Savoir les distinguer
Alors que le niveau de vie des
pays industrialisés n’a cessé
de s’accroître, les souffrances psy-
chiques sont nombreuses et han-
dicapantes. La tristesse n’est plus
de mise et il est de plus en plus
difficile de ne pas se lever systé-
matiquement en forme tous les
matins. Anxiété et dépression
sont parmi les plus répandus des
maux du monde moderne.
L’anxiété généralisée
L’ anxiété généralisée touche 3 à
4% de la population générale
et se caractérise par des inquié-
tudes excessives et chroniques
entravant le bon fonctionnement
du quotidien ainsi que par un
retentissement somatique pro-
gressif. Si cette maladie handica-
pante n’est pas traitée, elle per-
siste toute la vie : le taux de
rémission spontané est faible,
moins d’un sur trois à deux ans.
La prise en charge d’un patient
souffrant de cette pathologie re-
pose désormais sur la venlafaxine,
seul antidépresseur à avoir l’indi-
cation dans cette entité anxieuse
chronique.
En premier lieu, il faut s’assu-
rer de l’absence de maladies or-
ganiques qui peuvent présen-
ter des symptômes évoquant
l’anxiété généralisée (maladies car-
dio-vasculaires, maladies endocri-
niennes, maladies pulmonaires)
ou des symptômes psychiatriques
(schizophrénie atypique), et de
l’absence de toxicomanie, de stress
post-traumatique. Chez un patient
souffrant d’anxiété généralisée, les
causes sont multiples et variées.
Ce trouble est défini par un souci
permanent, excessif et envahis-
sant qui concerne tous les aspects
de la vie professionnelle, sociale
et familiale du sujet. Ces soucis
s’accompagnent d’un retentisse-
ment émotionnel (et d’une ten-
sion musculaire permanente) et
de manifestations neurovégéta-
tives comme les palpitations, les
sueurs, etc. Au fil des années, le
trouble se chronicise, et s’instal-
lent alors une fatigue chronique,
des difficultés de concentration,
des troubles du sommeil et du ca-
ractère. Il existe souvent des fac-
teurs prédisposants constitution-
nels et un environnement social
ou familial insécurisant.
L’anxiété généralisée débute en
général vers l’adolescence et
induit un handicap social mar-
qué, entraînant des échecs sen-
timentaux, professionnels et re-
lationnels ; elle peut être le lit
d’un état dépressif majeur (dans
40 % des cas) et elle est fré-
quemment associée à d’autres
troubles anxieux, comme le trou-
ble panique, ou à des conduites
d’alcoolisation.
Un handicap social
La prise en charge au long cours
de l’anxiété généralisée réduit la
souffrance psychique et phy-
sique ainsi que le handicap so-
cial. Il est important de faire
prendre conscience au patient
de la réalité de son trouble
anxieux et de sa vulnérabilité
émotionnelle. On propose les
techniques de relaxation ensei-
gnées par des professionnels
qualifiés, les thérapies psycha-
nalytiques ou les thérapies co-
gnitivo-comportementales pour
travailler sur l’intolérance à l’in-
certitude et sur l’incapacité à la
résolution de problèmes. En cas
d’accès aigu de l’anxiété, le trai-
tement médicamenteux fait ap-
pel aux benzodiazépines, en sa-
chant que leur prescription ne
doit pas dépasser 3 mois (risque
de pharmacodépendance) ou à
la buspirone. A l’heure actuelle,
la venlafaxine est donc le mé-
dicament pouvant être utilisé
comme traitement de fond de
l’anxiété généralisée. L’efficacité
sur la symptomatologie anxieuse
est perceptible à une ou deux se-
maines du traitement et à six
mois. Huit patients sur dix re-
trouvent une bonne adaptation
sociale et relationnelle.
La dépression
La dépression, quant à elle, reste
sous-traitée (les tranquillisants
sont totalement inefficaces) en
raison de la sous-estimation du
diagnostic mais aussi du déni des
personnes déprimées. Celles-ci
ont du mal à admettre la réalité
d’une maladie psychique teintée
d’auto-dévalorisation ainsi que
la nécessité de se faire aider.
Certes, diagnostiquer la dépres-
sion ou repérer un risque suici-
daire sur les éléments cliniques
n’est pas toujours facile. D’où
l’importance, pour les médecins,
d’être à l’écoute des personnes
pouvant rapporter des signes
subtils pour faire le diagnostic :
famille du patient, infirmière, ki-
nésithérapeute ou pharmacien.
La dépression est définie de fa-
çon scientifique par certains cri-
tères. Dans sa forme caractéris-
tique, il existe un trouble de
l’humeur avec tristesse, une pé-
joration du soi et du monde, une
perte des intérêts et du plaisir et,
éventuellement, une idée suici-
daire s’accompagnant de
La souffrance psychique est un mal répandu. Entre
anxiété et dépression, le diagnostic n’est pas toujours
simple à faire. Il est important d’en connaître les symp-
tômes pas toujours très distincts.
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Anxiété et dépression
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Professions Santé Infirmier Infirmière - No26 - mai 2001
difficultés de concentration,
d’asthénie, d’anxiété qui aug-
mente le potentiel suicidaire. Il
s’agit d’un changement net du
comportement par rapport à
l’état antérieur, avec un impact
socioprofessionnel et familial.
Pour répondre aux critiques des
sociologues à propos de pres-
criptions abusives des antidé-
presseurs pour des difficultés
existentielles, le Pr M. Ferreri a
rappelé qu’il existe une différence
entre les personnes tristes à cause
d’une crise ou d’un deuil (qui res-
tent toutefois réactives à l’envi-
ronnement et peuvent par mo-
ment s’éloigner du deuil) et les
déprimés qui présentent une in-
filtration totale de la personnalité
par un défaut de mobilisation des
affects positifs.
Tristesse
ou dépression ?
Pour le médecin généraliste
ayant accès à l’histoire du patient
et de la famille, la difficulté dia-
gnostique apparaît lorsque les
troubles somatiques, les troubles
anxieux ou les troubles du com-
portement sont au premier plan.
Des troubles du caractère sont
marqués par une irritabilité, une
conduite d’alcoolisation récente,
des troubles d’allure névrotique
avec phénomènes phobiques ou
obsessionnels. Il est important
que le médecin reste en contact
avec l’entourage du malade.
L’hospitalisation doit être envi-
sagée en cas d’idées envahis-
santes de mort et de suicide,
d’une symptomatologie délirante
ou d’un alcoolisme intense. Le
recours au psychiatre se pose
devant certaines formes de dé-
pression qui ont résisté à un
traitement médicamenteux bien
conduit : on retrouve souvent,
dans ce cas, les troubles de la
personnalité ou la persistance
d’événements qui sont facteurs
de risque de la dépression. La
psychothérapie de soutien, ana-
lytique ou cognitivo-comporte-
mentale doit toujours être pro-
posée. Néanmoins, sa mise en
route dépend aussi du patient,
de son désir d’engagement et de
sa capacité de verbalisation et
d’élaboration.
Les personnes âgées
Le vécu dépressif des patients
âgés est souvent banalisé (“il est
normal d’être déprimé quand on
est vieux”) et mis sur le compte
de la vieillesse, ce qui ne fait
qu’aggraver leur repli sur soi et
leur perte du goût d’entre-
prendre. C’est pourquoi une ap-
proche pharmacologique doit
être accompagnée d’un suivi
psychosocial. En première in-
tention sont recommandés les
antidépresseurs de la nouvelle
génération, tels que les inhibi-
teurs de recapture de la séroto-
nine, qui offrent une sécurité
d’emploi et une rémission de
l’épisode dépressif dans près de
70 % des cas. Les antidépres-
seurs tricycliques ayant un
risque d’effets indésirables di-
gestifs, ophtalmologiques ou
cardiaques sont réservés aux dé-
pressions sévères. Quant aux sis-
mothérapies proposées pour des
dépressions mélancoliques ou
délirantes avec une menace du
pronostic vital, elles sont sujettes
à des controverses.
Rappelons que la dépression est
une pathologie fréquemment
rencontrée en institution géria-
trique, avec une prévalence al-
lant de 20 à 40 %, souvent sous
des formes anxieuses plus ou
moins bruyantes ou, à l’inverse,
anhédoniques, insidieuses et
évoluant à bas bruit. C’est dire
qu’il ne faut pas perdre de vue
que l’isolement social, la perte
des proches, l’isolement senso-
riel constituent autant de fac-
teurs pouvant favoriser l’instal-
lation d’un état dépressif chez les
sujets âgés.
Ludmila Couturier
MEDEC 2001
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Anxiété et dépression
Professions Santé Infirmier Infirmière - No26 - mai 2001
Téléthon 2000
522 404 935 francs, c’est le
montant global des dons re-
cueillis par le Téléthon 2000.
Ce qui représente une concréti-
sation de 104 % de la promesse
affichée au terme des 30 heures
d’émission sur France 2.
L’AFM donne rendez-vous les
7et 8 décembre 2001 pour le
prochain Téléthon.
Formation continue
L’université Paris-XIII de la fa-
culté de médecine, à Bobigny,
propose une formation validée
par un diplôme d’université :
“Personnes malades et handi-
capées : éthique et déontologie
dans les pratiques de soins,
d’éducation spécialisée, de ré-
éducation et de formation
professionnelle”.
Les cours débutent avec l’année
calendaire. Ils ont lieu un mer-
credi sur deux, chaque mois,
les deux semestres étant séparés
par les congés universitaires.
Dossier d’inscription au bu-
reau de l’IUP, rue de la
Convention, 93017 Bobigny.
Tél : 01 43 11 27 13
ou 02 38 94 53 07.
Formation qualité
Afnor Formation Conseil for-
me chaque année plus de
10 000 stagiaires inter- et in-
tra-entreprises au manage-
ment, à la qualité et certifica-
tion 9000. Aujourd’hui, sont
élaborés des stages de forma-
tion destinés à tous les acteurs
du domaine de la santé, dont
les infirmiers. Parmi les stages :
“Assurance de la qualité en sté-
rilisation des dispositifs médi-
caux dans les établisssements
de santé” ; “Conduire son pro-
jet d’accréditation dans un éta-
blissement de soins”.
Renseignements :
01 42 91 55 22.
E-mail : info.formation@afnor.fr
Brèves...
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