle-ci pourra être de nature qualitative (si le sujet est peu ou pas connu, si on
veut identifier de nouveaux comportements, croyances ou formuler des
hypothèses) ou quantitative (si les données sont mesurables, généralisables,
chiffrables).
J’ai choisi de travailler avec une méthode qualitative plutôt que quantitative. En
effet, celle-ci permet d’expliquer, de comprendre les comportements humains ;
c’est donc la meilleure approche pour répondre à mes hypothèses.
Le choix, pour les individus, de consommer ou non un aliment ne relève pas du
scientifique mais plutôt du social. Il apparaît donc que,
pour cette étude, la
meilleure approche est celle qualitative car elle permet, par des entretiens
approfondis, de comprendre la motivation des mangeurs.
De plus, cette méthode permet d’identifier, chez le consommateur, de nouveaux
comportements mais aussi de nouvelles opinions et croyances qu’il sera utile de
faire émerger.
L’étude qualitative va donc permettre de comprendre les motivations de l’achat de
lait et des produits laitiers.
Tous les choix qui le mangeur fait, ne sont ni mesurables, ni quantifiables. En
revanche, prendre le temps d’écouter, de discuter, de découvrir et d’analyser des
représentations et des associations d’images fera l’objet d’une étude de nature
qualitative. C’est en recueillant le point de vue de deux choix complètement
opposés : « je consomme du lait » et « je ne veux pas en consommer » que l’on
pourra dégager des profils de consommation.
1.3 Le focus group
J’ai donc choisi le focus group qui se définit comme une discussion collective, une
réunion de groupe.
« L’entretien collectif permet un transfert progressif du pouvoir de
l’enquêteur vers le groupe : à plusieurs, les personnes interrogées
acquièrent une influence sur la définition des thèmes et autres
questions pertinentes, alors que ce rôle leur aurait plus probablement
échappé dans le cadre d’un entretien collectif […] il a la capacité de
saisir des discours prononcés avec une certaine spontanéité, car la
situation de recherche reste à priori proche des interactions sociales
concrètes. En effet, les participants sont confrontés à la contradiction,
prennent position en relation avec d’autres acteurs ».48
C’est pourquoi, il m’a semblé que le focus group était le meilleur moyen d’apporter
des réponses à mes hypothèses.
En effet, il permet de faire discuter les gens entre eux ; on observe donc à la fois
un avis individuel et un avis de groupe. Cette double opinion pourra permettre de
mettre en évidence le rôle de l’alimentation sur la santé.
Il est également intéressant car la communication, les interactions entre les
personnes vont fournir plus de réponses en matière de croyances et d’imaginaires
ce qui permettra de répondre à l’hypothèse sur l’influence des croyances.
Il fait aussi apparaître une synergie de groupe avec des interactions entre les
personnes ce qui donne un débat très enrichissant et permettra d’appréhender au
mieux le lait et son statut.
C’est donc dans le cadre du focus group que j’essaierai de valider mes
hypothèses.
Pour y répondre, il me paraît plus judicieux de prévoir deux réunions, l’une avec
un groupe de consommateurs de lait, l’autre avec un groupe de non
consommateurs. En effet, le focus group nécessite que l’échantillon soit
homogène par rapport au problème mais hétérogène en ce qui concerne ses
membres.
Afin d’avoir une meilleure synergie, les groupes seront restreints : 10 personnes
par groupe.
48
SAVARESE Eric. Méthodes des sciences sociales. Poitiers : Editions ellipses, 2006, p.23.
2. Le protocole d’enquête
2.1 Choix de l’échantillon
Pour le focus group, l’échantillon sera composé de 10 personnes.
Comme nous l’avons vu précédemment, il sera préférable de faire deux focus
groupes différents.
Parmi les différents critères possibles pour la sélection de mon échantillon, j’ai
décidé d’en choisir 4 qui, pour moi, semblaient les plus adaptés pour répondre à
mes hypothèses.
2.1.1 Le groupe des consommateurs de lait
2.1.1.1 Le sexe
Les hommes et les femmes consomment du calcium. Cependant, les femmes sont
plus concernées car, généralement, ce sont elles qui font les courses pour leurs
enfants et leur mari. De plus, elles sont davantage touchées par les problèmes
d’ostéoporose et de fracture à la ménopause.
Il faudra qu’il y ait une majorité de femmes présentes dans l’échantillon.
Tableau 6 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur sexe
Femmes
Hommes
7
3
2.1.1.2 L’âge
Afin de répondre aux hypothèses, il me paraît important que les âges des
participants soient assez différents. En effet, on a vu que les discours nutritionnels
étaient ciblés en fonction des populations et que les symboles variaient en
fonction des âges de la vie.
Il faudrait donc qu’il y ait des enfants, adolescents et jeunes enfants, car c’est une
population qui est particulièrement visée par la consommation des produits laitiers.
Cependant il ne me semble pas judicieux de faire interagir des adultes et des
enfants. En effet, les adolescents ont souvent un rapport conflictuel avec les
adultes, et les jeunes enfants sont trop timides et n’oseraient pas argumenter leurs
idées.
C’est pourquoi, il serait donc plus intéressant d’avoir dans l’échantillon, des
parents qui seraient le reflet des envies de leurs enfants.
L’échantillon se composera également de quelques jeunes adultes - 18-30 ans - et
d’adultes - 30-55 ans - qui représenteront la population bien portante.
Enfin, il comprendra des personnes ayant un âge supérieur à 55 ans qui
représenteront la population avec un risque de fracture plus important, population
également ciblée pour une augmentation de la consommation de calcium.
Tableau 7 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur âge
Jeunes adultes
18-30 ans
4
Adultes
30-55 ans
3
Adultes
> 55 ans
3
2.1.1.3 Le statut marital
Comme nous venons de le voir, il est nécessaire de retrouver au sein de
l’échantillon des parents qui seront représentatifs de la voix de leurs enfants. Les
enfants n’étant pas ciblés de la même manière en fonction de leur âge, on
choisira, dans l’échantillon, des couples qui ont des enfants de moins de 10 ans et
de plus de 10 ans. Il y aura également des célibataires pour que tous les statuts
soient représentés.
Tableau 8 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur statut
marital
Couples ayant un ou
Couples ayant un ou
plusieurs enfants de
plusieurs enfants de plus
Célibataires
moins de 10 ans
de 10 ans
4
3
3
2.1.1.4 Le niveau d’éducation
Les hypothèses utilisent, pour les allégations santé, des termes nutritionnels. Il
sera donc nécessaire d’avoir des niveaux d’étude différents pour voir comment
ces notions sont appréhendées et comprises. Il faudra donc que l’échantillon
comprenne des gens qui ont fait peu d’études - CAP, BEP - qui se sont arrêtés au
baccalauréat et d’autres qui ont fait des études supérieures.
Tableau 9 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur niveau
d’étude
BTS/ IUT et bac
CAP/ BEP
Baccalauréat
> bac +3
+3
2
3
3
2
2.1.2 Le groupe des non-consommateurs de lait
2.1.2.1 Le sexe
La non consommation de lait peut aussi bien concerner les hommes que les
femmes. Pour avoir un panel représentatif, on choisira donc autant d’hommes que
de femmes.
Tableau 10 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur sexe
Femmes
Hommes
5
5
2.1.2.2 L’âge
L’âge des participants devra couvrir le plus de tranches d’âge différentes possible.
En effet, on a peu de données sur ces non-consommateurs. Pour être sûre d’avoir
un échantillon représentatif, il y aura un nombre équivalent de personnes dans
chaque catégorie d’âge.
Tableau 11 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur âge
Jeunes adultes
18-30 ans
4
Adultes
30-55 ans
3
Adultes
> 55 ans
3
2.1.2.3 Le statut marital
Sur ce point, il sera aussi nécessaire de retrouver, au sein de l’échantillon, des
parents représentatifs de la voix de leurs enfants. Cette catégorie est d’autant plus
importante que l’on connaît les risques d’une carence en calcium chez les jeunes
enfants. Il sera donc intéressant que ces personnes soient les plus nombreuses.
Tableau 12 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur
statut marital
Couple ayant un ou
plusieurs enfants de
moins de 10 ans
4
Couple ayant un ou
plusieurs enfants de plus
de 10 ans
2
Célibataires
4
2.1.2.4 Le niveau d’éducation
Pour les mêmes raisons que pour les consommateurs de lait, il faudra des
personnes de niveaux d’études différents pour évaluer les niveaux de
compréhension.
Tableau 13 : répartition des 10 personnes de l’échantillon en fonction de leur
niveau d’étude
CAP/ BEP
Baccalauréat
2
3
BTS/ IUT et bac
+3
3
> bac +3
2
2.2 La mise en place
Le lieu choisi devra être assez central et facile d’accès pour que tout le monde
puisse y venir. Il faudra qu’il soit desservi par le métro pour que les gens non
motorisés puissent s’y rendre et qu’il y ait à proximité un parking où ceux qui ont
une voiture pourront se garer.
La salle devra être suffisamment grande pour accueillir toutes les personnes et
pour que la réunion de groupe se déroule bien.
Le rendez-vous sera fixé aux alentours de 18h pour laisser le temps aux
personnes qui travaillent de s’y rendre. Commencer à 18h permettra également de
ne pas finir la réunion trop tard, puisque celle-ci durera environ 2 heures.
2.3 Le déroulement
Les personnes seront installées en « U » avec des tables devant elles pour
qu’elles puissent écrire si besoin est.
Cette disposition permettra à l’animateur de voir tout le monde et aux personnes
présentes de pouvoir interagir plus facilement avec les autres membres du
groupe.
La séance sera filmée par un camarade afin de faciliter, après la séance, le
traitement et l’analyse des données.
3. Le guide d’animation
Le guide d’animation pour le groupe des consommateurs de lait sera présenté en
annexe C. Celui pour les non-consommateurs sera un dérivé du premier.
3.1 La construction du guide
La séance commencera par la présentation de la personne qui filmera et de
l’animateur. Puis ce dernier expliquera le déroulement de la discussion et les
règles.
Ensuite, ce sont les participants qui se présenteront afin de mieux se connaître.
Pour faciliter l’interaction, ils placeront devant eux, un papier avec leur prénom.
Avant de commencer, on réalisera un exercice d’évocation avec un mot qui n’a
rien à voir avec le thème de la réunion pour que chaque personne parle.
Dans un premier temps, on proposera le même type d’exercice mais sur
l’alimentation en général. On n’abordera pas directement les produits laitiers pour
voir à quelle place ils se situent dans l’alimentation globale des consommateurs.
Après cet exercice, on fera lister tous les produits laitiers que les mangeurs
connaissent et les mots qui leur correspondent.
Ensuite, on essaiera de faire classer, par les participants, les produits laitiers en
différents groupes.
Dans un deuxième temps, on va chercher à savoir quels sont les bienfaits
ressentis par les consommateurs lorsqu’ils mangent des produits laitiers. Puis on
analysera correspondance avec les indications inscrites sur les produits.
On leur fera définir ce qu’est une allégation nutritionnelle pour eux ; sont-ils
d’accord avec ces étiquetages ? On essaiera de savoir si, en ce qui les concerne,
l’alimentation et la santé sont liées.
Dans un troisième temps, on tentera de comprendre les motivations d’achat de
ces différents produits, la consommation personnelle et celle des enfants.
On utilisera une projection temporelle pour argumenter sur cette consommation de
lait. On leur proposera de se projeter en 2030 et d’expliquer pourquoi la
consommation de lait aura doublé.
Enfin, on proposera de faire un découpage : à partir de magazines divers, chaque
participant découpera des images, des textes, des lettres, des symboles qui lui
évoqueront les produits laitiers ; puis il les collera sur un grand tableau blanc.
Pour cet exercice, les participants seront en autonomie, l’animateur les laissera
faire sans se mêler de leur choix.
Par la suite, on affichera le grand tableau et chacun donnera les raisons de ses
choix d’images, lettres…
Pour conclure, on débriefera sur le choix de la consommation des produits laitiers
et sur leurs bienfaits.
Les participants auront un temps, à la fin de la réunion, pour remplir un
questionnaire (auto-administré) sur les produits laitiers.
3.2 Les résultats attendus
Les résultats de cette réunion de groupe seront, probablement, que la
consommation de lait et de produits laitiers est influencée par deux variables : la
santé et le symbolique.
En effet, dans le contexte actuel, les études montrent que les choix des mangeurs
sont guidés par le désir d’une alimentation saine et donc par l’achat de produits
bons pour la santé.
De plus, la symbolique de l’aliment ingéré et les images perçues auront toujours
un rôle important dans le choix des aliments quels qu’ils soient.
CONCLUSION
Comme nous avons pu le voir, le lait est un aliment incontournable dans
l’alimentation des Français. Il est consommé tel quel ou sous ses formes dérivées
(fromages, yaourts…).
Cependant, cela n’a pas toujours été le cas et l’on note que sa consommation
s’est transformée au fil des années. En effet, d’un aliment complètement rejeté, il
a été progressivement accepté puis complètement intégré dans l’alimentation.
Sa consommation varie selon les régions, mais aussi en fonction de l’âge.
Certaines populations sont d’ailleurs plus ciblées que d’autres par les industries
agro-alimentaires et les recommandations nutritionnelles. C’est le cas, par
exemple des enfants, des adolescents, des femmes ménopausées et des
personnes âgées.
On assiste aussi à une multiplication des discours nutritionnels qui, souvent, sont
contradictoires. On a ainsi pu constater l’émergence de nouveaux courants antilait émettant des réserves quant à ses bienfaits et allant même jusqu’à dire que le
lait serait dangereux pour la santé.
C’est en grande partie via les médias que ces discours quels qu’ils soient et ces
recommandations sont véhiculés.
De plus, comme nous l’avons vu, le rôle des images inconscientes n’est pas
négligeable.
La
montée
de
la
médicalisation
de
l’alimentation,
les
nombreuses
recommandations nutritionnelles et allégations nutritionnelles mais aussi les
symboles que le lait représente peuvent inspirer le consommateur.
Dans ce contexte, le mangeur se retrouve désorienté vis-à-vis de ses choix
alimentaires. On observe donc une modification des motivations et des
comportements.
Pour choisir, le mangeur doit ainsi tenir compte de données à la fois scientifiques
et nutritionnels (pour le bien de sa santé) mais aussi plus sociologiques (aliment
ayant une charge symbolique importante).
Il semble qu’il soit également soumis aux pressions des groupes industriels et
scientifiques mais aussi à ses propres représentations inconscientes.
Dans ces conditions, dispose-t-il vraiment de son libre-arbitre quant à la
consommation du lait et des produits laitiers ?
Bibliographie
Ouvrages :
AMBROISE Martin et al. Apports nutritionnels conseillés pour la population
Française. Paris : Editions Tec et doc, 2001, p. 131-139 ; p. 407 ; P. 421.
BERTHIER Nicole. Les techniques d’enquête en sciences sociales. Méthodes et
exercices corrigés. 4ème édition. Paris : Editions Armand colin, 2010.
BLIN Dominique et al. L’allaitement maternel : une dynamique à bien comprendre.
2ème édition. Ramonville : Editions Erès, 2007, p.88-123.
COLIN Didier. Dictionnaire des symboles, des mythes et des légendes. Italie :
Editions Hachette, 2000.
CORBEAU Jean-Pierre, POULAIN Jean-Pierre. Penser l’alimentation. Entre
imaginaire et rationalité. Toulouse : Editions Privat, 2008, p.108.
FISCHLER Claude. L’homnivore. Paris : Editions Odile Jacob, février 2001.
Pr JOYEUX Henri, Dr SCHNEBELEN Arnal. Comment enrayer l’épidémie des
cancers du sein ? Editions FX de Guibert, 2007.
PHILIBERT Myriam. Dictionnaire des symboles fondamentaux. Monaco : Editions
du rocher, 2000, p.65-66.
POULAIN Jean-Pierre. Manger aujourd’hui, attitudes, normes et pratiques.
Toulouse : Editions Privat, 2008, p.121-128
POULAIN Jean-Pierre. Sociologies de l’alimentation. Paris : Editions PUF, 2002.
PROUST Isabelle. Désirs et peurs alimentaires au XXIème siècle. Paris : Editions
Dalloz, 2006.
RAOULT-WACK Anne-Lucie. Dis-moi ce que tu manges… Paris : Editions
Découvertes Gallimard, 2001, p. 32-36.
SAVARESE Eric. Méthodes des sciences sociales. Poitiers : Editions ellipses,
2006.
SEIGNALET Jean. L’alimentation ou la troisième médecine. 5ème édition. Paris :
Editions de l’œil, 2004.
SOROSTE Alain. Lamy Dehove. Editions : Wolters Kluwer France, mai 2008.
SOUCCAR Thierry. Lait, mensonges et propagandes. Vergèze : Editions Thierry
Souccar, 2008.
VIERLING Elisabeth. Aliments et boissons, filières et produits. 3e édition. Paris :
Editions Doin, 2008, p. 15-54.
Article/ Publications :
FISCHLER Claude. Le bon et le saint. Cahier de l’OCHA, n°1, CIDIL, p.20.
OBSERVATOIRE DE LA QUALITE DE L’ALIMENTATION. Étude Sectorielle Des
Produits Laitiers Ultra-Frais 2009. Mai 2010, p.18-23.
Thèse :
GINESTE Muriel. Les formes sociales de l’équilibre alimentaire. Thèse de doctorat
sociologie. Toulouse : Université de Toulouse II-Le Mirail, 2003, p. 258-264.
Brochures :
ASCOMED, CNIEL. Les produits laitiers comment leur en parler ? . Paris : Pôle
éditorial et enseignement du CNIEL, 2010.
CNIEL. Les produits laitiers : les meilleurs amis de la croissance. Montpellier :
Pôle éditorial et enseignement du CNIEL, 2010.
CNIEL, CIDIL. Guide d’applications pédagogiques : alimentation et activités
physiques. Yvelines : Pôle éditorial et enseignement du CNIEL, 2010.
Page web/Documents en ligne :
Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du
travail. Présentation et missions de l’ANSES [en ligne]. Disponible sur : <
http://www.anses.fr/ >. (Consulté le 12-03-2011).
CNIEL. Les produits laitiers, le lait, la vie [en ligne]. Disponible sur : <
www.produits-laitiers.com/les-produits-laitiers/varietes/le-lait/>. (Consulté le 21-022012).
CNIEL. Histoire, sociologie et images du lait [en ligne]. Disponible sur :
http://www.cniel.com/publicat/Questions_sur/pdf/QS_HS2.pdf. (Consulté le
29/02/2012).
Institut Français de la Nutrition. Actualités en nutrition [en ligne]. Disponible sur :
www.ifn.asso.fr>. (Consulté le 20-12-2011).
Manger Bouger. Alicaments : Des Bénéfices Nutritionnels Peuvent Cacher Des
Déséquilibres En Sel, Sucre Et Graisses [en ligne]. Disponible sur : <
http://www.mangerbouger.be/ALICAMENTS-DES-BENEFICES>. (Consulté le 1303-2012).
Observatoire CNIEL des habitudes alimentaires. Mémoire lactée [en ligne].
Disponible : < http://www.lemangeur-ocha.com/>. (Consulté le 22-12-2011).
Congrès/ Colloques :
OFFICE DE L’ELEVAGE. Comité lait de vache. La consommation des produits
laitiers par les ménages Français en 2006, 7 février 2008, p.4.
MAKELA Johanna. Alimentations modernes et classification des aliments.
Colloque sur les alimentations particulières, 19 janv. 2012.
Table des annexes
Annexe A : Composition nutritionnelle du lait
Annexe B : mini-questionnaire sur la consommation
des produits laitiers
p.65
p.67
Annexe C : le guide d’animation
p.69
Annexe A : Composition nutritionnelle du lait
Pour 100ml de lait
Eau : 88g
Teneur élevée, donc énergie faible
Composés azotés : 3,4g
Composés azotés protéiques : 3,2g
-
Fraction caséinique : αS1, αS2, β, Kappa caséine
Ensemble micellaire. Ce sont des monomères de caséines, ph=4,6
αS1 et β ne contiennent pas de protéines soufrées, alors que αS2 en contient et
va pouvoir créer des ponts disulfures. Ces monomères sont hydrophobes. Elles
sont insolubles.
Kappa caséine : elle a un pôle hydrophobe et un pôle hydrophile. Elle stabilise les
monomères précédentes en limitant leur précipitation.
Elle est soluble et permet la formation de micelles stables.
Ces monomères forment des submicelles et plusieurs submicelles forment des
micelles.
La stabilité des micelles est assurée par la répulsion statique des charges
négatives.
Il peut y avoir des facteurs déstabilisants comme :
- Le Ph : une diminution du Ph entraîne une diminution de l’ionisation, le calcium et
le phosphore sont dissout, les micelles se désagrègent, la fraction caséinique
précipite en dessous de 4,6. Il y a formation d’un gel lactique.
- Enzymes coagulantes : la pressure hydrolyse partiellement la kappa
caséine, il y a libération de la partie hydrophile, les micelles se resserrent et
il y a formation d’un gel de pressure.
- la température : inférieur à 4°C, les micelles se dépolymérisent et
repassent sous forme de submicelles.
Il n’y a pas de facteur limitant même si la cystéine et la méthionine sont
faiblement représentées.
- Les protéines du lactosérum : elles sont solubles.
- les albumines : α lactalbumine et le sérum albumine : forte teneur en
tryptophane
- la β lactoglobuline : forte teneur en tryptophane
- les autres protéines : immunoglobulines, protéases, peptoses
Le facteur limitant est l’histidine.
Les protéines du lactosérum sont de meilleures qualités que celles de la
caséine.
- les enzymes : protéases, lipases, lysosome, oxydases, réductases…
- les métalloprotéines : la transferrine
Composés azotés non protéiques : 0,2g
Acide urique, créatinine, acides aminés libres, urée, nucléotides
Lipides : 3,7g
Il y a 98% de TG et 2% de phospholipides (céphalines, sphingosines, lécithines)
AGS : 65% AGMI : 33% AGPI : 2% 6>3
Glucides : 4,8g
Lactose : 98%fermentation lactique ou fermentation alccolique.
Le lactose -> glucose + galactose
Inositol : 2%
IG = 45
Energie :
280KJ
Varie avec les lipides
Acides organiques :
Citrique, neuramique, orotique qui sont à l’origine du Ph légèrement acide du lait
Minéraux : 0,6g
Ils sont sous forme de sels. Ils vont se trouver dans la phase hydrique sous forme
ionisée et non ionisée.
Na : faible
K : élevée
Ca : 120mg Ca/p=1,4 Le calcium du lait est optimisé grâce à la légère acidité qui
permet de maintenir le calcium sous forme ionisée.
P : 90mg
Oligoéléments : très faible quantité d’où la supplémentation en fer des laits
pédiatriques
Vitamines :
-
-
Liposolubles :
- activité vitaminique A : plus importante dans le lait récolté en été, des
vaches élevées en plein air. Teneur couvre 20% des ANC
- vit D : couvre 10% des ANC
- vit E : couvre 2% des ANC
Hydrosolubles : la vit B2 couvre 30% des ANC, vit B12 : 0,42µg
Annexe B : mini-questionnaire sur la consommation de lait
*Obligatoire
Quel est votre âge?*

12 à 15 ans

16 à 18 ans

18 à 25 ans

25 à 45 ans

45 à 65 ans

65 ans et +
Combien consommez-vous de produits laitiers par jour?*
(lait, yaourt, fromage)

0

1

2

3

4

5 et plus
Pourquoi consommez-vous des produits laitiers?*
Pensez-vous que les produits laitiers ont des effets bénéfiques sur la santé?*

Oui

Non
Si oui, lesquels?*
Connaissez-vous des slogans de publicité pour les produits laitiers?*

Oui

Non
Si oui, lesquels ?
*
A quoi vous renvoie le lait et les produits laitiers?* (images, symboles...)
Annexe C : le guide d’animation
Introduction :
10 min
Présentation de l’animateur et de la personne qui filme.
Présentation du déroulement de la séance et les règles :
-
il n’y a pas de bonnes ou mauvaises réponses, pas de tabou ;
-
on peut s’approprier les arguments des autres et la reprendre avec ses
propres mots ;
-
on peut ne pas être d’accord avec un argument et y opposer ses propres
idées ;
-
on respecte le temps de parole de l’autre, on ne parle pas tous en même
temps ;
-
on éteints les téléphones portables.
Présentation des participants : âge, nombre d’enfant, hobbies, activités
pratiquées, régimes alimentaires particuliers, un trait de caractère. Prénom que la
table sur une feuille pliée en deux.
Exercice préliminaire : Si je vous dis : « soleil », à quoi cela vous fait penser ?
Dites tous les mots qui vous viennent à l’esprit.
Faire le même exercice avec un autre mot : « bébé », veillez à ce que tous les
participants aient donné 1 ou plusieurs mots.
Nous allons maintenant entrer dans le sujet pour lequel nous nous sommes
réunies aujourd’hui : les aliments importants.
Les aliments en général :
5 min
Evocations spontanées sur le mot « aliment » :
Si je vous dis « aliments », quels sont les mots et adjectifs auxquels cela vous fait
penser :
-
mots/adjectifs
-
goût/ dégoût
-
odeurs/saveurs
Regarder à quel moment sont cités les produits laitiers, comment ils sont classés.
Les différents produits laitiers
20 min
Quels sont tous les produits laitiers que vous connaissez ?
- lister
Reprendre chaque produit laitier cité et travailler sur les évocations spontanées
de ces produits laitiers :
- Mots/adjectifs
- Couleurs
- Images/symboles
- Situations
- J’aime ce produit
- Je n’aime pas ce produit
Faire établir des catégories de produits laitiers :
- comment peut-on les regrouper ?
- pourquoi ?
- qu’est ce qui les différencie ?
Les bienfaits des produits laitiers
20 min
Selon vous, quels sont les bienfaits que vous apportent les produits laitiers ?
- Lister toutes les réponses
- A chaque réponse, associer une explication, une sensation
Est-ce que ces bienfaits correspondent à ce qu’il y a de marqué sur les étiquettes
des produits ?
Quelles sont ces informations que les mangeurs reconnaissent sur ces produits ?
Leur faire définir le terme d’allégation nutritionnelle.
Sont-ils d’accord avec ces allégations ? :
- qu’en pensent-ils ?
- sensations
- émotions
- vécu personnel
L’alimentation peut-elle jouer sur la santé ?
- donner des exemples
- explications
- vécu
Comportement d’achat
5 min
Combien de produits laitiers, ils achètent en fonction des catégories qu’ils ont
citées ?
Pourquoi on achète ce produit, pourquoi on ne l’achète pas ?
Relance :
- prix
- image
- packaging
- saveurs
Consommation
15 min
Combien ils en consomment personnellement ?, leurs enfants ?
Pourquoi ?
Quelles sont les raisons de consommation ?
Projection temporelle :
Imaginez, en 2030, la consommation de lait a doublé :
- que s’est-il passé ?
- pourquoi
- qui consomme ?
- quels sont les arguments qui ont fait augmenter les ventes ?
Le lait dans tous ses états
35 min
Maintenant, on propose de faire un découpage.
A partir de magazines divers, chaque participant simultanément découpe des
images, textes, lettres, symboles qui lui font penser aux produits laitiers et les
collent sur un grand tableau blanc.
Pour cet exercice, les participants sont en autonomie, l’animateur les laisse faire
sans se mêler de leur choix.
Par la suite, on affiche le grand tableau et chaque participant donne les raisons de
ses choix d’images, lettres…
Conclusion
5 min
Quels sont les meilleurs produits laitiers ? Pourquoi doit-on en consommer ?
Pour conclure, quels arguments donneriez-vous à une personne qui ne
consomme pas de lait pour qu’elle change ses habitudes alimentaires ?
Questionnaire
Les participants auront un temps à la fin de la réunion pour remplir un
questionnaire (auto-administré) sur les produits laitiers.
5 min
Table des figures
- Figure 1 : Variations de la consommation en fonction des régions
p.10
- Figure 2 : Consommation des produits laitiers en France chez
p.11
les enfants et adolescents
- Figure 3 : Evolution de la consommation de lait chez les enfants
p.11
- Figure 4 : Achats de lait en 2006
p.12
- Figure 5 : Rapport entre consommation de lait et fractures
p.27
du col du fémur
- Figure 6 : Etiquetages et allégations sur les produits laitiers
p.33
Liste des tableaux
- Tableau 1 : Structure des dépenses des consommations des
ménages Français
p.13
- Tableau 2 : les besoins et apports conseillés en calcium par
jour en mg
p.22
- Tableau 3 : grammages (en g) des produits laitiers servis
en restauration collective selon l’âge
p.24
- Tableau 4 : liste des allégations nutritionnelles les plus
citées sur les produits laitiers
p.34
- Tableau 5 : liste des allégations santé les plus citées sur
les produits laitiers
p.35
- Tableau 6 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur sexe chez les consommateurs de lait
p.53
- Tableau 7 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur âge chez les consommateurs de lait
p.53
- Tableau 8 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur statut marital chez les consommateurs de lait
p.54
- Tableau 9 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur niveau d’étude chez les consommateurs de lait
p.54
- Tableau 10 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur sexe chez les non consommateurs de lait
p.55
- Tableau 11 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur âge chez les non consommateurs de lait
p.55
- Tableau 12 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur statut marital chez les non consommateurs de lait
p.56
- Tableau 13 : Répartition des 10 personnes de l’échantillon en
fonction de leur niveau d’étude chez les non consommateurs de lait
p.56
Table des matières
INTRODUCTION
p.6
Partie 1 : Le lait, un aliment incontournable de l’alimentation Française
1. Le lait
1.1 Le lait sous toutes ses formes
1.2 Le lait, un aliment indispensable
1.2.1 Qualités organoleptiques
1.2.2 Qualités nutritionnelles
1.2.3 Qualités hygiéniques
1.3 La place du lait en France
1.4 Histoire de lait
1.4.1 Le rejet
1.4.2 L’acceptation
1.4.3 L’intégration
2. La consommation du lait
2.1 Images et mythes du lait
2.1.1 Les images
2.1.2 Les mythes autour du lait
2.2 Discours nutritionnels : entre abondance et controverse
2.2.1 Le discours pro-lait
2.2.1.1 Le calcium
2.2.1.2 Les populations ciblées
2.2.1.3 Les recommandations officielles
2.2.2 Le discours anti-lait
2.2.2.1 Le lait : un agrobusiness
2.2.2.2 Le lait, un aliment dangereux ?
2.2.3 La multitude des discours
p.8
p.8
p.8
p.9
p.9
p.9
p.9
p.10
p.13
p.13
p.15
p.15
p.16
p.16
p.16
p.18
p.20
p.21
p.21
p.22
p.23
p.24
p.24
p.26
p.28
Partie 2 : Pourquoi le mangeur consomme-t-il des produits laitiers ?
1. Hypothèse 1 : Ce sont les allégations nutritionnelles qui poussent
les gens à consommer du lait
1.1 Les allégations en général
1.1.1 Définitions
1.1.1.1 Allégations nutritionnelles
1.1.1.2 Allégations santé
1.1.2 Les acteurs impliqués par la mise en place
des allégations
1.1.2.1 L’industrie laitière
1.1.2.2 Les acteurs de la nutrition
1.2 Les allégations sur les produits laitiers
1.3 Le rôle des médias
2. Hypothèse 2 : Ce sont les croyances qui font que les gens
consomment du lait
2.1 Le lait, symbole de vie
2.1.1 Le lait, le premier aliment de la vie
2.1.2 La couleur blanche
2.2 Le lait, souvenir d’enfance
2.3 Le lait symbole de nature et de terroir
p.30
p.30
p.30
p.30
p.30
p.31
p.32
p.32
p.32
p.33
p.36
p.37
p.38
p.38
p.39
p.40
p.41
2.3.1 La nature
2.3.2 Le fromage, symbole de terroir
3. Hypothèse 3 : C’est la montée de la médicalisation de l’alimentation
qui fait du lait un aliment santé et qui influe donc sur sa consommation
3.1 La médicalisation de l’alimentation
3.1.1 La transition nutritionnelle
3.1.2 La montée des régimes
3.1.3 Quand l’alimentation devient un facteur
de bonne santé
3.2 Le lait, alicament ?
3.2.1 Alicament : définition
3.2.2 Yaourts et pro-biotiques
3.2.3 Alicament : bénéfices ou supercherie commerciale ?
p.41
p.41
p.42
p.42
p.43
p.44
p.45
p.46
p.46
p.47
p.47
Partie 3 : Méthodologie
1. Le choix de la méthode d’enquête
1.1 La méthodologie en général
1.2 Le qualitatif
1.3 Le focus group
p.49
p.49
p.49
p.50
p.51
2. Le protocole d’enquête
2.1 Choix de l’échantillon
2.1.1 Le groupe des consommateurs de lait
2.1.1.1 Le sexe
2.1.1.2 L’âge
2.1.1.3 Le statut marital
2.1.1.4 Le niveau d’étude
2.1.2 Le groupe des consommateurs de lait
2.1.2.1 Le sexe
2.1.2.2 L’âge
2.1.2.3 Le statut marital
2.1.2.4 Le niveau d’étude
2.2 La mise en place
2.3 Le déroulement
p.52
p.52
p.52
p.52
p.53
p.54
p.54
p.55
p.55
p.55
p.55
p.56
p.56
p.57
3. Le guide d’animation
3.1 La construction du guide
3.2 Les résultats attendus
p.57
p.57
p.58
CONCLUSION
p.60
Bibliographie
Table des annexes
Annexes
Liste des figures
Liste des tableaux
Table des matières
p.62
p.64
p.65
p.73
p.74
p.75
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