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From TraitementSida 177
Une étude découvre des maladies cardiaques chez des jeunes
séropositif
La grande accessibilité de la multithérapie antirétrovirale a prolongé la survie d’un grand nombre de personnes vivant
avec le VIH (PVVIH), particulièrement celles vivant dans les pays à revenu élevé qui prennent leurs soins et leurs
traitements au sérieux. Toutefois, les traitements ne guérissent pas l’infection au VIH et l’amélioration de la survie
peut s’accompagner de plusieurs problèmes, notamment l’accélération du processus de vieillissement dans
plusieurs organes et appareils du corps.
De quelle manière la chronicité de l’infection au VIH pourrait-elle accélérer le processus de vieillissement? Les
chercheurs n’ont pas encore de réponse à cette question, mais ils ont commencé à étudier sérieusement
l’interaction entre le VIH et le vieillissement. Entre autres, ils soupçonnent le VIH de causer des dommages à
l’organisme par le biais de l’activation immunitaire chronique. Peu de temps après ses premiers contacts avec le VIH,
le système immunitaire s’active dans une tentative de maîtriser l’infection. Mais, malheureusement, le VIH est futé et
réussit à éluder les systèmes de défense du corps; lorsque l’infection passe au stade chronique, une bataille à vie
s’enclenche entre le système immunitaire et le virus. Cette lutte prolongée fait en sorte que les cellules du système
immunitaire demeurent souvent dans un état activé. De plus, le cœur et les vaisseaux sanguins sont
particulièrement vulnérables aux dommages causés par l’activation immunitaire.
Les traitements anti-VIH réduisent spectaculairement les niveaux de VIH dans le sang. Une fois la suppression virale
accomplie, le système immunitaire tente de freiner le processus d’activation, mais il n’y réussit pas intégralement. Le
système immunitaire communique avec les autres organes et appareils du corps et peut en influencer le
fonctionnement. Certaines cellules immunitaires vont jusqu’à se loger dans ces différents appareils et organes. Une
fois installées, les cellules libèrent des messagers chimiques qui peuvent causer de l’inflammation dans les tissus, et
cette inflammation risque de causer des ravages avec le temps.
Des chercheurs de l’Université Harvard ont étudié l’impact du VIH sur les vaisseaux sanguins d’hommes
séropositifs. Leurs résultats laissent croire que le VIH peut provoquer le rétrécissement des artères chez des
hommes relativement jeunes et asymptomatiques, augmentant ainsi leurs risques de crise cardiaque.
Détails de l’étude
Les chercheurs ont recruté 110 hommes qu’ils ont répartis en deux groupes comme suit :
séropositifs – 78 hommes
séronégatifs – 32 hommes
Les données recueillies auprès des hommes séronégatifs ont servi à des fins de comparaison seulement, et le
présent rapport ne s’intéresse qu’aux hommes séropositifs.
Tous les participants étaient asymptomatiques et n’avaient aucune maladie cardiovasculaire connue au moment du
recrutement.
Les participants ont consenti à des interviews, des examens physiques et des scans cardiaques. De plus, un
cardiologue a effectué des angiographies coronaires — intervention permettant d’évaluer le débit sanguin dans les
vaisseaux qui approvisionnent le cœur en sang oxygéné.
Le profil moyen des participants séropositifs était le suivant :
âge – 47 ans
35 % de fumeurs
29 % souffraient d’hypertension
9 % souffraient de diabète
durée de l’infection au VIH – 14 ans
compte de CD4+ – 523 cellules
81 % avaient une charge virale sous le seuil des 50 copies
95 % suivaient un traitement anti-VIH
Chez les quatre hommes qui ne recevaient pas de médicaments anti-VIH, le compte de CD4+ et la charge virale
étaient approximativement de 800 cellules et de 1 000 copies/mL, respectivement.
Résultats—recherche de cardiopathies
L’analyse des données recueillies lors des interviews, des examens physiques et des prises de sang révélaient que
nombre de facteurs – âge, race, alimentation, poids – se comparaient dans les deux groupes. Les résultats des
analyses de sang étaient plus ou moins semblables aussi en ce qui avait trait au cholestérol et à la glycémie. Compte
tenu de ces résultats, on aurait tendance à conclure que le risque de crise cardiaque serait faible (environ 5 %) pour
ces hommes au cours des 10 prochaines années.
Résultats—scans (tomodensitométrie)
Même si l’évaluation des marqueurs habituels des risques cardiovasculaires s’avérait rassurante, l’analyse des scans
et des angiographies racontait une autre histoire. Les chercheurs ont découvert des dépôts collants (plaque) sur les
parois artérielles de près de 60 % des hommes séropositifs. La plaque artérielle se compose de cholestérol, de
déchets et parfois du calcium; elle peut aussi contenir des cellules immunitaires qui sont attirées par la plaque à
cause de l’inflammation. Lorsque la plaque est abondante, elle risque de bloquer les artères et d’empêcher le sang et
l’oxygène de parvenir au cœur, ce qui augmente le risque de crise cardiaque. Parfois, des morceaux de plaque
peuvent se détacher et causer la formation de caillots qui bloquent le flux sanguin, causant crises cardiaques ou
accidents vasculaires cérébraux (si le caillot se fraie un chemin jusqu’au cerveau). À titre de comparaison,
mentionnons que seulement 34 % des hommes séronégatifs présentaient des signes de plaque dans leurs artères.
Celle-là est une différence significative du point de vue statistique.
Rétrécissement des artères
Les chercheurs ont également observé un blocage important des artères coronaires – vaisseaux qui
approvisionnent le cœur en oxygène et en nutriments – chez environ 7 % des hommes séropositifs. En effet, chez
ces derniers, le flux sanguin en direction du cœur était réduit d’au moins 70 %. À cause de cette obstruction, le
risque de crise cardiaque sur 10 ans est passé de 5 % à 12 % chez les hommes en question. Par contraste, chez les
hommes séronégatifs présentant un rétrécissement important de leurs artères, le risque de crise cardiaque sur 10
ans était d’environ 4 % – une différence significative.
À la clinique
Concernant les cinq hommes séropositifs présentant un blocage important de leurs artères, les chercheurs ont
avisé leur famille et recommandé une consultation en cardiologie. Voici ce qui s’est passé :
Un des hommes a subi une épreuve d’effort (test de stress) pour évaluer sa santé cardiaque; son résultat était
normal et il se porte bien jusqu’à présent;
Un autre homme attend de faire son épreuve d’effort.
Les trois autres hommes ont été évalués par des cardiologues. Après d’autres tests, les spécialistes ont confirmé
un rétrécissement artériel grave. Un des hommes a subi un pontage coronarien et un autre s’est fait poser un stent
(endoprothèse coronaire) pour empêcher l’artère de se fermer. Les médecins ont essayé de poser un stent au
troisième, mais cela n’a pas réussi. Ils lui ont également prescrit des médicaments anticholestérol, mais le patient ne
pouvait les tolérer. Deux ans plus tard, une évaluation a révélé que ses artères s’étaient rétrécies davantage, et il a
subi un pontage coronarien. Tous les trois « se portent bien », selon l’équipe de recherche.
Rétrécissement artériel
Les chercheurs ont trouvé que les hommes séropositifs dont les artères contenaient de la plaque avaient également
tendance à présenter les caractéristiques suivantes :
âge avancé
séropositif depuis longtemps
taux plus élevé de cholestérol total, de triglycérides et de cholestérol LDL (le mauvais)
faible rapport CD4 : CD8
taux élevé d’un messager chimique appelé MCP-1 (monocyte chemoattractant protein-1 ) qu’utilise le système
immunitaire
Bien que nombre d’études par observation aient trouvé un lien entre l’exposition aux médicaments anti-VIH et un
risque accru de maladie cardiovasculaire, ce ne fut pas le cas de cette étude menée à l’Université Harvard. Les
chercheurs ont toutefois constaté que les hommes présentant un taux élevé d’anticorps contre le virus CMV
(cytomégalovirus) étaient plus susceptibles de manifester des signes de cardiopathie.
Danger : la plaque
Tenant compte de plusieurs facteurs — âge, prise d’inhibiteurs de la protéase, taux de cholestérol, charge virale,
compte de CD4+ — les chercheurs ont déterminé que plus la période de séropositivité durait, plus les artères de la
personne touchée risquaient d’être tapissées de dépôts de plaques nombreux et épais.
Avertissement au sujet du score de calcium
La plaque contient parfois du calcium. Certaines études ont mis l’accent sur la recherche d’un lien éventuel entre la
plaque contenant du calcium et le risque de maladie cardiovasculaire. Ces études attribuent un score de calcium aux
participants pour indiquer la quantité de cet élément dans leurs artères. Des plaques peuvent toutefois être
présentes en l’absence de dépôts de calcium détectables. Ainsi, l’équipe de l’Université Harvard souligne dans son
rapport qu’ « une proportion significative de patients atteints d’athérosclérose coronarienne auraient été manqués si
l’on avait utilisé le score de calcium comme seul moyen d’évaluer l’athérosclérose coronarienne ».
Comprendre le lien
Les résultats de cette étude laissent croire qu’il existe un lien entre l’infection au VIH et le rétrécissement des artères
qui s’opère indépendamment des facteurs de risque cardiovasculaires. Il semble que le lien en question soit lié à la
durée de la séropositivité. Il semble donc que le VIH joue un rôle dans l’apparition de maladies cardiovasculaires,
peut-être en déclenchant ou en intensifiant des réactions inflammatoires.
Le système immunitaire
Le fait qu’on ait trouvé un lien entre le rapport CD4/CD8 et la maladie cardiovasculaire porte à croire que le système
immunitaire joue un rôle à cet égard. Un autre indice de ce rôle réside dans la découverte d’un taux élevé du
messager chimique immunitaire MCP-1 chez les hommes présentant un risque élevé de maladie cardiovasculaire. Le
MCP-1 attire un groupe de cellules immunitaires appelées monocytes. Les monocytes – et leur forme mature appelée
macrophages – se trouvent partout dans le corps. Des études antérieures avaient permis de constater que le MCP-1
envoyait des signes qui attirait les monocytes vers les plaques artérielles. Il est possible que les monocytes
intensifient l’inflammation à l’intérieur de la plaque. De plus, les cellules infectées par le VIH libèrent des protéines qui
stimulent pour leur part la sécrétion du MCP-1. Mentionnons aussi que d’autres chercheurs ont relevé un lien entre
le MCP-1 et un risque accru de maladie cardiovasculaire, tant chez des personnes séronégatives que séropositives.
CMV
Le cytomégalovirus, ou CMV, appartient à la famille des virus de l’herpès. Chez les personnes immunodéprimées
ayant un compte de CD4+ faible, l’infection au CMV peut causer des ulcères et endommager la rétine, entraînant la
cécité dans certains cas. Certains chercheurs soupçonnent l’infection au CMV de contribuer au risque de maladie
cardiovasculaire et ont élaboré une théorie à cet égard. Les données utilisées pour cette théorie proviennent de
recherches menées sur des souris, les études en question ayant montré que l’infection au CMV faisait augmenter la
tension artérielle et semblait causer d’autres complications aussi. Des études menées auprès de nombreuses
personnes ont trouvé une association entre l’infection au CMV et la maladie cardiovasculaire. Il faut toutefois
effectuer d’autres recherches chez des humains pour mieux comprendre dans quelle mesure le CMV peut être
considéré comme un facteur de risque de maladie cardiovasculaire chez les PVVIH.
À l’avenir
Cette étude de l’Université Harvard a porté exclusivement sur des hommes. D’autres études seront nécessaires
pour surveiller la santé cardiovasculaire des personnes séropositives, autant les femmes que les hommes, au fil du
temps. Nombre de questions importantes doivent être posées, telles les suivantes :
Dans quelle mesure le VIH contribue-t-il à la progression de la maladie cardiovasculaire?
Quel est le meilleur traitement pour aider les personnes séropositives à cesser de fumer?
Des modifications alimentaires, telles que le régime DASH (dietary approaches to stop hypertension =
approches alimentaires pour arrêter l’hypertension) peuvent avoir un impact spectaculaire sur les risques
cardiovasculaires chez les personnes séronégatives. Le régime DASH est-il aussi sûr et efficace chez les
personnes séropositives?
Quel rôle les médicaments (aspirine, statines) et les suppléments (huile de poisson) anti-inflammatoires jouentils en ce qui concerne l’infection au VIH et les risques cardiovasculaires?
Si le traitement anti-VIH commençait plus tôt, y aurait-il un impact sur la vitesse de progression de la maladie
cardiovasculaire?
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