Dossier de présentation

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► L’HISTOIRE
David entretient une relation par mail avec une jeune Française, Sandrine. Ils se sont
rencontrés pendant un congrès d’entreprises à Londres. Ils ont passé une nuit ensemble.
Pour eux deux, cela a compté.
Mais une révélation soudaine va mettre fin à cette histoire naissante. Peu à peu, David se
livre. Il n’a pas toujours travaillé dans la vente. A une époque, il était prof, de lettres. Et
marié, à Jess, dont il était fou amoureux. Mais sa femme avait des dettes. De très, très
grosses dettes. Alors, entre l’amour et l’argent, il a fallu choisir.
Véritable mosaïque, Love & Money retrace à rebours l’histoire de David et Jess, de la
brutale explosion de leur couple à la demande en mariage. Dennis Kelly y interroge notre
rapport à l’argent, la place que nous lui accordons, la hiérarchisation de nos valeurs,
dans un monde où, paraît-il, le bonheur s’achète. Une œuvre fascinante, complexe,
terriblement drôle et sombre à la fois.
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► L’AUTEUR
Né en 1970, dans une famille Irlandaise de cinq
enfants, Dennis Kelly grandit à Barnet, dans la
banlieue nord de Londres. Son père était chauffeur
de bus, et Kelly quitte l’école à 16 ans pour
travailler dans un supermarché. C’est à cette
époque qu’il découvre le théâtre, en intégrant le
Barnet Drama Center, une jeune compagnie locale.
Il se lance quelques années plus tard dans des
études théâtrales universitaires, au Goldsmiths
College de Londres.
Il affirme n’y avoir rien appris en matière d’écriture
dramatique, et affiche très rapidement une volonté
de rompre avec le théâtre social réaliste anglais
qu’il a étudié,
pour expérimenter de nouvelles
formes d’écriture, tout en traitant de sujets brûlants
d’actualité. Adepte d’une écriture volontiers
provocatrice, avec ces dialogues extrêmement
rythmés, ces mots crus, ces situations souvent
violentes et ce regard sans complaisance porté sur
nos sociétés, il
s’inscrit dans le courant
dramaturgique britannique du théâtre dit « in-yerface », qui s’emploie à montrer l’inhumanité de l’être humain et les dérives de notre
monde.
Sa première pièce, Débris, est créée à Londres en 2003. Suivront Oussama, ce héros en
2004, Love & Money en 2006, ou encore Occupe-toi du bébé, joué au Théâtre de la
Colline en février 2011. Son œuvre est désormais traduite et jouée dans le monde entier.
Dennis Kelly a par ailleurs été élu meilleur auteur dramatique de l’année 2009 par la
revue allemande Theater Heute.
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► NOTE D’INTENTION
► « Vous voulez sentir que chaque journée de travail peut être autre chose que
patauger dans le sang ».
Il y a quelques années, quand j’étais étudiant, j’ai travaillé au service contentieux d’une
société de crédit – une grosse boite, une de celles que tout le monde connait. J’étais
chargé de recouvrement : toute la journée, un automate composait pour moi des
numéros de téléphone et me mettait en relation avec des gens qui, pour une raison ou
pour une autre, avaient cessé de rembourser leurs dettes. En un minimum de temps, je
devais m’informer de leur situation financière, comprendre la raison pour laquelle ils ne
payaient plus, et passer avec eux un nouvel accord de remboursement, à hauteur d’au
moins 3% de leur dette chaque mois. Si cela s’avérait impossible, ou s’ils n’étaient pas
assez coopératifs, je transférais leur dossier à un huissier chargé, à leurs frais, de saisir
leurs biens.
Je traitais des dizaines de dossiers chaque jour : des étudiants sans revenus, des mères
célibataires en pleurs, des chômeurs en fin de droits, des gens tombés malades et qui
avaient perdu leur emploi, des gens qui ne parlaient pas un mot de Français et dont on
se demandait comment ils avaient pu comprendre le contrat qu’ils avaient signé, des
veuves qui découvraient à la mort de leur mari que celui-ci avait des dettes, quelques
escrocs aussi, et puis beaucoup, beaucoup de gens qui travaillaient et qui, simplement,
ne s’en sortaient pas. J’avais appris à ne plus parler de personnes, mais de « db », pour
débiteurs. Aux menaces de suicide, je devais répondre que cela n’est jamais une solution
et faire en sorte que la discussion tourne court.
C’est à cette période de ma vie que la lecture de Love & Money m’a renvoyé, et c’est
pour cela, je crois, que j’ai d’abord eu envie de prendre en charge ce texte. J’ai
découvert la pièce par hasard à la fin du mois de juin 2012. Depuis des mois, je
cherchais une pièce à monter, une bonne pièce, une de celles dont j’aurais l’impression
qu’elle avait réellement quelque chose à dire sur le monde tel qu’il est aujourd’hui. Je l’ai
lue, et j’ai su que j’avais entre les mains un matériel exceptionnel. Ce jour-là, les infos
ont parlé d’un Grec qui s’était suicidé, écrasé par la crise.
Au centre de Love & Money, il y a un couple, Jess et David. Ils sont jeunes, fraichement
mariés, fous amoureux. Ils sont citadins, modernes, un peu bobos. Lui est prof, elle on
ne sait pas ; ils font partie de la fameuse middle class. Seulement, Jess a des dettes. De
grosses dettes. 70 000 livres. Elle doit prendre un deuxième boulot, lui doit quitter
l’enseignement pour entrer dans la vente. Cela ne suffit pas. Alors, pour David, il
apparait qu’entre l’amour et l’argent, il faudra faire un choix. Le couple explose. Et de
quelle manière.
Si nous choisissons de nous attaquer à ce texte, c’est parce que nous sentons qu’il
soulève des questions fondamentales et passionnantes sur le fonctionnement de nos
sociétés occidentales contemporaines. La place que nous accordons à l’argent. Notre
besoin maladif de posséder. Notre peur perpétuelle du déclassement, dans une période
de crise. Notre capacité à nous adapter ou non à un système économique de plus en plus
complexe, dont le fonctionnement nous échappe inévitablement, à moins d’avoir
« l’instinct du tueur ». La question de cette capacité d’adaptation se pose d’ailleurs pour
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tous les personnages de la pièce. Tous essaient juste de s’en sortir, dans cette société
britannique extraordinairement violente qui ne leur laisse pas le choix. Certains y
arrivent, à la condition d’abandonner tout idéal (la religion, les idéaux politiques,
l’amour) au profit d’une croyance unique : le fric. Certains deviennent des monstres à
force d’essayer de s’en sortir. D’autres, enfin, échouent, tout simplement.
Et puis il y a Jess. Cette jeune femme perdue, qui n’a jamais trouvé sa place dans le
monde. Cette fille que la puissance de son amour transperce, qui dit qu’elle pourrait
« dégueuler d’amour ». Cette fille qui s’émerveille de l’existence de l’univers, des étoiles
et de la gravité, de l’improbabilité de la vie, de la sienne et de celle des autres, et qui ne
comprend pas, face à tant de mystères et de hasards, que l’on accorde tant d’importance
à cette chose morte, irréelle, à cette convention qu’est, au fond, l’argent.
A l’heure où j’écris ces lignes, nous répétons depuis plusieurs mois, et je commence à
voir à quoi le spectacle ressemblera. Nous avons fait le choix de la plus grande simplicité
possible. Parce que ce texte est fort, parce que ces personnages sont complexes, nous
essayons d’éviter les effets de manche, les numéros d’acteurs. Parce que nous
souhaitons avant tout être porteurs de cette histoire et des problématiques qu’elle
soulève, nous nous adresserons la plupart du temps directement au public. Il ne s’agira
pas tant de dénoncer que de poser des questions. Je ne crois pas que le théâtre puisse
changer quoique ce soit au monde, mais du moins peut-il permettre de prendre
conscience de certaines choses. Nous essaierons de ne pas être moralisateurs. Aucun des
personnages de Kelly n’entre en révolte contre ce que, pour simplifier, nous appelons le
« système ». Jess le dit : « je déteste quand les gens sont juste à critiquer et tout parce
qu’on porte tous des chaussures, bon Dieu, alors vous voyez mais parfois je me pose des
questions ». Il y a là une clef. Nous nous poserons des questions.
Alexandre Lhomme
Collectif Les Âmes Visibles
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► L’ÉQUIPE
Alexandre Lhomme | Mise en scène | Le Père, le Docteur
Né en 1984, Alexandre découvre le théâtre à l’âge de 10 ans. Après
de études d’Histoire, il se forme au Cours Florent, de 2008 à 2011.
Au théâtre, il joue dans Viol de Botho Strauss, Baal de Bertolt
Brecht, Ivanov d’Anton Tchekhov, Une soirée entre amis d’Harold
Pinter, On Purge (Bébé) ! de Georges Feydeau, Mein Kampf (Farce)
de George Tabori, Une scène jouée dans la mémoire de Charlotte
Delbo, Love & Money de Dennis Kelly et Médée, la femme qui tua
ses enfants de Laura Bélorgey. Au cinéma, il joue dans Deuil sous
influence de Xavier Hervo, Que ferait Woody ?, Discours sur la
servitude volontaire et Exercice de style de Mathieu Aglossi, et Débutants Acceptés de
Rémy Delattre. En 2013, il met en scène Love & Money de Dennis Kelly (spectacle créé
en mai 2013 au Théâtre Confluences à Paris, reprise au Théâtre Le Hublot en avril 2015).
En 2015, il mettra en scène Ce qui évolue, ce qui demeure, d’Howard Barker.
Teddy Atlani | Paul, Duncan
Originaire de la Drôme, Teddy entre au Cours Florent en 2008, où il
suit la formation de Franck Victor, Suzanne Marrot, Cyril Anrep,
Grétel Delattre et Georges Bécot. Dans cette école, il rencontre les
futures « Âmes Visibles ». Ensemble, ils s'attèlent à monter
plusieurs projets, dont Mein Kampf (Farce), de George Tabori, Viol
de Botho Strauss, On purge (Bébé) !, de Georges Feydeau, ou
encore un moyen-métrage, Deuil Sous Influence, réalisé par Xavier
Hervo.
Durant la saison 2011-2012 il apparait dans T, court-métrage de
Xavier Tesson & Dorian Hays, et endosse successivement les rôles de Toto et Bastien
Follavoine dans On purge (Bébé) ! de Georges Feydeau, mis en scène par Pauline Raineri
à l'Aktéon et au Funambule entre septembre 2011 et juin 2012. En 2013, il participe à
Love & Money de Dennis Kelly, et est à l'affiche du prochain court-métrage de Xavier
Hervo, Tripaliare.
Laura Bélorgey | La Mère, Val
Laura pratique le théâtre et le chant depuis l’enfance. A quatorze
ans, elle décide de prendre des cours de théâtre privés et c’est à
dix-huit ans qu’elle intègre la formation professionnelle du Cours
Florent. Elle participe à divers projets de fin d’étude tels qu’une
adaptation de Procès Ivre de Koltès et trois créations : Mort(s) de et
par Pauline Rambeau de Baralon, Michel sans chez lui de et par
Nicolas Avinée et Un crime de et par Milena Malenic. Parallèlement,
elle monte Ivanov de Tchekhov. Certaines de ces créations sont
jouées dans plusieurs festivals dont le festival Cumulus monté par
la Compagnie de la pluie à Paris en 2012. La même année, elle
interprète le rôle principal dans La sœur d’Olga, de Margot Simonney. En 2014, elle met
en scène une adaptation collective du mythe de Médée intitulée Médée : la femme qui
tua ses enfants.
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Maxime Lafay | David
Maxime Lafay est comédien, diplômé des Cours Florent en 2011 où
il a suivi les enseignements d’Estelle Bonnier, Maxime Pecheteau,
Suzanne Marrot, Véronique Vella et Jean-Pierre Garnier. Il a joué
dans plus de sept Travaux de Fin d'Etudes aux Cours Florent,
notamment Je ne sais pas encore de Jessica Lajoux et Baal de
Bertolt Brecht, dans le rôle de Jean.
Entre 1999 et 2008, il prend des cours de théâtre à l'atelier de la
ville de Moulins. De 2008 à 2011, il est membre de la compagnie Ça
tourne pas rond, avec laquelle il joue La vie de Galilée de Bertolt
Brecht. En 2012, il joue Je ne sais pas encore de Jessica Lajoux
durant deux mois au Kibele, ainsi qu'une adaptation du cabaret d'Hanoch Levin, Douce
vengeance et autres sketchs, toujours au Kibele.
Pauline Raineri | Sandrine, Debbie
Après l'obtention de son baccalauréat, Pauline décide de continuer la
formation qu'elle avait commencée dès l'adolescence au Cours
Florent (« Ateliers Jeunesse »). Elle intègre donc la formation
professionnelle grâce à laquelle elle étudie avec Bertrand
Degrémont, Suzanne Marrot, Cédric Prévost ou encore Véronique
Vella. Dans le cadre de sa dernière année à l'école, elle met en
scène On Purge (Bébé) ! de Georges Feydeau, pièce dans laquelle
elle joue également le rôle de Julie Follavoine. La pièce sort
rapidement du cadre scolaire pour être jouée à l’Aktéon puis au
Funambule, de septembre 2011 à juin 2012.
Depuis septembre 2012, on a pu retrouver Pauline dans Mein Kampf (Farce) de George
Tabori mis en scène par Makita Samba, et Love and Money de Dennis Kelly mis en scène
par Alexandre Lhomme. Elle s’attèle aussi à la création d’un festival, Le Festival
International des Rires du Monde de Saint-Denis, et répète un spectacle, Avant la nuit,
avec la compagnie Loin Devant.
Louve Reiniche-Larroche | Jess
Louve Reiniche-Larroche se passionne dès l'âge de 6 ans pour la
comédie aux ateliers du Théâtre de l'Épouvantail. Dans les cours
d’Esther Kouyaté, elle développe le plaisir du jeu. Elle entre au
Cours Florent en 2005 aux Ateliers Jeunesse. Elle poursuit son
cursus théâtral, intègre la formation professionnelle dans les cours
de Bertrand Degrémont, Suzanne Marrot, Cédric Prévost, Véronique
Vella et Cyril Anrep.
En 2010-2011, elle est actrice dans plusieurs courts-métrages, dont
The Ash Of My Lips, et costumière dans un long métrage Dies
Festum, deux réalisations de Juan Pittalluga. Au théâtre, elle joue
dans les Mein Kampf (Farce) de George Tabori, On Purge (Bébé) ! de Georges Feydeau,
et Love And Money de Dennis Kelly. Elle est également en préparation de la pièce de
Charlotte Delbo, Une scène jouée dans la mémoire, dans laquelle elle interprète le rôle
de Françoise.
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► LA PRESSE
Que reste-t-il de l’amour dans un
monde qui ne pense qu’au fric ? À
travers la descente aux enfers d’un
couple
endetté,
« Love
and
Money » propose une radiographie
du monde néolibéral servie par de
jeunes comédiens étonnamment
justes.
L’Angleterre n’en finit pas de produire
des auteurs de théâtre passionnants.
Dennis Kelly est l’un des derniers en
date, et sûrement pas le moins
intéressant. Ses premières œuvres ont
eu un certain retentissement : il a ainsi
été élu Meilleur Auteur dramatique de
l’année 2009 par la revue allemande
Theater Heute. En France, Occupe-toi
du bébé
a
été
à
l’affiche
au
Théâtre de la Colline en 2011. Si Dennis Kelly, par son langage cru et son théâtre en
prise directe sur le monde d’aujourd’hui, s’inscrit dans la lignée des auteurs du courant
in-yer-face qui domine la scène anglaise depuis les années 1990, chacune de ses pièces
est aussi une construction savante et complexe, loin pourtant de tout intellectualisme.
C’est le cas de Love and Money qui retrace à rebours (selon un procédé qui rappelle un
peu Trahisons de Pinter) l’histoire d’un couple au destin malheureux, depuis la demande
en mariage jusqu’à la tragédie finale. Quel secret cache David qui vient de rencontrer,
pendant un congrès d’entreprise, Sandrine, une jeune Française avec qui il communique
par mail ? Ce secret, c’est l’histoire de l’échec et de la descente aux enfers de son couple.
Et d’abord, son triste destin de prof de lettres conduit à prendre un emploi plus lucratif
pour rembourser les dettes de sa femme, Jess. Lui qui ignorait tout du monde de
l’entreprise va découvrir la jungle du monde du travail, un univers où l’obsession de
l’argent fait vaciller toutes les valeurs morales.
Un théâtre ultracontemporain
On comprend que la jeune compagnie Les Âmes visibles ait eu envie de relever le défi
que représente ce texte : plaisir d’interpréter un théâtre ultracontemporain mettant en
scène des personnages d’aujourd’hui, avec leur fragilité, leur immoralité ou leur
impudence. Comme il est fréquent sur les scènes actuelles, les six comédiens ne quittent
pas le plateau et se partagent les dix rôles, belle galerie de portraits qui, mis bout à bout,
brosse aussi celui de notre monde libéral où chacun souffre pour et par l’argent.
S’agissant d’un collectif aussi soudé, difficile de distribuer des satisfecit – mais plus
difficile encore de ne pas souligner la performance remarquable de Marine Reiland en
businesswoman cynique, ou celle de Maxime Lafay en jeune prof égaré dans un monde
dont il ignore les règles.
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Sous nos yeux, l’engrenage tragique, la machine à broyer les destins se met en marche.
Le spectateur mesure chaque minute davantage l’enlisement de ce couple en crise, forcé
de cumuler des jobs pour s’en sortir. L’humour british de Dennis Kelly se fait très souvent
noir pour dépeindre les excès d’une société individualiste obsédée par les signes
extérieurs de richesse. Surtout, la mise en scène d’Alexandre Lhomme parvient avec une
grande intelligence à exprimer ce qui fait l’intérêt et la force de la pièce : montrer le
désarroi des êtres dans un monde qui perd la boule et tend à faire de nous des monstres
(ainsi Pauline Raineri dans le rôle de Debbie, forcée de repousser les propositions
douteuses de Duncan). Saisir le moment où l’humanité des personnages vacille pour
sombrer dans la pornographie, la violence gratuite, la profanation de sépulture ou… le
meurtre.
Sans filet
Du théâtre aussi intelligent et aussi bien joué, ça donnerait presque les larmes aux yeux.
Le plus étonnant peut-être : l’économie de moyens et le dépouillement de la mise en
scène. À cet égard, la scène initiale de l’échange de mails montrant deux personnages
piégés par la communication à distance, véritable gageure, se trouve abordée le plus
simplement du monde, preuve qu’au théâtre il suffit parfois d’oser. Encore faut-il avoir
des comédiens à la hauteur, capables de jouer très près du public, c’est-à-dire sans filet.
Petit miracle : aucune fausse note, l’équilibre n’est jamais rompu. Dans ce dispositif
émouvant de sincérité et impressionnant d’efficacité, Louve Reiniche-Larroche se montre
assez bluffante lors du monologue final de Jess, l’acheteuse compulsive idéaliste. Il ne
reste qu’à souhaiter longue vie à ce spectacle et espérer qu’il rencontrera l’audience qu’il
mérite.
Fabrice Chêne
Les Trois Coups.com
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► EXTRAIT
VAL :
Je ne crois plus en Dieu.
DAVID : Non ?
VAL :
Non. N’est-ce pas Paul ?
PAUL :
C’est sûr que non.
VAL :
Et à quoi je crois désormais, Paul ?
PAUL :
Au fric.
VAL :
A l’argent. Je crois à l’argent.
David.
C’est mon truc maintenant.
David.
Et de la même façon qu’une plante prend de l’oxygène et des nutriments et se
sert de la photosynthèse pour transformer la lumière du soleil en énergie, je
prends des clients et des employés et je me sers du travail acharné pour
produire du fric, putain. Je suis une photosynthétiseuse de fric.
Un temps.
Paul ?
Paul lui passe un formulaire de candidature. Elle le passe à David.
Il faut que tu remplisses ça maintenant, David.
DAVID : Ok.
VAL :
Je sais déjà ce que tu sais faire et quelle formation tu as mais il faut quand
même que tu le remplisses parce que –
DAVID : Parce qu’il faut que je le remplisse.
VAL :
Parce qu’il faut que tu le remplisses, bien sûr. Donc, on peut te faire débuter au
dépôt et –
DAVID : Au dépôt ?
VAL :
Oui.
Pause.
Tu pensais être tout de suite à la vente ?
DAVID : Eh bien. Je… je pensais que…
VAL :
Mais tu n’as aucune expérience dans la vente.
DAVID : C’est pour ça que je suis venu te voir. Écoute, je
ne m’attends pas à ce que tu me fasses de faveur.
VAL :
Je te fais une faveur.
DAVID : Oui, pardon. Mais je pensais…
Pause.
Je veux dire je pensais pouvoir décrocher quelque chose…
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VAL :
Tu ne pensais pas à ici ?
PAUL :
Ici ?
VAL :
Dans l’encadrement ?
DAVID : Je ne sais pas ce que je pensais, je pensais (il remarque quelque chose sur le
formulaire) mon Dieu, je ne peux pas vivre avec ça.
VAL :
C’est peu.
DAVID : Val, je ne peux pas –
VAL :
C’est un salaire de départ.
PAUL :
Une fois passé commercial. Je conduis une Audi.
DAVID : C’est moins que ce que je gagne.
VAL :
C’est un salaire de départ, mais une fois passé
commercial –
DAVID : J’ai besoin d’argent tout de suite.
VAL :
Il y a un système d’échelon, on est obligé
de te faire débuter au deuxième échelon.
DAVID : Tu as débuté à quel échelon ?
VAL :
Au cinquième. Mais j’ai une licence
d’études commerciales.
DAVID : J’ai une licence.
VAL :
De lettres. Tu as une licence de lettres,
David. C’est la seule façon, n’est-ce pas Paul ?
PAUL :
La seule façon.
DAVID : Tu as débuté où ?
PAUL :
Au cinquième échelon.
VAL :
Mais c’est différent.
Dennis Kelly, Love & Money, Scène 3
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► LE COLLECTIF
Les Âmes Visibles se rencontrent pour la plupart en 2009 au Cours Florent, dans la classe
de Suzanne Marrot. Ils jouent Pinter, Bond, Barker, montent un spectacle sur le théâtre
anglais sous Margaret Thatcher, et apprennent ce que travailler ensemble veut dire.
L’année suivante, dans le cadre de leurs travaux de fin d’études, ils montent leurs
propres spectacles : Viol, de Botho Strauss, mis en scène par Marine Reiland ; On Purge
(Bébé) !, de Georges Feydeau, mis en scène par Pauline Raineri ; Mein Kampf (Farce),
enfin, de George Tabori, mis en scène par Makita Samba.
Ils sortent de l’école en juin 2011, avec l’envie de faire vivre et grandir ces spectacles,
d’en créer d’autres, de poursuivre cette aventure commune, mais aussi de rencontrer
d’autres comédiennes et comédiens. Alors ils fondent Les Âmes Visibles en octobre 2011.
Un collectif, et non une compagnie, avec la volonté de permettre à chacun d’exprimer sa
propre sensibilité, mais toujours pour se mettre au service du groupe.
On Purge (Bébé) ! est le premier spectacle à sortir de l’école. Il est joué une centaine de
fois à Paris entre septembre 2011 et juin 2012, et est en tournée depuis. En novembre
2012, le collectif reprend Mein Kampf (Farce). Le spectacle est ensuite programmé au
Théâtre Douze, en janvier et février 2014. Love & Money, créé au Théâtre Confluences
en mai 2013, est le troisième spectacle du collectif. Il sera repris en avril 2015 au
Théâtre Le Hublot à Colombes. Pour la saison 2015/2016, le collectif prépare Ce qui
évolue, ce qui demeure, d’Howard Barker.
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► NOS AUTRES SPECTACLES
ON PURGE (BÉBÉ) / GEORGES FEYDEAU
Mise en scène Pauline Raineri
C'est l'histoire d'un couple qui ne fonctionne plus.
Ou encore, d'un enfant roi, qui ne veut pas se purger
et rend sa mère hystérique.
Ou d'un mari déchu.
D'un invité perdu.
Non, c'est l'histoire de Rose, la bonne, qui décide de
partir, de voir le monde qu'elle a côtoyé, mais de
l'autre côté.
« Une bénédiction qui force sourire et bonne
humeur. » Théâtres.com
« Ce tourbillon d’absurde procure, grâce au
talent à l’inventivité de ce jeune collectif, un
réel plaisir. » Les Trois Coups
« Il fallait oser dépoussiérer une œuvre de
Feydeau sans que cela tombe dans du déjà vu.
Pari réussi ! » Polemic
MEIN KAMPF (FARCE) / GEORGE TABORI
Mise en scène Makita Samba
La Rue du Sang, à Vienne, dans les années 1900
et quelques. Shlomo Herzl, un vieux Juif vendeur de
Bibles et de Kama Sutra, bavarde avec Dieu et se
rêve en nouveau prophète. Dans son asile de nuit
pour clochards et mendiants, il s’attèle à la rédaction
de son chef-d’œuvre, dont il n’a pour l’instant que le
titre : « Mein Kampf ». Ce livre sera son combat, sa
bible pour un monde meilleur.
Surgit alors un jeune homme tout droit venu de
Braunau-sur-Inn, un peintre sans talent qui s'apprête
à tenter le concours d'entrée aux Beaux-Arts. Un
dénommé Hitler, personnage bavard et grossier,
paranoïaque et vaniteux, pas encore nazi, mais de
plus en plus antisémite.
Peut-on aimer son ennemi comme soi-même ?
Shlomo pourrait voir le danger venir. Mais
persuadé qu'il y a du bon en chacun, il ne verra dans
le jeune Hitler qu'un homme comme lui, persuadé d’avoir une grande destinée, mais
terrifié à l'idée d'échouer. Il le nourrira, le soignera, le consolera, l'arrachera à la Mort et
l'aidera à accomplir son destin.
« Mise en scène et interprétation sont à la hauteur de ce chef-d’œuvre
d’humanisme et d’humour noir. Drôle et terrifiant à la fois. » Les Trois Coups
« Les comédiens sont parfaits de bout en bout. Pas une fausse note, des tirades
impressionnantes sans l’ombre d’une hésitation, et un public que l’Histoire
prend dans ses bras. » Cultures-J
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► GÉNÉRIQUE
LOVE AND MONEY
texte Dennis Kelly
traduction Philippe Le Moine et Francis Aïqui
l’Arche est agent et éditeur du texte représenté
création Confluences | 21, 22 & 23 Mai 2013
mise en scène Alexandre Lhomme
un spectacle du collectif Les Âmes Visibles
avec
Jess | Louve Reiniche-Larroche
David | Maxime Lafay
Sandrine, Debbie | Pauline Raineri
La Mère, Val | Laura Bélorgey
Paul, Duncan | Teddy Atlani
Le Père, le Docteur | Alexandre Lhomme
photo de couverture du dossier Éric Mariette
contact production
Alexandre Lhomme | 06.37.67.52.80 | [email protected]
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