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Editeur Responsable: Dirk Velghe
Avenue du Port 86c Boîte 309 -1000 Bruxelles
Un bon dessin vaut par-
fois mieux qu’un long
discours. Le graphique
qui compare la parité
yen/dollar avec l’évolution de la ba-
lance courante du Japon est pour le
moins éloquent. Historiquement,
le yen a toujours eu tendance, en
toute bonne logique, à se déprécier
quand son surplus courant dimi-
nuait, et vice-versa. Il y a eu, par
moments, un certain décalage dans
ces tendances, mais jamais à un
point tel que celui que nous obser-
vons aujourd’hui, car avec une ba-
lance commerciale devenue néga-
tive pour la première fois depuis
1980 et un compte courant en
chute libre, le yen devrait être très
loin de son niveau actuel et plus
proche de la parité 130-150 yen/dol-
lar.Le Japon a été frappé par trois
chocs majeurs ces dernières an-
nées. Grand exportateur, il a été
fortement touché par l’effondre-
ment du commerce mondial suite
à la crise des subprimes, et ensuite
il a été pénalisé par la politique du
dollar faible initiée par la FED. À ce
petit jeu-là, cette dernière a, en ef-
fet, été nettement plus agressive
que la Banque du Japon (BoJ) pour
combattre le risque déflationniste,
multipliant par 3,2 sa base moné-
taire contre seulement 1,4 fois pour
son homologue japonais. C’est
pourquoi, alors qu’il aurait dû bais-
ser, le yen s’est au contraire appré-
cié.
La catastrophe de Fukushima et
la crise des îles Senkaku n’ont en-
suite fait que renforcer le phéno-
mène de détérioration de la ba-
lance commerciale. Pour un pays
lointain et dépourvu de ressources
naturelles, l’abandon du nucléaire
pèse sur une facture énergétique
qui représente un quart des impor-
tations. Elle détériore également
un peu plus sa compétitivité, car le
Japon paie maintenant 8 fois plus
cher son gaz que les Etats-Unis.
Dans ce contexte, le Japon aurait
donc pu faire l’économie d’une
crise diplomatique avec la Chine,
son partenaire économique le plus
important. Son impact a d’ailleurs
été immédiat. Après un deuxième
trimestre déjà fort peu vaillant, le
Japon est entré en récession au troi-
sième trimestre avec un PIB en
baisse de 3,5%, quasi essentielle-
ment tiré par l’effondrement du
surplus commercial.
Réagir
Le Japon est donc dans l’obligation
de réagir, car tous les clignotants
budgétaires sont dans le rouge.
Même s’ils le sont depuis si long-
temps déjà que cela ne semble
presque plus avoir d’importance, il
est toutefois bon de rappeler que le
déficit budgétaire de 10% est en
train de battre tous les records et
que, du fait d’une dynamique dé-
mographique défavorable (vieillis-
sement suivi maintenant d’une
baisse de la population), il est
maintenant d’une nature essentiel-
lement structurelle.
Avec un endettement record
combiné à des taux d’intérêt les
plus bas du monde, le tout assorti
d’une devise qui se renforce alors
même que le commerce extérieur
s’effondre, le Japon semble donc
être dans un monde à part. Pour
paraphraser un célèbre écrivain ja-
ponais, il est maintenant quelque
part «au sud de la frontière, à
l’ouest du soleil». Or quelque chose
qui ne peut pas durer finit toujours
pas s’arrêter. À moins d’un miracle,
une forte dépréciation du yen sem-
ble selon nous inscrite dans les
étoiles.
L’élection de dimanche
Quel peut en être le ou les éléments
déclencheurs? Le premier est déjà
en cours depuis quelque temps,
puisque le Japon n’est plus en me-
sure, comme par le passé, d’autofi-
nancer son déficit budgétaire et
doit maintenant avoir recours à la
planche à billet. Le second sera
peut-être l’élection de ce dimanche.
En effet, le favori des sondages,
Shinzo Abe le président du LDP,
pointe, à juste titre, la force du yen
comme une des principales causes
des problèmes actuels. Il souhaite
dès lors le faire baisser en créant un
fonds de 50 trillions de yen, chargé
d’acheter des obligations d’État
étrangères. Il est aussi en faveur de
la fixation d’un objectif d’inflation
de 2%. C’est d’ailleurs pour cela qu’il
souhaite nommer, lors du renou-
vellement du mandat en avril 2013,
un gouverneur de la BoJ en faveur
d’une politique monétaire plus
agressive. Sur l’effet d’annonce, le
yen a déjà baissé contre le dollar de
78 à 82 yen.
Une baisse jusqu’à 90 yen aug-
menterait les bénéfices du Topix de
25% et la croissance du PIB de 0,8%
avec un décalage de 12 mois. Consi-
déré sous cet angle, il n’y a donc
plus de temps à perdre pour stimu-
ler l’économie et la Bourse, car
l’augmentation de la taxe sur la
consommation, amenée à doubler
d’ici 2015 pour contenir les déficits,
commencera à se faire sentir dès
2014. Il y a cependant une inconnue
majeure. Compte tenu de la taille
de son marché obligataire, essen-
tiellement détenu par les banques
locales, une baisse du yen entraîne-
rait une remontée inévitable des
taux qui risquerait d’affecter forte-
ment la solvabilité du secteur.
La politique du yen faible n’est
donc pas sans conséquence. Les
deux années qui viennent seront
donc très intéressantes à suivre,
surtout pour nous Européens, car
la situation japonaise est une des
images avancées de la crise écono-
mique dans laquelle nous nous dé-
battons. Avec le risque de déflation
lié à notre surendettement, nos
bulles immobilières et la problé-
matique du vieillissement de nos
populations, notre situation ac-
tuelle est bien plus proche de celle
du Japon des années 90 que nous
nous plaisons à le penser…
Le secteur des «dispositifs médi-
caux» englobe un très large éven-
tail de produits, allant de simples
pansements aux produits les plus
sophistiqués tels des pacemakers,
en passant par les lentilles de
contact, les prothèses, l’équipe-
ment médical, etc. Ce secteur très
innovateur, surtout en Europe, ca-
pitalise quelque 95 milliards d’eu-
ros (chiffres Eucomed pour l’UE-27,
la Norvège et la Suisse).
Contrairement aux médica-
ments, les dispositifs médicaux ne
font pas l’objet d’une autorisation
préalable à la mise sur le marché
mais doivent généralement être
pourvus d’un marquage CE autori-
sant leur libre circulation dans
l’UE. Le cadre réglementaire exis-
tant a démontré sa valeur, mais il
fait aussi l’objet de critiques, no-
tamment suite au scandale mon-
dial des implants mammaires
«PIP».
Pour rappel, ces implants pré-
sentaient des risques élevés de rup-
ture, suite à l’utilisation fraudu-
leuse d’un gel industriel non-ho-
mologué à la place du gel de
silicone médical.
Afin d’éviter que ce genre de dé-
rives ne se reproduise à l’avenir, les
autorités et le secteur collaborent à
une révision et un renforcement
du cadre réglementaire.
Ainsi, la Commission euro-
péenne a récemment adopté et
soumis au Parlement européen et
au Conseil deux propositions de
règlements sur les dispositifs mé-
dicaux. Une des mesures phares de
la réforme est l’instauration d’un
système d’identification unique
des dispositifs («UDI»), qui per-
mettra entre autres d’en améliorer
la traçabilité après leur commer-
cialisation, de contribuer à réduire
le nombre d’erreurs médicales et
de lutter contre la contrefaçon.
Au niveau belge, la ministre
Laurette Onkelinx n’a pas souhaité
attendre l’aboutissement de ces
travaux et a préparé un plan d’ac-
tion global qui a comme objectifs
principaux d’assurer un meilleur
contrôle et une plus grande traça-
bilité de tous les dispositifs médi-
caux. La priorité au niveau de l’exé-
cution sera néanmoins donnée aux
dispositifs dits «implantables»,
présentant les plus hauts risques.
Cette réforme ambitieuse de-
vrait être bouclée en 2016. Des
groupes de travail planchent ac-
tuellement sur les mesures de mise
en œuvre des «piliers» de la ré-
forme, notamment: l’identification
et la traçabilité, le contrôle et la
«matériovigilance» (c’est-à-dire la
surveillance des éventuels inci-
dents liés aux dispositifs médi-
caux). Les mesures d’exécution de-
vront être consacrées en temps
utile dans des arrêtés royaux, tout
en s’alignant sur les futures me-
sures européennes.
Améliorer l’identification
et la traçabilité
Le plan prévoit tout d’abord de
rendre obligatoire l’enregistre-
ment des dispositifs implantables
dès leur entrée dans le circuit de
distribution belge.
Ainsi, les données relatives à la
qualité, la sécurité et l’efficacité des
dispositifs devront être mises à la
disposition de l’AFMPS (Agence fé-
dérale pour les médicaments et les
produits de santé), du SPF Econo-
mie et de l’Inami par le fabricant
ou le distributeur.
L’instauration de cet enregistre-
ment obligatoire sera progressive:
avril 2014 pour les implants les
plus courants (par exemple, les
prothèses de hanche et les pace-
makers) et avril 2016 pour tout im-
plant.
De même, toute pose d’im-
plants devra obligatoirement être
enregistrée dans le système par les
professionnels de la santé au plus
tard dès avril 2014. Ces profession-
nels seront, par ailleurs, tenus de
fournir une «carte implant» au pa-
tient, reprenant toute une série
d’informations. Avec cette carte, le
patient aura la garantie que son
implant a suivi le circuit légal et il
saura exactement ce qui lui a été
implanté.
Ce système permettra aux auto-
rités, en cas de problème, de savoir
à tout moment où se trouvent les
dispositifs concernés et d’avertir
les professionnels et patients
concernés.
Améliorer le contrôle
et la sécurité
Dès octobre 2013, un circuit légal
de délivrance des dispositifs médi-
caux sera instauré qui passera obli-
gatoirement par les pharmacies
(officines ou hospitalières).
Afin de permettre une meilleure
surveillance du secteur dans sa glo-
balité par les autorités, le plan pré-
voit en outre un renforcement des
contrôles auprès des fabricants,
distributeurs, hôpitaux et cli-
niques privées. 41 inspecteurs se-
ront engagés à ces fins par l’AFMPS.
Ce renforcement des contrôles s’est
déjà fait ressentir auprès du sec-
teur des dispositifs implantables
qui a connu une nette augmenta-
tion des inspections depuis le mois
de septembre.
La «matériovigilance»
Enfin, le plan prévoit la mise en
place de points de contact «maté-
riovigilance» et d’une procédure
obligatoire standardisée pour la
notification des risques incidents
afin de pouvoir alerter les autorités
en cas de problèmes. Cette obliga-
tion incombera à chaque acteur
délivrant ou mettant à disposition
un dispositif. Les hôpitaux et les
distributeurs pourront le faire, sur
base volontaire, dès janvier 2013. La
mesure deviendra obligatoire pour
tous les acteurs du secteur, dès oc-
tobre 2013.
«Cette forme belge du secteur
des dispositifs médicaux, qui trouve
son origine dans l’affaire‘PIP’, donne
lieu à un véritable ‘screening’ de toute
la glementation en matière de dis-
positifs médicaux et garantira au pa-
tient un acs à des dispositifs plus
surs et davantage contrôlés», ex-
plique Richard Van den Broeck, di-
recteur d’Unamec, l’association re-
présentative belge du secteur des
dispositifs médicaux. «Il s’agit d’une
forme fort ambitieuse dont la mise
en œuvre sera complexe vu la vaste di-
versité du secteur. Unamec est favora-
ble à une mise en œuvre raisonnable
de ce plan, de sorte que les différents
acteurs du secteur puissent continuer
à fonctionner ‘normalement’, sans en-
traves administratives déraisonna-
bles, tout en continuant à favoriser
l’innovation et à préserver la compéti-
tivité du secteur.»
Notons encore que le secteur
s’est engagé à financer lui-même le
plan qui devrait dès lors être bud-
gétairement neutre pour l’État.
Une forme
ambitieuse
des dispositifs
médicaux
Suite au scandale
des implants
mammaires PIP,
le secteur et les
autorités collaborent
à un renforcement
du cadre
réglementaire.
Shinzo Abe, président du LDP. © EPA
BERTRAND
VERAGHAENNE
Chief economist CIC Banque
Transatlantique Belgium
L’ECHO JEUDI 13 DÉCEMBRE 2012 13
Agora
FLORENCE
VERHOESTRAETE
& CHRISTEL BRION
Avocates NautaDutilh
Au sud de la frontière,
à l’ouest du soleil
1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
-500
0
500
1000
1500
2000
2500 50
100
150
200
250
300
Balance courante despaiements (moyenne mobile1an/ milliards de yen) .
Dollar en yen chelle de droite/inversée).
COURSDUYEN ET ÉVOLUTION DE LA BALANCECOURANTE JAPONAISE
Source:Thomson Reuters Datastream
Le Japon est entré
en récession.
Tous les clignotants
budgétaires
sont dans le rouge.
Des élections
à la Chambre des
représentants auront
lieu ce dimanche
16 décembre 2012.
Le favori des
sondages, Shinzo
Abe, sait que la force
du yen est une des
principales causes
des problèmes.
Il y a cependant une
inconnue majeure.
La politique du yen
faible n’est pas sans
conséquences.
Les deux années
à venir seront très
intéressantes
à suivre...
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