1 CENTRE NATIONAL de la PROPRIÉTÉ FORESTIÈRE Délégation de POITOU-CHARENTES Étude sur la dynamique du chêne pubescent en Poitou-Charentes Comité de pilotage du 12 mai 2015 Les Ruralies, Maison de l’agriculture, Vouillé (Deux-Sèvres) Etaient présents : Fabienne BENEST, Institut National de l’information Géographique et Forestière Lorène DUMEAUX, Fondation LISEA Biodiversité Olivier FORESTIER, Pôle National des ressources Génétiques Forestières de Guemené Penfao Sabine GIRARD, Institut pour le Développement Forestier Didier GROSPEAUD, propriétaire forestier Arnaud GUYON, CNPF délégation Poitou-Charentes Lionel HAY, DRAAF Poitou-Charentes Martial HOMMEAU CNPF délégation Poitou-Charentes Yves LACOUTURE CETEF de la Charente Jean LEMAIRE, Institut pour le Développement Forestier Brigitte MUSCH, Office National des Forêts Yann ROLLAND, Office National des Forêts Eric SEVRIN, CNPF délégation Centre-Ile de France Luc VANCRAYELYNGHE, société COSEA Porteur du projet : Partenaires financiers : Expertise technique : 2 CENTRE NATIONAL de la PROPRIÉTÉ FORESTIÈRE Délégation de POITOU-CHARENTES Rappel du programme de l’étude Phase 1 : Etat des lieux du chêne pubescent en Poitou-Charentes en relation avec les chênes pédonculés et sessiles Intervenant : Fabienne Benest, Institut National de l’information Géographique et Forestière • État des lieux de la ressource (3 principaux chênes) • Situation du chêne pubescent dans les peuplements • Contexte stationnel avec géolocalisation des peuplements jugés remarquables Délais : avril 2015 Phase 2 : Evolution spatio-temporelle de la situation des chênes en Poitou-Charentes Intervenant : Fabienne Benest, Institut National de l’information Géographique et Forestière • Évolution des trois chênes indigènes à partir des deux derniers inventaires réalisés Délais : avril 2015 Phase 3 : mise en relation des évolutions constatées avec des facteurs explicatifs Intervenants : Fabienne Benest et Jean Lemaire, Institut pour le Développement Forestier • Rechercher les liens pouvant exister entre les évolutions constatées et des facteurs tels le sol, la flore ou le climat Délais : décembre 2015 Phase 4 : repérage des peuplements remarquables de chêne pubescent susceptibles de fournir des graines de qualité Intervenants : Sabine Girard, Institut pour le Développement Forestier et Yves Lacouture, CETEF de la Charente • Repérage , sur le terrain, de peuplements remarquables de chêne pubescent susceptibles de fournir des graines de qualité • Organisation d’une récolte et d’une mise en production de plants locaux Délais : décembre 2015 3 4 5 6 7 8 9 Premiers débats et discussions : Yves Lacouture soulève les difficultés qu’il a rencontrées pour identifier avec certitude les chênes pubescents. L’exercice s’avère difficile même pour les spécialistes. Il est d’ailleurs rare de retrouver, à la fois, sur un même rameau feuillé tous les critères morphologiques du pubescent. De fait, pas mal de sujets présentent des caractères intermédiaires (hybrides ?). Pour le gestionnaire, cette difficulté d’identification présente un réel problème. Comment favoriser, lors d’un martelage dans un peuplement mélangé, le pubescent par rapport au sessile ? Un marquage des éclaircies en période estivale ou à l’automne serait probablement plus pertinent. Cela se pratique déjà en région Centre ce qui permet aux experts de bien renseigner les fiches de présentation des cahiers des ventes. Des peuplements repérés en Poitou-Charentes, seul celui de Ternay (86) présentait une glandée suffisante à l’automne 2014 pour qu’une récolte y soit réalisée. Une partie des glands récoltés dans ce peuplement a été réservée pour expérimentation et a été semée à la pépinière de Guémené (PNRGF1). Le reste de la récolte a été commercialisée par Vilmorin auprès de pépiniéristes forestiers. Ce lot de graines sera ainsi à l’origine de la quasi-totalité des plants de la région de provenance QPU101 Nord-Ouest que l’on trouvera dans les pépinières dans les deux prochaines années. Certains pépiniéristes, qui produisent des chênes en une seule saison dans des godets, proposeront d’ailleurs dès l’automne 2015 des plants à la vente (Pep. Beauchery par exemple). Certains des boisements compensateurs de la ligne LCG prévus la saison prochaine pourront ainsi être réalisés avec le matériel récolté à Ternay. Cela devrait concerner surtout le département de l’Indre et Loire d’après Luc Vancrayelynghe qui s’engage à réserver rapidement ces plants auprès des pépiniéristes concernés. Rappelons simplement qu’actuellement, seules des origines du Sud de la France sont disponibles sur le marché. Ceci est à mettre en lien avec le développement de la trufficulture. Concernant la pureté spécifique des semences obtenues, il est rappelé que la commercialisation de glands potentiellement hybrides est possible, à condition qu’il en soit fait mention sur les étiquetages qui accompagnent la graine puis le plant. 11 Pôle National des Ressources génétiques Forestières de l’ONF regroupant les 3 anciennes pépinières administratives auxquelles le Ministère a confié une mission d’intérêt général. 10 11 12 13 14 15 Analyse de l’évolution du chêne pubescent : intervention de Jean Lemaire Avec l’évolution du climat constatée, la probabilité de présence du chêne pubescent a évolué depuis les années 1980 Carte 1 : Simulation de la potentialité de présence climatique du chêne pubescent entre 1961-90 Taux de présence du chêne pubescent % Le vert indique une faible probabilité de présence le rouge une très forte Les points bleus sont les points d’inventaire où le chêne pubescent a été inventorié par l’IGN entre 1993 et 1996 1981-10 MOINS 1 °C à TX0608 et 40 mm de plus à PETP0509 Carte 2 : Simulation de la potentialité de présence climatique actuelle du chêne pubescent 1981-2010 Taux de présence du chêne pubescent Les points rouges sont les points d’inventaire où le chêne pubescent a été inventorié par l’IGN entre 2008 et 2013 16 Carte 3 : Simulation de la potentialité de présence climatique du chêne pubescent avec 1 °C d’augmentation de la température annuelle Taux de présence du chêne pubescent Débats et discussions sur la progression du chêne pubescent : Les premiers chiffres présentés par Fabienne Benest suscitent une certaine controverse. Comment peut-on expliquer, qu’en trente ans, sans qu’il n’y ait eu d’actions sylvicoles spécifiques, la surface des peuplements dominés par le chêne pubescent ait triplée et que le volume du bois sur pied ait été multiplié par sept ? Fabienne précise que si la méthode d’échantillonnage de l’IFN a changé en 2004, le protocole de prises de mesures et d’infos est resté quasi identique. L’erreur d’identification lui paraît peu probable surtout pour les données postérieures à 1990. Les observateurs ont en effet été spécialement formés, dès cette époque, à tout ce qui était relevés floristiques en général et reconnaissance des chênes en particulier. On constate par ailleurs, à l’examen des cartogrammes et des points d’observations présentés par Fabienne, que l’aire du pubescent s’est effectivement étendue. Par contre, le taux de couvert dans les régions où il était présent dans les inventaires des années 80, à en règle générale sensiblement baissé ce qui parait paradoxal... mais qui peut s’expliquer : le taux de couvert du pubescent est forcément plus faible si l’on passe de quelques points a fort taux à un nombre plus élevé à taux moyen. Concernant le travail d’inventaire effectué sur le terrain, Fabienne précise que ses équipes inventorient 6000 nouveaux points chaque année. Un passage se fait ensuite, cinq ans plus tard, pour évaluer la récolte effectuée. Une nouvelle identification des plantes en présence peut être réalisée en cette occasion. Pour le chêne, la tâche est plus difficile quand les passages se font en hiver. L’idéal serait d’intervenir en été mais, pour des raisons pratiques d’accès, ce sont avant tout les zones de montagne qui sont visitées en cette saison. 17 Si l’on s’intéresse à la surface occupée par les chênaies en Poitou-Charentes, on constate que celleci reste assez stable depuis les années 80 et se situe aux environs de 200 000 ha. Au sein de ces peuplements, on constate une progression du chêne pubescent (+ de 250%), une baisse modérée du pédonculé (- 17%) et une plus sensible du chêne sessile (- 45%). Les premières cartographies simulées par Jean Lemaire à partir de « Bioclimsol » laissent entrevoir une forte corrélation entre progression du pubescent et augmentation du déficit pluviométrique estival. Selon Jean, une des analyses à peaufiner par l’IGN est de regarder les caractéristiques dendrométriques des chênes pubescents, l’âge des peuplements et son évolution sur la période. Ces éléments nous aideront de savoir d’où viennent ces chênes « spontanés ». En effet, il parait évident que ces chênes ne sont pas issus de régénérations récentes sur des nouvelles surfaces forestières. ils peuvent avoir deux origines, • • le déclin des chênes sessiles ou pédonculé au profit de chêne pubescent présent en sous étage des chênes non identifiés au départ comme pubescent et qui au profit de l’augmentation des températures sur ce territoire expriment une adaptation morphologique, à savoir l’apparition plus marquée de leur pubescence. Ces questions devront être approfondies et affinées. C’est le travail que Jean va entreprendre avec Fabienne dans le courant de l’été. Un rapport technique détaillé doit impérativement être remis au CNPF avant la fin de l’année, (délai fixé par les conventions qui ont permis la mise en œuvre de cette action). 18 Deuxième partie : suite du programme et projets interrégionaux Retro planning par rapport à la présente convention : Arnaud Guyon rappelle que les délais pour la réalisation cette étude ont été fixés au 30 avril 2015 pour les phases 1et 2 puis au 31 décembre 2015 pour les phases 3 et 4. Le retard pris doit donc être rattrapé. C’est ainsi que la livraison de l’analyse : • • de la situation des différents chênes a été demandée pour la fin juin 2015, de leurs données écologiques pour la fin du mois de juillet Une réunion de travail est prévue pour le 23 juillet entre Jean, Fabienne et le CNPF. Sur le plan administratif, une demande pour un délai supplémentaire de 6 mois devra être sollicitée auprès du Conseil Régional. Projets à bâtir ensemble : Le fil rouge de nos travaux, d’une région à l’autre, devra tourner autour de l’objectif suivant : mieux connaître la niche écologique du chêne pubescent Plusieurs pistes de travail ont été élaborées : • • • Réaliser des plantations comparatives avec du chêne sessile comme témoin Travailler sur l’identification et l’évolution spatiale du chêne pubescent S’intéresser à la sylviculture des peuplements existants Réalisation de plantations comparatives. Brigitte Musch souhaite que l’on définisse précisément l’objectif de ces essais comparatifs. Il est important de savoir si l’on souhaite répondre à des questions sur la génétique du chêne, sa provenance ou sa sylviculture. Les dispositifs mis en place en dépendront. Concernant les aspects génétiques, Brigitte précise que : • • • 2 entre les différents chênes, on a affaire à un continuum de combinaisons génétiques, pour déterminer l’espèce à laquelle un individu appartient, le CGAF2 réalise des analyses génétiques basées sur la recherche de marqueurs microsatellites. Le coût de l’analyse génétique est d’environ 10 € par arbre. Celle-ci se fait par comparaison, à l’aide du logiciel « Structure » auprès d’une base référençant des sujets réputés « purs ». le FCBA propose une autre technique plus précise mais plus chère. Conservatoire Génétique des Arbres Forestiers de l’ONF. 19 Lorsque l’hybridation est très ancienne (ex ; avec du tauzin) les caractères correspondants peuvent ne plus être « actifs », donc sans conséquence sur la phénologie ou les caractéristiques morphologiques de l’arbre. A l’automne 2014, en plus de la récolte du peuplement de Ternay, trois autres peuplements de pubescent ont pu être récoltés et sont en cours d’élevage à la pépinière de Guémené (PNRGF) à des fins expérimentales. L’élevage des plants se fait en pleine terre sur 2 ans. Les dispositifs comparant ces différentes sources de graines seront donc à installer au cours de l’hiver 2016/17. En plus des peuplements récoltés en 2014, ces dispositifs pourront également en intégrer d’autres qui seront récoltés à l’automne 2015. Ces derniers seront alors produits en 1 an. Dans un premier temps, il est proposé d’installer quatre dispositifs identiques selon un gradient climatique de déficit hydrique estival et de froid : en Normandie, Poitou-Charentes, Provence et en région Centre. Dans chaque dispositif, seront également installés des plants issus d’un peuplement sélectionné « local » de chêne sessile. Pour le dispositif à installer en Poitou-Charentes, le peuplement sélectionné de la forêt de Moulière (86) a été récolté en 2014 et des plants issus de cette récolte sont en cours d’élevage à Guémené (PNRGF) dans cet objectif. Les modalités d’installation et de suivi des dispositifs seront calées dès l’été 2015. Le comité de pilotage a évoqué la possibilité d’installer 7 modalités en comparaison : 4 à 5 à base de pubescent, 2 à 3 à base de sessile dont une origine « pont », reproduit de manière végétative, commune à toutes les plantations. Le schéma des dispositifs dépendra toutefois du nombre de peuplements qui auront pu être récoltés en 2015. Pour ce faire, le repérage de peuplements « porte-graines » tel qu’il a été conduit en PoitouCharentes, doit être poursuivi et étendu aux autres régions concernées. Pour cette raison, une nouvelle formulation du cahier des charges mis en œuvre en 2014 dans le cadre de la présente étude sera proposée par Sabine, pour transmission aux autres régions candidates à la prospection. Eric Sevrin indique qu’il donnera, dès cet été, la consigne à ses collègues techniciens de prospecter les peuplements intéressants et d’apprécier la récolte potentielle. Il est précisé qu’une récolte n’est envisageable que si la glandée est importante car c’est le gage d’une bonne qualité de semences (meilleur taux de germination) et en particulier d’une bonne diversité génétique des lots. Cela est d’autant plus important que les performances des graines dans les tests comparatifs seront à l’origine des conseils donnés aux utilisateurs dans quelques années ! Dans la pratique, l’évaluation de la qualité de la glandée se fait généralement à la fin de l’été (septembre). Une bonne glandée se traduit par une quantité importante de glands visibles aux jumelles dans le houppier, si on doit chercher les glands, mieux vaut ne pas s’engager dans l’organisation du ramassage. Si la souille n’est pas trop dense, le ramassage se fait à la main, sinon, il faut envisager la pose de filets (cf. expérience normande). A noter que la période de récolte des glands de pubescents est plus longue que celle du sessile (Le sessile peut germer très rapidement). Identification et évolution spatiale du chêne pubescent Les corrélations effectuées par Jean entre la progression du pubescent et l’évolution du P-ETP permettent de définir des lignes ou le pubescent risque de s’implanter à la faveur du réchauffement climatique. 20 De l’avis du comité de pilotage, il serait intéressant d’installer dès maintenant des placeaux d’observation en différents points par rapport à cette zone de progression. Un travail taxonomique sur les chênes y serait effectué. Les placeaux seraient répartis sur les zones qui transitent du vert au jaune-rouge sur l’ensemble de la période étudiée. Ce travail sera à confier à un élève ingénieur dans le cadre de son stage de fin d’étude, dès 2016. Il convient de jeter d’ici là, les bases du protocole d’observation et de la méthodologie à mettre en place. Sylviculture des peuplements à base de chêne pubescent Si l’on souhaite encourager les gestionnaires à pratiquer une sylviculture dynamique de leurs chênaies pubescentes, il importe de leur proposer des itinéraires techniques adaptés au tempérament de cette essence. Eric Sevrin rappelle que la priorité est de bien le reconnaitre au sein des peuplements. En matière de sylviculture, il indique avoir expérimenté la pratique du détourage et constaté que les arbres réagissaient bien. Le pubescent étant un pionnier comme le pédonculé, ne faut-il pas le gérer comme ce dernier ? Fait à Niort, le 8 juin 2015